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29/03/2022 | FRANCE | N°21PA05180

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 29 mars 2022, 21PA05180


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 7 février 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2007131 du 11 juin 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 septembre 2021, M

me B..., représentée par Me Langlois, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'ann...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 7 février 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2007131 du 11 juin 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 septembre 2021, Mme B..., représentée par Me Langlois, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 février 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour "vie privée et familiale" ou "étudiant" à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours sous astreinte de 200 euros par jour de retard et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour assortie d'une autorisation de travail ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil de la somme de 1 800 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

S'agissant de la régularité du jugement :

- il est entaché d'une erreur de fait dans la mesure où contrairement à ce qu'indiquent les premiers juges, elle justifie de sa présence en France depuis 2017 et est entrée sur le territoire français régulièrement, sous couvert d'un visa Schengen de court séjour délivré par les autorités italiennes.

S'agissant de la décision portant refus de séjour :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'erreur de droit dans la mesure où le préfet a méconnu l'étendue de sa compétence ;

- elle est entachée d'erreur de fait dès lors que contrairement à ce qu'indiquent les premiers juges, elle justifie de sa présence en France depuis 2017, elle est entrée en France régulièrement sous couvert d'un visa Schengen de court séjour délivré par les autorités italiennes, et elle justifie depuis d'une parfaite intégration à la société française, et du fait qu'elle ne peut retourner au Mali ;

- elle a été prise en méconnaissance de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'erreur de droit dans la mesure où le préfet s'est cru à tort lié par la circonstance qu'elle ne dispose pas de visa de long séjour pour refuser de lui délivrer un titre de séjour mention " étudiant " ;

- elle a été prise en méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, notamment au regard des critères de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 ;

- elle a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision attaquée est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;

- elle est entachée d'erreur de droit dans la mesure où le préfet s'est cru à tort en situation de compétence liée pour prononcer la décision attaquée ;

- elle a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

S'agissant de la décision fixant le délai de départ volontaire :

- la décision attaquée est illégale en raison de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

- elle est entachée de défaut de motivation ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

- la décision attaquée est illégale en raison de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen et a été prise en méconnaissance de l'article 33 de la convention de Genève, de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 août 2021 du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Paris.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante malienne née le 1er juin 2000, a sollicité son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile le 10 décembre 2019, ainsi qu'en qualité d'étudiante sur le fondement de l'article L. 313-7 du même code. Par un arrêté du

7 février 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays destination. Mme B... relève appel du jugement du 11 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Mme B... soutient que le jugement est entaché d'une erreur de fait dans la mesure où contrairement à ce qu'indiquent les premiers juges, elle justifie de sa présence en France depuis 2017 et est entrée en France régulièrement sous couvert d'un visa Schengen de court séjour délivré par les autorités italiennes. Toutefois, cette circonstance relève du bien-fondé du jugement et non de sa régularité. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

4. La décision contestée vise les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et notamment les articles L. 313-7, L. 313-14, L. 511-1-I, L. 511-1 II, L. 512-1 à L. 512-5 et L. 513-1 à L. 513-4 de ce code. Elle indique également, en particulier, que si Mme B... déclare être entrée en France en septembre 2017, elle ne justifie pas de la réalité de cette date et ne peut donc se prévaloir d'une longue présence habituelle et continue sur le territoire depuis lors, et que Mme B... ne justifie ni de l'intensité, ni de l'ancienneté et de la stabilité de ses liens personnels et familiaux en France, ni enfin de conditions d'existence pérennes ou d'une insertion forte dans la société française. Par ailleurs, le préfet de la Seine-Saint-Denis a relevé que l'intéressée n'établissait pas être exposée à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. Dans ces conditions, et alors que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'était pas tenu de reprendre l'ensemble des éléments relatifs à la situation personnelle de Mme B..., la décision en litige comporte l'énoncé suffisant des considérations de droit et de fait qui la fondent au sens des dispositions précitées des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, et doit être regardée comme étant suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision contestée doit être écarté comme manquant en fait. Par ailleurs, la circonstance que certains des éléments mentionnés seraient erronés, si elle peut affecter la légalité interne de la décision attaquée, est en tout état de cause sans incidence sur la régularité formelle de sa motivation, et ne saurait en l'espèce, contrairement à ce que soutient la requérante, permettre d'établir que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'aurait pas procédé à un examen sérieux de sa situation. Le moyen soulevé à ce dernier titre doit, par suite, également être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant ". En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée et sous réserve d'une entrée régulière en France. (...) ".

6. Il résulte de ces dispositions que l'autorité administrative peut accorder une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " sans que la condition de visa de long séjour soit exigée, en cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier et plus particulièrement des termes de la décision contestée, que le préfet de la Seine-Saint-Denis se soit cru tenu d'opposer à la requérante la condition de visa de long séjour sans examiner sa situation, alors qu'elle ne justifie pas d'une nécessité liée au déroulement de ses études en indiquant qu'elle doit effectuer des stages. Par ailleurs, il ressort de la motivation de la décision en litige que le préfet de la Seine-Saint-Denis a procédé à un examen de sa situation individuelle. Dans ces conditions, contrairement à ce que soutient la requérante, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas commis d'erreur de droit en refusant de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 312-2 du code des relations entre le public et l'administration dispose : " Font l'objet d'une publication les instructions, les circulaires ainsi que les notes et réponses ministérielles qui comportent une interprétation du droit positif ou une description des procédures administratives. (...) ". Selon l'article L. 312-3 de ce même code : " Toute personne peut se prévaloir des documents administratifs mentionnés au premier alinéa de l'article L. 312-2, émanant des administrations centrales et déconcentrées de l'Etat et publiés sur des sites internet désignés par décret. / Toute personne peut se prévaloir de l'interprétation d'une règle, même erronée, opérée par ces documents pour son application à une situation qui n'affecte pas des tiers, tant que cette interprétation n'a pas été modifiée. ". Des règles particulières d'opposabilité des circulaires, instructions, notes et réponses ministérielles émanant des administrations centrales et déconcentrées de l'État ont par ailleurs été fixées tant à l'article R. 312-10 de ce même code, aux termes duquel : " Les sites internet sur lesquels sont publiés les documents dont toute personne peut se prévaloir dans les conditions prévues à l'article L. 312-3 précisent la date de dernière mise à jour de la page donnant accès à ces documents ainsi que la date à laquelle chaque document a été publié sur le site./ Ces sites comportent, sur la page donnant accès aux documents publiés en application de l'article L. 312-3, la mention suivante : " Conformément à l'article L. 312-3 du code des relations entre le public et l'administration, toute personne peut se prévaloir de l'interprétation d'une règle, même erronée, opérée par les documents publiés sur cette page, pour son application à une situation qui n'affecte pas des tiers, tant que cette interprétation n'a pas été modifiée, sous réserve qu'elle ne fasse pas obstacle à l'application des dispositions législatives ou réglementaires préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l'environnement ".

8. Il résulte de ces dispositions que, pour être opposable, une circulaire du ministre de l'intérieur adressée aux préfets doit faire l'objet d'une publication sur le site " www.interieur.gouv.fr " par le biais d'une insertion dans la liste définissant les documents opposables et comportant les mentions prescrites à l'article R. 312-10, et doit comporter un lien vers le document intégral publié sur le site " Légifrance.gouv.fr ", site relevant du Premier ministre.

9. La circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'a pas été publiée, contrairement à ce que soutient la requérante, dans les conditions précisées au point 8 du présent arrêt. Mme B... ne peut dès lors utilement s'en prévaloir.

10. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 ".

11. Mme B... soutient être présente sur le territoire français depuis octobre 2017 et se prévaut de sa maîtrise de la langue française, de sa bonne intégration, de la réussite de sa scolarité, de ses actions de bénévolat et du fait qu'elle travaille en contrat à durée indéterminée à temps partiel depuis mars 2021. Elle soutient également qu'elle a fui son pays d'origine à la suite d'un projet de mariage forcé. Toutefois, elle ne produit aucun élément probant à l'appui de ses allégations, alors au demeurant qu'elle n'a jamais présenté de demande d'asile. Dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que le préfet de la Seine-Saint-Denis a méconnu les dispositions précitées et commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant qu'elle ne justifiait pas de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels impliquant que lui soit délivré un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

12. En cinquième lieu, il ressort de l'arrêté contesté que le préfet a pris en compte la circonstance selon laquelle elle est dépourvue d'attaches familiales en France et mentionne qu'elle ne justifie pas de motifs exceptionnels justifiant son admission au séjour. Dans ces conditions, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas procédé à un examen réel et complet de sa situation. Eu égard au contenu de la décision attaquée, elle n'est pas davantage fondée à soutenir, que le préfet se serait cru en situation de compétence liée pour refuser de lui délivrer un titre de séjour, quel qu'il soit, au seul motif de l'absence de visa de long séjour.

13. En sixième lieu, il résulte de ce qui précède et il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait méconnu l'étendue de ses compétences en ne faisant pas usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit ne peut qu'être écarté.

14. En septième lieu, la requérante fait valoir que la décision est entachée d'une erreur de fait, en ce qu'elle ne retient pas qu'elle est entrée régulièrement en France sous couvert d'un visa de court séjour délivré par les autorités italiennes en octobre 2017. Toutefois, il résulte de ce qui a été dit précédemment que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait pris la même décision sans relever ce motif. Par conséquent, ce moyen ne peut qu'être écarté.

15. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. I1 ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

16. Il ressort des pièces du dossier et notamment des déclarations de Mme B... qu'elle n'est présente sur le territoire français que depuis octobre 2017. Célibataire et sans enfant à charge, elle ne justifie pas d'attaches familiales ou personnelles stables sur le territoire français. Elle n'établit pas être isolée, en revanche, dans son pays d'origine. Dans ces conditions et sans qu'ait d'incidence la circonstance que la requérante justifie du sérieux de ses études, en prenant la décision en litige, le préfet n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

17. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français devrait être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour ne peut qu'être écarté.

18. En deuxième lieu, il ne ressort ni des termes de l'arrêté litigieux ni des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'aurait pas procédé à un examen circonstancié de la situation personnelle de Mme B... ou se serait estimé en situation de compétence liée pour prononcer une obligation de quitter le territoire à l'égard de l'intéressée.

19. En troisième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 16.

20. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, que la décision obligeant Mme B... à quitter le territoire national serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ volontaire :

21. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que Mme B... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français pour soutenir que la décision fixant un délai de départ volontaire serait elle-même illégale.

22. Mme B... reprend en appel, avec la même argumentation qu'en première instance, les moyens tirés de ce que la décision fixant le délai de départ volontaire est entachée d'un défaut de motivation et d'une erreur manifeste d'appréciation. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 18 et 20 de leur jugement.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

23. En premier lieu, les moyens dirigés contre la décision portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ayant été écartés, l'exception d'illégalité de ces décisions, invoquée à l'appui des conclusions de Mme B... dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi, ne peut qu'être écartée.

24. En deuxième lieu, aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".

25. La décision fixant le pays de destination vise les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne dans ses motifs que l'intéressée n'établit pas être exposée à des traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et indique qu'elle est de nationalité malienne et qu'elle pourrait être reconduite d'office à la frontière du pays dont elle a la nationalité ou de tout autre pays où elle établirait être légalement admissible. Ainsi, il ne ressort pas des termes de la décision contestée que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'aurait pas examiné la situation particulière de Mme B..., notamment au regard des dispositions et des stipulations précitées.

26. En dernier lieu, si Mme B... fait valoir qu'elle risque de subir un mariage forcé en cas de retour au Mali, elle ne produit aucun élément probant de nature à établir la réalité de ses allégations. Par suite, la décision fixant le pays de renvoi n'a pas méconnu les stipulations précitées.

27. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 février 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'État sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience publique du 7 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- Mme Marie-Dominique Jayer, première conseillère,

- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 mars 2022.

La rapporteure,

G. A...Le président,

I. LUBEN

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

21PA05180 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA05180
Date de la décision : 29/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Gaëlle MORNET
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : LANGLOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-03-29;21pa05180 ?
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