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29/06/2022 | FRANCE | N°21PA00563

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 29 juin 2022, 21PA00563


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société British Columbia Investment Management Corporation (société BCIMC) a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer le remboursement des retenues à la source opérées sur les dividendes de source française qu'elle a perçus entre 2013 et 2015 pour un montant total de 747 609 euros, majoré des intérêts moratoires.

Par un jugement n° 1913723/1 du 3 décembre 2020, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une

requête et des mémoires enregistrés les 2 février, 12 mai et 25 juin 2021, la société BCIMC, rep...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société British Columbia Investment Management Corporation (société BCIMC) a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer le remboursement des retenues à la source opérées sur les dividendes de source française qu'elle a perçus entre 2013 et 2015 pour un montant total de 747 609 euros, majoré des intérêts moratoires.

Par un jugement n° 1913723/1 du 3 décembre 2020, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 2 février, 12 mai et 25 juin 2021, la société BCIMC, représentée par Me Pascal Schultze et Me Perrine Florentin, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Montreuil du 3 décembre 2020 ;

2°) de prononcer le remboursement des retenues à la source pour les montants de 294 471 euros, 234 569 euros et 218 569 euros prélevées au titre respectivement des années 2013, 2014 et 2015, assorti des intérêts moratoires ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les fonds dont elle a la gestion répondent aux conditions de l'article 29 alinéa 7 b) de la convention franco-canadienne ;

- ces fonds, constitués et établis au Canada, sont gérés exclusivement aux fins d'administrer des fonds ou de verser des prestations en vertu d'un ou plusieurs régimes de pensions ou de retraite ;

- ils sont les bénéficiaires effectifs des dividendes ;

- ils sont exonérés d'impôt au Canada ;

- il ne détiennent directement ou indirectement pas plus de 5 % du capital et des droits de vote dans les sociétés distributrices de dividendes, et la catégorie principale des actions des sociétés distributrices fait l'objet de transactions régulières sur une bourse de valeurs située en France ;

- les fonds répondent aux conditions posées par la doctrine référencée BOI-INT-CVB-20 n° 40.

Par des mémoires en défense enregistrés les 19 avril et 10 juin 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société British Columbia Investment Management Corporation ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 10 juin 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 25 juin 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention du 2 mai 1975 entre la France et le Canada tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôt sur le revenu et sur la fortune ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de Mme Jimenez, rapporteure publique,

- et les observations de Me Schultze, avocat de la société British Columbia Investment Management Corporation.

Une note en délibéré, enregistrée le 16 juin 2022, a été présentée pour la société British Columbia Investment Management Corporation.

Considérant ce qui suit :

1. La société British Columbia Investment Management Corporation (BCIMC), de droit canadien, a perçu, de 2013 à 2015, des dividendes de différentes sociétés françaises cotées, qui ont été soumis à une retenue à la source, sur le fondement des dispositions combinées des articles 119 bis et 187 du code général des impôts et de la convention fiscale franco-canadienne du 2 mai 1975. Par des courriers des 31 décembre 2014, 10 décembre 2015 et 23 décembre 2016, elle a demandé le remboursement d'une partie de ces retenues à la source, pour un montant total de 747 609 euros, dont 294 471 euros au titre de l'année 2013, 234 569 euros au titre de l'année 2014 et 218 569 euros au titre de l'année 2015. Elle relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant au remboursement de l'intégralité de ces montants, majoré des intérêts moratoires.

2. D'une part aux termes du 2 de l'article 119 bis du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " Les produits visés aux articles 108 à 117 bis donnent lieu à l'application d'une retenue à la source dont le taux est fixé par l'article 187 lorsqu'ils bénéficient à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France (...) ". En vertu de l'article 187 du même code, le taux de la retenue à la source est fixé, sauf pour les exceptions qu'il énumère, à 30 % des revenus concernés.

3. D'autre part, aux termes de l'article 10 de la convention franco-canadienne susvisée : " Dividendes / 1. Les dividendes payés par une société qui est un résident d'un Etat contractant à un résident de l'autre Etat contractant sont imposables dans cet autre Etat. / 2. Toutefois, ces dividendes sont aussi imposables dans l'Etat contractant dont la société qui paie les dividendes est un résident, et selon la législation de cet Etat, mais, si la personne qui reçoit les dividendes en est le bénéficiaire effectif, l'impôt ainsi établi ne peut excéder : (...) c) 15 p. cent du montant brut des dividendes, dans tous les autres cas ". Aux termes de l'article 29 de cette même convention : " Dispositions diverses (...) 7. (...) b) Nonobstant les dispositions de l'article 10, les dividendes payés par une société qui est un résident d'un Etat contractant à un organisme constitué et établi dans l'autre Etat contractant qui y est géré exclusivement aux fins d'administrer des fonds ou de verser des prestations en vertu d'un ou de plusieurs régimes de pension ou de retraite sont exonérés d'impôt dans le premier Etat pourvu que : / i) l'organisme en soit le bénéficiaire effectif et soit généralement exonéré d'impôt dans l'autre Etat ; et / ii) l'organisme ne détienne directement ou indirectement pas plus de 5 p. cent du capital ni plus de 5 p. cent des droits de vote dans la société qui paie les dividendes; et / iii) la catégorie principale des actions de la société qui paie les dividendes fasse l'objet de transactions régulières sur une bourse de valeurs située dans le premier Etat ".

4. Il est constant que la société requérante n'est pas le bénéficiaire effectif des dividendes qui ont supporté la retenue à la source et n'est pas gérée exclusivement aux fins d'administrer des fonds ou de verser des prestations en vertu d'un ou de plusieurs régimes de pension ou de retraite. Elle n'est par suite pas fondée à se prévaloir, en ce qui la concerne, de l'exonération prévue par les stipulations précitées du b) du 7. de l'article 29 de la convention franco-canadienne susvisée.

5. Il résulte en outre de l'instruction que tant les réclamations contentieuses que la demande de première instance et la requête d'appel sont présentées au nom de la société BCIMC et non pas au nom des fonds dont elle a la gestion. La société BCIMC, qui ne saurait dans ces conditions utilement faire valoir que les pièces justificatives qu'elle a présentées émanent des fonds qu'elle gère, et qui ne présente aucun document la mandatant pour représenter lesdits fonds en justice dans le cadre de la présente procédure contentieuse, ne saurait valablement soutenir qu'elle a agi au nom et pour le compte de ces fonds.

6. Il résulte des points 4. et 5. qui précèdent que les conclusions de la société BCIMC ne peuvent qu'être rejetées.

7. Au surplus, et à supposer même que la société BCIMC soit en mesure d'invoquer devant la Cour les stipulations précitées de la convention franco-canadienne au nom et pour le compte des fonds dont elle assure la gestion, il lui appartient, dans la mesure où elle est seule en mesure de le faire, d'apporter les éléments permettant d'établir que lesdits fonds répondent aux conditions d'exonérations prévues par les stipulations invoquées et de déterminer la portée chiffrée de cette exonération. En se bornant à produire des documents rédigés en langue anglaise relatifs à la nature et à l'activité des fonds en cause, documents qui, en outre, ne concernent pas au titre de l'année 2013, les fonds intitulés " University of Victoria staff Pension Plan " et " Workers' compensation Board Superannuation Plan ", au titre de l'année 2014 les fonds intitulés " University of Victoria Money Purchase Pension Plan " et " University of Victoria Combination Pension Plan " dont aucun document ne permet de considérer qu'il s'agit d'une seule et même entité juridique, et, au titre de l'année 2015, le fonds intitulé " University of Victoria Faculty Pension Plan ", et en l'absence de documents exploitables en langue française permettant de distinguer les dividendes perçus par les fonds mentionnés ci-dessus et les dividendes perçus par les autres fonds, la société BCIMC, ne met pas la Cour en mesure d'apprécier le bien-fondé et la portée de l'exonération dont elle se prévaut. La doctrine référencée BOI-INT-CVB-20 n° 40 ne fait pas de la loi fiscale une interprétation différente de ce qui précède.

8. Il résulte de ce qui précède que la société British Columbia Investment Management Corporation (BCIMC) n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la société requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société BCIMC est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société British Columbia Investment Management Corporation et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction des résidents à l'étranger et des services généraux.

Délibéré après l'audience du 15 juin 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. Magnard, premier conseiller,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe 29 juin 2022.

Le rapporteur,

F. A...Le président,

I. BROTONS

Le greffier,

J. CHAMPESME

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 21PA00563


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA00563
Date de la décision : 29/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : GGV GRÜTZMACHER/GRAVERT/VIEGENER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-06-29;21pa00563 ?
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