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18/07/2022 | FRANCE | N°22PA01403

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 18 juillet 2022, 22PA01403


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 29 avril 2021 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée à l'issue de ce délai.

Par un jugement n° 2117427/3-2 du 18 novembre 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par

une requête, enregistrée le 25 mars 2022, et un mémoire de communication de pièces, enregistré le 2 m...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 29 avril 2021 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée à l'issue de ce délai.

Par un jugement n° 2117427/3-2 du 18 novembre 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 mars 2022, et un mémoire de communication de pièces, enregistré le 2 mai 2022, Mme C..., représentée par Me Rochiccioli, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2117427/3-2 du 18 novembre 2021 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 avril 2021 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Elle soutient que :

- la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 devenu L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 mai 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 février 2022 du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Paris.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante malienne née le 26 février 1986, est entrée en France le 25 octobre 2014 selon ses déclarations. Le 11 février 2021, elle a sollicité auprès du préfet de police la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des articles L. 313-11 7° et L. 313-14 désormais codifiés aux articles L. 423-23 L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 29 avril 2021, le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme C... relève appel du jugement du 18 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En vertu de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... a quitté le Mali accompagnée de sa dernière fille, née en 2010, qu'elle est entrée en France, à tout le moins en 2015, et qu'elle y réside depuis lors. Elle s'occupe seule de l'éducation de sa fille scolarisée en France depuis l'école maternelle, cette dernière devant entrer, à la date de l'arrêté litigieux, en classe de 6ème et justifiant d'une bonne intégration sociale et scolaire, ainsi que le démontre la production de nombreuses attestations en ce sens. Il ressort, par ailleurs, des actes de mariage des 17 janvier et 11 avril 2021, et n'est pas contesté, que les deux premières filles de la requérante, nées en 2004 et 2007, ont épousé en 2021 au Mali, aux âges respectivement de 13 et 17 ans, des hommes âgés de 35 et 40 ans. Ainsi, dans les conditions très particulières de l'espèce, eu égard à la durée de présence en France de l'intéressée et de sa dernière fille, et compte tenu des conséquences que l'arrêté contesté est susceptible d'entraîner sur la situation de cette dernière pour laquelle, au demeurant, une demande d'asile a été déposée le 21 janvier 2022 et est en cours d'examen, la décision litigieuse est de nature à porter atteinte à l'intérêt supérieur de cette enfant au sens des stipulations conventionnelles précitées. Il s'ensuit que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Elle est par suite fondée à en demander l'annulation ainsi que celle de l'arrêté du 29 avril 2021 du préfet de police.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'enjoindre au préfet de police de délivrer à Mme C... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu en revanche d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de mettre à la charge de l'Etat le versement au conseil de Mme C..., Me Rochiccioli, d'une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, sous réserve que Me Rochiccioli renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2117427/3-2 du 18 novembre 2021 du tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 29 avril 2021 du préfet de police sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à Mme C... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'État versera à Me Rochiccioli la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer, au préfet de police et à Me Rochiccioli.

Délibéré après l'audience du 24 mai 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Julliard, présidente,

Mme Marie-Dominique Jayer, première conseillère,

Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 juillet 2022.

La rapporteure,

M-D. B...La présidente,

M. D...La greffière,

A. DUCHERLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

1

N° 08PA04258

2

N° 22PA01403


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA01403
Date de la décision : 18/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme JULLIARD
Rapporteur ?: Mme Marie-Dominique JAYER
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : ROCHICCIOLI

Origine de la décision
Date de l'import : 26/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-07-18;22pa01403 ?
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