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06/12/2022 | FRANCE | N°22PA01513

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 06 décembre 2022, 22PA01513


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... et la société Securise ont demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la délibération du 5 septembre 2019 par laquelle la Commission nationale d'agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) a rejeté son recours administratif préalable obligatoire formé le 23 juillet 2019 à l'encontre de la décision du 1er juillet 2019 par laquelle la commission locale d'agrément et de contrôle Île-de-France Ouest a refusé de renouveler son agrément

en qualité de dirigeant d'une société de sécurité privée.

Par un jugement n° 1908...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... et la société Securise ont demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la délibération du 5 septembre 2019 par laquelle la Commission nationale d'agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) a rejeté son recours administratif préalable obligatoire formé le 23 juillet 2019 à l'encontre de la décision du 1er juillet 2019 par laquelle la commission locale d'agrément et de contrôle Île-de-France Ouest a refusé de renouveler son agrément en qualité de dirigeant d'une société de sécurité privée.

Par un jugement n° 1908979 du 1er février 2022, le tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 avril 2022, M. C..., représenté par Me Maamouri, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Melun du 1er février 2022 ;

2°) d'annuler la délibération du 5 septembre 2019 de la commission nationale d'agrément et de contrôle du CNAPS ;

3°) d'enjoindre au CNAPS de lui délivrer l'agrément sollicité dans le délai de cinq jours ;

4°) de mettre à la charge du CNAPS la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité dès lors qu'il n'est pas établi que sa minute a été signée ;

- la décision attaquée a été prise au terme d'une procédure irrégulière dès lors que le principe du contradictoire, énoncé aux articles L. 121-1 et L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration, a été méconnu ; les éléments retenus à son encontre ne lui ont pas été communiqués ;

- cette décision est entachée d'erreur de droit dès lors que la charge de la preuve des faits reprochés ne repose pas sur lui ; il appartient au CNAPS d'établir la matérialité des faits qu'elle lui impute ;

- les procès-verbaux de police ne peuvent prouver les faits reprochés mais constituent de simples renseignements, en application des dispositions de l'article 430 du code de procédure pénale ; les faits sur lesquels est fondé le refus de renouvellement de son agrément sont matériellement inexacts ; le courrier pris en compte par le CNAPS est un résumé erroné de ses déclarations ;

- la décision contestée est entachée d'erreur d'appréciation.

Par un mémoire enregistré le 25 août 2022, le CNAPS, représenté par Me Cano, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 500 euros soit mise à la charge de M. C... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité intérieure,

- le code des relations entre le public et l'administration,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de Mme Pena, rapporteure publique,

- les observations de Me Maamouri, représentant M. C..., et les observations de Me Coquillon, représentant le CNAPS.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... dirige depuis 2017 une société de sécurité privée. Par un courrier du 12 octobre 2018, il a demandé le renouvellement de son agrément en qualité de dirigeant auprès de la commission locale d'agrément et de contrôle (CLAC) Île-de-France Ouest, en application des dispositions de l'article L. 612-6 du code de la sécurité intérieure. Par une décision du 1er juillet 2019, sa demande a été rejetée. Par un courrier du 18 juillet 2019, M. C... a formé un recours administratif préalable obligatoire devant la Commission nationale d'agrément et de contrôle (CNAC) du Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS). Par une délibération prise lors de sa séance du 5 septembre 2019, cette dernière a rejeté la demande de renouvellement d'agrément. M. C... demande à la cour d'annuler le jugement du 1er février 2022 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 5 septembre 2019.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de la sécurité intérieure : " Sont soumises aux dispositions du présent titre, dès lors qu'elles ne sont pas exercées par un service public administratif, les activités qui consistent : / 1° A fournir des services ayant pour objet la surveillance humaine ou la surveillance par des systèmes électroniques de sécurité ou le gardiennage de biens meubles ou immeubles ainsi que la sécurité des personnes se trouvant dans ces immeubles ou dans les véhicules de transport public de personnes ; / 1° bis A faire assurer par des agents armés l'activité mentionnée au 1°, lorsque celle-ci est exercée dans des circonstances exposant ces agents ou les personnes se trouvant dans les lieux surveillés à un risque exceptionnel d'atteinte à leur vie ; / 2° A transporter et à surveiller, jusqu'à leur livraison effective, des bijoux représentant une valeur d'au moins 100 000 euros, des fonds, sauf, pour les employés de La Poste ou des établissements de crédit habilités par leur employeur, lorsque leur montant est inférieur à 5 335 euros, ou des métaux précieux ainsi qu'à assurer le traitement des fonds transportés ; / 3° A protéger l'intégrité physique des personnes ; / 4° A la demande et pour le compte d'un armateur, à protéger, contre des menaces d'actes définis aux articles 224-6 à 224-8 du code pénal ou d'actes de terrorisme définis au titre II du livre IV du même code, des navires battant pavillon français, en application de l'article L. 5441-1 du code des transports. ". Aux termes de l'article L. 612-6 du code de la sécurité intérieure : " Nul ne peut exercer à titre individuel une activité mentionnée à l'article L. 611-1, ni diriger, gérer ou être l'associé d'une personne morale exerçant cette activité, s'il n'est titulaire d'un agrément délivré selon des modalités définies par décret en Conseil d'Etat. ". Et aux termes de l'article L. 612-7 du code de la sécurité intérieure, dans sa version alors applicable : " L'agrément prévu à l'article L. 612-6 est délivré aux personnes qui satisfont aux conditions suivantes : / 1° Etre de nationalité française ou ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne ou d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ; / 2° Ne pas avoir fait l'objet d'une condamnation à une peine correctionnelle ou à une peine criminelle inscrite au bulletin n° 2 du casier judiciaire ou, pour les ressortissants étrangers, dans un document équivalent, pour des motifs incompatibles avec l'exercice des fonctions ; / 3° Ne pas avoir fait l'objet d'un arrêté d'expulsion non abrogé ou d'une interdiction du territoire français non entièrement exécutée ; / 4° Ne pas avoir fait l'objet d'une décision, prononcée sur le fondement des dispositions du chapitre III du titre V du livre VI du code de commerce ou prise en application des textes antérieurs à ce code et ne pas avoir fait l'objet d'une décision de nature équivalente dans un autre Etat membre de l'Union européenne ou un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ; / 5° Ne pas exercer l'une des activités, énumérées par décret en Conseil d'Etat, incompatibles par leur nature avec celles qui sont mentionnées à l'article L. 611-1 ; / 6° Ne pas exercer l'activité d'agent de recherches privées ; / 7° Justifier d'une aptitude professionnelle dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat lorsque ces personnes exercent effectivement les activités mentionnées à l'article L. 611-1 et, lorsqu'elles utilisent un chien dans le cadre de ces activités, de l'obtention d'une qualification professionnelle définie en application de l'article L. 613-7. / L'agrément ne peut être délivré s'il résulte de l'enquête administrative, ayant le cas échéant donné lieu à consultation, par des agents du Conseil national des activités privées de sécurité spécialement habilités par le représentant de l'Etat territorialement compétent et individuellement désignés, des traitements de données à caractère personnel gérés par les services de police et de gendarmerie nationales relevant des dispositions de l'article 31 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, à l'exception des fichiers d'identification, que son comportement ou ses agissements sont contraires à l'honneur, à la probité, aux bonnes mœurs ou sont de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes ou des biens, à la sécurité publique ou à la sûreté de l'Etat et sont incompatibles avec l'exercice des fonctions susmentionnées. "

3. Pour refuser de renouveler l'agrément de M. C... en qualité de dirigeant d'une société de sécurité privée, la CNAC s'est fondée sur sa mise en cause en qualité d'auteur de faits de travail dissimulé, d'emploi d'un étranger non muni d'une autorisation de travail salarié et d'emploi pour l'exercice d'activités de surveillance, gardiennage, transport de fonds ou de protection des personnes, de personne non titulaire d'une carte professionnelle, commis du

6 juin 2015 au 22 juillet 2015 à Caen, faits pour lesquels l'intéressé a été auditionné par les services de police et a fait l'objet d'une convocation à comparaître devant le tribunal de grande instance de Caen le 23 octobre 2018. Toutefois, si seul un courrier des services de police, qui présente un bref " résumé " de son audition, affirme que M. C... aurait reconnu les faits, aucun procès-verbal n'est produit par l'administration, ni aucun autre document probant, alors par ailleurs que le requérant conteste la matérialité de l'infraction et fait valoir, sans être contredit par le CNAPS, qu'il n'a pas été poursuivi. Dans ces conditions, M. C... est fondé à soutenir que les faits qui lui sont reprochés ne sont pas matériellement établis, et par suite à demander l'annulation de la décision refusant le renouvellement de son agrément.

4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a refusé d'annuler la délibération du 5 septembre 2019 par laquelle la CNAC a rejeté son recours administratif préalable obligatoire formé le 23 juillet 2019 à l'encontre de la décision du 1er juillet 2019 par laquelle la commission locale d'agrément et de contrôle Île-de-France Ouest a refusé de renouveler son agrément en qualité de dirigeant d'une société de sécurité privée.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Le présent arrêt, eu égard à ses motifs, implique nécessairement que soit délivré à M. C... un agrément en qualité de dirigeant d'une société de sécurité privée. Il y a dès lors lieu d'enjoindre au CNAPS, sous réserve d'un changement dans les circonstances de droit et de fait depuis la date d'édiction de la décision annulée, de délivrer cet agrément à l'intéressé dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais liés au litige :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. C..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme au titre des frais exposés par le CNAPS et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de ce dernier le versement de la somme de 1 500 euros au requérant sur le fondement des mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1908979 du 1er février 2022 du tribunal administratif de Melun ainsi que la délibération du 5 septembre 2019 par laquelle la Commission nationale d'agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité a rejeté le recours administratif préalable obligatoire formé le 23 juillet 2019 par M. C... à l'encontre de la décision du 1er juillet 2019 par laquelle la commission locale d'agrément et de contrôle Île-de-France Ouest a refusé de renouveler son agrément en qualité de dirigeant d'une société de sécurité privée, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au Conseil national des activités privées de sécurité, sous réserve d'un changement dans les circonstances de droit et de fait depuis le 5 septembre 2019, de délivrer à M. C... un agrément en qualité de dirigeant d'une société de sécurité privée, dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le Conseil national des activités privées de sécurité versera la somme de 1 500 euros à M. C... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions du Conseil national des activités privées de sécurité tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au conseil national des activités privées de sécurité.

Délibéré après l'audience du 15 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- Mme Marianne Julliard, présidente-assesseure,

- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 décembre 2022.

La rapporteure,

G. B...Le président,

I. LUBEN

La greffière,

N. DAHMANI

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA01513


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA01513
Date de la décision : 06/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Gaëlle MORNET
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : MAAMOURI ABDELKARIM

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-12-06;22pa01513 ?
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