Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... A... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 25 août 2021 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de sa reconduite à la frontière.
Par un jugement n° 2122608/4-1 du 2 juin 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 1er juillet 2022, Mme A... C..., représentée par Me de Sousa, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2122608/4-1 du 2 juin 2022 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler les décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français contenues dans l'arrêté du 25 août 2021 du préfet de police ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour ou à défaut, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation dans le délai de 15 jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 000 euros à verser à son conseil au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
En ce qui concerne les moyens communs à toutes les décisions :
- elles ne sont pas suffisamment motivées ;
- la régularité de l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ne peut être contrôlée en l'absence de sa production ;
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 10° devenu l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet aurait dû faire usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation ;
- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît les stipulations des articles 2 et 3 la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 611-3 9° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
- elle méconnaît les stipulations des articles 2 et 3 la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été communiquée au préfet de police qui n'a pas été produit de mémoire.
Mme A... C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 septembre 2022 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- et les observations de Me de Sousa, avocate de Mme A... C....
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... C..., ressortissante congolaise (RDC) née le 24 décembre 1956, est entrée en France le 13 mai 2016 selon ses déclarations. Le 25 février 2021, elle a sollicité son admission au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 25 août 2021, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme A... C... relève appel du jugement du 2 juin 2002 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne les moyens communs à toutes les décisions :
2. L'arrêté attaqué vise notamment les dispositions des articles L. 425-9 et L. 611-1-3° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dont il a été fait application. Il mentionne également les considérations de fait propres à Mme A... C... qui constituent le fondement des décisions portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de ces décisions doivent être écartés.
3. Il ressort des pièces du dossier que l'avis du 27 mai 2021 du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a été versé aux débats en première instance. Faute pour la requérante en appel d'assortir de précisions, le moyen tiré d'éventuelles irrégularités entachant cet avis, le moyen tiré d'un vice de procédure ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat ".
5. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié.
6. Il ressort des pièces du dossier que la décision rejetant la demande de titre de séjour de Mme A... C... a été prise notamment au vu d'un avis du collège de médecins de l'OFII du 27 mai 2021 selon lequel, si l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale, son défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité et que son état de santé lui permet de voyager sans risque. Pour contester cet avis, la requérante produit des ordonnances de mai et juin 2021, de janvier et février 2022 lui prescrivant notamment de la Sertraline, de l'Alprazolam, de l'Alimémazine, du Lometazepam, ainsi que, comme en première instance, le certificat médical du 3 septembre 2019 adressé par son médecin psychiatre au médecin de l'OFII. Le psychiatre mentionne qu'elle aurait été " emprisonnée 1,5 mois avec maltraitance, abus, viols, privation, (...) ", qu'elle souffre de troubles post-traumatiques avec " complication dépressive ", qu'il a constaté un " début d'amélioration du tableau clinique avec amendement des symptômes psychotique " et que sa prise en charge thérapeutique s'effectue par le recours à des " entretiens psychothérapeutiques ". Il fait en outre état d'un traitement médicamenteux à base de Sertraline, Xanax et Noctamide, et de ce qu'il est nécessaire de " maintenir (la) prise en charge actuelle au risque d'une aggravation de (l') état clinique " en cas d'arrêt du traitement. Ce seul certificat, établi vingt mois avant l'avis du collège de médecin de l'OFII, n'est toutefois pas de nature à infirmer celui-ci. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
7. En deuxième lieu, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé. En l'espèce, la requérante n'établit pas avoir formé une demande à un autre titre que celui d'étrangère malade. Par suite, elle ne peut utilement soutenir que le préfet de police, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de Mme A... C..., aurait dû faire usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation de sa situation.
8. En dernier lieu, Mme A... C..., célibataire, entrée sur le territoire national à l'âge de 60 ans et mère d'une fille majeure résidant en France, ne démontre ni l'intensité de ses liens personnels et familiaux en France, ni la réalité de son intégration alors qu'il n'est pas contesté qu'elle n'est pas dépourvue de toutes attaches familiales en République démocratique du Congo où résident ses quatre autres enfants. Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision en litige serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
9. Pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 6 et 8 du présent arrêt, Mme A... C... n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée méconnaitrait les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation en raison de ses conséquences exceptionnelles sur sa vie privée et familiale et sur son état de santé.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
10. Aux termes de l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Le droit à la vie de toute personne est protégée par la loi (...) ". Aux termes de l'article 3 de la même convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
11. Mme A... C... fait valoir qu'elle appartient à une communauté chrétienne, laquelle est une des principales composantes de l'opposition en République démocratique du Congo, qu'elle a été emprisonnée et torturée puis exfiltrée de la prison et a réussi à fuir son pays. Elle précise souffrir d'un stress post-traumatique et avoir des craintes pour sa vie et sa santé en cas de retour dans son pays d'origine. Cependant elle ne produit aucun élément au soutien de ces allégations qui permettrait d'établir ces risques et ses craintes personnelles de persécutions. En outre, elle n'établit pas, ainsi qu'il a été dit au point 6, qu'une absence de traitement aurait pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Le moyen tiré d'une violation des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut, par suite, qu'être écarté.
12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, sa requête d'appel ne peut qu'être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 14 novembre 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Le Goff, président de chambre,
- M. Ho Si Fat, président assesseur,
- Mme Jayer, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 décembre 2022.
La rapporteure,
M-D B...Le président,
R. LE GOFF
Le greffier,
P. TISSERAND
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22PA03020