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17/03/2023 | FRANCE | N°21PA03742

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 17 mars 2023, 21PA03742


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D... et B... C... ont demandé au tribunal administratif de Montreuil la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contribution exceptionnelle sur les revenus, auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2015 à raison d'une plus-value générée en 1999, et celle des intérêts correspondants.

Par un jugement n° 1809442 du 25 mai 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistré

e le 6 juillet 2021, M. et Mme C..., représentés par Me Bos, demandent à la Cour :

1°) d'annule...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D... et B... C... ont demandé au tribunal administratif de Montreuil la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contribution exceptionnelle sur les revenus, auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2015 à raison d'une plus-value générée en 1999, et celle des intérêts correspondants.

Par un jugement n° 1809442 du 25 mai 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 6 juillet 2021, M. et Mme C..., représentés par Me Bos, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et intérêts en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- c'est à tort que l'administration a fait application des dispositions du 2 bis de l'article 150-0 D du code général des impôts, issues de la loi de finances rectificative n° 2016-1918 du 29 décembre 2016, qui n'étaient pas applicables à une plus-value constatée le 14 décembre 2015, en sorte que les impositions en litige sont dépourvues de base légale ;

- l'administration, en appliquant le coefficient d'érosion monétaire au prix de revient des actions de la société Mont Jura, a fait une application inexacte de la décision n° 2016-538 QPC du Conseil constitutionnel ;

- le calcul de la somme dont ils demandent qu'elle soit retenue au titre de la plus-value imposable résulte de l'application littérale de la décision du 22 avril 2016 n° 2016-538 QPC du Conseil constitutionnel ; l'affectation du coefficient d'érosion monétaire à l'assiette de la plus-value correspond à l'objectif d'égalité devant les charges publiques de la réserve émise par cette décision, laquelle consiste à placer les contribuables dont la plus-value, placée en report d'imposition avant 2013, est taxable postérieurement au 1er janvier 2013, dans une situation similaire aux contribuables bénéficiant de l'abattement pour durée de détention prévu aux 1 ter et 1 quater de l'article 150-0 D du code général des impôts.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 novembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance, conclut au rejet de la requête en faisant valoir que les moyens soulevés sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution du 4 octobre 1958, notamment son article 62 ;

- la loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999 de finances pour 2000 ;

- loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014 ;

- la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la décision n° 2016-538 QPC du Conseil constitutionnel du 22 avril 2016 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de Mme Lescaut, rapporteure publique,

- et les observations de Me Bos pour M. et Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. M. D... C... a apporté, le 17 avril 1999, 32 765 actions de la société Monts Jura à la société Fireg, en échange de 14 984 actions de cette société nouvellement constituée, réalisant à cette occasion une plus-value de 1 394 352 euros dont il a demandé le report d'imposition en vertu des dispositions alors en vigueur de l'article 160 du code général des impôts. Le 21 septembre 2009, il a apporté 11 984 actions de la société Fireg à la société de droit luxembourgeois Philureg, 3 000 actions de la société Fireg ayant auparavant fait l'objet d'une donation à ses enfants. La société Philureg a été dissoute le 23 décembre 2014 et sa liquidation achevée le 14 décembre 2015, entraînant de ce fait la fin du report de l'imposition de la plus-value mobilière réalisée en 1999. Les modalités de déclaration de cette plus-value ont donné lieu à des échanges avec les services fiscaux aux fins de tenir compte, notamment, de la décision du Conseil constitutionnel n° 2016-538 QPC du 22 avril 2016. Au terme de ces échanges les époux C..., se conformant aux indications données par le service dans un message du 17 mars 2017 ont déposé, le 12 avril 2017, deux déclarations de plus-values modèles 2074 et 2074-1 indiquant une plus-value imposable dont le montant, de 1 004 453 euros, résultait de l'application du coefficient d'érosion monétaire mentionné par la décision du Conseil constitutionnel n° 2016-538 QPC du 22 avril 2016, respectivement, au prix d'acquisition de chacun des titres cédés. Leurs cotisations d'impôt sur le revenu de l'année 2015 ont été établies conformément à ces déclarations. Toutefois, M. et Mme C... ont formé, le 2 mars 2018, une réclamation tendant à ce que la plus-value taxable soit ramenée à 56 702 euros, exposant qu'ils estimaient avoir été induits en erreur par le message du 17 mars 2017 de l'administration fiscale et demandant que le coefficient d'érosion monétaire soit appliqué à la plus-value réalisée et non au prix d'acquisition des titres. En l'absence de réponse expresse à cette réclamation, ils ont saisi le tribunal administratif de Montreuil aux fins d'obtenir la réduction, à concurrence d'une assiette ramenée à 56 702 euros, des cotisations d'impôt sur le revenu de l'année 2015 résultant de la plus-value dont le report d'imposition a expiré cette même année. Ils relèvent appel du jugement n° 1809442 du 25 mai 2021 par lequel le tribunal de Montreuil a rejeté leur demande.

Sur les conclusions aux fins de décharge :

S'agissant du droit applicable :

2. D'une part, en ce qui concerne l'assiette de la plus-value réalisée par les époux C... le 17 avril 1999, les dispositions du I ter de l'article 160 du code général des impôts alors en vigueur et pour lesquelles ils ont opté, disposent que " (...) 4. L'imposition de la plus-value réalisée à compter du 1er janvier 1991 en cas d'échange de droits sociaux résultant d'une opération de fusion, scission ou d'apport de titres à une société soumise à l'impôt sur les sociétés peut être reportée dans les conditions prévues au II de l'article 92 B ". Les dispositions du II de l'article 92 B de ce code, demeurées applicables aux plus-values se trouvant en report d'imposition à la date du 1er janvier 2000 en vertu V de l'article 94 de la loi du 30 décembre 1999 visée ci-dessus, prévoient que l'imposition de la plus-value réalisée en cas d'échange de titres peut être reportée au moment où s'opérera la cession, le remboursement ou l'annulation des titres reçus lors de l'échange, l'imposition de la plus-value étant reportée de plein droit, en application de cet article 94, lorsque les titres reçus en échange font l'objet d'une nouvelle opération d'échange dans les conditions prévues à l'article 150-0 B du code général des impôts.

3. D'autre part, en ce qui concerne le montant de la plus-value assujetti à l'imposition, dont la fin du report est intervenue le 14 décembre 2015, date de la liquidation la société Philureg, en application de la combinaison des dispositions citées au point précédent, les dispositions des articles 150-0 A et 200 A du code général des impôts alors en vigueur prévoient que les gains nets retirés d'une telle opération sont soumis à l'impôt sur le revenu selon le barème progressif. Ces dispositions ne prévoient aucun abattement en fonction de la durée de détention.

4. Toutefois, par sa décision 2016-538 QPC du 22 avril 2016, le Conseil constitutionnel, saisi dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, a formulé la réserve d'interprétation suivante, s'agissant des 1 ter et 1 quater A de l'article 150-0 D du code général des impôts dans leur rédaction résultant de la loi du 29 décembre 2014 visée ci-dessus qui prévoient des abattements de la plus-value pour la durée de détention aux seuls gains mentionnés au I de l'article 150-0 A réalisés à compter du 1er janvier 2013 : " 11. (...) il résulte de l'assujettissement des plus-values mobilières à l'impôt sur le revenu prévu par l'article 200 A du code général des impôts (...) qu'un taux marginal maximal d'imposition de 62,001 % s'applique à la plus-value réalisée avant le 1er janvier 2013 qui a été placée en report d'imposition et dont le report expire postérieurement à cette date (...) les valeurs mobilières qui ont donné lieu à la réalisation de cette plus-value, fait générateur de l'imposition, ont pu être détenues sur une longue durée avant cette réalisation (..) faute de tout mécanisme prenant en compte cette durée pour atténuer le montant assujetti à l'impôt sur le revenu, l'application du taux marginal maximal à cette plus-value méconnaîtrait les capacités contributives des contribuables (...) par suite, les dispositions contestées ne sauraient, sans méconnaître l'égalité devant les charges publiques, priver les plus-values placées en report d'imposition avant le 1er janvier 2013 qui ne font l'objet d'aucun abattement sur leur montant brut et dont le montant de l'imposition est arrêté selon des règles de taux telles que celles en vigueur à compter du 1er janvier 2013, de l'application à l'assiette ainsi déterminée d'un coefficient d'érosion monétaire pour la période comprise entre l'acquisition des titres et le fait générateur de l'imposition (...) sous cette réserve, le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant les charges publiques doit être écarté ".

S'agissant du moyen tiré du défaut de base légale de l'imposition :

5. M et Mme C... soutiennent qu'en appliquant un coefficient d'érosion monétaire au prix d'acquisition des actions apportées le 17 avril 1999 à la société Fireg, l'administration a en réalité appliqué les dispositions du 2 bis de l'article 150-0 D du code général des impôts, issues de la loi de finances rectificative n° 2016-1918 du 29 décembre 2016, qui n'étaient pas applicables ratione temporis. Toutefois, il ne saurait se déduire de ce que le 2 bis de l'article 150-0 D du code général des impôts prévoit un tel mécanisme que l'administration aurait, en faisant application d'un coefficient d'érosion monétaire au prix de revient des actions apportées en 1999, rétroactivement appliqué la loi de finances rectificative pour 2016. Les requérants ne sont pas davantage fondés à soutenir que l'administration fiscale, qui a entendu appliquer la réserve d'interprétation formulée par la décision du Conseil constitutionnel n° 2016-538 QPC du 22 avril 2016, se serait fondée sur une règle de détermination de l'assiette dépourvue de base légale.

S'agissant du moyen tiré de l'inexacte application de la réserve d'interprétation formulée par la décision du Conseil constitutionnel n° 2016-538 QPC du 22 avril 2016 :

6. Compte tenu des dates, respectivement, de la réalisation le 17 avril 1999 de la plus-value en cause, et de la fin du report de son imposition le 14 décembre 2015, et en l'absence de mécanisme instauré par le législateur qui serait applicable aux plus-values en cause afin de prendre en compte la durée de détention des titres pour atténuer le montant de la plus-value assujetti à l'impôt sur le revenu, l'administration était tenue de faire application de la réserve d'interprétation telle que formulée par la décision n° 2016-538 QPC du 22 avril 2016 du Conseil constitutionnel.

7. En premier lieu, contrairement à ce que fait valoir l'administration fiscale, il ressort des termes mêmes de la réserve d'interprétation formulée par la décision n° 2016-538 QPC du 22 avril 2016 du Conseil constitutionnel, que le coefficient d'érosion monétaire qu'elle mentionne, observé pour chaque lot sur la période comprise entre la date d'acquisition des titres et celle de la réalisation de la plus-value, doit s'appliquer non pas au prix d'acquisition des titres mais au montant de la plus-value placée en report d'imposition.

8. En second lieu, M. et Mme C... soutiennent que le calcul du montant imposable résultant de l'application de la décision n° 2016-538 QPC du 22 avril 2016 du Conseil constitutionnel consisterait à multiplier la plus-value réalisée sur chaque lot par le coefficient d'érosion monétaire pertinent pour ce lot, puis à déduire de ce résultat la plus-value réalisée. Cependant, il résulte des motifs de la réserve d'interprétation formulée par la décision n° 2016-538 QPC du 22 avril 2016 du Conseil constitutionnel, qui vise à garantir le principe d'égalité devant les charges publiques compte tenu de l'absence d'application, aux plus-values placées en report d'imposition avant le 1er janvier 2013, de l'abattement pour durée de détention prévu par le 1 ter et le 1 quater A de l'article 150-0 D du code général des impôts ou d'un autre mécanisme de réduction tenant compte de la durée de détention des titres, que l'application d'un coefficient d'érosion monétaire qu'elle mentionne doit s'entendre de l'opération de la division de chaque plus-value imposable concernée par le coefficient d'érosion monétaire pertinent pour la période comprise entre la date de l'acquisition des titres dont la cession a généré une plus-value et celle de la réalisation de la plus-value.

S'agissant du montant de la plus-value assujetti à l'impôt sur le revenu:

9. En premier lieu, il résulte de l'instruction, en particulier des éléments produits par les requérants et qui ne sont pas contestés par l'administration fiscale, concernant, d'une part, le montant de la plus-value réalisée sur chaque lot de titres Monts Jura, soit respectivement les montants de 1 489, 48 514, 4 511, 6 809, 6 639, 14 767, 373 473, 7 192, 202 482, 665 876, 170 et 62 430 euros, et, d'autre part, le coefficient d'érosion monétaire constaté, pour chaque lot, sur la période comprise entre la date d'acquisition des titres et celle de la réalisation de la plus-value sur ces titres, soit respectivement les coefficients de 6,95, 5,196, 4,895, 4,482, 3,941, 3,562, 2,697, 2,435, 1,891, 1,281, 1,281 et 1,02, que le montant total de la plus-value, calculé selon la règle énoncée au point 8, s'établit à 847 520 euros.

10. En second lieu, il est constant que les époux C... avaient, avant la fin du report de l'imposition de la plus-value, fait donation à leurs enfants de 3 000 parts de la société Fireg à laquelle ils avaient apporté leurs titres Monts Jura en 1999. Il résulte ainsi de l'instruction, et n'est d'ailleurs pas contesté par l'administration fiscale, que la quote-part de la plus-value imposable entre leurs mains représente seulement 79,98 % du montant de la plus-value réalisée en 1999 devant être assujettie à l'impôt. Par suite, la base d'imposition de M. et Mme C... à l'impôt sur le revenu, au titre de la plus-value réalisée sur les titres de la société Monts Jura, doit être fixée à 677 846,48 euros.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... sont seulement fondés à demander que le montant assujetti à l'impôt de la plus-value réalisée sur les titres de la société Monts Jura soit ramené du montant effectivement imposé de 1 004 453 euros à celui de 677 846,48 euros, et qu'ils soient déchargés, en droits et intérêts, des cotisations d'impôt sur le revenu et de contribution exceptionnelle sur les revenus auxquelles ils ont été assujettis, au titre de l'année 2015, correspondant à cette réduction en base.

Sur les frais liés à l'instance :

12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. et Mme C... de la somme de 1 500 euros en application de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La base d'imposition de M. et Mme C... à l'impôt sur le revenu de l'année 2015, au titre de la plus-value réalisée sur les titres de la société Monts Jura, est ramenée à 677 846,48 euros.

Article 2 : M. et Mme C... sont déchargés, en droits et intérêts, des cotisations d'impôt sur le revenu et de contribution exceptionnelle sur les revenus auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2015, en conséquence de la réduction prononcée à l'article 1er.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Montreuil est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'État versera la somme de 1 500 euros à M. et Mme C... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme D... et B... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction des impôts des non-résidents.

Délibéré après l'audience du 26 janvier 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Vinot, présidente de chambre,

Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,

M. Perroy, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 mars 2023.

Le rapporteur,

G. A...La présidente,

H. VINOT

La greffière,

E. VERGNOL La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21PA03742 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA03742
Date de la décision : 17/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES - REVENUS ET BÉNÉFICES IMPOSABLES - RÈGLES PARTICULIÈRES - PLUS-VALUES DES PARTICULIERS - PLUS-VALUES MOBILIÈRES - REPORT D'IMPOSITION (II DE L'ART - 92 B DU CGI) - ABATTEMENTS POUR DURÉE DE DÉTENTION (ART - 150-0 D DU CGI - ISSU DE L'ART - 17 DE LA LOI DU 29 DÉCEMBRE 2013 DE FINANCES POUR 2014) - PLUS-VALUES PLACÉES EN REPORT D'IMPOSITION AVANT LE 1ER JANVIER 2013 [RJ1] - EVÈNEMENT METTANT FIN AU REPORT D'IMPOSITION ANTÉRIEUR À LA DATE D'APPLICATION DE LA LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE DU 29 DÉCEMBRE 2016 - 1) APPLICATION DE LA RÉSERVE D'INTERPRÉTATION FORMULÉE PAR LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL AU POINT 11 DE SA DÉCISION N°2016-538 QPC DU 22 AVRIL 2016 - EXISTENCE [RJ2] - 2) CALCUL DU MONTANT DE LA PLUS-VALUE ASSUJETTI À L'IMPÔT SUR LE REVENU [RJ3].

19-04-02-08-01 1) En ce qui concerne l'assiette de la plus-value réalisée le 17 avril 1999, les dispositions du I ter de l'article 160 du code général des impôts alors en vigueur disposent que l'imposition de la plus-value réalisée en cas d'échange de droits sociaux résultant d'une opération de fusion, scission ou d'apport de titres à une société soumise à l'impôt sur les sociétés peut être reportée dans les conditions prévues au II de l'article 92 B. Les dispositions du II de l'article 92 B de ce code, demeurées applicables aux plus-values en report d'imposition à la date du 1er janvier 2000 en vertu V de l'article 94 de la loi du 30 décembre 1999, prévoient que l'imposition de la plus-value réalisée en cas d'échange de titres peut être reportée au moment où s'opérera la cession, le remboursement ou l'annulation des titres reçus lors de l'échange, l'imposition de la plus-value étant reportée de plein droit lorsque les titres reçus en échange font l'objet d'une nouvelle opération d'échange dans les conditions prévues à l'article 150-0 B du code général des impôts. ......En ce qui concerne le montant de la plus-value assujetti à l'imposition, dont la fin du report est intervenue le 14 décembre 2015, les dispositions des articles 150-0 A et 200 A du code général des impôts alors en vigueur prévoient que les gains nets retirés d'une telle opération sont soumis à l'impôt sur le revenu selon le barème progressif. Ces dispositions ne prévoient aucun abattement en fonction de la durée de détention.......Toutefois, par sa décision n° 2016-538 QPC du 22 avril 2016, le Conseil constitutionnel a formulé la réserve d'interprétation suivante, s'agissant des 1 ter et 1 quater A de l'article 150-0 D du code général des impôts dans leur rédaction résultant de la loi du 29 décembre 2014, qui prévoient des abattements de la plus-value pour la durée de détention aux seuls gains réalisés à compter du 1er janvier 2013 : « 11. (…) il résulte de l'assujettissement des plus-values mobilières à l'impôt sur le revenu prévu par l'article 200 A du code général des impôts (…) qu'un taux marginal maximal d'imposition de 62,001 % s'applique à la plus-value réalisée avant le 1er janvier 2013 qui a été placée en report d'imposition et dont le report expire postérieurement à cette date (…) les valeurs mobilières qui ont donné lieu à la réalisation de cette plus-value, fait générateur de l'imposition, ont pu être détenues sur une longue durée avant cette réalisation (..) faute de tout mécanisme prenant en compte cette durée pour atténuer le montant assujetti à l'impôt sur le revenu, l'application du taux marginal maximal à cette plus-value méconnaîtrait les capacités contributives des contribuables (…) par suite, les dispositions contestées ne sauraient, sans méconnaître l'égalité devant les charges publiques, priver les plus-values placées en report d'imposition avant le 1er janvier 2013 qui ne font l'objet d'aucun abattement sur leur montant brut et dont le montant de l'imposition est arrêté selon des règles de taux telles que celles en vigueur à compter du 1er janvier 2013, de l'application à l'assiette ainsi déterminée d'un coefficient d'érosion monétaire pour la période comprise entre l'acquisition des titres et le fait générateur de l'imposition (…) sous cette réserve, le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant les charges publiques doit être écarté ». ......Compte tenu des dates, respectivement, de la réalisation le 17 avril 1999 de la plus-value en cause, et de la fin du report de son imposition le 14 décembre 2015, et en l'absence de mécanisme instauré par le législateur qui serait applicable aux plus-values en cause afin de prendre en compte la durée de détention des titres pour atténuer le montant de la plus-value assujetti à l'impôt sur le revenu, l'administration était tenue de faire application de la réserve d'interprétation telle que formulée par la décision n° 2016-538 QPC du 22 avril 2016 du Conseil constitutionnel. ......2) Il ressort des termes mêmes de la réserve d'interprétation formulée par la décision n° 2016-538 QPC du 22 avril 2016 du Conseil constitutionnel que le coefficient d'érosion monétaire qu'elle mentionne, observé pour chaque lot sur la période comprise entre la date d'acquisition des titres et celle de la réalisation de la plus-value, doit s'appliquer non au prix d'acquisition des titres mais au montant de la plus-value placée en report d'imposition.......Il résulte des motifs de cette réserve d'interprétation, qui vise à garantir le principe d'égalité devant les charges publiques compte tenu de l'absence d'application, aux plus-values placées en report d'imposition avant le 1er janvier 2013, de l'abattement pour durée de détention prévu par le 1 ter et le 1 quater A de l'article 150-0 D du code général des impôts ou d'un autre mécanisme de réduction tenant compte de la durée de détention des titres, que l'application d'un coefficient d'érosion monétaire qu'elle mentionne doit s'entendre de l'opération de la division de chaque plus-value imposable concernée par le coefficient d'érosion monétaire pertinent pour la période comprise entre la date de l'acquisition des titres dont la cession a généré une plus-value et celle de la réalisation de la plus-value.

POUVOIRS PUBLICS ET AUTORITÉS INDÉPENDANTES - CONSEIL CONSTITUTIONNEL - RÉSERVES D'INTERPRÉTATION ASSORTISSANT LA DÉCLARATION DE CONFORMITÉ À LA CONSTITUTION D'UNE DISPOSITION LÉGISLATIVE - AUTORITÉ ABSOLUE DE CHOSE JUGÉE - RÉSERVE D'INTERPRÉTATION FORMULÉE PAR LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL AU POINT 11 DE SA DÉCISION N° 2016-538 QPC DU 22 AVRIL 2016 CONCERNANT LES PLUS-VALUES PLACÉES EN REPORT D'IMPOSITION AVANT LE 1ER JANVIER 2013 - DONT LA FIN DU REPORT D'IMPOSITION EST ANTÉRIEURE À LA DATE D'APPLICATION DE LA LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE DU 29 DÉCEMBRE 2016 - 1) APPLICATION - EXISTENCE [RJ2] - 2) CALCUL DU MONTANT DE LA PLUS-VALUE ASSUJETTI À L'IMPÔT SUR LE REVENU [RJ3].

52-035 1) Compte tenu des dates, respectivement, de la réalisation le 17 avril 1999 de la plus-value en cause, et de la fin du report de son imposition le 14 décembre 2015, et en l'absence de mécanisme instauré par le législateur qui serait applicable aux plus-values en cause afin de prendre en compte la durée de détention des titres pour atténuer le montant de la plus-value assujetti à l'impôt sur le revenu, l'administration était tenue de faire application de la réserve d'interprétation telle que formulée par la décision n° 2016-538 QPC du 22 avril 2016 du Conseil constitutionnel. ......2) Il ressort des termes mêmes de la réserve d'interprétation formulée par la décision n° 2016-538 QPC du 22 avril 2016 du Conseil constitutionnel que le coefficient d'érosion monétaire qu'elle mentionne, observé pour chaque lot sur la période comprise entre la date d'acquisition des titres et celle de la réalisation de la plus-value, doit s'appliquer non au prix d'acquisition des titres mais au montant de la plus-value placée en report d'imposition.......Il résulte des motifs de cette réserve d'interprétation, qui vise à garantir le principe d'égalité devant les charges publiques compte tenu de l'absence d'application, aux plus-values placées en report d'imposition avant le 1er janvier 2013, de l'abattement pour durée de détention prévu par le 1 ter et le 1 quater A de l'article 150-0 D du code général des impôts ou d'un autre mécanisme de réduction tenant compte de la durée de détention des titres, que l'application d'un coefficient d'érosion monétaire qu'elle mentionne doit s'entendre de l'opération de la division, de chaque plus-value imposable concernée, par le coefficient d'érosion monétaire pertinent pour la période comprise entre la date de l'acquisition des titres dont la cession a généré une plus-value et celle de la réalisation de la plus-value.


Références :

[RJ1]

Rappr. CE, 31 mars 2021, Mme de Galbert Defforey, n° 441918, T. pp. 631-659-680-684....

[RJ2]

Rappr. CE, Assemblée, 11 mars 1994, S.A. « La Cinq », n° 115052, p. 118....

[RJ3]

Comp. CJUE, 18 septembre 2019, nos C-662/18 et C-672/18, lorsqu'est intervenue une opération d'échanges de titres relevant de la directive 2009/133/CE du Conseil, du 19 octobre 2009, et de la directive 90/434/CEE du Conseil, du 23 juillet 1990.


Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: M. Gilles PERROY
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : FIDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-03-17;21pa03742 ?
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