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31/03/2023 | FRANCE | N°22PA01516

France | France, Cour administrative d'appel, 5ème chambre, 31 mars 2023, 22PA01516


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. AF... P... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du ministre de l'intérieur du 2 août 2019 portant tableau d'avancement au grade de brigadier-chef de police au titre de l'année 2019, ensemble les décisions de nomination à ce grade de M. B..., M. H..., M. Y..., Mme T..., M. AI..., M. F..., Mme Comte, M. S..., M. W..., M. AL..., Mme J..., Mme AJ..., M. D..., M. AE..., M. X..., Mme K..., Mme L..., Mme AH... A..., Mme N... et M. L... ainsi, en conséquenc

e de l'illégalité fautive de l'arrêté attaqué, que l'indemnisation de son préjudice...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. AF... P... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du ministre de l'intérieur du 2 août 2019 portant tableau d'avancement au grade de brigadier-chef de police au titre de l'année 2019, ensemble les décisions de nomination à ce grade de M. B..., M. H..., M. Y..., Mme T..., M. AI..., M. F..., Mme Comte, M. S..., M. W..., M. AL..., Mme J..., Mme AJ..., M. D..., M. AE..., M. X..., Mme K..., Mme L..., Mme AH... A..., Mme N... et M. L... ainsi, en conséquence de l'illégalité fautive de l'arrêté attaqué, que l'indemnisation de son préjudice matériel et moral.

Par un jugement n° 1914190 du 4 février 2022, le tribunal administratif de Paris a fait droit à la demande de M. P... et lui a accordé une somme de 1 500 euros au titre de son préjudice matériel et moral.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 4 avril 2022, le ministre de l'intérieur demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1914190 du 4 février 2022 du tribunal administratif de Paris.

Il soutient n'avoir commis aucune erreur manifeste d'appréciation en adoptant, pour l'année 2019, le tableau d'avancement au grade de brigadier-chef de la police nationale.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 mai 2022, M. P..., représenté par Me Trennec, conclut au rejet de la requête en faisant valoir que le moyen qu'y soulève le ministre est infondé et à ce que l'Etat lui verse une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il conclut également, à titre incident, à ce que le jugement soit réformé en ce qu'il n'a pas assorti l'injonction de réexamen de sa candidature d'une astreinte et en ce qu'il a limité l'indemnisation de son préjudice, qui doit être réparé à hauteur d'une somme de 5 000 euros, au montant de 1 500 euros.

La procédure a été communiquée à M. B..., M. H..., M. Y..., Mme T..., M. AI..., M. F..., Mme Comte, M. S..., M. W..., M. AL..., Mme J..., Mme AJ..., M. D..., M. AE..., M. X..., Mme K..., Mme L..., Mme AH... A..., Mme N... et M. L..., qui n'ont pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 95-654 du 9 mai 1995 ;

- le décret n° 2010-888 du 28 juillet 2010 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Perroy ;

- les conclusions de Mme Lorin, rapporteure publique désignée en application de l'article R. 222-24 du code de justice administrative ;

- et les observations de M. R... B....

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement n° 1914190 du 4 février 2022 rendu sur demande de M. P..., le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 2 août 2019 portant tableau d'avancement au grade de brigadier-chef de police pour l'année 2019, ensemble les arrêtés de nomination de M. B..., M. H..., M. Y..., Mme T..., M. AI..., M. F..., Mme Comte, M. S..., M. W..., M. AL..., Mme J..., Mme AJ..., M. D..., M. AE..., M. X..., Mme K..., Mme L..., Mme AH... A..., Mme N... et M. L.... Il a également enjoint au ministre de l'intérieur de réexaminer la candidature de M. P..., ainsi que celle des fonctionnaires dont les arrêtés de nomination sont annulés, dans un délai de trois mois, et mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en réparation du préjudice matériel et moral subi par M. P... ainsi qu'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par sa requête, le ministre de l'intérieur demande à la Cour l'annulation de ce jugement, cependant que M. P... conclut, à titre incident, à ce que le jugement soit réformé en ce qu'il n'a pas assorti l'injonction de réexamen de sa candidature d'une astreinte et en ce qu'il a limité l'indemnisation de son préjudice, qui doit être réparé à hauteur d'une somme de 5 000 euros, au montant de 1 500 euros.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 58 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " L'avancement de grade a lieu de façon continue d'un grade au grade immédiatement supérieur. Il peut être dérogé à cette règle dans les cas où l'avancement est subordonné à une sélection professionnelle. (...) Sauf pour les emplois laissés à la décision du Gouvernement, l'avancement de grade a lieu, selon les proportions définies par les statuts particuliers, suivant l'une ou plusieurs des modalités ci-après : 1° Soit au choix, par voie d'inscription à un tableau annuel d'avancement, établi après avis de la commission administrative paritaire, par appréciation de la valeur professionnelle et des acquis de l'expérience professionnelle des agents, 2° Soit par voie d'inscription à un tableau annuel d'avancement, établi après avis de la commission administrative paritaire, après une sélection par voie d'examen professionnel. (...) ". Aux termes de l'article 17 du décret du 9 mai 1995 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale : " Pour l'établissement du tableau d'avancement de grade qui est soumis à l'avis des commissions administratives paritaires, il est procédé à un examen approfondi de la valeur professionnelle des agents susceptibles d'être promus compte tenu des notes obtenues par les intéressés, des propositions motivées formulées par les chefs de service et de l'appréciation portée sur leur manière de servir. Cette appréciation prend en compte les difficultés des emplois occupés et les responsabilités particulières qui s'y attachent ainsi que, le cas échéant, les actions de formation continue suivies ou dispensées par le fonctionnaire et l'ancienneté ". Aux termes de l'article 13 du décret du 28 juillet 2010 relatif aux conditions générales de l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires de l'Etat : " Les fonctionnaires sont inscrits au tableau par ordre de mérite. Les candidats dont le mérite est jugé égal sont départagés par l'ancienneté dans le grade ".

3. Pour annuler l'arrêté attaqué, les premiers juges ont retenu qu'il ressortait des pièces du dossier que M. P..., qui avait obtenu des notes et des appréciations plus favorables pour les années 2016, 2017 et 2018 que neuf des agents inscrits sur le tableau d'avancement, présentait des mérites supérieurs à ces agents.

4. Le ministre soutient qu'une telle appréciation est erronée dès lors que si M. P... dispose de notations légèrement supérieures et de bonnes appréciations, les agents promus occupaient des fonctions impliquant des niveaux de responsabilité et de difficulté supérieurs ainsi que l'exercice de fonctions d'encadrement. Toutefois, il ressort de l'examen des onze dossiers de brigadiers promus présentant des notes égales ou inférieures à celles de M. P... que ses notes administratives, à savoir 5 en 2016, 5 en 2017 et 6 en 2018 sont sensiblement supérieures à celles de plusieurs autres promus. L'intéressé, qui a reçu la médaille d'honneur de la police nationale Argent, quatre lettres de félicitations dont une le 20 juillet 2017, a par ailleurs été affecté, sur la période, en brigade de nuit en tant que chef de brigade où il a encadré 15 à 17 agents, ses compétences managériales étant du reste dûment documentées et appréciées. Il dispose par ailleurs d'une ancienneté dans le grade supérieure à celle de plusieurs des candidats promus. Il a enfin été considéré par ses supérieurs comme apte à la promotion dès l'année 2016, et ce, de manière immédiate au titre de l'année 2019, alors que certains autres brigadiers promus, aux notes inférieures et ne justifiant pas de missions plus sensibles, ne l'ont jamais été. Ainsi, il résulte de l'examen approfondi de ces dossiers que sept brigadiers promus en 2019 au grade de brigadier-chef présentaient des mérites inférieurs à ceux de M. P.... C'est ainsi à juste titre que le tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté du 2 août 2019 portant tableau d'avancement au grade de brigadier-chef de police.

5. Il résulte de ce qui précède que la requête du ministre de l'intérieur tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris du 4 février 2022 doit être rejetée.

Sur les conclusions incidentes de M. P... :

6. Si M. P... fait grief au jugement d'avoir cantonné à tort l'indemnisation du préjudice matériel et moral qui a résulté, pour lui, de l'illégalité fautive de l'arrêté du 2 août 2019, à la somme de 1 500 euros, l'intéressé n'établit pas en appel qu'en retenant ce montant, les premiers juges n'auraient pas fait une juste appréciation de ce préjudice.

7. Il ne ressort par ailleurs pas des pièces du dossier que le ministre aurait exécuté l'injonction de réexamen prononcée par le tribunal administratif de Paris, ce qui est susceptible de nuire au déroulement de carrière de M. P..., comme du reste aux candidats promus par l'arrêté annulé qui, en raison de cette annulation, ne sont notamment pas en mesure de pouvoir candidater au grade de major. Dans ces conditions, il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'intérieur de procéder au réexamen de la candidature de M. P... et de M. B..., M. H..., M. Y..., Mme T..., M. AI..., M. F..., Mme Comte, M. S..., M. W..., M. AL..., Mme J..., Mme AJ..., M. D..., M. AE..., M. X..., Mme K..., Mme L..., Mme AH... A..., Mme N... et M. L... dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Sur les frais liés à l'instance :

8. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante dans l'instance, une somme de 1 500 euros à verser à M. P... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête du ministre de l'intérieur est rejetée.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de procéder au réexamen de la candidature de M. P... et de M. B..., M. H..., M. Y..., Mme T..., M. AI..., M. F..., Mme Comte, M. S..., M. W..., M. AL..., Mme J..., Mme AJ..., M. D..., M. AE..., M. X..., Mme K..., Mme L..., Mme AH... A..., Mme N... et M. L... dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Article 3 : Les conclusions indemnitaires présentées par M. P... par la voie de l'appel incident sont rejetées.

Article 4 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à M. P... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. AF... P..., au ministre de l'intérieur, à M. R... B..., à M. M... H..., à M. V... Y..., à Mme AK... T..., à M. O... AI..., à M. AG... F..., à Mme I... Comte, à M. C... S..., à M. AN... W..., à M. AD... AL..., à Mme E... J..., à Mme G... AJ... épouse AB..., à M. U... D..., à M. AA... AE..., à M. AO... X..., à Mme Z... K..., à Mme Q... L..., à Mme AM... A..., à Mme E... N... et à M. AC... L....

Délibéré après l'audience du 9 mars 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Vrignon-Villalba, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Perroy, premier conseiller,

- M. Aggiouri, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mars 2023.

Le rapporteur,

G. PERROY

La présidente,

C. VRIGNON-VILLALBA

La greffière,

A. MAIGNAN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22PA0151602


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA01516
Date de la décision : 31/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VRIGNON-VILLALBA
Rapporteur ?: M. Gilles PERROY
Rapporteur public ?: Mme LORIN
Avocat(s) : SCP ARENTS-TRENNEC

Origine de la décision
Date de l'import : 28/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-03-31;22pa01516 ?
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