Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 25 janvier 2021 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2103545/1-1 du 16 juin 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire de régularisation enregistrés les 13 juillet 2021 et 10 mai 2022, M. B..., représenté par Me Giudicelli-Jahn, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 16 juin 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 25 janvier 2021 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois et sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté du préfet de police a été pris au terme d'une procédure irrégulière dès lors que la commission du titre de séjour n'a pas été saisie, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors qu'il justifie de dix années de présence habituelle en France ;
- l'arrêté contesté méconnaît les stipulations des articles 3 et 10 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ; il justifie de cinq années de résidence régulière sur le territoire français, ce qui lui ouvre droit au bénéfice d'un titre de séjour valable dix ans ;
- le préfet de police a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que sa présence en France depuis plus de dix ans et son insertion professionnelle constituent des motifs exceptionnels de nature à justifier son admission exceptionnelle au séjour.
Par un mémoire enregistré le 18 octobre 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant tunisien né le 1er juin 1978, déclare être entré en France en 2003. Par un arrêté du 25 janvier 2021, le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... demande à la cour d'annuler le jugement du 16 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 : " Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an et renouvelable et portant la mention " salarié ". Après trois ans de séjour régulier en France, les ressortissants tunisiens visés à l'alinéa précédent peuvent obtenir un titre de séjour de dix ans. Il est statué sur leur demande en tenant compte des conditions d'exercice de leurs activités professionnelles et de leurs moyens d'existence. ".
3. Pour refuser à M. B... la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des stipulations précitées, le préfet de police a relevé qu'il ne travaillait plus et ne justifiait pas de moyens d'existence. Il ne ressort pas des pièces du dossier que ces motifs seraient erronés. Par suite, le moyen tiré de la violation desdites stipulations ne peut qu'être écarté.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 10 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 : " Un titre de séjour d'une durée de dix ans, ouvrant droit à l'exercice d'une activité professionnelle, est délivré de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour sur le territoire français : [...] g) Au ressortissant tunisien titulaire d'un titre de séjour d'un an délivré en application des articles 5, 7 ter, ou 7 quater, qui justifie de cinq années de résidence régulière ininterrompue en France, sans préjudice de l'application de l'article 3 du présent Accord. 2. Sont notamment considérés comme remplissant la condition de séjour régulier, les bénéficiaires d'un titre de séjour d'un an délivré en application des articles 7 ter et 7 quater. 3.Ce titre de séjour est renouvelé de plein droit pour une durée de dix ans. ". Contrairement à ce qu'il soutient, M. B... ne justifie pas de cinq années de résidence régulière en France, ne produisant de titre de séjour en qualité de salarié que pour les périodes allant du 26 mai 2016 au
25 mai 2017, du 26 mai 2017 au 25 mai 2018, et du 13 janvier 2020 au 12 janvier 2021. Il n'est donc pas fondé à soutenir qu'il pourrait bénéficier d'un titre valable dix ans sur le fondement des stipulations précitées.
5. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 313-14, alors en vigueur, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) ". Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaire prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Il fixe ainsi, notamment, les conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-tunisien prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant tunisien souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-tunisien, au sens de l'article 11 de cet accord. Toutefois, ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un titre de séjour à un ressortissant tunisien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation. Enfin, l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 n'a pas entendu écarter l'application des dispositions de procédure qui s'appliquent à tous les étrangers en ce qui concerne la délivrance, le renouvellement ou le refus de titres de séjour.
6. D'une part, M. B... soutient qu'il réside habituellement en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué du 25 janvier 2021. Il ne produit cependant, en ce qui concerne l'année 2011, qu'un duplicata d'ordonnance daté du 18 novembre 2011, une fiche de circulation à l'hôpital Saint-Louis du même mois de novembre, une feuille de soins datée de novembre ne mentionnant ni son prénom ni son adresse, une facture non probante datée également de novembre ainsi qu'un courrier publicitaire non daté établi par une société proposant une assurance complémentaire santé. Dans ces conditions, il ne justifie pas de sa présence habituelle sur le territoire français au cours des dix années précédant l'arrêté contesté. Par suite, le préfet de police n'a pas pris cet arrêté au terme d'une procédure irrégulière en ne saisissant pas la commission du titre de séjour au titre des dispositions précitées de l'article L. 313-14, alors en vigueur, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. D'autre part, si le requérant soutient qu'il est bien intégré à la société française et qu'il a travaillé régulièrement au cours des dernières années, il ne produit à l'appui de sa demande que des bulletins de paie concernant, pour les dernières années, les mois de janvier 2015 à septembre 2015, de novembre 2015 à avril 2016, de septembre et octobre 2016, d'avril 2017, et de novembre 2019 à mai 2020 en qualité de boulanger. Ces circonstances ne suffisent pas à établir qu'il justifierait de motifs exceptionnels de nature à permettre sa régularisation dans le cadre du pouvoir discrétionnaire dont dispose le préfet de police, qui n'a par suite commis aucune erreur manifeste d'appréciation en refusant de renouveler son titre de séjour en qualité de salarié.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 janvier 2021 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera transmise au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 15 novembre 2022 à laquelle siégeaient :
- M. Ivan Luben, président de chambre,
- Mme Marianne Julliard, présidente-assesseure,
- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 décembre 2022.
La rapporteure,
G. A...Le président,
I. LUBENLa greffière,
N. DAHMANI
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 21PA03955
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