Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 31 juillet 2020 par laquelle la maire de Paris a prononcé son licenciement à compter du 30 décembre 2020, ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux, de condamner la Ville de Paris à lui verser la somme de 68 830 euros, assortie des intérêts de droit à compter du
17 août 2020, date de sa demande préalable en réparation des préjudices subis, et de mettre à la charge de la Ville de Paris une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2021247/2-3 du 8 juillet 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 21 juillet et
1er décembre 2021, Mme B..., représentée par Me Scanvic, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2021247/2-3 du 8 juillet 2021 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler la décision du 31 juillet 2020 ;
3°) de condamner la Ville de Paris à lui verser la somme de 74 682 euros, assortie des intérêts de droit à compter du 17 août 2020, date de la demande préalable ;
4°) de mettre à la charge de la Ville de Paris la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal a, en méconnaissance des prescriptions de l'article L. 741-2 du code de justice administrative, omis de viser le mémoire en réplique qu'elle a produit le 26 mai 2021 ;
- le jugement attaqué est entaché d'erreur de droit en qu'il a validé les deux motifs qui fondent la décision de licenciement, à savoir la disparition du groupe " socialiste et apparentés " au conseil de Paris et le fait qu'aucun des autres groupes du conseil de Paris ne l'ait recrutée ;
- le simple changement de nom d'un groupe ne saurait fonder légalement une décision de licenciement ;
- la décision est illégale en ce que la date du licenciement a été fixée au 30 décembre 2020 et non au 30 septembre 2020, date d'expiration du délai de préavis de deux mois.
Par un mémoire en défense enregistré le 22 septembre 2021, la Ville de Paris, représentée par la SCP Foussard-Froger, conclut au rejet de la requête et à ce que la Cour mette à la charge de Mme B... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales,
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée,
- le décret n° 88-145 du 15 février 1988,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Ho Si Fat, président assesseur,
- les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique,
- les observations de Me Scanvic, avocat de Mme B..., et de Me Froger, avocat de la Ville de Paris.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... a été recrutée en qualité de collaboratrice de cabinet à la Ville de Paris le 22 août 2007, puis, à compter du 16 avril 2008, elle a été engagée en qualité de collaboratrice d'un groupe d'élus au conseil de Paris et affectée au service du groupe " socialiste, radical de gauche et apparentés ". Elle est devenue secrétaire générale de ce groupe le
1er juillet 2012. Le 16 avril 2014, elle a été reconduite dans ses fonctions de collaboratrice de groupe d'élus et son contrat a été renouvelé pour une durée indéterminée. A la suite des élections municipales des 15 mars et 28 juin 2020, le groupe " socialiste et apparentés " a disparu. Mme B... a alors été informée, lors d'un entretien du 1er juillet 2020, qu'il sera mis fin à son contrat. Elle a été ensuite convoquée par lettre recommandée avec accusé de réception du
17 juillet 2020 à un entretien préalable à son licenciement. Par décision du 31 juillet 2020, la maire de Paris l'a licenciée à compter du 30 décembre 2020. Le 17 août 2020, Mme B... a formé un recours gracieux à l'encontre de cette décision et présenté des conclusions indemnitaires. Une décision implicite de rejet est née à la suite du silence gardé par la Ville de Paris. Mme B... a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler la décision du
31 juillet 2020, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux et, d'autre part, de condamner la Ville de Paris à lui verser la somme de 68 830 euros au titre des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de son licenciement. Par un jugement du 8 juillet 2021 dont Mme B... relève appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Sur la régularité du jugement :
2. Il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué mentionne dans ses visas le mémoire en réplique produit par la requérante le 25 mai 2021. Par suite, le moyen tiré du défaut de visa de ce mémoire dans le jugement doit être écarté comme manquant en fait.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. Aux termes de l'article L. 2121-28 du code général des collectivités territoriales : " I. Dans les conseils municipaux des communes de plus de 100 000 habitants, le fonctionnement des groupes d'élus peut faire l'objet de délibérations sans que puissent être modifiées, à cette occasion, les décisions relatives au régime indemnitaire des élus. / II. Dans ces mêmes conseils municipaux, les groupes d'élus se constituent par la remise au maire d'une déclaration, signée de leurs membres, accompagnée de la liste de ceux-ci et de leur représentant. / (...) Le maire peut, dans les conditions fixées par le conseil municipal et sur proposition des représentants de chaque groupe, affecter aux groupes d'élus une ou plusieurs personnes. (...) / L'élu responsable de chaque groupe d'élus décide des conditions et des modalités d'exécution du service confié que ces collaborateurs accomplissent auprès de ces groupes au sein de l'organe délibérant ". Aux termes de l'article 110-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 : " Les agents contractuels recrutés sur le fondement du code général des collectivités territoriales pour exercer les fonctions de collaborateur de groupe d'élus sont engagés par contrat à durée déterminée pour une durée maximale de trois ans, renouvelable, dans la limite du terme du mandat électoral de l'assemblée délibérante concernée. / Si, à l'issue d'une période de six ans, ces contrats sont renouvelés, ils ne peuvent l'être que par décision expresse de l'autorité territoriale et pour une durée indéterminée. / La qualité de collaborateur de groupe d'élus est incompatible avec l'affectation à un emploi permanent d'une collectivité territoriale et ne donne aucun droit à titularisation dans un grade de la fonction publique territoriale. (...) ". Ces dispositions ne font pas obstacle à ce que le juge de l'excès de pouvoir contrôle que la décision mettant fin aux fonctions d'un collaborateur de groupe d'élus ne repose pas sur un motif matériellement inexact ou une erreur de droit et n'est pas entachée de détournement de pouvoir.
4. Il ressort des pièces du dossier qu'à l'issue des élections municipales des 15 mars et
28 juin 2020, un groupe d'élus s'est constitué sous la dénomination " Paris en commun " et que ce nouveau groupe s'est constitué par démembrement d'un précédent groupe, dénommé " socialiste et apparentés " auprès duquel Mme B... avait été affectée en qualité de collaboratrice de groupe par un contrat à durée indéterminée en cours à la date de la décision en litige.
Mme B... a été licenciée aux motifs, d'une part, que le groupe " socialiste et apparentés " a été supprimé et, d'autre part, qu'elle n'a pas été recrutée au sein de l'un des nouveaux groupes du conseil de Paris.
5. Pour contester la légalité de cette décision, Mme B... soutient en premier lieu que la décision litigieuse est entachée d'erreur de droit dès lors que le motif retenu pour fonder son licenciement ne figure pas parmi les motifs prévus par le décret n° 88-145 du 15 février 1988 relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale. Il résulte toutefois des dispositions de l'article 110-1 de la loi du 26 janvier 1984, que " la qualité de collaborateur de groupe d'élus est incompatible avec l'affectation à un emploi permanent d'une collectivité territoriale " de sorte que les personnes recrutées pour exercer les fonctions de collaborateur de groupe d'élus peuvent être licenciées dès lors que le groupe au service duquel elles étaient affectées a été supprimé ou n'a pas été renouvelé et qu'aucun autre groupe n'a souhaité les recruter. Il s'ensuit qu'en fondant la décision de licenciement en litige sur le fait que le groupe " socialiste et apparentés " avait été supprimé et qu'aucun autre groupe du conseil de Paris n'avait souhaité recruter Mme B..., la maire de Paris n'a pas, ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, entaché sa décision d'erreur de droit. Par suite, le moyen tiré d'une erreur de droit doit être écarté.
6. Mme B... soutient en deuxième lieu que le premier motif de la décision de licenciement manque en fait dès lors que le groupe " socialiste et apparentés " n'a pas disparu mais a simplement changé de nom et que le changement de nom du groupe auprès duquel elle était affectée ne pouvait fonder la décision de licenciement. Il résulte toutefois des dispositions précitées de l'article L. 2121-28 du code général des collectivités territoriales que les groupes d'élus se constituent par la remise au maire d'une déclaration, signée de leurs membres, accompagnée de la liste de ceux-ci et de leur représentant de sorte qu'un groupe constitué, après le renouvellement du conseil municipal, par une nouvelle déclaration, doit être regardé, une fois cette remise au maire, comme un groupe nouveau, quand bien même il y aurait, avec un groupe existant au cours du précédent mandat, des éléments de continuité tenant aux membres de ce groupe ou à son orientation politique. Il s'ensuit que la circonstance que certains membres du groupe " Paris en commun " aient auparavant appartenu au groupe " socialiste et apparentés ", que les autres membres de ce groupe aient été candidats socialistes ou investis par le parti socialiste et enfin que les deux groupes successifs aient été présidés par la même personnalité, ne sont pas de nature à remettre en cause le caractère nouveau du groupe " Paris en commun ". En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier, et il n'est d'ailleurs pas contesté par la requérante, qu'aucun président d'un autre groupe issu des élections municipales des 15 mars et 28 juin 2020 n'a demandé à la maire de Paris de l'affecter à son groupe. Dès lors, le moyen tiré de ce que les premiers juges se seraient fondés sur des faits matériellement inexacts doit être écarté.
7. Mme B... soutient en troisième lieu que la décision de licenciement est entachée d'illégalité en ce qu'elle fixe la date d'effet de son licenciement au 30 décembre 2020 et non au 30 septembre 2020, date d'expiration de son délai de préavis de deux mois, et que la Ville de Paris aurait dû lui verser une indemnité compensatrice pour les 44,5 jours de congés annuels restant à prendre à cette date. Toutefois, à supposer même qu'il restait à la requérante un nombre de jours de congés annuels à prendre, il ne résulte pas des dispositions de l'article 40 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 aux termes duquel " L'agent recruté pour une durée indéterminée (...) a droit à un préavis qui est de : (...) - deux mois pour l'agent qui justifie auprès de l'autorité qui l'a recruté d'une ancienneté de services égale ou supérieure à deux ans " que la Ville de Paris ne pouvait légalement décider que le licenciement prendrait effet à une date postérieure à la date d'expiration du délai minimal de deux mois du préavis. Par suite, ce dernier moyen ne peut qu'être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes. Par suite, il y a lieu de rejeter ses conclusions aux fins d'annulation ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'indemnisation.
Sur les frais liés à l'instance :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la Ville de Paris, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par Mme B... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la Ville de Paris et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Mme B... versera à la Ville de Paris la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la Ville de Paris.
Délibéré après l'audience du 5 septembre 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Le Goff, président de chambre,
- M. Ho Si Fat, président assesseur,
- Mme Larsonnier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 septembre 2022.
Le rapporteur,
F. HO SI FATLe président,
R. LE GOFF
La greffière,
E. VERGNOL
La République mande et ordonne au préfet de la région d'Île-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA04122