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24/01/2023 | FRANCE | N°21PA03858

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 24 janvier 2023, 21PA03858


Vu la procédure suivante :

Par une requête et deux mémoires enregistrés les 9 juillet 2021, 18 octobre 2021 et 7 janvier 2022, la société Sud A..., représentée par Me Cerf, demande à la cour :

1°) d'annuler la décision du 26 mai 2021 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a rejeté sa candidature pour l'exploitation d'un service de A... dans le ressort du comité territorial de l'audiovisuel de Lyon, dans la zone de Grenoble ;

2°) d'annuler la décision du CSA n° 2021-635 du 26 mai 2021, autorisant l'association Oxygène Vercors à exploiter

dans la zone de Grenoble un service de A... de catégorie A par voie hertzienne terr...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et deux mémoires enregistrés les 9 juillet 2021, 18 octobre 2021 et 7 janvier 2022, la société Sud A..., représentée par Me Cerf, demande à la cour :

1°) d'annuler la décision du 26 mai 2021 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a rejeté sa candidature pour l'exploitation d'un service de A... dans le ressort du comité territorial de l'audiovisuel de Lyon, dans la zone de Grenoble ;

2°) d'annuler la décision du CSA n° 2021-635 du 26 mai 2021, autorisant l'association Oxygène Vercors à exploiter dans la zone de Grenoble un service de A... de catégorie A par voie hertzienne terrestre en modulation de fréquence dénommé Oxygène Grenoble ;

3°) d'enjoindre à l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, au besoin sous astreinte, de lui attribuer une fréquence dans la zone de Grenoble ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa candidature pour l'attribution d'une fréquence dans cette zone ;

4°) de mettre à la charge de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- il n'est pas établi que le CSA était régulièrement composé lorsqu'il a adopté la décision attaquée ;

- les dispositions de l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986 ont été méconnues, les décisions attaquées étant entachées d'erreur d'appréciation au regard du principe de sauvegarde du pluralisme des courants d'expression socio-culturels ; son service propose ainsi une ligne éditoriale originale, notamment en ce qu'elle est orientée vers l'actualité rugbystique et les cultures du sud de la France, et est donc susceptible de répondre de manière plus pertinente à l'intérêt du public de la zone de Grenoble que les services retenus ; les radios déjà autorisées dans la zone ne proposent pas une offre comparable à la sienne ; le CSA a également commis une erreur d'appréciation en délivrant une autorisation à BFM Business, qui se borne à retransmettre à la A... les programmes de la chaîne de télévision BFM Business et qui n'assure pas la mission alléguée d'intermédiation entre les entreprises et les demandeurs d'emploi ;

- seules trois radios étaient déjà autorisées en catégorie E dans la zone de Grenoble, contre quatorze radios présentant des analogies certaines en catégorie C et D ;

- le service Oxygène Grenoble ne propose pas une offre sportive comparable à la sienne dès lors que sa programmation est consacrée aux sports de montagne et non au rugby.

Par deux mémoires en défense enregistrés les 9 août 2021 et 20 décembre 2021, le CSA conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

La clôture de l'instruction a été fixée au 23 mai 2022.

Vu :

- la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de Mme Pena, rapporteure publique,

- et les observations de Me Aubert, représentant la société Sud A....

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 26 juin 2019, publiée au Journal officiel de la République française le 6 juillet 2019, le CSA a lancé un appel aux candidatures pour l'exploitation de services de A... par voie hertzienne terrestre en modulation de fréquence à temps complet dans le ressort du comité territorial de l'audiovisuel de Lyon, notamment pour la zone de Grenoble. Par une décision du 26 mai 2021, notifiée à la société Sud A... par courrier du 22 juin 2021, le CSA a rejeté la candidature présentée par l'intéressée pour cette zone. Par une décision du même jour, publiée au Journal officiel de la République française le 15 juin 2021, il a autorisé l'association Oxygène Vercors à exploiter dans la zone de Grenoble un service de A... de catégorie A par voie hertzienne terrestre en modulation de fréquence dénommé Oxygène Grenoble. La société Sud A... demande à la cour d'annuler ces deux décisions.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. D'une part, aux termes de l'article 4 de la loi du 30 septembre 1986 dans sa version applicable à l'espèce : " (...) Le Conseil supérieur de l'audiovisuel ne peut délibérer que si quatre au moins de ses membres sont présents. Il délibère à la majorité des membres présents. Le président à voix prépondérante en cas de partage égal des voix. ".

3. Il ressort du procès-verbal de la séance du 26 mai 2021 que le CSA a délibéré en présence de six de ses membres régulièrement nommés, dont son président. Le moyen tiré de l'irrégularité de la composition du CSA lors de l'adoption des décisions attaquées manque donc en fait et doit être écarté.

4. D'autre part, aux termes de l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, dans sa rédaction applicable à la date des décisions attaquées : " Sous réserve des dispositions de l'article 26 de la présente loi, l'usage des fréquences pour la diffusion de services de A... par voie hertzienne terrestre est autorisé par le Conseil supérieur de l'audiovisuel dans les conditions prévues au présent article. / Pour les zones géographiques et les catégories de services qu'il a préalablement déterminées, le conseil publie une liste de fréquences disponibles ainsi qu'un appel à candidatures. (...) / Le conseil accorde les autorisations en appréciant l'intérêt de chaque projet pour le public, au regard des impératifs prioritaires que sont la sauvegarde du pluralisme des courants d'expression socio-culturels, la diversification des opérateurs, et la nécessité d'éviter les abus de position dominante ainsi que les pratiques entravant le libre exercice de la concurrence. / Il tient également compte : / 1° De l'expérience acquise par le candidat dans les activités de communication ; / 2° Du financement et des perspectives d'exploitation du service notamment en fonction des possibilités de partage des ressources publicitaires entre les entreprises de presse écrite et les services de communication audiovisuelle ; / 3° Des participations, directes ou indirectes, détenues par le candidat dans le capital d'une ou plusieurs régies publicitaires ou dans le capital d'une ou plusieurs entreprises éditrices de publications de presse ; / 4° Pour les services dont les programmes comportent des émissions d'information politique et générale, des dispositions envisagées en vue de garantir le caractère pluraliste de l'expression des courants de pensée et d'opinion, l'honnêteté de l'information et son indépendance à l'égard des intérêts économiques des actionnaires, en particulier lorsque ceux-ci sont titulaires de marchés publics ou de délégations de service public ; / 5° De la contribution à la production de programmes réalisés localement ; / 6° Pour les services dont les programmes musicaux constituent une proportion importante de la programmation, des dispositions envisagées en faveur de la diversité musicale au regard, notamment, de la variété des œuvres, des interprètes, des nouveaux talents programmés et de leurs conditions de programmation ; / 7° S'il s'agit de la délivrance d'une nouvelle autorisation après que l'autorisation précédente est arrivée à son terme, du respect des principes mentionnés au troisième alinéa de l'article 3-1. / Le Conseil supérieur de l'audiovisuel veille, sur l'ensemble du territoire, à ce qu'une part suffisante des ressources en fréquences soit attribuée aux services édités par une association et accomplissant une mission de communication sociale de proximité, entendue comme le fait de favoriser les échanges entre les groupes sociaux et culturels, l'expression des différents courants socioculturels, le soutien au développement local, la protection de l'environnement ou la lutte contre l'exclusion. / Le conseil veille également au juste équilibre entre les réseaux nationaux de radiodiffusion, d'une part, et les services locaux, régionaux et thématiques indépendants, d'autre part. / Il s'assure que le public bénéficie de services dont les programmes contribuent à l'information politique et générale. (...) ".

5. Dans la zone de Grenoble, où étaient autorisés les services Campus Grenoble, IFM, New's FM, Phare FM Grenoble, A... 100 Kol, Hachalom, A... Fontaine, A... Grésivaudan, A... Kaléidoscope, A... Passion et RCF Isère en catégorie A, Alpes 1 Rhône, Alpes, Hot A..., Max FM et A... Isa en catégorie B, Chérie FM, Nostalgie, NRJ, Virage A... et Virgin A... en catégorie C, Beur FM, Fun A..., M A..., A... Classique, RFM, Rire et Chansons, RTL2 et Skyrock en catégorie D, Europe 1, RMC et RTL en catégorie E, ainsi que les radios de service public France Bleu Isère, France Culture, France Info, France Inter, Mouv' et France Musique, et où deux fréquences étaient disponibles, le CSA a retenu la candidature de A... Oxygène Grenoble et de BFM Business. Il a écarté la candidature de la société requérante au titre de la catégorie E aux motifs que le public de la zone bénéficiant déjà, avec Europe 1, RTL, RMC, France Inter, France Info et, dans une moindre mesure, France Culture, A... Classique et France Bleu Isère, de plusieurs services contribuant à l'information politique et générale, Sud A... contribuerait dans une moindre mesure à la sauvegarde du pluralisme des courants d'expression socioculturels et répondrait dans une moindre mesure à l'intérêt du public de la zone que A... Oxygène Grenoble, retenue en catégorie A, et BFM Business, retenue en catégorie D. Il a en outre relevé que le service A... Oxygène Grenoble permettait de traiter l'actualité locale en consacrant notamment une partie de sa programmation à la montagne, la zone de Grenoble étant située aux portes des Alpes et connaissant de nombreuses communications avec les stations d'altitude. Le CSA a, au surplus, relevé que le service BFM Business était déjà présent dans la zone de Grenoble depuis 2004 et que sa disparition serait de nature à mécontenter l'auditoire. Si la société requérante soutient que son service, favorisant notamment l'actualité rugbystique et les cultures du sud de la France, la rendait plus pertinente dans la zone concernée, il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu des particularités de cette zone et des services retenus au regard des services déjà autorisés, qui proposent de l'information générale et de l'actualité sportive, le CSA aurait entaché les motifs sus rappelés d'erreur d'appréciation. Les services retenus présentent ainsi des projets non encore représentés dans la zone et susceptibles de répondre à l'intérêt du public. À cet égard, la dimension économique de la ville de Grenoble justifie l'intérêt pour le public de la zone d'une A... telle que BFM Business, alors même que ce service n'assurerait pas la mission alléguée d'intermédiation entre les entreprises et les demandeurs d'emploi. Par ailleurs, la retransmission par voie hertzienne des programmes du service de télévision BFM Business est sans incidence sur la légalité de la décision du CSA, dont l'appréciation n'avait pas à tenir compte des services déjà présents dans la zone en matière de télévision. Enfin, si le nombre de radios autorisées en catégorie A, au terme de l'appel, est important, il n'en résulte pas un déséquilibre entre réseaux locaux ou régionaux et réseaux à vocation nationale.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la société Sud A... n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du 26 mai 2021 par laquelle le CSA a rejeté sa candidature pour l'exploitation d'un service de A... dans le ressort du comité territorial de l'audiovisuel de Lyon, dans la zone de Grenoble, ni de la décision du 26 mai 2021 par laquelle le CSA a autorisé le service de A... A... Oxygène Grenoble à émettre par voie hertzienne sur la zone de Grenoble. Les conclusions à fin d'annulation de la requérante doivent donc être rejetées ainsi, par voie de conséquence, que ses conclusions à fin d'injonction.

Sur les frais liés aux litiges :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme au titre des frais exposés par la société Sud A... et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société Sud A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Sud A..., à l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, et à l'association Oxygène Vercors.

Délibéré après l'audience du 3 janvier 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- Mme Marianne Julliard, présidente-assesseure,

- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 janvier 2023.

La rapporteure,

G. B...Le président,

I. LUBENLa greffière,

A. DUCHER

La République mande et ordonne à la ministre de la culture, en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA03858


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA03858
Date de la décision : 24/01/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Gaëlle MORNET
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : AXIOME AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 29/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-01-24;21pa03858 ?
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