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28/06/2022 | FRANCE | N°21PA04372

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 28 juin 2022, 21PA04372


Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société anonyme (SA) Arkamys a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la restitution du solde du crédit d'impôt pour dépenses de recherche dont elle s'estime titulaire au titre de l'exercice 2018, à concurrence du montant résultant de la prise en compte des dépenses de recherche et développement afférentes aux opérations sous-traitées à la société à responsabilité limitée (SARL) Altim France. Par un jugement n° 2008608 du 22 juin 2021, le tribunal administratif de Paris a re

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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société anonyme (SA) Arkamys a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la restitution du solde du crédit d'impôt pour dépenses de recherche dont elle s'estime titulaire au titre de l'exercice 2018, à concurrence du montant résultant de la prise en compte des dépenses de recherche et développement afférentes aux opérations sous-traitées à la société à responsabilité limitée (SARL) Altim France. Par un jugement n° 2008608 du 22 juin 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 30 juillet 2021 et 7 janvier 2022, la SA Arkamys, représentée par Me Hautin, avocat, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2008608 du 22 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à prononcer la restitution du solde du crédit d'impôt pour dépenses de recherche dont elle s'estime titulaire au titre de l'exercice 2018, à concurrence du montant résultant de la prise en compte des dépenses de recherche et développement correspondantes aux opérations sous-traitées à la SARL Altim France ; 2°) de prononcer la restitution sollicitée ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens. Elle soutient, dans le dernier état de ses écritures, que : - les dépenses de sous-traitance confiées à la SARL Altim France à hauteur de 187 542 euros sont éligibles au crédit d'impôt pour dépenses de recherche, dès lors que la société justifie de l'affectation des personnels de la SARL Altim France sur les différents projets de recherche confiés ainsi que du nombre d'heures passées par chaque sous-traitant de la société Altim France à chacun de ses projets de recherche et développement ; - la SARL Altim France est un organisme de recherche privé agréé par le ministre chargé de la recherche et qu'elle dispose d'un agrément ; - la SARL Altim France a bien réalisé des opérations de sous-traitance en faisant travailler en régie, avec les équipes de la société requérante, quatre ingénieurs qui étaient nécessaires à la réalisation de ses projets. Par un mémoire en défense, enregistré le 13 décembre 2021, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que : - la société Arkamys ne justifie pas que la SARL Altim France est un organisme de recherche au sens de l'article L. 244 quater B du code général des impôts et qu'elle serait titulaire d'un agrément délivré par le ministre de la recherche ; - elle ne démontre pas l'accomplissement par la SARL Altim France de la réalisation d'opérations de recherche ; - elle ne justifie pas de la compétence des salariés concernés pour réaliser les opérations en litige ; - les factures présentées par la société requérante ne sont pas suffisamment précises pour justifier les dépenses facturées par la SARL Altim France. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - et les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. La SA Arkamys, qui est spécialisée dans le traitement numérique du signal sonore, a demandé la restitution de sa créance de crédit d'impôt pour dépenses de recherche d'un montant de 396 625 euros au titre de l'exercice clos en 2018. L'administration n'a admis que partiellement cette demande à hauteur de 340 263 euros. Par la présente requête, la SA Arkamys relève régulièrement appel du jugement du 22 juin 2021 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande de restitution du solde crédit d'impôt pour dépenses de recherche dont elle s'estime titulaire au titre de l'année 2018, à concurrence du montant de 56 262 euros résultant de la prise en compte des dépenses de recherche et développement afférentes aux opérations sous-traitées à la SARL Altim France. 2. Aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts : " I. Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année. (...) II. Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : (...) / d) Les dépenses exposées pour la réalisation d'opérations de même nature confiées à : / 1° Des organismes de recherche publics ; / 2° Des établissements d'enseignement supérieur (...) ; / 3° Des fondations de coopération scientifique agréées conformément au d bis ; / 4° Des établissements publics de coopération scientifique ; / 5° Des fondations reconnues d'utilité publique du secteur de la recherche agréées conformément au d bis ; / 6° Des associations régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association ayant pour fondateur et membre l'un des organismes mentionnés aux 1° ou 2° ou des sociétés de capitaux dont le capital ou les droits de vote sont détenus pour plus de 50 % par l'un de ces mêmes organismes. Ces associations et sociétés doivent être agréées conformément au d bis et avoir conclu une convention en application de l'article L. 313-2 du code de la recherche ou de la recherche ou de l'article L. 762-3 du code de l'éducation avec l'organisme précité. (...) / d bis) Les dépenses exposées pour la réalisation d'opérations de même nature confiées à des organismes de recherche privés agréés par le ministre chargé de la recherche, ou à des experts scientifiques ou techniques agréés dans les mêmes conditions. (...) ". Aux termes du I de l'article 49 septies de l'annexe III audit code : " Pour la détermination des dépenses de recherche visées aux (...) b (...) du II de l'article 244 quater B du code général des impôts, il y a lieu de retenir : (...) b Au titre des dépenses de personnel, les rémunérations et leurs accessoires ainsi que les charges sociales, dans la mesure où celles-ci correspondent à des cotisations sociales obligatoires. ". Ces dispositions ne limitent pas les dépenses de personnel susceptibles d'ouvrir droit au crédit d'impôt aux seules rémunérations et charges sociales versées pour des personnes employées par l'entreprise et affectées à des opérations de recherche susceptibles d'ouvrir droit à ce crédit, mais s'étendent aux rémunérations et aux charges sociales prises en charge par l'entreprise au titre de la mise à sa disposition par un tiers de personnes afin d'y effectuer, dans les locaux de l'entreprise et avec ses moyens, des opérations de recherche de cette dernière.

3. En premier lieu, dans son mémoire en défense, le ministre se prévaut, au bénéfice des dispositions de l'article L. 199 C du livre des procédures fiscales, de l'absence de détention d'un agrément délivré par le ministère de la recherche à la société Altim France conformément aux dispositions précitées. Toutefois, il résulte de l'instruction que la société Altim France disposait d'un agrément délivré par le ministère de la recherche le 26 mai 2016 en qualité d'organisme de recherche privée pour les années 2016, 2017 et 2018. 4. En second lieu, l'administration fait valoir également que la société requérante ne produit pas d'éléments permettant de justifier de la réalité des prestations de recherche développement réalisées par les salariés de la société sous-traitante, qui lui ont été facturées. 5. En l'espèce, la SA Arkamys sollicite la prise en compte dans l'assiette du crédit d'impôt recherche pour 2018, au titre du d bis) des dispositions précitées de l'article 244 quater B du code général des impôts, de la facturation par la SARL Altim France de prestations sous-traitées pour son compte à cette dernière. Elle fait notamment valoir qu'elle a conclu le 6 juillet 2017 avec la SARL Altim France un contrat cadre ainsi que deux contrats d'application portant, d'une part, sur les algorithmes d'amélioration du son dans l'automobile, le suivi des projets, qualité, coût et délais, l'estimation de la charge, le pilotage de l'effort, la gestion client, tant d'équipementiers de rang 1 que de constructeurs automobiles, ainsi que la participation à la mise en place de pratiques agiles, et, d'autre part, sur l'évolution des outils de réglage et de paramétrage des algorithmes Arkamys sur les cibles des clients, le développement d'applications graphiques sous Windows notamment et de protocoles de communication (UART, Ethernet, propriétaire). Ces contrats prévoyaient la facturation de la mise à disposition de personnels à hauteur d'une rémunération forfaitaire respectivement de 410 euros et 430 euros / hors taxes par jour par personnel. La société requérante produit également une fiche complémentaire qui reprend l'éligibilité au crédit d'impôt recherche, au demeurant non contestée par l'administration, de deux projets développés par la SA Arkamys (SoundStage et AutoEQ), auxquels ont participé les quatre consultants de la SARL Altim France, et qui précise, à partir d'extractions d'un logiciel de suivi des temps passés utilisé par la SA Arkamys pour ses propres personnels, à quelle part de leur temps de travail ils ont contribué à la réalisation des projets en cause. 6. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que les prestations facturées par la SARL Altim France correspondent aux interventions de quatre salariés de cette société, employés en régie par la SA Arkamys, qui, au regard de leurs diplômes d'ingénieurs, doivent être regardés comme des personnels de recherche aux sens des dispositions précitées de l'article 244 quater B du code général des impôts. Enfin, la société requérante produit un tableau qui individualise le nombre d'heures passées par chacun des salariés mentionnés au traitement des deux projets de recherche et développement menés par la société Arkamys. Ce tableau est le résultat d'une extraction des heures renseignées par les sous-traitants de la société dans le logiciel JIRA qui permet de visualiser l'état d'avancement d'un projet en permettant le découpage des projets en récits utilisateurs (tâches, composants, temps passé...) et leur affectation aux développeurs. Cette extraction permet d'identifier la personne concernée (case " Full Name "), la date à laquelle le travail a été réalisé (case " Work date "), le nombre d'heures passées par le sous-traitant à cette date (case " Hours "), le nom de la mission sur laquelle le sous-traitant a travaillé (case " Project Name ") et la description du travail réalisé (case " Issue summary " et " Work description "). A partir de ces extractions de temps du logiciel JIRA et sur la base des factures mensuelles adressées par la société Altim France à la société Arkamys, cette dernière a déterminé la quote-part de dépenses de sous-traitance éligibles à retenir pour la détermination du crédit d'impôt pour dépenses de recherche 2018 puis a appliqué à chaque sous-traitant un " taux RetD " à leur coût journalier hors taxes pour connaître la valorisation en recherche et développement. 7. Au regard de ce qui précède, la société requérante produit suffisamment d'éléments permettant d'attester le nombre d'heures consacrées par chaque salarié de la SARL Altim France aux deux projets éligibles. Elle doit dès lors être regardée comme établissant le caractère éligible des dépenses dont la prise en charge, à hauteur d'un montant de 187 542 euros, est demandée au titre du crédit d'impôt pour dépenses de recherche. La SA Arkamys est donc fondée à solliciter la restitution du crédit d'impôt pour dépenses de recherche résultant de la prise en compte de ces dépenses, soit 56 262 euros. 8. Il résulte de tout ce qui précède que la SA Arkamys est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'annulation et de restitution d'imposition doivent dès lors être accueillies. Sur les dépens : 9. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête ou de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat ". La présente instance n'ayant comporté aucuns desdits frais, les conclusions de la société Arkamys tendant à la condamnation de l'autre partie aux dépens ne peuvent qu'être rejetées. Sur les frais liés au litige : 10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SA Arkamys d'une somme de 3 000 euros au titre des frais d'instance en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.D E C I D E :Article 1er : Le jugement n° 2008608 du tribunal administratif de Paris du 22 juin 2021 est annulé.Article 2 : L'Etat remboursera à la SA Arkamys la somme de 56 262 euros au titre d'un crédit d'impôt recherche pour l'exercice 2018.Article 3 : L'Etat versera à la SA Arkamys la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.Article 4 : Les conclusions de la SA Arkamys sont rejetées pour le surplus.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme (SA) Arkamys et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.Copie en sera adressée à l'administratrice des finances publiques chargée de la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris (service du contentieux d'appel déconcentré - SCAD).Délibéré après l'audience du 10 juin 2022, à laquelle siégeaient :- M. Carrère, président,- M. Soyez, président assesseur,- Mme Boizot, première conseillère.Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 28 juin 2022.La rapporteure,S. A...Le président,S. CARRERE La greffière,C. DABERTLa République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.2N° 21PA04372


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA04372
Date de la décision : 28/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: Mme Sabine BOIZOT
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : HAUTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-06-28;21pa04372 ?
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