Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association France Nature Environnement Paris a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler, d'une part, l'arrêté du 3 octobre 2017 par lequel le maire de Paris a délivré à la société coopérative d'intérêt collectif par actions simplifiée Le paysan urbain Grand Paris un permis de construire pour l'aménagement d'une ferme urbaine sur le réservoir d'eau non potable de Charonne, sur un terrain sis 8/12 rue Stendhal et 15 /21 chemin du parc de Charonne à Paris (XXème arrondissement) et, d'autre part, la décision du 24 janvier 2018 rejetant son recours gracieux formé à l'encontre de cet arrêté.
Par un jugement n° 1805246 du 16 juillet 2020 le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 21 septembre 2020 et des mémoires enregistrés les 21 octobre 2020, 23 février 2021 et 9 janvier 2022, l'association France Nature Environnement Paris représentée par Me Cofflard, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1805246 du 16 juillet 2020 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler, d'une part, l'arrêté du 3 octobre 2017 par lequel le maire de Paris a délivré à la société coopérative d'intérêt collectif par actions simplifiée Le paysan urbain Grand Paris un permis de construire (n° PC 075 120 17 V 0029) pour l'aménagement d'une ferme urbaine sur le réservoir d'eau non potable de Charonne, sur un terrain sis 8/12 rue Stendhal et 15 /21 chemin du parc de Charonne à Paris (XXème arrondissement), d'autre part, la décision du 24 janvier 2018 rejetant son recours gracieux formé à l'encontre de cet arrêté et, enfin, l'arrêté du maire de Paris en date du 28 février 2019 délivrant un permis de construire (n° PC 075 120 19 V 0012) aux mêmes fins.
3°) de mettre à la charge de la Ville de Paris et de la société coopérative d'intérêt collectif par actions simplifiée Le paysan urbain Grand Paris le versement d'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- il ne répond pas à un moyen qui n'était pas inopérant ;
- le projet litigieux méconnait les dispositions de l'article UG 11.1 du règlement du plan local d'urbanisme de la Ville de Paris ;
- il méconnait également les dispositions de l'article UG 11.1.3 du même règlement ;
- il est entaché d'une erreur d'appréciation et d'une erreur de droit au regard des dispositions de l'article UG 15.3.2. de ce règlement ;
- les autres moyens de légalité externe et de légalité interne soulevés dans sa demande de première instance sont fondés et il y a lieu pour la Cour d'y statuer par l'effet dévolutif de l'appel.
Par des mémoires en défense enregistrés le 23 février 2021 et le 11 avril 2022, la société coopérative d'intérêt collectif par actions simplifiée à capital variable Le paysan urbain Grand Paris, représentée par Me de Lombardon, conclut, à titre principal, au non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête et, à titre subsidiaire, au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis la somme de 3 000 euros à la charge de l'association requérante en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- il y a lieu, en application de l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, de fixer par ordonnance un délai au-delà duquel ne pourra plus être invoqué de moyens nouveaux ;
- à titre subsidiaire, aucun des moyens de la requête n'est fondé, comme il a été exposé dans son mémoire en défense de première instance qui est joint au présent mémoire ;
- il n'y a plus lieu à statuer sur les conclusions de la requérante dirigées contre le permis de construire délivré le 3 octobre 2017, au bénéfice duquel elle a renoncé et dont elle a demandé le retrait à la Ville de Paris le 13 janvier 2022, dès lors qu'elle a en outre demandé puis obtenu un nouveau permis de construire le 20 août 2019, lequel a été affiché sur le terrain ;
- les conclusions de l'association requérante sont irrecevables comme tardives et présentées à tort devant la Cour et dépourvues de tout moyen de droit ;
Par des mémoires en défense enregistrés le 4 juin 2021, le 12 janvier 2022 et 12 avril 2022, la Ville de Paris, représenté par Me Falala conclut, à titre principal, au non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête et, à titre subsidiaire, au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis la somme de 1 500 euros à la charge de l'association requérante en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la délivrance d'un nouveau permis de construire au bénéficiaire d'un précédent permis, sur le même terrain, a implicitement mais nécessairement pour effet de rapporter le permis initial, ce retrait étant indivisible de la délivrance du nouveau permis ; par suite, les conclusions aux fins d'annulation du permis initial ne deviennent sans objet du fait de la délivrance d'un nouveau permis qu'à la condition que le retrait qu'il a opéré ait acquis, à la date à laquelle le juge qui en est saisi se prononce, un caractère définitif ;
- le second permis ne peut devenir définitif que s'il a été notifié au requérant et qu'il n'a pas été attaqué dans le délai de recours contentieux ;
- en l'espèce, le permis attribué le 20 août 2019 constitue un permis nouveau, dès lors qu'il a été dicté par des considérations sécuritaires impératives, et que le changement du projet a été très substantiel, et son économie générale bouleversée ;
- ce permis a été transmis en préfecture et ainsi rendu exécutoire le 23 août 2019, et affiché en mairie le même jour ; il a été en outre affiché sur le terrain, sans donner lieu au moindre recours d'un tiers ; l'association requérante en a eu individuellement connaissance au plus tard au moment d'en recevoir notification par le greffe le 23 février 2021 ; elle ne l'a pas contesté dans le délai de deux mois qui a suivi ;
- le non-lieu à statuer s'impose, dès lors que le permis de construire initial ne pourra jamais être mis en œuvre, tant en raison de son retrait, qui découle de l'intervention du nouveau permis, que de la renonciation du bénéficiaire et d'impossibilités techniques ;
- ce même permis initial a en outre été retiré par un arrêté du maire de Paris en date du 11 avril 2022 ;
- à titre subsidiaire, aucun des moyens de la requête n'est fondé, comme il a été exposé dans son mémoire en défense de première instance qui est joint au présent mémoire.
Le 21 décembre 2021, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la décision de la Cour était susceptible d'être fondée sur le moyen, relevé d'office, tiré de ce que, en application des dispositions du second alinéa de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme, dans leur rédaction issue de l'article 58 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, la délivrance d'un nouveau permis de construire au bénéficiaire d'un précédent permis, sur le même terrain, ne rend pas sans objet un recours dirigé contre le premier initial, tant que ce dernier n'a pas fait l'objet d'une décision de retrait prononcée à la demande de son bénéficiaire.
Le 7 avril 2022, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la décision de la Cour était susceptible d'être fondée sur les moyens, relevés d'office, tirés de ce que les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Paris en date du 28 février 2019 délivrant un permis de construire (n° PC 075 120 19 V 0012) sont irrecevables dès lors que :
- elles ont été présentées directement devant le juge d'appel, alors que le permis de construire ne peut être regardé comme " modificatif " au sens et pour l'application de l'article
L. 600-5-2 du code de l'urbanisme ;
- elles sont tardives ;
- elles ne sont fondées sur aucun moyen de droit.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- les conclusions de Mme Guilloteau, rapporteure publique,
- les observations de Me Cofflard, avocat de l'association France Nature Environnement Paris,
- et les observations de Me Gorse, substituant Me Falala, avocat de la Ville de Paris.
Une note en délibéré a été présentée le 20 avril 2022 pour l'association France Nature Environnement Paris.
Considérant ce qui suit :
1. L'association France Nature Environnement Paris a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler, d'une part, l'arrêté du 3 octobre 2017 par lequel le maire de Paris a délivré à la société coopérative d'intérêt collectif par actions simplifiée Le paysan urbain Grand Paris un permis de construire (n° 075 120 17 V 0029) pour l'aménagement d'une ferme urbaine sur le réservoir d'eau non potable de Charonne, sur un terrain sis 8/12 rue Stendhal et 15 /21 chemin du parc de Charonne à Paris (XXème arrondissement) et, d'autre part, la décision du 24 janvier 2018 rejetant son recours gracieux. Elle relève appel devant la Cour du jugement du 16 juillet 2020 par lequel ce tribunal a rejeté ses demandes.
2. Une nouvelle demande de permis de construire ayant été déposée le 28 février 2019 par la société coopérative d'intérêt collectif par actions simplifiée Le paysan urbain Grand Paris, le maire de Paris y a fait droit par un arrêté du 20 août 2019 délivrant le permis de construire
n° 075 120 19 V0012. L'association France Nature Environnement Paris demande également à la Cour d'annuler ce nouvel arrêté.
Sur les demandes des parties relatives à l'instruction :
3. En premier lieu, l'association France Nature Environnement Paris représentée par Me Cofflard, demande à la Cour d'user de ses pouvoirs d'instruction pour ordonner la communication du permis de construire délivré le 28 février 2019 sous le n° PC 075 120 19 V 0012 dont elle demande l'annulation dans son mémoire enregistré le 23 février 2021.
4. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 412-1 du code de justice administrative : " La requête doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée, sauf impossibilité justifiée, de l'acte attaqué. " L'association requérante a mentionné elle-même l'existence du permis de construire délivré le 28 février 2019 dans son mémoire enregistré le 23 février 2021. L'arrêté y relatif lui a été notifié en même temps que le mémoire de la société coopérative d'intérêt collectif par actions simplifiée à capital variable Le paysan urbain Grand Paris qui produisait ce permis. Il n'appartient pas à la Cour, en l'absence, en l'espèce, de toute " impossibilité justifiée ", d'ordonner à l'administration de produire tout ou partie des pièces afférentes à ce permis de construire, alors même que l'association requérante n'allègue même pas en avoir demandé la communication aux services de la Ville de Paris.
5. En second lieu, la société coopérative d'intérêt collectif par actions simplifiée à capital variable Le paysan urbain Grand Paris fait valoir qu'il y a lieu, en application de l'article
R. 611-7-1 du code de justice administrative, de fixer par ordonnance un délai au-delà duquel il ne pourra plus être invoqué de moyens nouveaux
6. Aux termes des deux premiers alinéas de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme : " Par dérogation à l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, et sans préjudice de l'application de l'article R. 613-1 du même code, lorsque la juridiction est saisie d'une requête relative à une décision d'occupation ou d'utilisation du sol régie par le présent code, ou d'une demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant une telle décision, les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense. Cette communication s'effectue dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 611-3 du code de justice administrative. / Lorsqu'un permis modificatif, une décision modificative ou une mesure de régularisation est contesté dans les conditions prévues à l'article L. 600-5-2, les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux à son encontre passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense le concernant. ".
7. Conformément aux dispositions précitées, aucun moyen nouveau n'a pu être invoqué, d'une part, à l'encontre de l'arrêté contesté du 3 octobre 2017 après le 24 mai 2021, à l'expiration du délai de deux mois suivant date de communication aux parties du premier mémoire en défense de la société coopérative d'intérêt collectif par actions simplifiée à capital variable Le paysan urbain Grand Paris et, d'autre part, à l'encontre de l'arrêté contesté du 28 février 2019 après le
5 août 2021, après la communication aux parties du premier mémoire en défense de la Ville de Paris suivant la contestation de ce second arrêté. Par suite, la demande de la société coopérative d'intérêt collectif par actions simplifiée à capital variable Le paysan urbain Grand Paris tendant à ce qu'il soit fait usage de la procédure de cristallisation des moyens prévue à l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, est sans objet.
Sur le non-lieu à statuer, relativement au permis de construire délivré le 3 octobre 2017 :
8. Par un arrêté en date du 11 avril 2022, le maire de Paris a retiré, sur la demande de la société pétitionnaire, le permis de construire délivré le 3 octobre 2017, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait connu le moindre commencement d'exécution. Il s'ensuit que les conclusions qui tendent à l'annulation dudit permis sont devenues sans objet et qu'il n'y a donc plus lieu d'y statuer.
Sur les conclusions tendant à l'annulation du permis de construire délivré le 20 août 2019 :
9. Aux termes de l'article L. 600-5-2 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'un permis modificatif (...) intervient au cours d'une instance portant sur un recours dirigé contre le permis de construire, de démolir ou d'aménager initialement délivré ou contre la décision de non-opposition à déclaration préalable initialement obtenue et que ce permis modificatif (...) ont été communiqués aux parties à cette instance, la légalité de cet acte ne peut être contestée par les parties que dans le cadre de cette même instance. ".
10. À supposer même que le permis de construire délivré le 28 février 2019 puisse être regardé comme présentant un caractère seulement " modificatif " le faisant entrer dans le champ d'application des dispositions précitées de l'article L. 600-5-2 du code de l'urbanisme, il ressort des pièces du dossier qu'il a été notifié le 23 février 2021, par l'effet de la communication du mémoire en défense des bénéficiaires auquel il était joint, à l'association requérante, et qu'ainsi cette dernière doit être regardée comme en ayant eu connaissance acquise au plus tard à cette date. Les conclusions à fin d'annulation de cet arrêté, présentées à la Cour le même jour, n'étaient fondées sur aucun moyen de droit, et l'association requérante n'a jamais complété ses écritures ultérieures par l'exposé de tels moyens, et notamment pas durant le délai de deux mois suivant la communication, à elle faite le 23 février 2021, du permis de construire qu'elle contestait pourtant expressément. Ses conclusions tendant à l'annulation de cet arrêté méconnaissent ainsi les dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative.
11. Il résulte de ce qui précède que les conclusions de l'association requérante dirigées contre le permis délivré le 20 août 2019 sont irrecevables et doivent être rejetées.
Sur les frais du litige :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'association France Nature Environnement Paris, qui dans la présente instance est la partie perdante, en puisse invoquer le bénéfice. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à sa charge les sommes réclamées sur le fondement des mêmes dispositions par la Ville de Paris et par la société coopérative d'intérêt collectif par actions simplifiée Le paysan urbain Grand Paris.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête de l'association France Nature Environnement Paris dirigées contre l'arrêté du 3 octobre 2017 par lequel le maire de Paris a délivré à la société coopérative d'intérêt collectif par actions simplifiée Le paysan urbain Grand Paris un permis de construire pour l'aménagement d'une ferme urbaine sur le réservoir d'eau non potable de Charonne, sur un terrain sis 8/12 rue Stendhal et 15 /21 chemin du parc de Charonne à Paris (XXème arrondissement) et contre la décision du 24 janvier 2018 rejetant son recours gracieux formé à l'encontre de cet arrêté.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête d'appel de l'association France Nature Environnement Paris est rejeté.
Article 3 : Les conclusions de la Ville de Paris et de la société coopérative d'intérêt collectif par actions simplifiée Le paysan urbain Grand Paris fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'association France Nature Environnement Paris, à la Ville de Paris et à la société coopérative d'intérêt collectif par actions simplifiée Le paysan urbain Grand Paris.
Copie en sera adressée au préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris.
Délibéré après l'audience du 14 avril 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président de chambre,
- M. Diémert, président-assesseur,
- M. Gobeill, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 mai 2022.
Le rapporteur,
S. A...Le président,
J. LAPOUZADE La greffière,
C. POVSE
La République mande et ordonne au préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA02765