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11/04/2022 | FRANCE | N°21PA01890

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 11 avril 2022, 21PA01890


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 6 juillet 2020 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2011932/6-1 du 12 mars 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des pièces enregistrées

les 12 et 20 avril, et le 21 mai 2021, M. B..., représenté par Me Ceccaldi, demande à la Cour :

1°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 6 juillet 2020 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2011932/6-1 du 12 mars 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des pièces enregistrées les 12 et 20 avril, et le 21 mai 2021, M. B..., représenté par Me Ceccaldi, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2011932/6-1 du 12 mars 2021 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 6 juillet 2020 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire dans un délai de 30 jours et a fixé le pays à destination d'une mesure d'éloignement ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir en lui délivrant dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

S'agissant du refus de titre de séjour :

- il est entaché d'un défaut de motivation ;

- il est entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- il méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'une erreur de droit au regard de ces dispositions ;

- il méconnaît les dispositions des articles L. 313-10 et L. 313-14 du même code ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;

- il méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale dès lors qu'elle est fondée sur la décision de refus de titre de séjour elle-même illégale ;

- elle est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière en raison de la méconnaissance des droits de la défense et du principe du contradictoire ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne mentionne pas expressément le pays vers lequel il peut être renvoyé ;

- elle méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été transmise au préfet de police qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

- la convention franco-sénégalaise relative à la circulation et au séjour des personnes,

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Collet a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant sénégalais né le 14 septembre 1995, entré en France en 2011 selon ses déclarations, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du

6 juillet 2020, le préfet de police a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement. Par jugement n° 2011932/6-1 du 12 mars 2021, dont M. B... relève appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, M. B... invoque les moyens tirés de l'insuffisance de motivation des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français et du défaut d'examen de sa situation personnelle s'agissant du refus de titre de séjour qui lui a été opposé. Toutefois, il n'apporte à l'appui de ces moyens, déjà soulevés devant le tribunal administratif, aucun élément nouveau susceptible de remettre en cause l'appréciation portée à juste titre par les premiers juges. Il y a dès lors lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par ces derniers d'une part aux points 2 et 8 du jugement attaqué et d'autre part au point 3 du même jugement.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont les dispositions sont désormais codifiées à l'article L. 423-23 de ce code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

4. M. B... fait valoir qu'il est en France depuis l'année 2011, soit depuis l'âge de

16 ans, qu'il s'est marié au Sénégal le 27 novembre 2014 avec une compatriote avec laquelle il vit, qu'il a eu avec son épouse deux enfants nés en France en 2017 et 2019, dont l'aîné est scolarisé, que dès son entrée en France, il a travaillé et subvenu à ses besoins, qu'il a perçu un salaire supérieur au salaire minimum interprofessionnel de croissance annuel en 2016, 2017 et 2018 et que son père, de nationalité française, son demi-frère, sa demi-sœur et son oncle sont présents sur le territoire français. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que son épouse est dépourvue de titre de séjour et fait l'objet depuis mars 2020 d'une obligation de quitter le territoire français. Dans ces conditions, compte tenu du jeune âge de ses enfants et A... la situation irrégulière de son épouse, l'arrêté attaqué ne peut être regardé comme ayant porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs ou aux buts poursuivis par cette mesure. Les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par le refus de titre de séjour contesté ne peuvent qu'être écartés. Pour les mêmes motifs, le préfet de police en prenant le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français n'a pas entaché d'erreur manifeste son appréciation des conséquences de ces mesures sur la situation personnelle de

M. B.... Enfin, si le requérant soutient que le préfet de police, en lui opposant dans le refus de séjour contesté la circonstance qu'il ne justifie pas de ressources personnelles stables, aurait entaché cette décision d'une erreur de droit au regard des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui n'imposent pas une telle condition, à supposer même que cette mention puisse être regardée comme une condition de délivrance du titre de séjour sollicité, les autres motifs de cette décision suffisaient à eux seuls pour la justifier légalement.

5. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... ait sollicité un titre de séjour sur le fondement des articles L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur. Ces dispositions n'ouvrent pas droit à des titres de séjour délivrés de plein droit. Le préfet de police n'était, dès lors, pas tenu d'examiner d'office le droit de M. B... à obtenir un titre de séjour sur leur fondement. Par suite, le requérant ne peut utilement soutenir que le refus de titre de séjour en litige aurait méconnu les articles L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. En quatrième lieu, il ne ressort d'aucun texte que le préfet de police avait à recueillir les observations de M. B... avant de prendre à son encontre une obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours suite à la demande de titre de séjour qu'il avait formulée. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que celui-ci ait sollicité en vain un entretien avec les services préfectoraux, ni qu'il aurait été empêché de présenter des observations écrites ou orales avant que ne soit prise cette décision. Dès lors, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière en l'absence de respect des droits de la défense et de procédure contradictoire préalable est écarté.

7. En cinquième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines et traitements inhumains et dégradants ".

8. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français attaqués, à raison des risques que M. B... encourrait en cas de retour dans son pays d'origine est inopérant, un refus d'admission au séjour ainsi que l'obligation de quitter la France n'entraînant pas, par eux-mêmes, renvoi dans le pays d'origine.

9. Au surplus, M. B..., qui se borne à invoquer la séparation géographique de ses enfants et de son épouse qu'entraînerait la décision fixant le pays de destination et le risque sanitaire qui serait encouru en cas de retour dans son pays d'origine compte tenu de la pandémie actuelle, n'établit pas qu'il serait personnellement exposé à des peines ou traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté.

10. En dernier lieu, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision soulevé à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français est écarté dès lors qu'aucun des moyens dirigés contre le refus de délivrance d'un titre de séjour n'est fondé

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 juillet 2020 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire dans un délai de 30 jours et a fixé le pays à destination d'une mesure d'éloignement. L'ensemble des conclusions à fin d'annulation, d'injonction et tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent ainsi qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 21 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Le Goff, président,

- M. Ho Si Fat, président assesseur,

- Mme Collet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 avril 2022.

La rapporteure,

A. COLLET Le président,

R. LE GOFF

La greffière,

E. VERGNOL

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA01890


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA01890
Date de la décision : 11/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LE GOFF
Rapporteur ?: Mme Aude COLLET
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : CECCALDI

Origine de la décision
Date de l'import : 19/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-04-11;21pa01890 ?
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