Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 1er juillet 2021 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, ainsi que l'arrêté du même jour par lequel il lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de trois ans.
Par un jugement n° 2114156/8 du 15 septembre 2021, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé les arrêtés du 1er juillet 2021 et a enjoint au préfet de police de réexaminer la situation de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et de lui délivrer, dans un délai de quinze jours, une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il ait statué sur son cas et a rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. B....
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 15 octobre 2021, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 15 septembre 2021 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le Tribunal administratif de Paris.
Il soutient que :
- M. B... a été auditionné par les services de police le 1er juillet 2021, avant l'édiction des décisions en litige et il ressort du procès-verbal d'audition que tous les éléments utiles à l'examen de sa situation ont été recueillis et qu'il a été invité par les services de police à formuler toute observation complémentaire ; par ailleurs, il n'a pas fait valoir devant le tribunal des éléments pertinents ou des observations complémentaires utiles, qui auraient pu faire obstacle à la mesure d'éloignement contestée ; dans ces conditions, le droit de M. B... à être entendu, énoncé notamment par les principes généraux de l'Union européenne, n'a pas été méconnu ;
- les autres moyens soulevés par M. B... devant le Tribunal administratif de Paris ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense enregistré le 25 novembre 2021, M. B..., représenté par Me Nombret, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour :
1°) de l'admettre au bénéfice provisoire de l'aide juridictionnelle ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à Me Nombret, conseil de M. B..., sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de la renonciation de son avocate au bénéfice de la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- le moyen soulevé par le préfet de police n'est pas fondé ;
S'agissant des décisions l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination :
- les décisions l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination sont insuffisamment motivées ;
- le préfet de police n'a pas procédé à un examen sérieux et particulier de sa situation personnelle avant d'édicter les décisions contestées ;
- il a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ses décisions sur sa situation personnelle eu égard aux persécutions dont l'intéressé sera victime en cas de retour dans son pays d'origine ; pour des motifs d'ordre humanitaire, il aurait dû régulariser sa situation ;
S'agissant de la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire :
- la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire ;
S'agissant de la décision prononçant une interdiction de retour sur le territoire français :
- la décision prononçant une interdiction de retour sur le territoire français est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire et de la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire ;
- elle est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne mentionne pas une éventuelle mesure d'éloignement dont il aurait fait l'objet et que, par suite, l'ensemble des critères prévus par la loi ne sont pas visés ;
- le préfet de police a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;
- la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français fixée à trente-six mois est disproportionnée dès lors que son comportement ne constitue pas une menace à l'ordre public suffisante pour justifier cette durée.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n°2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant tunisien, entré en France en mars 2020 selon ses déclarations, a été interpellé par les services de police le 30 juin 2021. Par un arrêté du 1er juillet 2021, le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement. Par un second arrêté du même jour, il a prononcé à l'encontre de M. B... une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trente-six mois. Par un jugement du 15 septembre 2021, le Tribunal administratif de Paris a annulé les arrêtés du 1er juillet 2021 et a enjoint au préfet de police de réexaminer la situation de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. Le préfet de police relève appel de ce jugement.
Sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :
2. Il résulte de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence (...) l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée (...) par la juridiction compétente ou son président (...) ". Aux termes de l'article 61 du décret du 28 décembre 2020 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " L'admission provisoire peut être accordée dans une situation d'urgence, notamment lorsque la procédure met en péril les conditions essentielles de vie de l'intéressé (...) / L'admission provisoire est accordée par (...) le président de la juridiction saisie, soit sur une demande présentée sans forme par l'intéressé, soit d'office si celui-ci a présenté une demande d'aide juridictionnelle (...) sur laquelle il n'a pas encore été statué ".
3. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., représenté par Me Nombret et qui a présenté son mémoire en défense le 25 novembre 2021, n'a pas déposé de demande d'aide juridictionnelle auprès du bureau d'aide juridictionnelle. Eu égard aux circonstances de l'espèce, alors que la situation d'urgence, au sens de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991, n'est pas caractérisée, il n'y a pas lieu de prononcer l'admission provisoire de M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Sur le moyen d'annulation retenu par le premier juge :
4. Il ressort du procès-verbal de l'audition menée le 1er juillet 2021 par les services de police dans le cadre de l'interpellation de M. B... que celui-ci a été assisté par un interprète en langue arabe et qu'il a été interrogé sur les étapes de son parcours, les conditions et la date de son entrée sur le territoire français ainsi que sur les raisons de sa venue en France. Il ressort de ce procès-verbal que M. B... n'a pas été informé de la mesure d'éloignement envisagée. Toutefois, M. B... ne justifie pas qu'il a été privé, du fait de l'absence de cette information, de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision en litige. Dans ces conditions, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a annulé sa décision du 1er juillet 2021 obligeant M. B... à quitter le territoire français sans délai au motif que celui-ci n'aurait pas été entendu avant l'adoption de cette décision et que le principe des droits de la défense aurait été méconnu.
5. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant le Tribunal administratif de Paris et la Cour.
Sur les autres moyens soulevés par M. B... :
En ce qui concerne les arrêtés du 1er juillet 2021 dans leur ensemble :
6. Par un arrêté n° 2021-00539 du 9 juin 2021, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture de police du même jour, le préfet de police a donné délégation à M. C... A..., attaché d'administration de l'État, pour signer tous actes, arrêtés et décisions dans la limite de ses attributions. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des arrêtés du 1er juillet 2021 doit être écarté.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
7. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) ". Aux termes de l'article L. 613-1 du même code : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. (...) ".
8. En premier lieu, la décision contestée vise notamment la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en particulier son article 8, l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment le 1° de l'article L. 611-1. Elle précise l'identité, la date et le lieu de naissance de M. B... ainsi que sa nationalité. Elle mentionne que l'intéressé ne peut justifier d'un titre de séjour pour se maintenir sur le territoire français et qu'il est entré en France sous couvert d'un document de voyage non revêtu du visa prévu par les articles L. 311-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet de police n'est pas tenu de reprendre l'ensemble des éléments personnels de la situation de M. B.... Ainsi, la décision contestée comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision doit être écarté.
9. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que le préfet de police a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. B... avant de prendre la décision contestée.
10. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ".
11. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a déclaré être entré sur le territoire français en mars 2020. Il est célibataire et sans charge de famille en France et il n'établit pas la réalité des liens personnels dont il se prévaut. Il ne justifie pas être dépourvu de toutes attaches dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 27 ans. En outre, il n'établit pas être particulièrement intégré à la société française alors qu'il a été interpellé pour menaces de mort et violences volontaires en état d'ivresse sur une personne chargée d'une mission de service public dans une gare parisienne le
30 juin 2021. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision en litige n'a pas porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
12. En dernier lieu, M. B... soutient qu'il fera l'objet de persécutions en cas de retour dans son pays d'origine et que le préfet aurait dû régulariser sa situation. Cependant, le requérant ne verse au débat aucune pièce de nature à établir la réalité des risques auxquels il serait personnellement exposé en cas de retour en Tunisie. En outre, comme il vient d'être dit, M. B..., qui est entré récemment en France, est célibataire et sans charge de famille. Il ne se prévaut pas d'attaches familiales en France et n'établit pas en outre avoir développé des liens personnels. Par ailleurs, il ne justifie pas d'une particulière intégration à la société française. Au vu de l'ensemble de ces éléments, le préfet de police n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation de M. B....
En ce qui concerne la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire :
13. Aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. (...) ". Aux termes de l'article L. 612-2 du même code : " Par dérogation à l'article
L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; (...); 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet " .
14. En premier lieu, les moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée à l'appui des conclusions de M. B... dirigées contre la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire ne peut qu'être écartée par voie de conséquence.
15. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 613-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les décisions relatives au refus et à la fin du délai de départ volontaire prévues aux articles L. 612-2 et L. 612-5 et les décisions d'interdiction de retour et de prolongation d'interdiction de retour prévues aux articles L. 612-6, L. 612-7, L. 612-8 et L. 612-11 sont distinctes de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Elles sont motivées ".
16. La décision contestée vise notamment la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en particulier son article 8, et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment l'article L. 612-2. Elle mentionne que le comportement de M. B... a été signalé par les services de police le 30 juin 2021 pour violences volontaires en état d'ivresse sur une personne chargée d'une mission de service public dans un lieu destiné à l'accès à un moyen de transport collectif de voyageurs et pour menaces de mort à l'encontre d'une personne chargée de mission de service public de voyageurs commis à Paris. Elle précise en outre que l'intéressé, qui ne peut pas justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour et qu'il ne présente pas de garanties de représentation suffisantes dans la mesure où il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale. Enfin, elle porte l'appréciation qu'aucune circonstance particulière n'est de nature à remettre en cause la réalité du risque de fuite de l'intéressé. Ainsi, la décision contestée comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision doit être écarté.
17. En dernier lieu, M. B... soutient qu'il dispose d'une adresse stable dans le 17ème arrondissement de Paris. Cependant, il n'établit pas bénéficier d'un hébergement effectif et permanent. Dans ces conditions, le préfet de police a pu légalement considérer qu'il existait un risque qu'il ne se conforme pas à l'obligation de quitter le territoire français en litige. M. B... ne conteste pas le motif tiré de ce que son comportement constitue une menace pour l'ordre public. Par suite, le préfet de police n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile citées au point 13 en estimant qu'il existait un risque de fuite et une menace pour l'ordre public justifiant qu'aucun délai de départ volontaire ne soit accordé à M. B.... Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le refus d'accorder un délai de départ volontaire comporte des conséquences d'une particulière gravité sur la situation personnelle de l'intéressé qui, comme il a déjà été dit, est célibataire et sans charge de famille en France et ne justifie pas d'une particulière intégration à la société française.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
18. En premier lieu, la décision fixant le pays de destination vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en particulier son article 3 et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment son article L. 721-4. Elle mentionne la nationalité de M. B... et porte l'appréciation selon laquelle l'intéressé n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision contestée doit être écarté.
19. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que le préfet de police a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. B... avant de prendre la décision contestée.
20. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
21. M. B... soutient qu'en sa qualité d'ancien militaire, il fera l'objet de persécutions en cas de retour en Tunisie. Toutefois, il ne verse aucune pièce au soutien de cette allégation. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ait déposé une demande d'asile depuis son arrivée en France. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
22. En quatrième lieu, compte tenu de ce qui a été énoncé au point 11, la décision fixant le pays de destination ne porte pas, en tout état de cause, une atteinte disproportionnée par rapport au but qu'elle poursuit au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale.
23. En cinquième et dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 11 et 12, le préfet de police n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. B....
En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trente-six mois :
24. En premier lieu, les décisions portant obligation de quitter le territoire français et de refus d'octroi d'un délai de départ volontaire n'étant entachées d'aucune des illégalités alléguées, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de ces décisions invoquée à l'appui des conclusions dirigées contre la décision prononçant une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trente-six mois doit être écarté.
25. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ". Il résulte des dispositions citées au point 15 de l'article L. 613-2 du même code que la décision d'interdiction de retour prévue à l'article L. 612-6 du code doit être motivée.
26. La décision prononçant à l'encontre de M. B... l'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trente-six mois vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment ses articles 3 et 8 et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment son article L. 612-6. Il ressort également des termes de cette décision que le préfet de police a, pour fixer la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français, relevé que l'intéressé représente une menace pour l'ordre public en restant sur le territoire français dès lors que son comportement a été signalé par les services de police le 30 juin 2021 pour violences volontaires en état d'ivresse sur une personne chargée d'une mission de service public dans un lieu destiné à l'accès à un moyen de transport collectif de voyageurs et pour menaces de mort à l'encontre d'une personne chargée de mission de service public de voyageurs commis à Paris, qu'il allègue être entré sur le territoire français depuis mars 2020 et qu'il ne peut se prévaloir de liens suffisamment anciens, forts et caractérisés avec la France, l'intéressé se déclarant célibataire et sans enfant à charge. Dans ces conditions, et alors que le préfet de police n'était en tout état de cause pas tenu de se prononcer sur chacun des critères mentionnés à l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mais seulement sur ceux qu'il entendait retenir, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision contestée doit être écarté comme manquant en fait.
27. En troisième lieu, M. B... soutient que son comportement ne constitue pas une menace à l'ordre public et que la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français fixée à trente-six mois est disproportionnée. Toutefois, il ne conteste pas la matérialité des faits qui lui sont reprochés, lesquels sont au demeurant établis par les pièces du dossier. En outre, il ne justifie d'aucune circonstance humanitaire susceptible de faire obstacle à la mesure. Dans ces conditions, l'interdiction de retour d'une durée de trente-six mois n'est pas contraire aux dispositions de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
28. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 11, 12 et 27, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.
29. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé ses arrêtés du
1er juillet 2021 et lui a enjoint de réexaminer la situation de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et de lui délivrer immédiatement une autorisation provisoire de séjour valable jusqu'à ce qu'il ait statué sur son cas et à demander en conséquence l'annulation des articles 1er et 2 de ce jugement.
Sur les frais de l'instance :
30. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et font obstacle, en tout état de cause, à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme au conseil de M. B... au titre des frais liés à l'instance.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'admission provisoire de M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Article 2 : Les articles 1er et 2 du jugement n° 2114156/8 du 15 septembre 2021 du Tribunal administratif de Paris sont annulés.
Article 3 : La demande de M. B... présentée devant le Tribunal administratif de Paris et ses conclusions d'appel sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 11 avril 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Le Goff, président,
- M. Ho Si Fat, président assesseur,
- Mme Larsonnier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mai 2022.
La rapporteure,
V. D... Le président,
R. LE GOFF
La greffière,
E. VERGNOL
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA05412