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05/12/2022 | FRANCE | N°21PA02943

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 05 décembre 2022, 21PA02943


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. I... D... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 20 novembre 2020 par lequel le préfet du Val-d'Oise l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, lui a interdit de retourner en France pendant une durée d'un an et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement.

Par jugement n° 2019619/5-3 du 27 janvier 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 1er juin

2021, M. D..., représenté par Me Mendy, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 20196...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. I... D... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 20 novembre 2020 par lequel le préfet du Val-d'Oise l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, lui a interdit de retourner en France pendant une durée d'un an et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement.

Par jugement n° 2019619/5-3 du 27 janvier 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 1er juin 2021, M. D..., représenté par Me Mendy, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2019619/5-3 du 27 janvier 2021 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 20 novembre 2020 du préfet du Val-d'Oise ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) d'ordonner l'effacement de son signalement dans le fichier européen de non- admission dit F... ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation au bénéfice de la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- l'arrêté a été pris par une autorité incompétente ;

- il est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'une erreur de fait ;

- il n'a pas été précédé d'un examen sérieux et personnalisé de sa situation ;

- sa situation n'a pas été examinée par rapport à la convention relative à la circulation et au séjour des personnes entre la République française et la République du Bénin entrée en vigueur le 1er octobre 1994 et à l'accord France-Bénin relatif à la gestion des flux migratoires et au codéveloppement, signé à Cotonou le 28 novembre 2007 entré en vigueur le 1er mars 2010 ;

- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision de refus de délai de départ volontaire méconnaît les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

- la décision portant interdiction de retour est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

La requête a été transmise au préfet du Val-d'Oise qui n'a pas produit d'observations.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris du 28 avril 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention relative à la circulation et au séjour des personnes entre la République française et la République du Bénin signée le 21 décembre 1992 ;

- l'accord France-Bénin relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au codéveloppement du 28 novembre 2007 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant béninois né le 19 septembre 1983, est entré en France le 6 décembre 2018 selon ses déclarations. Par arrêté du 20 novembre 2020, le préfet du Val-d'Oise l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, lui a interdit de retourner en France pendant une durée d'un an et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement. Par jugement n° 2019619/5-3 du 27 janvier 2021, dont M. D... relève appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, l'arrêté attaqué a été signé par Mme C... G..., " chef de section Eloignement/Comex " au sein des services de la préfecture du Val-d'Oise, qui disposait d'une délégation de signature à cet effet consentie par un arrêté n° 19-078 du 17 juin 2019, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de l'Etat dans le Val-d'Oise le 2 septembre 2019. Par ailleurs, l'absence ou l'empêchement d'un fonctionnaire, qui peut être momentané ou résulter de l'organisation temporaire de la charge de travail entre un responsable et ses collaborateurs, n'a pas à être justifié par l'administration, hors le cas d'allégations factuelles précises de la part de la partie s'en prévalant. En l'espèce, M. D... n'établit pas que M. E... A..., directeur des migrations et de l'intégration et son adjointe, Mme H..., n'auraient pas été absents, empêchés ou indisponibles au moment de l'édiction de l'arrêté attaqué. Dès lors, le moyen tiré de ce que cet arrêté aurait été signé par une autorité incompétente manque en fait.

3. En deuxième lieu, M. D... invoque le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté attaqué. Toutefois, il n'apporte à l'appui de ce moyen, déjà soulevé devant le tribunal administratif, aucun élément nouveau susceptible de remettre en cause l'appréciation portée à juste titre par le premier juge. Il y a dès lors lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit au point 4 du jugement attaqué.

4. En troisième lieu, la circonstance, aussi regrettable soit-elle, que le préfet du Val-d'Oise ait mentionné par erreur dans l'arrêté attaqué que M. D... serait le père d'un enfant de trois mois qui vit en Côte d'Ivoire alors que cette information ne figure pas dans le procès-verbal d'audition du 20 novembre 2020 ni dans aucune autre pièce du dossier, n'est pas de nature à affecter la légalité de cet arrêté dès lors qu'après neutralisation de ce motif de fait erroné, il ressort que les autres motifs sur lesquels est fondé cet arrêté auraient suffi à conduire le préfet du Val-d'Oise à prendre la même décision.

5. En quatrième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Val-d'Oise n'aurait pas, avant de prendre l'arrêté attaqué, procédé à un examen particulier et suffisamment approfondi de la situation de M. D....

6. En cinquième lieu, le moyen tiré de l'absence d'examen de sa situation au regard de la convention relative à la circulation et au séjour des personnes entre la République française et la République du Bénin entrée en vigueur le 1er octobre 1994 et à l'accord France-Bénin relatif à la gestion des flux migratoires et au codéveloppement, signé à Cotonou le 28 novembre 2007 entré en vigueur le 1er mars 2010, qui n'est pas assorti de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé, alors, en tout état de cause que M. D... n'a fait aucune démarche tendant à la délivrance d'un titre de séjour, doit être écarté.

7. En sixième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. M. D... fait valoir que des membres de sa famille ayant pour la plupart la nationalité française vivent en France, qu'il a développé des attaches personnelles et sociales en France en participant notamment aux activités de l'association et qu'il travaille et a déclaré ses revenus en 2019 et 2020. Toutefois, le requérant est célibataire sans charge de famille en France et n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, le Bénin, où il a vécu jusqu'à l'âge de 35 ans et où résident ses parents et sa fratrie. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le préfet du Val-d'Oise aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en prenant à son encontre une obligation de quitter le territoire français ainsi que le moyen tiré de ce que le préfet aurait méconnu ces dispositions en lui interdisant de retourner en France pendant une durée d'un an doivent être écartés.

9. En septième lieu, aux termes des dispositions alors codifiées au II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français (...) ".

10. M. D... s'est maintenu sur le territoire français après expiration de la durée de validité de son visa et s'est abstenu de toute démarche en vue de régulariser sa situation et d'obtenir un titre de séjour. Contrairement à ce que soutient le requérant, le préfet était, compte tenu de ces éléments, fondé à lui refuser l'octroi d'un délai de départ sur le fondement du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

11. En dernier lieu, dès lors que M. D... n'établit pas que la décision l'obligeant à quitter le territoire français qui lui a été opposée est illégale, les moyens tirés de ce que les décisions fixant le pays de destination et portant interdiction de retour sont illégales par voie de conséquence de l'illégalité de cette décision ne peuvent qu'être écartés.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 novembre 2020 par lequel le préfet du Val-d'Oise l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, lui a interdit de retourner en France pendant une durée d'un an et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement. Ses conclusions à fin d'annulation ainsi que, par voie de conséquence, celles qu'il a présentées à fin d'injonction et sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. I... D... et au préfet du Val-d'Oise.

Délibéré après l'audience du 14 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Le Goff, président de chambre,

- M. Ho Si Fat, président assesseur,

- Mme Collet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 décembre 2022.

La rapporteure,

A. B... Le président,

R. LE GOFF

Le greffier,

P. TISSERAND

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA02943


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA02943
Date de la décision : 05/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LE GOFF
Rapporteur ?: Mme Aude COLLET
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : MENDY

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-12-05;21pa02943 ?
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