Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme M...,
- les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique,
- et les observations de Me Loty-Porzier, avocat des consorts E....
Considérant ce qui suit :
1. M. E..., né en 1926, a été admis le 17 mai 2008 à l'hôpital d'instruction des armées Bégin pour une fracture du col fémoral à la suite d'une chute à son domicile. Le lendemain, il a subi une intervention chirurgicale consistant en une arthroplastie totale de la hanche gauche P... prothèse à scellement biologique. Lors de son séjour à la maison de convalescence L'Amandier, à Châtenay-Malabry, il a de nouveau été victime d'une chute le 23 juin 2008. Le jour même, il a subi à l'hôpital d'instruction des armées Bégin une ostéosynthèse d'une fracture complexe du fémur gauche sur prothèse totale de hanche. Il a quitté l'hôpital le 27 juin 2008 et a regagné la maison de convalescence avec interdiction d'appui pendant 45 jours. Se plaignant de douleurs lors de l'appui sur son membre inférieur gauche et de difficultés à poursuivre les séances de rééducation au terme de cette période, M. E... a fait l'objet d'examens qui ont mis en évidence le 18 novembre 2008 une mobilisation de la prothèse fémorale. Le 27 janvier 2009, une reprise chirurgicale de la prothèse fémorale de M. E... a été réalisée à l'hôpital Cochin. L'intéressé a été hospitalisé jusqu'au 5 février 2009 avant d'être pris en charge au centre de rééducation Laënnec du 5 février au 13 mars 2009.
2. A la demande de M. E..., le Tribunal de grande instance de Nanterre a ordonné le 24 juin 2010 une expertise médicale. Le rapport a été déposé le 29 septembre 2015. Le 14 août 2017, M. E... a saisi le Tribunal administratif de Melun d'une demande tendant à la condamnation de l'Etat à l'indemniser des préjudices qu'il estime avoir subis lors de sa prise en charge le 23 juin 2008 P... les praticiens de l'hôpital d'instruction des armées Bégin. P... un jugement du 16 octobre 2020, le Tribunal administratif de Melun a rejeté les conclusions de la ministre des armées tendant à ce qu'une nouvelle expertise soit ordonnée et a condamné l'Etat à verser à M. E... la somme de 505 603 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 25 avril 2017 avec capitalisation des intérêts à compter du 25 avril 2018 et a mis à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
3. La ministre des armées relève appel de ce jugement et demande à la Cour d'ordonner une nouvelle expertise ou, à titre subsidiaire, de ramener à de plus justes proportions le montant des indemnités allouées à M. E... P... ce jugement en prenant en considération la seule fraction du dommage corporel déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue P... le patient d'obtenir une amélioration de son état de santé. M. E..., P... la voie de l'appel incident, a demandé à la Cour de réformer ce jugement en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à ses conclusions indemnitaires. P... un arrêt avant dire droit du 23 septembre 2021, la Cour a écarté le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement attaqué et a jugé qu'en réalisant le 23 juin 2008 une ostéosynthèse d'une fracture complexe du fémur gauche sans procéder au changement de la prothèse fémorale de M. E... qui était descellée et donc mobile, les praticiens de l'hôpital d'instruction des armées Bégin ont commis une faute qui a été à l'origine d'une perte de chance pour M. E... d'obtenir une amélioration de son état de santé et la Cour a sursis à statuer sur les conclusions des parties dans l'attente de la nouvelle expertise qu'elle a diligentée. L'expert désigné a déposé son rapport le 20 mai 2022.
Sur la recevabilité des conclusions présentées P... la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine devant la Cour :
4. Une caisse primaire d'assurance-maladie ayant été mise à même de faire valoir ses droits devant le tribunal administratif mais ayant omis de demander en temps utile le remboursement des frais exposés antérieurement au jugement de ce tribunal n'est plus recevable à le demander devant le juge d'appel.
5. Il résulte de l'instruction que la mutuelle générale de l'éducation nationale (MGEN), gestionnaire P... délégation du régime d'assurance maladie auquel M. E... était affilié, a été régulièrement mise en cause P... le tribunal administratif mais n'a pas produit de mémoire en première instance. Ainsi, les conclusions présentées devant la Cour de la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine, qui indique venir aux droits de la MGEN et assurer la gestion centralisée du recours contre les tiers pour le compte de cette dernière et qui tendent au remboursement de frais d'hospitalisation exposés antérieurement au jugement rendu le 16 octobre 2020, ont le caractère de conclusions nouvelles en appel et doivent, P... suite, être rejetées comme irrecevables. P... voie de conséquence, doivent également être rejetées les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine tendant au paiement de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale et à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Sur la perte de chance :
6. Dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou du traitement d'un patient dans un établissement public hospitalier a compromis ses chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute commise P... l'établissement et qui doit être intégralement réparé n'est pas le dommage corporel constaté, mais la perte de chance d'éviter que ce dommage soit advenu. La réparation qui incombe à l'hôpital doit alors être évaluée à une fraction du dommage corporel déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue.
7. Le ministre des armées soutient, dans le dernier état de ses écritures, que le taux de perte de chance pour M. E... d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation doit être fixé à 50 % dès lors qu'il ne résulterait pas de l'instruction, notamment du compte rendu opératoire du 23 juin 2008 et des comptes rendus des consultations médicales réalisées entre les 27 juin et 19 septembre 2008, que la prothèse à scellement biologique de M. E... aurait été descellée le 23 juin 2008, date à laquelle le patient a subi une ostéosynthèse d'une fracture complexe du fémur gauche, alors que le descellement aurait pu résulter de la rééducation post-opératoire. Cependant, cette argumentation n'est pas de nature à déterminer l'ampleur de la perte de chance subie P... M. E... mais à remettre en cause, pour la première fois, l'existence d'une faute commise P... les médecins de l'hôpital d'instruction des armées Bégin lors de l'intervention chirurgicale du 23 juin 2008. Or, dans son arrêt avant dire droit du 23 septembre 2021, la Cour a déjà jugé que la responsabilité de l'Etat est engagée à l'encontre de M. E... au motif qu'il résulte de l'instruction que le chirurgien n'a pas procédé au changement de la prothèse fémorale qui était descellée et donc mobile lors de l'ostéosynthèse de la fracture complexe du fémur gauche de M. E... effectuée le 23 juin 2008 à l'hôpital d'instruction des armées Bégin.
8. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise du docteur L..., que si M. E... a présenté le 23 juin 2008 une fracture complexe du fémur gauche à la suite d'une chute alors qu'il était en convalescence à la maison de repos L'Amandier après une première intervention consistant en une arthroplastie totale de la hanche gauche P... prothèse à scellement biologique, il aurait pu se remettre quasiment de manière complète de ces interventions et retrouver son autonomie si les médecins de l'hôpital d'instruction des armées Bégin avaient procédé lors de l'intervention du 23 juin 2008 au changement de la prothèse fémorale qui était descellée. L'expert a ainsi estimé que la faute médicale commise lors de cette intervention a entraîné une perte de chance de 95 % pour M. E... d'éviter une aggravation de son état de santé. Dans les circonstances de l'espèce, eu égard notamment à l'état de santé de M. E... avant l'intervention du 23 juin 2008, à l'évolution prévisible de celui-ci s'il avait été procédé au remplacement de la prothèse fémorale biologique descellée dès le 23 juin 2008 et à l'impossibilité pour M. E... de suivre pleinement les séances de rééducation post-opératoire du fait de la mobilité de cette prothèse qui l'empêchait de prendre appui sur son membre inférieur gauche, il y a lieu de fixer la part de responsabilité de l'hôpital d'instruction des armées Bégin à 95 %.
9. Il résulte ainsi de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'avoir recours à la procédure mentionnée à l'article R. 621-10 du code de justice administrative en demandant à l'expert de comparaître devant la formation de jugement en présence des parties pour lui fournir toutes explications complémentaires utiles, qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la réparation de la fraction du dommage subi P... M. E... à hauteur de 95%.
Sur l'évaluation des préjudices de M. E... :
10. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise du docteur L..., que la date de consolidation de l'état de santé de M. E..., lequel est décédé, ainsi qu'il a déjà été dit, le 12 septembre 2021, doit être fixée au 27 janvier 2010, c'est-à-dire un an après la reprise chirurgicale tendant au remplacement de la prothèse fémorale descellée.
A. En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :
A.1 S'agissant des préjudices patrimoniaux temporaires :
Quant aux frais divers :
11. M. E... a justifié avoir exposé des frais divers d'un montant total de 3 600 euros correspondant, d'une part, à l'assistance du docteur F..., médecin conseil, lors des opérations d'expertise du docteur D... et dont le coût s'élève, selon la facture du 29 septembre 2015, à 1 200 euros et, d'autre part, des honoraires d'un montant de 2 400 euros d'un architecte-urbaniste spécialisé en accessibilité handicap, qui a établi un diagnostic de mise en accessibilité du logement de M. E..., la nécessité d'un tel aménagement étant retenue P... le rapport d'expertise du docteur D.... Dans ces conditions, c'est à bon droit que le tribunal a mis à la charge de l'Etat la somme de 3 600 euros au titre des frais divers acquittés P... M. E....
Quant aux frais d'assistance P... une tierce personne :
12. Il résulte de l'instruction, notamment des rapports d'expertise du docteur D... et du docteur L..., que l'état de santé de M. E... a justifié, du fait de l'aggravation de son état de santé dû au non remplacement de la prothèse fémorale descellée le 23 juin 2008, d'une aide humaine non spécialisée pendant les périodes comprises, d'une part, entre le 19 septembre 2008, date de son départ de la maison de convalescence L'Amandier, et le 5 novembre 2008, date de sa prise en charge au centre de rééducation fonctionnelle de Saint-Cloud, soit 48 jours, et, d'autre part, entre le 14 novembre 2008, date de sa sortie de cet établissement et le 26 janvier 2009, date de son hospitalisation à l'hôpital Cochin afin de subir une reprise chirurgicale consistant au changement de la prothèse descellée, soit 74 jours et, enfin, entre le 13 mars 2009, date de sa sortie du centre de rééducation Laënnec, et le 27 janvier 2010, date de consolidation de son état de santé, soit 321 jours, c'est-à-dire pour une durée totale de 443 jours.
13. Il ressort des rapports d'expertise du docteur D... et du docteur L... que l'état de santé de M. E... a nécessité une aide humaine non spécialisée qu'ils ont évaluée respectivement à 6 heures et 4 heures P... jour. Le docteur L... a retenu en outre la " nécessité d'une aide de sécurité permanente depuis le retour à domicile le 19 septembre 2008 ". Il résulte de l'instruction que M. E..., qui se déplaçait avec un déambulateur et pouvait à compter de mars 2009 utiliser deux cannes anglaises, avait besoin d'aide pour la toilette, pour les repas, les tâches ménagères et les courses. En revanche, il ne résulte pas de l'instruction que son état de santé nécessitait une surveillance permanente. Dans ces conditions, il y a lieu de retenir une aide humaine non spécialisée de 6 heures P... jour.
14. Au vu de l'ensemble de ces éléments, il sera fait une juste appréciation du préjudice de M. E... pour les périodes retenues au point 12, sur la base d'un taux horaire de l'assistance P... une tierce personne non spécialisée évalué à 16 euros comme les consorts E... le demandent et proratisé pour prendre en compte les congés payés et les jours fériés sur une base annuelle de 412 jours, soit en l'espèce un nombre total de 500 jours, en le fixant à la somme de 48 000 euros. Après application du taux de perte de chance de 95%, la somme allouée à ce titre s'élève ainsi à 45 600 euros.
A.2 S'agissant des préjudices patrimoniaux permanents :
Quant aux frais d'adaptation du logement :
15. Les consorts E... sollicitent la somme totale de 14 806,85 euros au titre des travaux d'adaptation du logement de M. E... à son handicap effectués dans la salle de bain, la cuisine ainsi que dans le dégagement et produisent au soutien de leur demande le diagnostic d'accessibilité et d'autonomie de M. A..., architecte et expert conseil spécialisé en handicap accessibilité du 13 février 2017 mentionnant divers travaux à réaliser pour adapter le logement de M. E... à ses difficultés à rester debout et à se déplacer ainsi que leurs coûts approximatifs et celui de la mission de maîtrise d'œuvre d'un montant total de 24 255 euros. Ils versent également au dossier pour la première fois en appel une facture de la Sarl Plom 92 du 21 mai 2021 qui a réalisé des travaux d'aménagement dans la salle de bain de M. E... pour un coût total de 8 506,85 euros. En l'absence de toute autre facture justifiant la réalisation de travaux d'aménagement de la cuisine et du couloir, seuls les travaux de la salle de bain doivent être indemnisés. Il sera ainsi fait droit à la demande des consorts E..., après application du taux de perte de chance retenu, à hauteur de 8 081,50 euros.
Quant aux frais liés au handicap :
16. Les consorts E... sollicitent, dans le dernier état de leurs écritures, la somme de 2 728,26 euros au titre des frais liés au renouvellement et à l'entretien du déambulateur, du rollator trois roues, des coussins viscoélastiques, du siège de douche et du tabouret avec accoudoirs. Si ces frais correspondent à l'entretien et au renouvellement du matériel nécessaire à M. E... du fait des séquelles imputables à la faute médicale commise P... les praticiens de l'hôpital d'instruction des armées Bégin, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que la ministre des armées devait être regardée comme s'opposant à l'allocation d'un capital et que ces dépenses futures ne donneront lieu à prise en charge que sur présentation de justificatifs. L'achat du siège de douche est établi P... la facture de la Sarl Plom 92 du 21 mai 2021 et son remboursement est inclus dans la somme allouée au titre des frais d'adaptation du logement au point 15. En revanche, les consorts E... ne versent au dossier aucune facture ou tout autre élément justifiant des dépenses engagées P... M. E... au titre des autres frais liés au handicap invoqués pour la période comprise entre la date de consolidation de l'état de santé de M. E... et la date de son décès. Dans ces conditions, la demande des consorts E... doit être rejetée.
Quant aux frais d'assistance P... une tierce personne :
17. Il ressort du rapport d'expertise du docteur D... que celui-ci a retenu que l'état de santé de M. E... après consolidation nécessitait l'assistance P... une tierce personne 6 heures P... jour. Le docteur L... a évalué l'aide humaine non spécialisée apportée à M. E... à 4 heures P... jour et a également retenu la " nécessité d'une aide de sécurité permanente depuis le retour à domicile ". Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 13, il y a lieu de retenir une aide humaine non spécialisée de 6 heures P... jour pour la période comprise entre le 28 janvier 2010 et le 31 août 2021, soit 4 231 jours, M. E... ayant été hospitalisé du 1er au 12 septembre 2021, date de son décès. Le coût de l'assistance P... une tierce personne non spécialisée six heures P... jour au domicile de M. E... doit être calculé, comme il a déjà été dit, sur la base d'un prix horaire de 16 euros comme les consorts E... le demandent et proratisé pour prendre en compte les congés payés et les jours fériés sur une base annuelle de 412 jours, soit en l'espèce un nombre total de 4 776 jours. Il s'ensuit, alors qu'il résulte de l'instruction que M. E... n'a perçu aucune aide financière du département au titre de sa perte d'autonomie, que la somme allouée à ce titre s'élève, après application du taux de perte de chance de 95%, à 435 571 euros.
B. En ce qui concerne les préjudices extra-patrimoniaux :
B.1 S'agissant des préjudices extra-patrimoniaux temporaires :
Quant au déficit fonctionnel temporaire :
18. Il résulte de l'instruction, notamment des rapports d'expertise, que M. E... a, du fait de l'erreur médicale du 23 juin 2008, souffert d'un déficit fonctionnel temporaire total du 5 au 14 novembre 2008 et du 26 janvier 2009 au 5 avril 2009, soit pendant 79 jours, puis d'un déficit fonctionnel temporaire partiel de 75 % du 19 septembre 2008 au 5 novembre 2008 et du 14 novembre 2008 au 26 janvier 2009, soit pendant 122 jours.
19. Il ressort du rapport d'expertise du docteur D... que pour la période du 13 mars 2009 au 13 mai 2009, puis pour la période du 14 mai 2009 au 14 septembre 2009, celui-ci a évalué le déficit fonctionnel temporaire partiel présenté P... M. E... respectivement à 50 % et 25 %. Il ressort du rapport de l'expertise diligentée P... la Cour que le docteur L... a évalué le déficit fonctionnel temporaire partiel de M. E... à 75 % pour la période comprise entre le 13 mars 2009 et le 27 janvier 2010. Il résulte de l'instruction que M. E... ne pouvait se déplacer sans l'aide d'un déambulateur ou de deux cannes anglaises et que son périmètre de marche était très limité. Dans ces conditions, il y a lieu de retenir un déficit fonctionnel temporaire partiel de 75 % pour la période comprise entre le 13 mars 2009, date à laquelle il a quitté le centre de rééducation, et le 27 janvier 2010, date de la consolidation de son état de santé fixée P... le docteur L....
20. Au vu des éléments énoncés aux points 18 et 19, il sera fait une juste appréciation de l'indemnisation due pour ce chef de préjudice en l'évaluant à la somme de 6 500 euros après application du taux de perte de chance retenu.
Quant aux souffrances endurées :
21. Il résulte des rapports d'expertise que les experts ont évalué les souffrances endurées P... M. E... du fait du non remplacement de la prothèse fémorale descellée le 23 juin 2008 à 4,5 sur une échelle de 7. Il sera fait une juste appréciation du préjudice subi P... M. E... en lui allouant la somme de 11 400 euros après application du taux de perte de chance retenu.
Quant au préjudice esthétique :
22. Il résulte de l'instruction que l'utilisation P... M. E... de cannes anglaises et d'un déambulateur est imputable à l'erreur médicale commise le 23 juin 2008. Il convient d'allouer en réparation de ce préjudice la somme de 1 500 euros après application du taux de perte de chance retenu.
B.2 S'agissant des préjudices extra-patrimoniaux permanents :
Quant au déficit fonctionnel permanent :
23. Il ressort des rapports d'expertise que le docteur D... et le docteur L... ont évalué le déficit fonctionnel permanent de M. E... en " rapport avec l'insuffisance technique opératoire " à 12 %. Il sera fait une juste appréciation du préjudice subi P... M. E... en lui allouant la somme de 12 000 euros après application du taux de perte de chance retenu.
Quant au préjudice esthétique :
24. M. E... soutient que les premiers juges ont fait une évaluation insuffisante du préjudice esthétique temporaire et du préjudice esthétique permanent en retenant la somme globale de 5 000 euros alors que ce montant correspond à la seule indemnisation du préjudice esthétique permanent. Il résulte de l'instruction que du fait de l'utilisation de cannes anglaises et d'un déambulateur, le docteur D... a évalué le préjudice esthétique permanent de M. E... à 4/7 et le docteur L... à 3/7. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en allouant à M. E... la somme de 4 750 euros après application du taux de perte de chance retenu.
Quant au préjudice d'agrément :
25. M. E..., qui se prévalait, au titre du préjudice d'agrément, de ce que sa perte d'autonomie et l'impossibilité de se déplacer seul hors de son appartement ont conduit à la disparition de toute activité sociale, physique et de loisir et à l'impossibilité de conduire un véhicule, de jardiner et de bricoler, soutient que les premiers juges ont procédé à une évaluation insuffisante de ce chef de préjudice en l'évaluant à 2 000 euros. Cependant, les éléments invoqués P... M. E... ont été pris en considération au titre du déficit fonctionnel permanent, seule l'impossibilité de pratiquer une activité sportive ou de loisir spécifique qui était pratiquée avant le fait générateur peut donner lieu à une indemnité au titre du préjudice d'agrément. Toutefois, devant la Cour, le ministre des armées ne conteste pas le principe de l'indemnisation du préjudice d'agrément dont se prévaut M. E..., mais remet en cause l'imputabilité de ce préjudice aux seules suites de l'intervention chirurgicale du 23 juin 2008 au sein de l'hôpital d'instruction des armées Bégin alors que l'intéressé avait déjà subi une arthroplastie totale de la hanche gauche le 18 mai 2008. Or il résulte notamment du rapport d'expertise du docteur D... que le préjudice d'agrément de M. E... est entièrement lié à l'insuffisance technique de l'intervention chirurgicale en litige. Dans ces conditions, il y a lieu de confirmer le montant de 2 000 euros de l'indemnité allouée à ce titre P... le tribunal sur lequel sera appliqué le taux de perte de chance retenu de 95 %, l'indemnité allouée s'élevant dès lors à 1 900 euros.
26. Il résulte des points 11 à 25 de l'arrêt que l'évaluation de l'ensemble des préjudices de M. E... s'élève à la somme de 530 902,50 euros. Il s'ensuit que la somme de 505 603 euros allouée à M. E... P... les premiers juges doit être portée à 530 902,50 euros.
Sur les frais d'expertise :
27. Il y a lieu de mettre les frais de l'expertise du docteur L..., taxés et liquidés à la somme de 3 161 euros P... une ordonnance de la présidente de la Cour du 7 juillet 2022 à la charge définitive de l'Etat, dont il convient de déduire la somme de 2 400 euros versée à titre d'allocation provisionnelle.
Sur les frais liés à l'instance :
28. Il résulte de l'instruction que lors des opérations d'expertise du docteur L..., expert désigné P... la présidente de la Cour, les consorts E... ont bénéficié de l'assistance du docteur H..., médecin conseil, dont le coût s'élève, selon la note d'honoraires du 28 février 2022, à 2 880 euros.
29. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le paiement aux consorts E... de la somme globale de 5 380 euros au titre des frais liés à l'instance en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, incluant les frais d'assistance dans le cadre de la présente procédure P... le docteur H... d'un montant de 2 880 euros. P... ailleurs, ainsi qu'il a déjà été dit au point 5, les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine présentées sur le fondement de ces mêmes dispositions doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : L'indemnité que l'Etat a été condamné à verser aux consorts E... est portée à la somme de 530 902,50 euros.
Article 2 : Le jugement du 16 octobre 2020 du Tribunal administratif de Melun est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 2.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du ministre des armées est rejeté.
Article 4 : Les frais de l'expertise décidée P... arrêt avant dire droit du 23 septembre 2021, taxés et liquidés à la somme de la somme de 3 161 euros, sont mis à la charge définitive de l'Etat.
Article 5 : L'Etat versera à M. E... la somme de 5 380 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le surplus des conclusions d'appel incident des consorts E... est rejeté.
Article 7 : Les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine sont rejetées.
Article 8 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des armées, à Mme N... E..., Mme G... C..., M. J... E... et Mme K... E..., en qualité d'ayants droit de M. O... E... et à la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine.
Copie en sera adressée à la mutuelle générale de l'éducation nationale.
Délibéré après l'audience du 16 février 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Le Goff, président de chambre,
- M. Ho Si Fat, président assesseur,
- Mme Larsonnier, première conseillère.
Rendu public P... mise à disposition au greffe le 20 mars 2023.
La rapporteure,
V. M... Le président,
R. LE GOFF
Le greffier,
P. TISSERAND
La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 20PA04088 2