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02/06/2022 | FRANCE | N°21PA03898

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 02 juin 2022, 21PA03898


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du

6 juillet 2020 par lequel le préfet de police lui a refusé le renouvellement d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement.

Par jugement n° 2104905/6-3 du 10 juin 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 10 juillet 2021, M. B..., repré

senté par Me Nasio, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2104905/6-3 du 10 juin 2021 du Tr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du

6 juillet 2020 par lequel le préfet de police lui a refusé le renouvellement d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement.

Par jugement n° 2104905/6-3 du 10 juin 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 10 juillet 2021, M. B..., représenté par Me Nasio, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2104905/6-3 du 10 juin 2021 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 6 juillet 2020 par lequel le préfet de police lui a refusé le renouvellement d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour ou à défaut de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer pendant ce réexamen un récépissé de demande de renouvellement de titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;

- il n'a pas été précédé d'un examen particulier de sa situation ;

- il est illégal dès lors que le préfet s'est à tort cru lié par l'avis du collège de médecins de l'Office français d'immigration et d'intégration (OFII) ;

- il est entaché d'un vice de procédure en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 10° du même code ;

- il méconnaît les stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa santé physique, sa vie privée et sa santé morale ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.

La requête a été transmise au préfet de police qui n'a pas produit d'observations.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 8 septembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... est un ressortissant ivoirien né le 16 septembre 1985, entré en France le 24 décembre 2017 selon ses déclarations. Il a sollicité le 17 février 2020 le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 6 juillet 2020, le préfet lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement. Par jugement n° 2104905/6-3 du 10 juin 2021, dont M. B... relève appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, M. B... invoque les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de l'arrêté attaqué, du défaut d'examen particulier de sa situation personnelle et de ce que le préfet de police se serait considéré à tort comme étant en situation de compétence liée par l'avis du collège de médecins de l'OFII. Toutefois, il n'apporte à l'appui de ces moyens, déjà soulevés devant le Tribunal administratif de Paris, aucun élément nouveau susceptible de remettre en cause l'appréciation portée à juste titre par les premiers juges. Il y a dès lors lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par ces derniers aux points 2 et 3 du jugement attaqué.

3. En deuxième lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa numérotation alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée. (...) ". L'article R. 313-22 du même code dispose que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". D'autre part, aux termes du 10° de l'article L. 511- 4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa numérotation alors applicable : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué du 6 juillet 2020 a été pris après avis, du collège de médecins de l'Office français d'immigration et d'intégration (OFII) du 4 juin 2020 qui a considéré que l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité. Le requérant se borne à soutenir que lors de sa précédente demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le collège de médecins de l'OFII a considéré que son état de santé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut peut avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Toutefois, la circonstance que l'état de santé de M. B... lui ait précédemment permis d'obtenir la délivrance d'un titre de séjour sur ce fondement ne permet pas à elle seule d'établir qu'à la date à laquelle le préfet de police a pris l'arrêté attaqué du 6 juillet 2020, son état de santé justifiait toujours le renouvellement d'un tel titre. Il suit de là que M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'en prenant à son encontre l'arrêté attaqué, le préfet de police aurait méconnu les dispositions précitées des articles L. 313-11-11° et L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. En troisième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. M. B... soutient être entré en France en 2016 et avoir le centre de ses intérêts sur le territoire français ainsi que ses amis, ses projets de vie et de travail et qu'il n'a plus d'attaches familiales dans son pays d'origine, la Côte d'Ivoire. Il ressort des pièces du dossier qu'il est célibataire et sans charge de famille en France et il n'établit pas l'existence de son insertion sur le territoire français. Dans ces conditions, le préfet de police n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a pris l'arrêté attaqué et n'a, dès lors, pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa santé physique, sa vie privée et sa santé morale.

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont les dispositions sont désormais codifiées à l'article L. 432-13 de ce code, la commission du titre de séjour " est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ". Il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions d'obtention du titre de séjour sollicité auxquels il envisage de refuser ce titre de séjour et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions.

8. Or, il résulte de ce qui précède que M. B... ne justifie pas satisfaire aux conditions prévues par les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de police n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande. Le moyen tiré du défaut de saisine de la commission du titre de séjour ne peut qu'être écarté.

9. En cinquième lieu, aux termes de l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 : " Le droit de toute personne à la vie est protégée par la loi ". Aux termes de l'article 3 de cette même convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

10. Dès lors qu'il résulte de ce qui est indiqué au point 4 du présent arrêt que le requérant n'établit pas que son état de santé nécessite une prise en charge dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, le moyen selon lequel l'arrêté attaqué méconnaîtrait les stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas davantage fondé.

11. En dernier lieu, M. B... n'établit pas que les décisions portant refus de renouvellement de titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français qui lui ont été opposées sont illégales. Dès lors, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de ces décisions, soulevé à l'appui des conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination, ne peut qu'être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 juillet 2020. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont également rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 16 mai 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Le Goff, président,

- M. Ho Si Fat, président assesseur,

- Mme Collet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 2 juin 2022.

La rapporteure,

A. A... Le président,

R. LE GOFF

La greffière,

E. VERGNOL

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA03898


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA03898
Date de la décision : 02/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LE GOFF
Rapporteur ?: Mme Aude COLLET
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : SELARL IVAN NASIO AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 14/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-06-02;21pa03898 ?
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