Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2021 par lequel le préfet de Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour.
Par une ordonnance n° 2117774 du 25 février 2022, le président de la 11ème chambre du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 17 avril 2022, M. D..., représenté par Me Meurou, demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 2117774 du 25 février 2022 du président de la 11ème chambre du tribunal administratif de Montreuil ;
2°) d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2021 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour pluriannuelle dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour n'est pas suffisamment motivée s'agissant de sa vie privée et familiale et de son état de santé ;
- cette décision n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation personnelle ;
- elle est entachée d'un vice de procédure dès lors que l'avis de la commission du titre de séjour n'est pas suffisamment motivé s'agissant de sa vie privée et familiale et de son état de santé ;
- elle est entachée d'incompétence de l'auteur de l'acte ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- et les observations de Me Raymond, avocat de M. D....
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., ressortissant congolais né le 17 septembre 1968, est entré en France en 2000 selon ses déclarations. Le 18 septembre 2016, un titre de séjour d'une durée d'un an lui a été délivré sur le fondement du 11ème de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur devenu l'article L. 423-7 à compter du 1er mai 2021. Le 29 août 2019, il en a sollicité le renouvellement. Par un arrêté du
13 octobre 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande. M. D... relève appel de l'ordonnance du 25 février 2022 par laquelle le président de la 11ème chambre du tribunal administratif de Montreuil, sur le fondement des dispositions précitées du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté comme ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés ou des moyens inopérants.
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
2. Pour rejeter comme irrecevables les conclusions aux fins d'annulation présentées par M. B... D..., le président de la 11ème chambre du tribunal administratif de Montreuil s'est fondé sur les dispositions de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, qui prévoient que : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours (...) les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ", en estimant que la requête de M. D... ne comportait que des moyens de légalité externe manifestement infondés ou des moyens inopérants.
3. A l'appui de sa demande présentée devant le tribunal administratif de Montreuil,
M. D... a notamment invoqué les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de la décision litigieuse et de l'absence de l'examen complet et sérieux de sa situation, de même que ceux tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, outre celui tiré de l'erreur manifeste d'appréciation.
4. Dès lors que l'arrêté litigieux se borne à considérer que le comportement de l'intéressé représentait une menace pour l'ordre public sans porter aucune appréciation relative à l'atteinte portée à sa vie privée et familiale alors que des titres de séjour avaient été délivrés, sans discontinuer, à M. D... depuis le 18 avril 2016 en qualité d'étranger malade puis ès qualité de parent d'enfants français, ce dernier ne peut pas être regardé comme ayant soulevé des moyens de légalité externe manifestement infondés ou des moyens inopérants. Il est ainsi fondé à soutenir que sa demande de première instance ne relevait pas des dispositions du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative. Par suite, la demande de
M. D... ne pouvait pas régulièrement faire l'objet d'une ordonnance de rejet sur le fondement de l'article R. 222-1 du code de justice administrative. Il en résulte que l'ordonnance par laquelle le président de la 11ème chambre du tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande de M. D... doit être annulée.
5. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par
M. D... devant le tribunal administratif de Montreuil.
Sur les conclusions à fin d'annulation, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la demande :
6. Le préfet de la Seine-Saint-Denis, dans son arrêté litigieux du 13 octobre 2021 rejetant la demande de renouvellement de la carte de séjour pluriannuelle sollicitée par
M. D..., après avoir cité les condamnations pénales infligées à l'intéressé, a estimé " que les faits pour lesquels il est connu de la justice et de la police permettent de regarder l'intéressé comme susceptible de constituer une menace à l'ordre public ; qu'au regard de ces éléments, il n'y a pas lieu de faire droit à sa demande de renouvellement de titre de séjour en qualité de parent d'un enfant français, l'intéressé ne peut donc plus se prévaloir des dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il ne peut davantage se prévaloir des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ". Dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que M. D... est père de deux enfants français nés en 2003 et en 2006, qu'il vit en concubinage depuis 2011 avec la mère de ses enfants, titulaire d'une carte de résident valable jusqu'en 2027 et qu'il a bénéficié depuis 2016 d'une carte de séjour en qualité d'étranger malade puis de parent d'enfant français, le préfet de la Seine-Saint-Denis ne pouvait omettre de prendre en considération ces éléments dans sa décision et d'apprécier l'éventuelle atteinte qui pouvait être portée par l'arrêté litigieux au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale. La seule circonstance que cet arrêté mentionne que la commission du titre de séjour, qui s'est réunie le 9 septembre 2021, a émis un avis défavorable " aux motifs que l'intéressé est multirécidiviste, qu'il présente un risque réel de trouble à l'ordre public et qu'il a eu une attitude désinvolte et peu respectueuse au final de la commission " ne saurait pallier ces vices de procédure. Par suite, l'arrêté contesté est entaché d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle.
7. Il résulte de ce qui précède que M. D... est fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 13 octobre 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour.
Sur les conclusions présentées à fin d'injonction :
8. L'exécution du présent arrêt, eu égard à ses motifs, implique que le préfet de la Seine-Saint-Denis réexamine la demande de renouvellement de la carte de séjour pluriannuelle présentée par M. D.... Il y a donc lieu d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder à ce réexamen dans le délai de trois mois suivant la date de notification du présent arrêt.
Sur les frais liés au litige :
9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. D... de la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : L'ordonnance n° 2117774 du 25 février 2022 du président de la 11ème chambre du tribunal administratif de Montreuil et l'arrêté du 13 octobre 2021 du préfet de la Seine-Saint-Denis sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder au réexamen de la demande de renouvellement de la carte de séjour pluriannuelle présentée par M. D... dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'État versera à M. D... la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D..., au préfet de la Seine-Saint-Denis et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Délibéré après l'audience publique du 21 juin 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Ivan Luben, président de chambre,
- Mme Marianne Julliard, présidente assesseure,
- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 septembre 2022.
Le président rapporteur,
I. A...L'assesseure la plus ancienne,
M. C...
La greffière,
N. DAHMANI
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°22PA01751