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07/07/2022 | FRANCE | N°21PA05201

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 07 juillet 2022, 21PA05201


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté en date du 21 juillet 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera éloignée.

Par un jugement n° 2008703 en date du 30 juillet 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :
>Par une requête, enregistrée le 7 septembre 2021 et transmise à la Cour par l'ordonnance n°21V...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté en date du 21 juillet 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera éloignée.

Par un jugement n° 2008703 en date du 30 juillet 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 septembre 2021 et transmise à la Cour par l'ordonnance n°21VE02586 du président de la 4ème chambre de la Cour administrative d'appel de Versailles,

Mme B..., représentée par Me Traore, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2008703 du 30 juillet 2021 du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer sa situation ;

3°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administratif.

Elle soutient que :

Sur le jugement attaqué :

- il est insuffisamment motivé ;

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

- elle méconnaît les dispositions des articles L. 314-11 et L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire :

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 511, I, 3° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 511- 11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante haïtienne née le 4 février 1943, est entrée régulièrement en France en 2008 sous couvert d'un visa court séjour. Le 18 juillet 2018, elle a sollicité le renouvellement de sa carte de séjour temporaire. Le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande par un arrêté en date du 21 juillet 2020, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme B... fait appel du jugement du 30 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. Il ressort des énonciations du jugement attaqué que les premiers juges ont répondu, par une motivation qui rappelle tant les textes applicables que les faits de l'espèce, à l'ensemble des conclusions et des moyens opérants qui avaient été soulevés en première instance par Mme B.... Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement du 30 juillet 2021 du tribunal administratif de Montreuil doit être écarté.

Sur la légalité de l'arrêté contesté :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : (...) 2° A l'enfant étranger d'un ressortissant de nationalité française si cet enfant est âgé de dix-huit à vingt et un ans ou dans les conditions prévues à l'article L. 311-3 ou s'il est à la charge de ses parents ainsi qu'aux ascendants d'un tel ressortissant et de son conjoint qui sont à sa charge, sous réserve qu'ils produisent un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ". Il ressort des termes même de ces dispositions que l'autorité administrative, lorsqu'elle est saisie d'une demande tendant à la délivrance d'un titre de séjour au bénéfice d'un étranger qui fait état de sa qualité d'ascendant à charge d'un ressortissant français, peut légalement fonder sa décision de refus sur la circonstance que l'intéressé ne saurait être regardé comme étant à la charge de son descendant, dès lors qu'il dispose de ressources propres, que son descendant de nationalité française ne pourvoit pas régulièrement à ses besoins, ou qu'il ne justifie pas des ressources nécessaires pour le faire. Il résulte également des dispositions de l'article L. 312-2 du même code que le préfet n'est tenu de saisir la commission que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions posées pour la délivrance de plein droit d'un titre de séjour sur le fondement des articles qu'elles visent.

5. Mme B... soutient qu'elle est prise en charge financièrement par sa fille française et que le préfet était dès lors tenu de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement du 2° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de saisir la commission du titre de séjour. Toutefois, les pièces produites par la requérante, à savoir une attestation de prise en charge financière, une fiche de salaire de sa fille et l'avis d'imposition de cette dernière pour l'année 2020, ne permettent pas d'établir qu'elle serait effectivement à sa charge, dès lors qu'elle ne justifie notamment pas être dépourvue de ressources propres et que les ressources du foyer de sa fille apparaissent modestes. Dès lors, Mme B... ne remplissait pas les conditions prévues pour la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en application des dispositions du 2° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que le préfet a entaché sa décision, d'une part, d'un vice de procédure en se prononçant sans avoir préalablement consulté la commission du titre de séjour, d'autre part, d'une erreur de droit, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions précitées ne peuvent qu'être écartés.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Une carte de résident portant la mention " résident de longue durée-UE " est délivrée de plein droit à l'étranger qui justifie : 1° D'une résidence régulière ininterrompue d'au moins cinq ans en France au titre de l'une des cartes de séjour temporaires ou pluriannuelles ou de l'une des cartes de résident prévues au présent code, à l'exception de celles délivrées sur le fondement des articles L. 313-7, L. 313-7-1, L. 313-7-2 ou L. 313-13, du 3° de l'article L. 313-20, de l'article L. 313-21 lorsqu'il s'agit du conjoint ou des enfants du couple de l'étranger titulaire de la carte de séjour délivrée en application du 3° de l'article L. 313-20, des articles L. 313-23, L. 313-24, L. 317-1 ou du 8° de l'article L. 314-11 (...) 2° De ressources stables, régulières et suffisantes pour subvenir à ses besoins. Ces ressources doivent atteindre un montant au moins égal au salaire minimum de croissance. Sont prises en compte toutes les ressources propres du demandeur, indépendamment des prestations familiales et des allocations prévues à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles ainsi qu'aux articles L. 5423-1, L. 5423-2 et L. 5423-3 du code du travail (...) 3° D'une assurance maladie ".

7. Mme B... ne justifiant pas de ressources stables, régulières et suffisantes pour subvenir à ses besoins, elle n'est pas fondée à soutenir que le préfet a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de lui délivrer un carte de résident.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable : " (...) L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) ". Si Mme B... fait valoir qu'elle réside habituellement en France depuis 2008, elle ne l'établit pas. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure entachant la décision attaquée faute de saisine de la commission du titre de séjour doit être écarté.

9. En quatrième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

10. Mme B... fait valoir que ses deux enfants vivent en France, qu'elle entretient des relations familiales avec l'ensemble de ses descendants et qu'elle vit chez sa fille qui la prend financièrement en charge. Toutefois, ainsi qu'il a été dit, les pièces qu'elle produit sont insuffisantes pour l'établir et elle ne justifie pas plus de l'ancienneté de son séjour en France. En outre, Mme B... ne soutient pas ne plus avoir d'attaches familiales à Haïti, où elle a vécu au moins jusqu'à l'âge de 65 ans. Dans ces conditions, Mme B... n'est pas fondée à soutenir qu'en rejetant sa demande de délivrance d'un titre de séjour et en l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations précitées une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis.

11. En cinquième lieu, Mme B... fait valoir qu'elle souffre d'une cholangite sclérosante des petites voies biliaires et qu'elle doit rester en France pour y poursuivre son traitement. Toutefois, en se bornant à produire une attestation médicale du 18 mai 2020, établie par une praticienne du service d'hépato-gastroentérologie du groupement hospitalier de territoire Grand Paris Nord-Est, qui indique, s'agissant de l'état de santé de Mme B..., qu'une " surveillance est nécessaire tous les six mois avec prise de sang et cholangio-IRM environ tous les ans ", la requérante n'apporte aucun élément de nature à contredire l'avis du collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration dont il ressort qu'elle peut bénéficier, dans son pays d'origine, d'un traitement approprié à son état de santé. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation ne peut qu'être écarté.

12. En dernier lieu, compte tenu de ce qui précède, le préfet, en refusant de délivrer un titre de séjour à Mme B... et en l'obligeant à quitter le territoire français, n'a pas entaché ses décisions d'une erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur sa situation personnelle.

13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 23 juin 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Diémert président assesseur,

- M. Doré, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 juillet 2022.

Le rapporteur,

F. A...Le président,

J. LAPOUZADE

La greffière,

C. POVSELa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA05201


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21PA05201
Date de la décision : 07/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. François DORE
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : TRAORE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-07-07;21pa05201 ?
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