Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2007626 du 16 mars 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 27 mars 2021 et un mémoire complémentaire enregistré le 22 avril 2022, M. A... représenté, par Me Bouaddi, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2007626 du 16 mars 2021 du tribunal administratif de Montreuil ;
2°) d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis ou à toute autre autorité administrative territorialement compétente de réexaminer sa situation, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer dans l'attente du réexamen une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.
Il soutient que :
Sur la régularité du jugement :
- il comporte des motifs contradictoires ;
- il a dénaturé les conclusions en interprétant la décision comme un refus de délivrance d'un titre de séjour alors qu'il s'agit d'un refus de renouvellement ;
- il méconnait les droits de la défense en ce qu'il ne pouvait pas déclarer inopérants les moyens tirés de l'absence de consultation du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
- il opère un renversement de la charge de la preuve ;
Sur la décision portant refus de titre de séjour :
- elle méconnait les dispositions de l'article L. 313-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle méconnait les dispositions de l'article 15 de la loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 qui prévoient la prolongation des titres de séjour expirant entre le 16 mai et le 15 juin 2020 ;
- elle méconnait les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;
- le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, saisi une première fois le 27 juin 2019, aurait dû être saisi une seconde fois de sa demande de renouvellement de titre de séjour ;
- compte tenu de son état de santé, il ne pouvait être renvoyé en Algérie durant la pandémie de Covid 19 ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- et les observations de Me Bouaddi représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., de nationalité algérienne né le 1er novembre 1987, est entré en France le 22 août 2018 sous couvert d'un visa Schengen court séjour. Il a sollicité son admission au séjour en qualité d'étranger malade sur le fondement de l'article 6 alinéa 7 de l'accord franco-algérien. Il relève appel du jugement du 16 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 24 juillet 2020 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.
Sur la régularité du jugement :
2. A supposer que M. A... ait entendu invoquer l'irrégularité du jugement en ce qu'il a dénaturé les faits de la cause en qualifiant la décision de refus de titre de séjour alors qu'il s'agit d'un refus de renouvellement de titre de séjour, qu'il est entaché d'une contradiction de motifs en ayant écarté comme inopérante l'invocation des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile tout en examinant la légalité de la décision au regard des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, qu'il a méconnu les droits de la défense en écartant comme inopérant le moyen tiré de l'absence d'une consultation du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et qu'il a renversé la charge de la preuve, ces moyens relèvent du bien-fondé du jugement et non de sa régularité.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
3. En premier lieu, l'arrêté contesté vise notamment les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les articles L. 313-2 et L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et précise que M. A... ne remplit pas les conditions du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien dès lors qu'il peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, qu'il ne peut prétendre à une admission exceptionnelle dès lors qu'il ne justifie pas d'une ancienneté sur le territoire français et d'une insertion professionnelle et qu'il n'y a pas d'obstacle l'empêchant de poursuivre sa vie privée et famille dans son pays d'origine. L'arrêté contesté comporte ainsi l'énoncé suffisant des considérations de droit et de fait qui fondent la décision portant refus de titre de séjour et doit être regardé comme suffisamment motivé, alors même que toutes les indications relatives à la situation privée et familiale de M. A... n'y sont pas mentionnées. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ladite décision doit être écarté comme manquant en fait.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...). 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. (...) ". Aux termes des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : 11) A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". Aux termes des dispositions de l'article R. 313-22 du même code, alors en vigueur : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ".
5. Les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régissant d'une manière complète les conditions dans lesquelles les Algériens peuvent être admis à séjourner en France et les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, il en résulte qu'un ressortissant algérien ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code précité doit être écarté comme inopérant. Ces mêmes stipulations n'ont toutefois pas entendu écarter, sauf stipulations incompatibles expresses, l'application des dispositions de procédure qui s'appliquent à tous les étrangers en ce qui concerne la délivrance, le renouvellement ou le refus de titres de séjour.
6. D'une part, M. A... soutient que, dès lors que la décision est une décision de refus de renouvellement de son titre de séjour, le préfet de la Seine-Saint-Denis était tenu de saisir de nouveau le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration après que celui-ci avait examiné sa situation le 11 février 2019. Toutefois, et en dépit de l'erreur de plume figurant dans le dispositif de la décision contestée qui rejette sa demande de " renouvellement " de titre de séjour, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que M. A... aurait été titulaire d'un premier titre de séjour, la décision relevant au demeurant qu'il s'agit d'une première demande de titre de séjour. Le requérant n'est dès lors fondé à soutenir ni que par le jugement attaqué le tribunal se serait mépris sur les conclusions présentées ni que le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration aurait dû être saisi une nouvelle fois.
7. D'autre part, il ressort des pièces du dossier, que M. A... est atteint de diabète de type 2, de la maladie de Verneuil, de la maladie de Crohn et d'une spondylarthrite ankylosante nécessitant une surveillance régulière. Pour refuser de lui délivrer un titre de séjour, le préfet de la Seine-Saint-Denis a estimé que si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. M. A... a été traité par Amgevita en avril 2019 et par Humira en avril 2020 ainsi qu'en attestent les ordonnances produites. Pour contredire le motif opposé par la décision, il ne produit que des certificats médicaux, établis notamment le 16 octobre 2018 par un professeur de l'Hôpital Lariboisière qui ne précise pas le contenu de son traitement, le 18 décembre 2018 par un médecin de l'Hôpital Saint-Antoine qui ne précise pas plus la teneur du traitement, un compte-rendu médical d'un professeur du centre hospitalo-universitaire Mustapha qui se borne à relever, sans autre précision, que le Humira est indisponible en Algérie et un certificat du même professeur de l'Hôpital Lariboisière aux termes duquel il est seulement justifié qu'il poursuive en France le traitement par Humira, alors même, ainsi qu'il a été dit plus haut, que M. A... a été, pendant une année et notamment durant l'examen de sa demande de titre de séjour, soigné par Amgevita, traitement à l'égard duquel aucune pièce du dossier ne fait état d'une intolérance ou d'une moindre efficacité. Au demeurant, et contrairement à ce que soutient l'intéressé, la circonstance que l'Amgevita n'apporte pas d'amélioration du service médical (ASMR V) par rapport à la biothérapie de référence n'est pas de nature à établir que ce traitement serait de ce seul fait moins performant. Enfin, les extraits d'articles de presse de portée générale sur les conditions d'accès et le coût élevé des traitements en Algérie ne sont pas plus de nature à remettre en cause les motifs de la décision contestée.
8. Enfin, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ayant été saisi le 27 juin 2019, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'était tenu de saisir de nouveau ce collège dès lors, en particulier, et en tout état de cause, qu'il n'est pas établi que le préfet n'a pas pris en compte tout circonstance nouvelle liée tant à la pandémie de COVID-19 qu'à la durée de la procédure qui aurait pu conduire à ressaisir le collège des médecins.
9. En troisième lieu, aux termes de l'article 15 de la loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 : " La durée de validité des documents de séjour suivants, qu'ils aient été délivrés sur le fondement du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou d'un accord bilatéral, arrivés à expiration entre le 16 mai 2020 et le 15 juin 2020, est prolongée de cent quatre-vingts jours :/1° Visas de long séjour ;/2° Titres de séjour, à l'exception de ceux délivrés au personnel diplomatique et consulaire étranger ;/3° Autorisations provisoires de séjour ;/4° Récépissés de demandes de titres de séjour ".
10. Le requérant, qui n'avait pas reçu de récépissé, soutient que son droit au séjour était, de ce fait, automatiquement prorogé de cent quatre-vingts jours par l'effet de la loi rappelée au point précédent. Toutefois, si en l'absence de décision favorable ou défavorable son droit au séjour se trouvait automatiquement prorogé, la décision de refus de séjour intervenue le 24 juillet 2020 a mis de plein droit fin à cette prorogation. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit dont serait entaché, pour ce motif, le refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté.
11. En quatrième lieu, la circonstance que le jugement ait relevé que le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile était inopérante tout en examinant la légalité de la décision sur le fondement du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien n'est pas de nature à révéler une contradiction de motifs.
12. En cinquième lieu, il ne ressort pas, en tout état de cause, des mentions du jugement qu'il aurait écarté comme inopérants les moyens tirés du vice de procédure dans la consultation du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration.
13. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 ".
14. M. A... soutient que le préfet de la Seine-Saint-Denis était tenu de saisir la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande. Il résulte des dispositions précitées que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions d'obtention du titre de séjour sollicité auxquels il envisage de refuser ce titre de séjour et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Compte tenu de ce qui a été dit aux points précédents, M. A... ne remplissait pas les conditions permettant la délivrance d'un titre de séjour et le préfet de la Seine-Saint-Denis n'était par suite pas tenu de saisir la commission du titre de séjour avant de prendre la décision contestée.
15. En dernier lieu, quand bien même le père de M. A... réside en France sous couvert d'un titre de séjour, il ne ressort pas des pièces du dossier que son épouse résidait en France en situation régulière au moment de la décision contestée. Par suite, ni le refus de séjour ni l'obligation de quitter le territoire ne sont entachés d'erreur manifeste d'appréciation.
16. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président de chambre,
- M. Diémert, président assesseur,
- M. Gobeill, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juillet 2022.
Le rapporteur,
JF. B...Le président,
J. LAPOUZADE
La greffière,
Y. HERBERLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA01616