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18/10/2022 | FRANCE | N°20PA02808

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 18 octobre 2022, 20PA02808


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat autonome tout RATP a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 22 novembre 2017 par laquelle la Régie autonome des transports parisiens (RATP) a rejeté sa demande d'abrogation de l'instruction générale 6 A, adoptée le

2 décembre 2016, relative à la composition et aux attributions de la commission de reclassement et de mettre à la charge de la RATP la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement

n° 1800879/3-1 du 21 juillet 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la r...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat autonome tout RATP a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 22 novembre 2017 par laquelle la Régie autonome des transports parisiens (RATP) a rejeté sa demande d'abrogation de l'instruction générale 6 A, adoptée le

2 décembre 2016, relative à la composition et aux attributions de la commission de reclassement et de mettre à la charge de la RATP la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1800879/3-1 du 21 juillet 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la requête du syndicat autonome tout RATP.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 28 septembre et

29 novembre 2020, le syndicat autonome tout RATP représenté par Me Renard, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 21 juillet 2020 ;

2°) de mettre à la charge de la RATP la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'un défaut de motivation ;

- les articles 8 à 11 de l'instruction contestée méconnaissent les articles L. 1226-3, L. 1226-7 et L. 5213-5 du code du travail, l'accord du 1er mars 1996 sur la mise en place d'une nouvelle politique de réinsertion interne pour les agents privés d'emploi statutaire par décision médicale, l'accord sur la formation professionnelle continue du 10 janvier 2013, la note de direction P. 33209 du 11 septembre 1979 et l'article 99 du statut des agents de la RATP au motif qu'ils ne prévoient pas que la commission de reclassement examine les possibilités de formation lors du reclassement ;

- l'article 3 de l'instruction contestée méconnait l'article 99 du statut des agents dès lors qu'il n'est pas prévu que la recherche de reclassement prenne en compte la liste des postes de reclassement spécifiquement prévue par ces dispositions statutaires ;

- l'instruction attaquée modifie la composition de la commission de reclassement dès lors que ne peut plus en être membre le médecin du conseil de prévoyance et qu'elle supprime le défèrement des agents inaptes définitifs à la commission médicale afin que celle-ci examine si l'état de santé des agents concernés peut être amélioré par un traitement médical ;

- l'instruction attaquée a été adoptée à l'issue d'une procédure irrégulière et par une autorité incompétente dans la mesure où la modification du statut des agents ne peut résulter que d'une délibération du conseil d'administration de la RATP approuvée par les ministres chargés de la tutelle, après avis de la commission consultative du statut du personnel de la RATP ;

- son adoption n'a pas été précédée de la consultation des organisations syndicales représentatives ni de la consultation des instances représentatives du personnel ;

- l'instruction attaquée ne répond pas aux exigences de l'instruction générale 526 et de l'instruction générale 100 D ;

- elle supprime plusieurs garanties pour les agents par rapport à la précédente instruction générale 6/VII du 15 avril 1952 qu'elle abroge ;

- elle méconnaît le principe de sécurité juridique en portant atteinte à des contrats de travail en cours.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 février 2022, la RATP, représentée par Me Job, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge du syndicat autonome tout RATP la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens invoqués par le syndicat autonome tout RATP ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le décret n° 59-157 du 7 janvier 1959 ;

- le décret n° 60-1362 du 19 décembre 1960 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Ho Si Fat, président assesseur,

- les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique,

- et les observations de Me Job, représentant la RATP.

Considérant ce qui suit :

Sur la régularité du jugement :

1. Le syndicat requérant soutient que le jugement attaqué est entaché d'un défaut de motivation. Toutefois, il résulte des motifs mêmes du jugement que le Tribunal administratif de Paris a répondu expressément aux moyens contenus dans la requête du syndicat requérant. Par suite, il y a lieu d'écarter le moyen tiré du défaut de motivation dont serait entaché le jugement attaqué.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 2 du statut du personnel de la RATP : " Des annexes établies conformément aux dispositions de l'article 4 du décret n° 59-157 du 7 janvier 1959 et à l'article 1er du décret n° 60-1362 du 19 décembre 1960, et portant les numéros des titres et chapitre correspondants complètent, s'il y a lieu, le présent statut. / Les modalités d'application du statut et de ses annexes font l'objet d'instructions ou de notes de service ". Aux termes de l'article 4 du décret du 7 janvier 1959 : " Le statut du personnel de la régie ne peut être modifié que par délibération du conseil d'administration de la régie approuvée par les ministres chargés du budget et des transports et, pour les modifications relatives à la maladie, la maternité, l'invalidité, le décès, les accidents du travail et les maladies professionnelles, par le ministre chargé de la sécurité sociale ".

3. En premier lieu, le syndicat requérant soutient que le statut du personnel de la régie ne peut être modifié que par délibération du conseil d'administration de la régie approuvée par les ministres chargés de la tutelle et que toute proposition de modification au statut, qu'elle qu'en soit l'origine, doit être présentée au conseil d'administration par le directeur général et qu'une décision prise en violation de cette procédure est irrégulière.

4. Il résulte des dispositions rappelées au point 2 de l'article 4 du décret du

7 janvier 1959 et de l'article 2 du statut du personnel que si les modifications apportées au statut des agents sont adoptées par délibération du conseil d'administration de la RATP après approbation des ministres chargés de la tutelle, les instructions générales qui ont pour objet de préciser les modalités d'application du statut sont, en vertu de l'article 4.1 de l'instruction générale 100 D, adoptées par le président-directeur général de la RATP ou son délégataire. Par suite, le premier moyen tiré de l'irrégularité de la procédure suivie doit être écarté.

5. En deuxième lieu, le syndicat requérant soutient que les dispositions des articles 8 à 11 de l'instruction générale contestée seraient entachées d'illégalité à défaut de prévoir la compétence de la commission de reclassement en matière de formation des agents en reclassement et méconnaîtraient les dispositions de l'article 99 du statut, de la note de direction P. 33209 du 11 septembre 1979 ainsi que les stipulations de l'accord sur la mise en place d'une nouvelle politique de réinsertion interne pour les agents privés d'emploi statutaire par décision médicale du 1er mars 1996 et de l'accord sur la formation professionnelle continue du

10 janvier 2013.

6. Aux termes de l'article 99 du statut des agents de la RATP : " L'agent faisant l'objet, après avis du médecin du travail, d'une décision d'inaptitude définitive peut être reclassé dans un autre emploi. Si l'agent n'est pas reclassé, il est réformé. / Le reclassement est subordonné :1° - à l'établissement par l'agent d'une demande ; 2° - à la vacance d'un poste dans un autre emploi ; 3° - à la possession des aptitudes et capacités requises pour occuper l'emploi considéré. (...). / Il est établi une liste des postes dits " de reclassement " et susceptibles d'être attribués aux bénéficiaires des dispositions du présent article, éventuellement après une formation organisée par la Régie en faveur de ces agents. / La liste de ces postes vacants est tenue à jour et mise à la disposition de la commission de reclassement. / La composition et les attributions de cette commission sont fixées par l'Instruction générale n° 6 ".

7. Il résulte de l'instruction que ni les dispositions précitées de l'article 99 du statut, ni la note de direction P. 33209 du 11 septembre 1979 ni les stipulations de l'accord sur la mise en place d'une nouvelle politique de réinsertion interne pour les agents privés d'emploi statutaire par décision médicale du 1er mars 1996 et de l'accord sur la formation professionnelle continue du 10 janvier 2013 ne déterminent les attributions de la commission de reclassement. En outre, si le syndicat requérant se prévaut des dispositions des articles L. 1226-3, L. 1226-7 et L. 5213-5 du code du travail en tant qu'elles prévoient que tout salarié déclaré inapte peut suivre un stage de reclassement professionnel ou un réentraînement au travail, ces dispositions ne sont pas applicables à la situation des agents de la RATP qui est régie par un statut particulier. Par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions des articles 8 à 11 de l'instruction générale 6 A seraient entachées d'illégalité à défaut de prévoir la compétence de la commission de reclassement en matière de formation des agents en reclassement doit être écarté.

8. En quatrième lieu, le syndicat requérant soutient que l'article 3 de l'instruction générale 6 A se borne donc à prévoir une recherche de reclassement parmi les postes vacants et omet totalement les postes de reclassement expressément prévus par l'article 99 du statut qui doivent faire l'objet d'une liste distincte. S'il est vrai que l'article 3 de l'instruction générale 6 A prévoit que la RATP recherche le reclassement de l'agent déclaré inapte sur tout poste vacant au sein du groupe et approprié à ses capacités, cette recherche inclut également, ainsi que l'ont relevé à juste titre les premiers juges, les postes inscrits sur la liste des postes de reclassement prévue par l'article 99 du statut. Par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article 99 du statut par l'article 3 de l'instruction générale contestée doit être écarté.

9. En cinquième lieu, si le syndicat requérant fait valoir que l'instruction générale contestée, en ne reprenant pas certaines dispositions figurant dans la précédente instruction générale 6/VII du 15 avril 1952, serait moins protectrice des droits des salariés déclarés inaptes, il ne l'établit pas par le simple rappel de ces anciennes dispositions. Par suite, ce moyen doit être écarté.

10. En sixième lieu, le syndicat requérant soutient que l'instruction générale contestée ne répond pas aux exigences fixées par l'instruction générale 100 D de juillet 2009 relative aux principes généraux de réglementation et l'instruction générale 526 de juillet 2009, prise pour application de cette dernière, relative à la production et l'administration de la réglementation générale.

11. Si, dans le cadre de la contestation d'un acte réglementaire par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure prise pour son application ou dont il constitue la base légale, la légalité des règles fixées par cet acte réglementaire, la compétence de son auteur et l'existence d'un détournement de pouvoir peuvent être utilement critiquées, il n'en va pas de même des conditions d'édiction de cet acte, les vices de forme et de procédure dont il serait entaché ne pouvant être utilement invoqués que dans le cadre du recours pour excès de pouvoir dirigé contre l'acte réglementaire lui-même et introduit avant l'expiration du délai de recours contentieux. Il s'ensuit que le syndicat requérant ne peut se prévaloir à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus d'abrogation de l'instruction générale contestée les moyens tirés de la méconnaissance des conditions d'élaboration de l'instruction générale telles que prévues par l'instruction générale 100 D et l'instruction générale 526 de juillet 2009. Par suite, ce moyen doit être écarté comme inopérant.

12. En septième lieu, le syndicat requérant soutient que l'instruction générale contestée est entachée d'illégalité dans la mesure où son adoption n'a pas été précédée de la consultation des organisations syndicales représentatives ni de la consultation des instances représentatives du personnel. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, ce moyen ne peut qu'être écarté comme inopérant.

13. En huitième lieu, le syndicat requérant fait valoir que l'adoption de l'instruction générale 6 A entraînerait une modification des éléments des contrats de travail en cours et méconnaîtrait le principe de sécurité juridique. Toutefois, ainsi que l'ont relevé à juste titre les premiers juges, il ne ressort pas des pièces du dossier que les contrats de travail des agents de la RATP contiendraient des clauses relatives à la commission de reclassement, et en particulier à sa composition et à ses attributions. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de sécurité juridique par l'instruction générale contestée doit être écarté.

14. Il résulte de ce qui précède que le syndicat autonome tout RATP n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 22 novembre 2017 par laquelle la RATP a rejeté sa demande d'abrogation de l'instruction générale 6 A.

Sur les frais liés à l'instance :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la RATP, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge du syndicat autonome tout RATP la somme que demande la RATP sur le fondement des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête du syndicat autonome tout RATP est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la RATP sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat autonome tout RATP et à la Régie autonome des transports parisiens.

Copie en sera adressée pour information au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Délibéré après l'audience du 26 septembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Le Goff, président de chambre,

- M. Ho Si Fat, président assesseur,

- Mme Collet, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022.

Le rapporteur,

F. HO SI FAT

Le président,

R. LE GOFFLa greffière,

E. VERGNOL

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 10PA03855

2

N° 20PA02808


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA02808
Date de la décision : 18/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LE GOFF
Rapporteur ?: M. Frank HO SI FAT
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : RENARD

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-10-18;20pa02808 ?
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