Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'article 3 de l'arrêté du 21 décembre 2017 par lequel le maire de la commune de Villeneuve-Saint-Georges a suspendu sa rémunération pendant la durée de son exclusion temporaire de fonctions, à effet du 24 juin 2017 au 23 décembre 2017 inclus, et de condamner la commune de Villeneuve-Saint-Georges à lui verser la somme de 1 893,79 euros au titre du reliquat des salaires et indemnités qui auraient dû lui être versés au cours de cette période.
Par une ordonnance n° 1801608 du 11 juin 2021, le vice-président du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 30 juillet 2021, M. B..., représenté par Me Varin, demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1801608 du 11 juin 2021 du vice-président du tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler l'article 3 de l'arrêté du maire de la commune de Villeneuve-Saint-Georges du 21 décembre 2017 ;
3°) d'annuler l'avis des sommes à payer du 9 janvier 2018 ;
4°) de condamner la commune de Villeneuve-Saint-Georges à lui verser la somme de 6 944,21 euros ;
5°) de mettre à la charge de la commune de Villeneuve-Saint-Georges une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- contrairement à ce qu'a jugé l'ordonnance attaquée, la requête comportait des conclusions tendant à l'annulation de l'avis des sommes à payer du 9 janvier 2018 ;
- l'article 3 de l'arrêté en litige méconnaît les articles L. 5424-1 et L. 5422-1 du code du travail dès lors qu'une révocation constitue une privation involontaire d'emploi ;
- sa demande indemnitaire était recevable dès lors qu'elle n'était que la conséquence de son recours en excès de pouvoir, que la commune ne lui avait pas opposé de fin de non-recevoir in limine litis, et qu'une réclamation préalable a été formée le 26 juillet 2019 ;
- il est en droit de prétendre au versement de son salaire au titre du mois de juillet 2017, de l'indemnité de résidence pendant six mois, du reliquat de la prime du mois de juin 2017, de la prime annuelle du mois de décembre 2017 et de la prime de transfert pendant six mois, soit une somme de 1 893,79 euros, à majorer d'une somme de 5 050,62 euros correspondant au total des saisies sur salaires pratiquées à tort par la commune.
Par un mémoire en défense enregistré le 7 mars 2022, la commune de Villeneuve-Saint-Georges conclut au rejet de la requête et à la condamnation de l'appelant à lui verser une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- c'est à bon droit que le vice-président du tribunal administratif de Melun a rejeté, en application du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, les conclusions tendant à l'annulation de l'article 3 de l'arrêté du 21 décembre 2017 ;
- les conclusions à fin d'indemnisation sont irrecevables en l'absence de liaison du contentieux, étant au surplus précisé que la demande tendant à l'indemnisation des saisies sur salaire a été rejetée par un jugement distinct du tribunal administratif de Melun dont M. B... n'a en tout état de cause pas relevé appel ;
- les conclusions tendant à l'annulation de l'avis des sommes à payer du 9 janvier 2018 sont irrecevables pour être nouvelles en appel ;
- en tout état de cause, les moyens sont infondés.
Les parties ont été informées, par courrier du 6 mars 2023, qu'en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, l'arrêt à intervenir était susceptible de se fonder sur le moyen relevé d'office tiré de l'irrégularité de l'ordonnance du tribunal administratif de Melun en ce qu'elle ne pouvait être adoptée sur le fondement du 7° du R. 222-1 du code de justice administrative dès lors que la demande de première instance comportait un moyen qui n'était pas inopérant.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- le code du travail ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Perroy ;
- et les conclusions de Mme Lorin, rapporteure publique désignée en application de l'article R. 222-24 du code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., adjoint d'animation titulaire au sein de la commune de Villeneuve-Saint-Georges, et exerçant la fonction d'animateur au centre de loisirs communal, a, par arrêté du 30 mai 2017, fait l'objet d'une sanction de révocation prenant effet à compter du 24 juin 2017. A la suite du recours présenté par le requérant le 20 juillet 2017, le conseil de discipline de recours d'Ile-de-France a, lors de sa séance tenue le 21 décembre 2017, émis un avis favorable à une mesure d'exclusion temporaire de fonctions d'un an dont six mois avec sursis. Par un arrêté du même jour, le maire de la commune de Villeneuve-Saint-Georges a prononcé une sanction d'exclusion temporaire de fonctions à l'encontre de M. B... d'une durée d'un an dont six mois de sursis, prenant effet du 24 juin au 23 décembre 2017 et a, aux termes de son article 3, privé l'intéressé de toute rémunération durant cette période. M. B... demande à la Cour d'annuler l'ordonnance du 11 juin 2021 par laquelle le vice-président du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'article 3 de l'arrêté du 21 décembre 2017 et à la condamnation de la commune de Villeneuve-Saint-Georges à lui verser la somme de 1 893,79 euros.
Sur les conclusions tendant à l'annulation du titre exécutoire du 9 janvier 2018 :
2. Si M. B... soutient avoir demandé au tribunal administratif de Melun l'annulation du titre exécutoire du 9 janvier 2018, il ressort des pièces du dossier qu'une telle demande a été formée dans une instance distincte ayant donné lieu à un jugement de rejet n° 1802246 en date du 4 février 2022. L'appelant ne demandant, dans la présente instance d'appel, que l'annulation de la seule ordonnance n° 1801608 du 11 juin 2021 rendue dans une instance dans laquelle il n'a pas formé de demande tendant à l'annulation du titre exécutoire du 9 janvier 2018, ladite demande est nouvelle en appel. Il y a lieu, par suite, d'accueillir la fin de non-recevoir opposée par la commune de Villeneuve-Saint-Georges et tirée de l'irrecevabilité de telles conclusions.
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
3. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) / 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours (...) les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés (...), ou des moyens qui (...) ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. (...) ".
4. Pour rejeter les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de l'article 3 de l'arrêté du 21 décembre 2017, le vice-président du tribunal administratif de Melun a considéré que l'unique moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 5424-1 et L. 5422-1 du code du travail était inopérant. Il résulte toutefois de ce qui sera exposé au point 7 qu'un tel moyen ne peut, le cas échéant, être écarté qu'après qu'ait été relevé que M. B... n'est, au regard des dispositions de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984, pas fondé à se prévaloir du régime de protection accordé aux travailleurs involontairement privés d'emploi qu'il invoque. Par suite, et comme il incombe au juge d'appel de le relever d'office, l'ordonnance du 11 juin 2021 est entachée d'irrégularité, dès lors que l'affaire ne pouvait être jugée que par une formation collégiale, et doit être annulée. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de se prononcer immédiatement par la voie de l'évocation.
Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'article 3 de l'arrêté du 21 décembre 2017 :
5. D'une part, aux termes de l'article L. 5424-1 du code du travail : " Ont droit à une allocation d'assurance dans les conditions prévues aux articles L. 5422-2 et L. 5422-3 : 1° (...) les agents titulaires des collectivités territoriales (...) ". Aux termes de l'article L. 5422-1 du même code : " Ont droit à l'allocation d'assurance les travailleurs involontairement privés de leur emploi (...) aptes au travail et recherchant un emploi qui satisfont à des conditions d'âge et d'activités antérieures ".
6. D'autre part, aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " (...) L'exclusion temporaire de fonctions, qui est privative de toute rémunération, peut être assortie d'un sursis total ou partiel (...) ". Si une sanction d'exclusion temporaire prononcée, sur le fondement de ces dispositions, à l'encontre d'un agent de la fonction publique territoriale entraîne pour celui-ci la cessation provisoire de ses fonctions et la privation, pour la même durée, de la rémunération qui leur est attachée, elle n'a pas pour effet de le priver de son emploi, l'agent conservant son emploi pendant la période d'exclusion et étant réintégré dans ses fonctions au terme de cette période. L'agent exclu temporairement ne peut donc prétendre, pendant la période où court cette sanction, à un revenu de remplacement sur le fondement des dispositions de l'article L. 5421-1 du code du travail.
7. Contrairement à ce que soutient M. B..., la privation de rémunération dont il demande l'annulation n'a pas été adoptée en conséquence de sa révocation prononcée par un arrêté du 3 mai 2017, mais par suite de l'exclusion temporaire de ses fonctions, cette mesure ayant été édictée au terme de l'article 1er de l'arrêté du 21 décembre 2017, lequel a nécessairement également eu pour effet de retirer la décision de révocation. La mesure d'exclusion temporaire des fonctions prononcée par le même article ainsi que par l'article 2 de l'arrêté en cause a entraîné pour le requérant la cessation provisoire de ses fonctions et la privation, entre le 24 juin et le 23 décembre 2017, de la rémunération qui leur est attachée. Conformément à ce qui a été dit au point 6, l'exclusion temporaire de fonctions ainsi prononcée, et qui est devenue définitive dès lors que les articles 1 et 2 de l'arrêté du 21 décembre 2017 n'ont pas été contestés par M. B... dans le délai contentieux, n'a pas eu pour effet de priver M. B... de son emploi, l'intéressé conservant son emploi pendant la période d'exclusion et étant réintégré dans ses fonctions au terme de cette période. Par suite, M. B..., qui n'était pas involontairement privé de son emploi au sens et pour l'application de l'article L. 5422-1 du code du travail et qui était tenu de reprendre ses fonctions à l'expiration du délai prévu par l'arrêté précité, ne peut prétendre, pendant la période où a couru cette sanction, à un revenu de remplacement sur le fondement des dispositions de l'article L. 5421-1 de ce code.
Sur les conclusions indemnitaires :
8. En premier lieu, si l'appelant demande le remboursement des saisies sur salaires qui ont, à hauteur d'un montant de 5 050,62 euros, été pratiquées par la commune de Villeneuve-Saint-Georges, ces saisies résultent de l'exécution du titre exécutoire du 9 janvier 2018 visant à la répétition des sommes versées à M. B... au titre de l'aide au retour à l'emploi pour la période comprise entre le 24 juin et 23 décembre 2017. Or l'annulation de ce titre, ensemble la décharge de l'obligation de payer, a été demandée, comme dit au point 2 de l'arrêt, dans le cadre d'une instance distincte, cependant que l'ordonnance dont il est ici relevé appel a seulement statué, au vu des conclusions formées par M. B..., sur une demande indemnitaire tendant au versement d'une somme de 1 893,79 euros correspondant à des sommes dont l'intéressé estime qu'elles auraient dû lui être versées au titre de revenus de remplacement et de diverses primes. De telles conclusions, ne peuvent, comme le lui oppose à bon droit l'intimée, qu'être rejetées comme irrecevables.
9. En second lieu, aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle ". Et selon l'article R. 412-1 du même code : " La requête doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée, sauf impossibilité justifiée, de l'acte attaqué ou, dans le cas mentionné à l'article R. 421-2, de la pièce justifiant de la date de dépôt de la réclamation. (...) ". La condition tenant à l'existence d'une décision de l'administration doit être regardée comme remplie si, à la date à laquelle le juge statue, l'administration a pris une décision, expresse ou implicite, sur une demande formée devant elle, régularisant ce faisant la requête.
10. En l'espèce, la demande de M. B..., enregistrée au greffe du tribunal le 28 février 2018, n'était, d'une part, pas accompagnée d'une décision, expresse ou implicite, de la commune de Villeneuve-Saint-Georges se prononçant sur une demande indemnitaire formée devant elle par l'intéressé et d'autre part, le requérant n'a pas davantage produit la pièce justifiant du dépôt d'une telle réclamation, et ce malgré la fin de non-recevoir opposée par la commune et en dépit de l'invitation à la régularisation qui lui a été adressée par le greffe du tribunal, par un courrier du 1er mars 2018, dont il a pris connaissance le 3 mars suivant. Si l'appelant se prévaut par ailleurs de ce qu'il aurait adressé une demande indemnitaire à la commune de Villeneuve-Saint-Georges le 26 juillet 2019, celle-ci le conteste sans que M. B... justifie de la notification d'une telle demande, en sorte que cette allégation n'est pas établie. Par suite, dans la mesure où aucune décision préalable de la part de l'administration n'était intervenue avant que la Cour ne statue sur la demande de M. B..., celle-ci ne peut qu'être rejetée comme irrecevable. En tout état de cause, M. B... n'établit l'existence d'aucune illégalité fautive.
11. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité des conclusions d'excès de pouvoir en ce qu'elles recherchent l'annulation partielle d'un acte indivisible, que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'article 3 de l'arrêté du 21 décembre 2017 ni la condamnation de la commune de Villeneuve-Saint-Georges à lui verser la somme de 1 893,79 euros. Les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dont il a assorti sa demande ne peuvent également qu'être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
12. Il résulte de ce qui précède que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à M. B... la somme qu'il lui réclame sur leur fondement. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de l'appelant une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés dans l'instance par la commune de Villeneuve-Saint-Georges.
DECIDE :
Article 1er : L'ordonnance n° 1801608 du 11 juin 2021 du vice-président du tribunal administratif de Melun est annulée.
Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Melun et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.
Article 3 : M. B... versera à la commune de Villeneuve-Saint-Georges une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la commune de Villeneuve-Saint-Georges.
Délibéré après l'audience du 9 mars 2023, à laquelle siégeaient :
- Mme Vrignon-Villalba, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Aggiouri, premier conseiller.
- M. Perroy, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mars 2023.
Le rapporteur,
G. PERROY
La présidente,
C. VRIGNON-VILLALBA
La greffière,
A. MAIGNAN
La République mande et ordonne au préfet du Val-de-Marne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 21PA0438802