Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La Fédération française du transport de personnes sur réservation (FFTPR) a demandé au tribunal administratif de Paris :
1°) d'annuler l'arrêté du 7 mai 2020 n° 2020 T 11028 modifiant, à titre provisoire, les conditions de circulation rue de Rivoli et rue Saint-Antoine, à Paris 1er et 4ème ;
2°) d'annuler l'arrêté du 11 mai 2020 n° 2020 T 11098 modifiant, à titre provisoire, les conditions de circulation rue de Rivoli, à Paris 1er ;
3°) d'annuler l'arrêté du 13 mai 2020 n° 2020 T 11103 modifiant les conditions de circulation place du Carrousel, à Paris 1er ;
4°) d'annuler les arrêtés du 16 octobre 2020 n° 2020 T 12364 portant prorogation de l'arrêté n° 2020 T 11028 du 7 mai 2020 modifiant, à titre provisoire, les conditions de circulation rue de Rivoli et rue Saint-Antoine, à Paris 1er et 4ème et n° 2020 T 12366 portant prorogation de l'arrêté n° 2020 T 11098 du 11 mai 2020 modifiant, à titre provisoire, les conditions de circulation rue de Rivoli, entre la rue Saint-Denis et la place de la Concorde, à Paris 1er.
Par un jugement n° 2007688/3-3 du 13 juillet 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 15 septembre 2021 et
27 avril 2022, la FFTPR, représentée par Me Jourdan, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2007688/3-3 du 13 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif a rejeté ses demandes ;
2°) d'annuler l'arrêté du 7 mai 2020 n° 2020 T 11028 modifiant, à titre provisoire, les conditions de circulation rue de Rivoli et rue Saint-Antoine, à Paris 1er et Paris 4ème ;
3°) d'annuler l'arrêté du 11 mai 2020 n° 2020 T 11098 modifiant, à titre provisoire, les conditions de circulation rue de Rivoli, à Paris 1er ;
4°) d'annuler l'arrêté du 13 mai 2020 n° 2020 T 11103 modifiant les conditions de circulation place du Carrousel, à Paris 1er ;
5°) d'annuler l'arrêté du 9 juillet 2020 n° 2020 T 11924 modifiant, à titre provisoire, les conditions de circulation rue de Rivoli, à Paris 1er ;
6°) d'annuler l'arrêté du 16 octobre 2020 n° 2020 T 12364 portant prorogation de l'arrêté n° 2020 T 11028 du 7 mai 2020 modifiant, à titre provisoire, les conditions de circulation rue de Rivoli et rue Saint-Antoine, à Paris 1er et 4ème et l'arrêté du 16 octobre 2020 n° 2020 T 12366 portant prorogation de l'arrêté n° 2020 T 11098 du 11 mai 2020 modifiant, à titre provisoire, les conditions de circulation rue de Rivoli, entre la rue Saint-Denis et la place de la Concorde, à Paris 1er ;
7°) de condamner la Ville de Paris à verser à la requérante une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle dispose d'un intérêt pour agir, en tant qu'association, dans la mesure où son champ d'action est local dès lors que son siège social est situé à Paris et que ses membres fondateurs résident soit à Paris soit en Ile de France et, en tant que fédération professionnelle ; et que s'il devait être décidé que son champ d'action est national, les arrêtés contestés ont en tout état de cause, par leur nature et leur objet, des conséquences excédant les seules circonstances locales ;
- l'arrêté du 9 juillet 2020 n° 2020 T 11924 n'a pas été précédé de la saisine du préfet en méconnaissance des dispositions de l'article L. 2512-14 du code général des collectivités territoriales ;
- l'arrêté du 9 juillet 2020 n° 2020 T 11924 aurait dû être précédé d'une étude d'impact en application des dispositions de l'article L. 122-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable ;
- les arrêtés contestés ont été pris par une autorité incompétente au regard de l'article L. 2213-1 du code général des collectivités territoriales dans la mesure où il n'a pas été fait état de raison impérieuse liée à des circonstances locales ;
- les arrêtés contestés sont dépourvus de base légale puisqu'ils sont fondés sur le décret n° 2020-293 du 23 mars 2020 lui-même abrogé par le décret n° 2020-545 du 11 mai 2020 ;
- les arrêtés contestés, par les mesures qu'ils fixent, portent atteinte, sans nécessité et de manière disproportionnée, à la liberté du commerce et de l'industrie et à la liberté de circuler.
Par un mémoire en défense enregistré le 2 mars 2022, la Ville de Paris, représentée par
Me Foussard, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la FFTPR au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la FFTPR est dépourvue d'intérêt à agir ;
- les conclusions tendant à l'annulation des arrêtés du 9 juillet 2020 n° 2020 T 11924 et du 16 octobre 2020 n° 2020 T 12364 et n° 2020 T 12366 sont tardives ;
- en tout état de cause, les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés.
Un mémoire a été enregistré le 2 février 2023 pour la Ville de Paris.
Une note en délibéré a été enregistré le 13 février 2023 pour la FFTPR.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme d'Argenlieu,
- les conclusions de Mme Jayer, rapporteure publique,
- et les observations de Me Jourdan, pour la Fédération française du transport de personnes sur réservation et de Me Froger pour la Ville de Paris.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 7 mai 2020 n° 2020 T 11028, la maire de Paris a soumis à restrictions la circulation automobile sur les rues Saint-Antoine et Rivoli du 11 mai au 23 juillet 2020. Les articles 3 et 4 de l'arrêté réservent la circulation sur la rue Saint-Antoine, entre la rue Jacques Cœur et la rue Sévigné, et sur le côté pair de la rue de Rivoli, entre la rue de Sévigné et la rue des Archives d'une part, et entre la rue de la Coutellerie et la rue Saint-Denis d'autre part, à certains véhicules listés à l'article 5 de cet arrêté, dont notamment les véhicules de transport collectif, les véhicules d'intérêt général, les véhicules de service public dans l'exercice de leur mission, les véhicules des commerçants et artisans pour les déplacements professionnels et les taxis. La voie centrale de la rue de Rivoli et le côté impair de la rue Saint-Antoine sont en outre réservés aux cycles par les articles 2 et 4 de l'arrêté. Par un arrêté du 11 mai 2020 n° 2020 T 11098, la même restriction a été appliquée, du 11 mai au 23 juillet 2020, à la portion de la rue de Rivoli comprise entre la rue Saint-Denis et la place de la Concorde, seuls les véhicules précités étant autorisés à circuler du côté pair de la voie. L'arrêté du 13 mai 2020 n° 2020 T 11103, publié le 15 mai suivant, a réservé, à titre provisoire jusqu'au 23 juillet 2020, la circulation sur la place du Carrousel aux véhicules de transports en commun, aux taxis et aux cycles, depuis la rue de Rivoli vers le quai François Mitterrand, sur les deux files de circulation au droit du jardin des Tuileries. Par deux arrêtés du 9 juillet 2020 n° 2020 T 12364 et n° 2020 T 11924, la maire de Paris a modifié les arrêtés n° 2020 T 11028 du 7 mai 2020 et n° 2020 T 1198 du 11 mai 2020 en les prorogeant " jusqu'à la dépose de la signalisation ". Enfin, par deux arrêtés du 16 octobre 2020 n° 2020 T 12364 et n° 2020 T 12366, la maire de Paris a une nouvelle fois prorogé les dispositions des arrêtés des 7 et 11 mai 2020 " jusqu'à la dépose de la signalisation ". La Fédération française du transport de personnes sur réservation (FFTPR) fait appel du jugement du 13 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des arrêtés des 7 mai, 11 mai, 13 mai et 16 octobre 2020.
Sur la régularité du jugement :
2. En premier lieu, il appartient en l'absence de précisions sur le champ d'intervention d'une association dans les stipulations de ses statuts définissant son objet, d'apprécier son intérêt à agir contre les décisions qu'elle attaque au regard de son champ d'intervention, en prenant en compte les indications fournies sur ce point par les autres stipulations des statuts, notamment par le titre de l'association et les conditions d'adhésion, éclairées, le cas échéant, par d'autres pièces du dossier. En l'espèce, l'article II des statuts de la FFTPR, relatif à son objet, ne comporte aucune mention concernant son champ territorial d'intervention. Toutefois, outre la dénomination de l'association, il ressort de ses statuts que son champ matériel d'intervention, qui s'apparente à celui d'une fédération professionnelle, consiste principalement à " fédérer les entreprises proposant des services de transport sur réservation ", " à promouvoir le développement (...), à optimiser et favoriser l'exercice de leur activité ", à les " représenter (...) auprès des partenaires institutionnels et publics ", " à développer des labels et standards de qualité " visant ainsi nécessairement l'ensemble des véhicules de transports sur réservation évoluant en France. Du reste, les conditions d'obtention de la qualité de membre de l'association ne comportent aucun critère géographique. Par suite, compte tenu de ces éléments, la FFTPR doit être regardée comme ayant un ressort national, la circonstance que son siège social soit situé à Paris et que ses membres fondateurs soient tous domiciliés en Ile-de-France étant sans incidence.
3. En second lieu, si, en principe, le fait qu'une décision administrative ait un champ d'application territorial fait obstacle à ce qu'une association ayant un ressort national justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour en demander l'annulation, il peut en aller autrement lorsque la décision soulève, en raison de ses implications, notamment dans le domaine des libertés publiques, des questions qui, par leur nature et leur objet, excèdent les seules circonstances locales. En l'espèce, les arrêtés litigieux ont pour objet de réserver, en raison de la situation de crise sanitaire résultant de l'épidémie de Covid-19, du déconfinement progressif mis en œuvre à compter du
11 mai 2020 et de la nécessité qui en résulte de contenir la circulation automobile, l'accès aux rues Saint-Antoine et Rivoli depuis la place de la Bastille jusqu'à la place de la Concorde à certains véhicules, parmi lesquels ne figurent pas les véhicules de transports sur réservation. Ils visent ainsi une zone de circulation limitée au centre de Paris et affectent exclusivement les véhicules de transports sur réservation se déplaçant dans l'agglomération parisienne. En outre, les arrêtés contestés ont été édictés sur le fondement des dispositions de l'article L. 2512-14 du code général des collectivités territoriales et du décret n° 2017-1175 du 18 juillet 2017 spécifiques à la Ville de Paris. Par suite, les arrêtés litigieux ne soulèvent pas, en raison de leur portée, des questions excédant leur seul objet local. Dans ces conditions, la FFTPR, nonobstant la nature des intérêts qu'elle défend, ne dispose pas en l'espèce d'un intérêt à en solliciter l'annulation et n'est dès lors pas fondée à soutenir que le jugement du tribunal administratif de Paris, dont elle fait appel, est irrégulier en tant qu'il a rejeté sa demande pour irrecevabilité.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
4. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la Ville de Paris, qui n'est pas dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la FFTPR demande au titre des frais de l'instance. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la FFTPR le versement à la Ville de Paris de la somme de 2 000 euros sur le fondement de ces mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la FFTPR est rejetée.
Article 2 : La FFTPR versera à la Ville de Paris la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions présentées par la FFTPR sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la Fédération française du transport de personnes sur réservation et à la Ville de Paris.
Délibéré après l'audience du 10 février 2023, à laquelle siégeaient :
- Mme Briançon, présidente,
- Mme d'Argenlieu, première conseillère,
- Mme Saint-Macary, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 mars 2023.
La rapporteure,
L. d'ARGENLIEULa présidente,
C. BRIANÇONLa rapporteure,
Le président,
La greffière,
A. GASPARYAN
La greffière,
La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA05119