Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 31 août 2021 par lequel le préfet de police lui a refusé le renouvellement d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement et a assorti ces décisions d'une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans.
Par jugement n° 2120628 -1/1 du 24 janvier 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 24 février 2022, M. C..., représenté par Me Macarez, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°2120628 -1/1 du 24 janvier 2022 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du 31 août 2021 par lequel le préfet de police lui a refusé le renouvellement d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement et a assorti ces décisions d'une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou de réexaminer sa demande au regard de sa situation administrative dans un délai d'un mois à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- s'agissant du refus de renouvellement de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français, le préfet a commis une erreur de fait et une erreur manifeste d'appréciation en raison du caractère disproportionné de la menace à l'ordre public retenue ;
- les décisions méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elles méconnaissent les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- elles sont entachés d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;
- le refus de renouvellement de titre de séjour est entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- l'interdiction de retour sur le territoire pendant deux ans est disproportionnée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 mai 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant philippin né le 21 février 1977, est entré en France le 21 mai 2010 selon ses déclarations. Par arrêté du 31 août 2021, le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement. Par jugement n°2120628 -1/1 du 24 janvier 2022, dont M. C... relève appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
2. Si M. C... soutient que l'interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans est disproportionnée, ce moyen ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté dès lors que cette décision est inexistante comme l'ont relevé à bon droit les premiers juges.
En ce qui concerne l'arrêté portant refus de renouvellement de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français :
3. En premier lieu, M. C... fait valoir que si le préfet de police estimait qu'il n'entrait plus dans les conditions d'octroi d'un titre de séjour sur le fondement de la vie privée et familiale, il aurait dû lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " et qu'ainsi, la décision de refus de renouveler son titre de séjour est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ait sollicité la délivrance d'un titre de séjour de cette nature. En tout état de cause, le préfet de police n'avait pas à examiner d'office si l'intéressé remplissait les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour sur un autre fondement que celui qu'il avait demandé. Par suite, le moyen ne peut qu'être écarté.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 412-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable : " La circonstance que la présence d'un étranger en France constitue une menace pour l'ordre public fait obstacle à la délivrance et au renouvellement de la carte de séjour temporaire, de la carte de séjour pluriannuelle et de l'autorisation provisoire de séjour prévue aux articles L. 425-4 ou L. 425-10 ainsi qu'à la délivrance de la carte de résident et de la carte de résident portant la mention " résident de longue durée-UE " (...) ". L'article L. 423-23 du même code dispose que : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".
5. M. C... soutient que le préfet a commis une erreur de fait et une erreur manifeste d'appréciation en raison du caractère disproportionné de la menace à l'ordre public retenue. Il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il a été condamné le 16 mai 2019 par la 24ème chambre du Tribunal correctionnel de Paris à 4 mois d'emprisonnement avec sursis pour des faits de violence sans incapacité commis le 14 janvier 2019 sur sa compagne, mère de ses deux enfants. Par ailleurs, si cette condamnation est la seule prononcée à son encontre suite au maintien des poursuites par le procureur de la République, il ressort des termes du procès-verbal de retrait de plainte du 5 février 2019 que les violences conjugales ne se sont pas limitées à celles commises le 14 janvier 2019. Par suite, en retenant que M. C... constituait une menace à l'ordre public et que cette circonstance faisait obstacle au renouvellement de son titre de séjour, le préfet de police n'a entaché ni d'une erreur de fait ni d'une erreur manifeste d'appréciation ses décisions portant refus de renouvellement de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.
6. En troisième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. M. C... déclare être entré en France le 21 mai 2010 et résider avec une compatriote en situation régulière, mère de leurs deux enfants, nés les 2 novembre 2014 et 4 septembre 2017. Toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 5, M. C... a été condamné pour des faits de violences commises sur la mère de ses enfants. Par ailleurs, s'il soutient contribuer à l'entretien et à l'éducation de ses enfants, les pièces produites, postérieures à la date de l'arrêté attaqué, ne permettent pas d'établir, à la date du 31 août 2021, la réalité d'une telle contribution. Par ailleurs, il se prévaut de son insertion professionnelle en produisant les bulletins de salaire en qualité d'homme d'entretien au sein de la société Paloan au titre des années 2018, 2019 et 2020 pour des durées de travail mensuelles limitées, un contrat à durée déterminée conclu avec la société Monoprix Exploitation en qualité d'employé du 22 juin 2020 au 26 juillet 2020, un contrat à durée indéterminée à temps partiel pour un emploi d'agent de service à compter du 8 juin 2021 conclu avec la société Osaee Services le même jour et un contrat à durée déterminée à temps partiel conclu avec la société Essi Opale le 5 juillet 2021 jusqu'au 9 juillet 2021, puis du 12 au 23 juillet 2021 et une attestation d'un employeur particulier. Ces activités professionnelles limitées ne permettent pas d'établir l'insertion professionnelle durable du requérant en France. Enfin, il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales aux Philippines, pays dans lequel il a vécu jusqu'à l'âge de 33 ans et où réside sa mère. Dans ces conditions, les décisions portant refus de renouvellement de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ne peuvent, dans les circonstances de l'espèce, être regardées comme ayant porté au droit de M. C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels ces décisions ont été prises. Les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont ainsi pas été méconnues par ces décisions. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de ce que ces décisions seraient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle doit être écarté.
8. En dernier lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
9. Dans les circonstances de l'espèce, compte tenu de la menace à l'ordre public que représente M. C..., du jeune âge des enfants et de l'absence d'éléments établissant qu'à la date de l'arrêté attaqué il contribuait effectivement à l'entretien et à l'éducation de ces derniers, les décisions portant refus de renouvellement de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français n'ont pas été prises en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 août 2021 du préfet de police. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 9 janvier 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Le Goff, président,
- M. Ho Si Fat, président assesseur,
- Mme Collet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 janvier 2023.
La rapporteure,
A. A... Le président,
R. LE GOFF
Le greffier,
P. TISSERAND
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22PA00873