Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 28 juillet 2021 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2116767/1-1 du 20 octobre 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 5 janvier et 6 mai 2022, M. C... B..., représenté par Me Nombret, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2116767/1-1 du 20 octobre 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 28 juillet 2021;
3°) d'enjoindre au préfet territorialement compétent de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir et sous astreinte de 80 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans les mêmes conditions de délai et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté est insuffisamment motivé ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen complet de sa situation ;
- il méconnait les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 mai 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 8 décembre 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme d'Argenlieu, rapporteure.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... B..., ressortissant malien né le 7 septembre 2002, est entré en France en juillet 2018, selon ses déclarations. Il a fait l'objet d'une interpellation sur la voie publique le 27 juillet 2021. Par un arrêté du 28 juillet 2021, le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. C... B... relève appel du jugement du 20 octobre 2021 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Il ressort des pièces du dossier que M. C... B... est entré en France, alors qu'il était encore mineur, pour retrouver son père M. E..., qui dispose d'une carte de résident, avec lequel il vit. Il n'est, par ailleurs, pas contesté que M. C... B... est en lien avec un de ses oncles de nationalité française, qui réside à Paris. Il ressort également des pièces du dossier qu'à son arrivée en France, M. C... B... a entamé avec succès un cursus scolaire en intégrant une classe UP2A de 2018 à 2020, puis le lycée hôtelier " Guillaume Tirel " en vue de préparer un certificat d'aptitude professionnelle (CAP) pour l'année 2020/2021. Durant cette année scolaire, il a, en outre, obtenu son certificat de formation générale, diplôme français de niveau 3 qui certifie l'acquisition de connaissances de base et des capacités d'insertion sociale et professionnelle, ainsi que son diplôme d'études en langue française DELF B1. Il est passé en seconde année de CAP à la rentrée 2021/2022. D'ailleurs, en avril 2022, sa professeure principale atteste que M. C... B... est : " un élève méritant et assidu qui fournit un travail sérieux et des efforts constants. Pendant ses périodes de stage en entreprise, il démontré ses compétences professionnelles (...). Ses très bons résultats scolaires, son sérieux et les évaluations très positives de ses maîtres de stage l'incitent à poursuivre en apprentissage à la rentrée prochaine. A l'issue de ce deuxième trimestre en deuxième année de CAP cuisine, il a obtenu les félicitations et ses moyennes dans toutes les matières sont satisfaisantes (...) ". Enfin, M. C... B... établit travailler en apprentissage au sein de la société Elior, depuis le 1er septembre 2021 et jusqu'au 31 août 2023, à raison de 35 heures par semaine. Par conséquent, dans les circonstances particulières de l'espèce, compte tenu du parcours de l'intéressé, de son implication dans la poursuite de son projet professionnel, laquelle implication témoigne, nonobstant son jeune âge, d'une forte volonté d'intégration et eu égard à la présence régulière en France de son père avec lequel il réside, le requérant est fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
3. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. C... B... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris, par le jugement dont il est fait appel, a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police en date du 28 juillet 2021.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
4. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ".
5. Eu égard au motif d'annulation retenu au point 2, l'exécution du présent arrêt implique que soit délivré à M. C... B... un titre de séjour mention " vie privée et familiale ". Il y a lieu, par suite, en application des dispositions précitées de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet de police de délivrer le titre de séjour sollicité par l'intéressé dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, en revanche, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
6. M. C... B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Nombret renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2116767/1 du tribunal administratif de Paris du 20 octobre 2021 et l'arrêté du préfet de police du 28 juillet 2021 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M. C... B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Me Nombret la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5: Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 18 novembre 2022, à laquelle siégeaient :
- Mme Heers, présidente de chambre,
- M. Mantz, premier conseiller,
- Mme d'Argenlieu, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 décembre 2022.
La rapporteure,
L. D'ARGENLIEU
La présidente,
M. A...
La greffière,
O. BADOUX-GRARE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 22PA00044 2