Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 5 mars 2019 par laquelle la ministre des armées a fixé la date de sa guérison avec retour à l'état antérieur au 12 novembre 2015 et de condamner l'Etat à lui verser une rente mensuelle de 3 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis en raison de son accident du 18 décembre 2014.
Par un jugement n° 1906227 du 22 octobre 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 22 décembre 2021 et le 18 décembre 2022, Mme C..., représentée par Me Varin, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 22 octobre 2021 ;
2°) avant dire droit d'ordonner une expertise médicale ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué qui ne se prononce pas sur le défaut de motivation de la décision du 5 mars 2019, est insuffisamment motivé ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision du 5 mars 2019 est insuffisamment motivée ;
- c'est à tort que les juges de première instance ont rejeté sa demande, alors même que son état de santé n'était pas consolidé à la date du 12 novembre 2015 retenue par l'administration, qu'elle remplissait les conditions fixées à l'article 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite pour bénéficier d'une admission anticipée à la retraite pour invalidité que le ministère des armées s'est abstenu de lui proposer, et pouvait prétendre à une rente viagère d'invalidité en application de l'article 28 du même code.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 octobre 2022, le ministre des armées, conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision du 5 mars 2019, fondé sur une cause juridique distincte de celle soulevée en première instance, est nouveau en appel et par suite irrecevable ;
- le moyen tiré de l'erreur d'appréciation n'est pas fondé ;
- il n'y a pas lieu d'ordonner l'expertise sollicitée dépourvue d'utilité au cas d'espèce.
Des pièces, enregistrées le 19 janvier 2023, ont été produites par le ministre des armées en réponse à une mesure d'instruction adressée par la Cour, en application de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative le 10 janvier 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général de la fonction publique ;
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- et les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., adjointe administrative de 2ème classe affectée au service des ressources humaines du ministère des armées, a été victime d'un accident de trajet le 17 février 2000 qui a été pris en charge au titre de la législation sur les accidents de service. Consécutivement à cet accident, Mme C... dont l'état de santé a été déclaré consolidé au 25 octobre 2000 et le taux d'invalidité fixé à 18 %, a perçu une allocation temporaire d'invalidité sans limitation de durée à compter du 6 novembre 2005, compte tenu des séquelles conservées. A la suite d'une rechute survenue au mois de février 2011, elle a été placée en congé de longue maladie pendant trois ans et a été reconnue travailleuse handicapée. Après avoir repris ses fonctions au mois de juin 2014, elle a été victime d'un nouvel accident le 18 décembre 2014 et a sollicité le bénéfice des dispositions du deuxième alinéa du 2° de l'article 34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984. A compter du 1er janvier 2017, Mme C... a fait valoir ses droits à la retraite. Par une décision du 20 mars 2017, l'accident du 18 décembre 2014 a également été reconnu imputable au service. Par une décision du 5 mars 2019, la date de sa guérison a été fixée rétroactivement au 12 novembre 2015. Mme C... relève régulièrement appel du jugement du tribunal administratif de Paris du 22 octobre 2021 en tant qu'il a rejeté ses conclusions à fin d'annulation et doit être regardée comme demandant également l'annulation de la décision du 5 mars 2019.
Sur la régularité du jugement :
2. En premier lieu, si Mme C... soutient que le tribunal a omis d'examiner le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision du 5 mars 2019, il ne ressort pas des pièces du dossier de première instance, et notamment de la requête et des mémoires produits, qu'elle aurait soulevé un tel moyen, contrairement à ce qu'elle soutient. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait entaché d'une insuffisance de motivation, en raison d'un défaut d'examen de ce moyen par les premiers juges doit être écarté.
3. En second lieu, hormis dans le cas où il se prononce sur la régularité du jugement, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision attaquée dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Par suite, les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation et de l'insuffisance de motivation, à raison d'un défaut de reconnaissance de son état de santé antérieur, dont serait entaché le jugement entrepris, ne peuvent être utilement soulevés et doivent être écartés comme inopérants.
Sur le bien-fondé du jugement :
4. En premier lieu, Mme C... a soulevé en première instance des moyens portant exclusivement sur la légalité interne de la décision du 5 mars 2019. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision, invoqué pour la première fois en appel, qui n'est pas d'ordre public et relève de la légalité externe de la décision, repose sur une cause juridique distincte et revêt le caractère d'une demande nouvelle en appel, qui est par suite, irrecevable.
5. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier, notamment de la déclaration d'accident de service établie le 22 décembre 2014, que Mme C... a été heurtée le 18 décembre 2014 par un chariot qui l'a blessée à la jambe gauche et plus précisément à la cheville. La date de guérison de son état de santé, consécutivement à cet accident, a été fixée au 12 novembre 2015 par le médecin agrée auprès du ministère de la défense après expertise réalisée par un médecin rhumatologue. Le rapport d'expertise relève que l'intéressée a présenté une contusion sans conséquence pérenne au niveau de la cheville gauche et sans influence sur les séquelles majeures préexistantes, conséquences de l'accident survenu en 2000, qu'aucune séquelle de la contusion subie en décembre 2014 ne peut être constatée, que le tableau clinique répond à des conséquences de l'accident antérieur et que les soins prescrits le 19 avril 2017 sont sans lien avec l'accident de 2014 qui a de longue date épuisé ses effets dynamiques.
Une contre-expertise réalisée le 5 octobre 2018 constate une guérison à la même date avec retour à un état antérieur évoluant pour son propre compte, sans rechute et sans lésion imputable à l'accident du 18 décembre 2014.
6. Pour contester cette guérison, Mme C... se prévaut de la décision du 20 mars 2017 par laquelle l'administration a reconnu l'imputabilité au service de son accident survenu au mois de décembre 2014 et l'invitant à présenter les pièces justificatives de sa prise en charge médicale à ce titre. Toutefois, la prise en charge éventuelle des frais engagés consécutivement à cet accident et postérieurement au départ à la retraite de l'intéressée, est sans incidence sur la détermination de la date de guérison qui a été arrêtée au 12 novembre 2015, ces deux évènements étant indépendants l'un de l'autre et ne présentant, contrairement à ce qu'elle soutient, aucune contradiction. Mme C... produit deux certificats médicaux de son médecin traitant attestant, d'une part, de consultations régulières entre le 18 décembre 2014 et le 31 décembre 2016 et, d'autre part, qu'à la date du 24 juillet 2017, elle était " toujours en soins pour des fractures de cheville gauche ". Elle présente également des prescriptions médicales et résultats d'examens médicaux établis entre le 31 mars 2016 et le 25 octobre 2022 qui justifient d'une prise en charge médicale dans le cadre d'une arthropathie à la cheville gauche, l'intéressée ayant été opérée en 2012 d'une " arthrodèse tibio talienne " de type Crawford Adams à cette cheville. Aucune de ces pièces ne permet cependant de contredire les constatations médicales citées au point 5 du présent arrêt et qui concluent à l'absence de séquelle consécutive à l'accident de service du 18 décembre 2014. Si l'intéressée soutient avoir également présenté une pathologie anxio-dépressive postérieurement à cet accident, elle ne présente aucune pièce médicale susceptible d'en justifier. Enfin, si Mme C... soutient que la fixation de la date de guérison en litige ne tient pas compte d'une rechute d'un état antérieur, aucun élément versé au dossier ne permet d'établir une aggravation de l'état de santé de l'intéressée résultant du précédent accident dont elle a été victime au mois de février 2000, au demeurant consolidé et entièrement réparé par la reconnaissance d'un taux d'invalidité fixé initialement à 18 %. Par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision en litige du 5 mars 2019 serait entachée d'une erreur d'appréciation. Ce moyen doit par suite être écarté.
7. En dernier lieu, la circonstance que Mme C... aurait pu bénéficier d'une mise à la retraite par anticipation ou prétendre à une rente d'invalidité est sans incidence sur la date de guérison retenue par l'administration.
8. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il y ait lieu de statuer sur la recevabilité de la demande de première instance, et sans qu'il soit besoin d'ordonner avant dire droit une mesure d'expertise médicale, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre des frais liés à l'instance doivent également être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 17 février 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Carrère, président,
- M. Soyez, président assesseur,
- Mme Lorin, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 17 mars 2023.
La rapporteure,
C. A...
Le président,
S. CARRERE
La greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA06570