La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/03/2022 | FRANCE | N°21PA00822

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 28 mars 2022, 21PA00822


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête enregistrée, sous le n° 1903547, la société anonyme (SA) Atéac a demandé au tribunal administratif de Paris :

1°) de prononcer la décharge des majorations pour défaut de paiement dans les délais des cotisations supplémentaires de taxes d'apprentissage et participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue qui lui ont été réclamées au titre de l'année 2015 à concurrence d'une somme de 8 021,62 euros ;

2°) de mettre à la charge de

l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justic...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête enregistrée, sous le n° 1903547, la société anonyme (SA) Atéac a demandé au tribunal administratif de Paris :

1°) de prononcer la décharge des majorations pour défaut de paiement dans les délais des cotisations supplémentaires de taxes d'apprentissage et participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue qui lui ont été réclamées au titre de l'année 2015 à concurrence d'une somme de 8 021,62 euros ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1903547 du 16 décembre 2020 le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de la société Atéac.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 16 février et 30 juin 2021, la SA Atéac, représentée par Me Bonin, avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement entrepris ;

2°) de prononcer la décharge des majorations litigieuses;

3°) de mettre à la charge de 1'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de le condamner au titre des dépens.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce que les premiers juges n'ont pas répondu au moyen, tiré de ce que les majorations en litige n'ont pas fait l'objet d'une motivation suffisante en ce qu'elles constituent des pénalités ;

- la procédure d'imposition est irrégulière, les majorations en litige, qui ont le caractère de sanction, ayant été appliquées sans être motivées en tant que pénalités, en méconnaissance de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales et de la doctrine BOI-CF-INF-30-20 du 3 janvier 2018 ;

- l'avis de mise en recouvrement est insuffisamment motivé ;

- les majorations en litige méconnaissent les principes constitutionnels de proportionnalité et d'individualisation des sanctions fiscales ;

- les majorations en litige méconnaissent le principe du droit à 1'erreur prévu à l'article L. 123-1 du code des relations entre le public et l'administration et retenu par la jurisprudence.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 avril 2021 le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Par ordonnance n° 21PA00822 du 1er septembre 2021, le président de la 9ème chambre de la Cour a constaté le non-lieu à transmission du mémoire distinct portant question prioritaire de constitutionnalité enregistré le 30 juin 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail,

- le code des relations entre le public et l'administration,

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales,

- la décision n° 2013-371 QPC du 7 mars 2014 du Conseil Constitutionnel,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Boizot,

- les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public,

- et les observations de Me Bonin pour la société Régus Paris.

Considérant ce qui suit :

1. La SA Atéac, qui exerce une activité de location de biens immobiliers, devait procéder au versement des taxes d'apprentissage et de participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue dues au titre des rémunérations versées en 2015 avant le 1er mars 2016. Elle n'a procédé au versement de ces taxes que le 27 juin 2017 en versant une somme totale de 9 226,38 euros comprenant à hauteur de 3 298,88 euros le règlement de la taxe d'apprentissage et à hauteur de 5 936,50 euros le règlement de la contribution relative à la participation à la formation professionnelle continue. Par une proposition de rectification du 7 décembre 2017, l'administration fiscale a soumis la société au versement de majorations des droits sur le fondement de l'article 1599 ter I du code général des impôts s'agissant de la taxe d'apprentissage et des articles 235 ter H bis et 235 ter KK du même code s'agissant de la participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue. Les droits et majorations en cause ont été mis en recouvrement le 15 juin 2018, la société ayant contesté le 22 août 2018, les majorations de taxe pour la somme globale de 8 021,62 euros. Cette réclamation a fait l'objet d'une décision de rejet du 16 janvier 2019. La SA Atéac a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de ces majorations. Par un jugement n° 1903547 du 16 décembre 2020 le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. La SA Atéac relève appel du jugement du 16 décembre 2020 précité.

Sur la régularité du jugement :

2. Contrairement à ce que soutient la société Atéac, le tribunal a suffisamment répondu, au point 4 du jugement attaqué, au moyen tiré de ce que les premiers juges n'ont pas répondu au moyen, tiré de ce que les majorations en litige n'ont pas fait l'objet d'une motivation suffisante en ce qu'elles constituent des pénalités. La société requérante, qui ne peut utilement contester le bien-fondé du jugement pour en remettre en cause la régularité, ne sont ainsi pas fondés à soutenir que le tribunal aurait omis de répondre à son moyen.

Sur la décharge des majorations de taxes en litige :

3. D'une part, aux termes de l'article 1599 ter I du code général des impôts alors applicable : " A défaut de versement ou en cas de versement insuffisant de la taxe d'apprentissage aux organismes collecteurs habilités en application des articles L. 6242-1 et L. 6242-2 du code du travail avant le 1er mars de l'année suivant celle du versement des salaires, le montant de la taxe, acquitté selon les modalités définies au III de l'article 1678 quinquies, est majoré de l'insuffisance constatée. ". Aux termes de l'article 1678 quinquies du même code alors applicable : " I. - La taxe d'apprentissage est recouvrée selon les modalités ainsi que sous les sûretés, garanties et sanctions applicables aux taxes sur le chiffre d'affaires. / II. - L'employeur peut imputer sur le montant du versement de la taxe d'apprentissage, le montant des dépenses effectivement faites et à raison desquelles il déclare être exonéré. / III. - Le versement de la taxe d'apprentissage prévu à l'article 228 bis est effectué auprès du comptable de la direction générale des impôts, accompagné du bordereau établi selon un modèle fixé par l'administration, et déposé au plus tard le 30 avril de l'année qui suit celle du versement des rémunérations ".

4. D'autre part, aux termes de l'article 235 ter D du code général des impôts (Participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue) : " Conformément aux dispositions de l'article L. 6331-9 du code du travail, les employeurs d'au moins dix salariés versent aux organismes mentionnés au même article un pourcentage minimal du montant des rémunérations versées pendant l'année en cours s'élevant à 1 %, sous réserve des dispositions de l'article L. 6331-10 du même code. ". Aux termes de l'article 235 ter H du même code : " Conformément aux dispositions de l'article L. 6331-9 du code du travail, les employeurs de dix salariés et plus consacrent au financement des actions de formation professionnelle continue un pourcentage au moins égal à 1 % du montant des rémunérations versées. ". Aux termes de l'article 235 ter G du même code : " Les règles relatives à l'absence de versement prévu à l'article L. 6331-11 du code du travail par l'employeur sont définies à l'article L. 6331-28 du même code. ". Aux termes de l'article L. 6331-28 du code du travail : " Lorsque l'employeur n'a pas effectué les reversements prévus à l'article L. 6331-11, il verse au Trésor une somme égale à la différence entre le montant prévu au premier alinéa de l'article L. 6331-10 et le montant des dépenses effectivement consacrées au compte personnel de formation et à son abondement. ". Aux termes de l'article 235 ter H bis du code général des impôts alors applicable : " Conformément et dans les conditions prévues à l'article L. 6331-30 du code du travail, le versement prévu à l'article 235 ter G est majoré du montant de l'insuffisance constatée. ".

5. Tout d'abord, il résulte des dispositions précitées que les redevables de la taxe d'apprentissage et de la participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue n'ont pas à souscrire une déclaration spécifique à ces taxes mais qu'ils doivent seulement indiquer, sur la déclaration annuelle des données sociales l'ensemble des sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail. Les entreprises qui ne se sont pas libérées auprès d'un organisme collecteur de la totalité des montants à leur charge doivent effectuer un versement de régularisation auprès du service des impôts des entreprises (SIE) compétent, entre le 1er mars et le 30 avril de l'année suivant celle du versement des rémunérations. Ce paiement peut faire l'objet d'une majoration égale au montant de l'insuffisance constatée : l'entreprise doit donc acquitter non seulement les droits restant dus, mais aussi une majoration d'un montant égal à ceux-ci. Le défaut, le retard ou l'insuffisance de paiement sont en outre sanctionnés par l'intérêt de retard mensuel prévu à l'article 1727 du CGI et par la majoration prévue à l'article 1731 du même code.

6. Par ailleurs, la majoration égale au montant de l'insuffisance constatée de la taxe d'apprentissage et de la contribution au développement de l'apprentissage, appliquée respectivement dans les conditions prévues aux articles 1599 ter 1, 235 ter H bis et 235 ter KK du code général des impôts précités vise à réprimer les personnes redevables des contributions précitées qui ont liquidé de manière erronée ou qui ont éludé tout ou partie de leur paiement dans le délai prescrit, et à dissuader les personnes de commettre de telles erreurs de liquidation ou de paiement de l'imposition. Elle constitue donc une sanction soumise aux principes de nécessité et de proportionnalité des peines tels qu'ils résultent de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

7. En premier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens des articles L. 211-2 à L. 211-7 du code des relations entre le public et l'administration, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable. ".

8. La SA Atéac soutient que les majorations en litige, qui ont le caractère de sanctions, ne sont pas motivées, contrairement à ce que prévoit l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales. En vertu de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales, les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales doivent être motivées, c'est-à-dire comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait constituant le fondement des sanctions prononcées. Pour justifier les majorations prononcées à l'encontre de la SA Atéac, l'administration a, dans la proposition de rectification du 7 décembre 2017 mentionnée ci-dessus, indiqué, pour chaque majoration, le texte appliqué, le montant de la majoration en cause et précisé que ce montant correspondait au montant de l'insuffisance constatée. Ce motif, quel qu'en soit le bien-fondé, et alors qu'il n'aurait pas été énoncé à l'appui d'une majoration qualifiée de pénalité, constitue, au regard de l'exigence posée par l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales, une motivation suffisante pour justifier l'application de cette pénalité.

9. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales ". Sont opposables à l'administration, dans les conditions prévues par le second alinéa de ce texte, les instructions ou circulaires publiées relatives à l'assiette ou au recouvrement de l'impôt, ainsi que celles relatives au bien-fondé ou au recouvrement des pénalités fiscales, mais non celles relatives à la procédure d'établissement de l'impôt, ni celles relatives à la procédure d'établissement des pénalités fiscales.

10. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que la SA Atéac ne saurait invoquer les énonciations de la doctrine administrative BOI-CF-INF-30-20 en tant que celles-ci ont trait à la procédure d'établissement des pénalités fiscales.

11. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 256-1du livre des procédures fiscales : " L'avis de mise en recouvrement prévu à l'article L. 256 indique pour chaque impôt ou taxe le montant global des droits, des pénalités et des intérêts de retard qui font l'objet de cet avis./Lorsque l'avis de mise en recouvrement est consécutif à une procédure de rectification, il fait référence à la proposition prévue à l'article L. 57 ou à la notification prévue à l'article L. 76 et, le cas échéant, au document adressé au contribuable l'informant d'une modification des droits, taxes et pénalités résultant des rectifications ".

12. Si la SA Atéac soutient qu'en ne mentionnant pas les majorations en litige en tant que pénalités dans l'avis de mise en recouvrement mentionné ci-dessus, l'administration a méconnu les dispositions précitées de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, il résulte de ce qui a été indiqué au point 8 du présent arrêt que l'administration, en globalisant les montants de droits et de majorations, qu'elle avait assimilées à des compléments de droits, doit être regardée comme ayant commis une erreur sans caractère substantiel, qui n'a pas été de nature à induire la requérante en erreur et ne l'a pas privée de la possibilité de contester utilement les majorations en litige, qu'elle a d'ailleurs parfaitement individualisées dans sa réclamation préalable, laquelle ne portait que sur ce point. Par suite, dans les circonstances de l'espèce, le moyen soulevé ne peut qu'être écarté.

13. En quatrième lieu, la SA Atéac soutient que la majoration complémentaire visée par les articles 1599 ter I et 235 ter KK du CGI ne constitue pas " une insuffisance de droits en principal " mais une sanction fiscale disproportionnée au regard des circonstances dans lesquelles elle a régularisé sa situation. L'appelante soutient que le retard de paiement des impositions visées par le présent litige est lié à des problèmes matériels et de personnel indépendants de sa volonté. Elle indique avoir néanmoins préparé dans les délais le dossier permettant le versement des taxes dues, mais sans être à même de finaliser cette déclaration, compte tenu des " circonstances particulières et exceptionnelles " auxquelles elle a dû faire face.

14. Toutefois, il ressort des dispositions précitées que les majorations en litige ont pour objet de dissuader les redevables d'éluder leur paiement, et que leur montant est fonction du montant de la contribution qui a été éludé, dès lors qu'il s'agit d'une majoration proportionnelle, égale au montant de la contribution dont le contribuable ne s'est pas acquitté. Ainsi, si le contribuable s'est partiellement acquitté de la contribution supplémentaire à l'apprentissage et de la taxe de participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue, la majoration ne porte que sur la fraction non acquittée de l'imposition. Dès lors, en fixant une majoration de la taxe à caractère proportionnel, égale au montant de la taxe due pour l'année écoulée qui n'a pas été versé aux organismes collecteurs agréés au 1er mars de l'année suivante, les articles 1599 ter 1, 235 ter H bis et 235 ter KK ont institué des sanctions qui, eu égard à leur objet et à leur assiette, ne revêtent pas, en elles-mêmes, un caractère disproportionné.

15. En cinquième lieu, la société requérante soutient qu'au regard de la décision précitée du Conseil Constitutionnel n° 2013-371 QPC, lorsque le défaut ou le retard de liquidation ou d'acquittement de l'impôt est involontaire, le principe de l'individualisation de la peine devra être appliquée de façon objective. Elle fait valoir que cette décision précise que " le principe d'individualisation des peines qui découle de l'article 8 de la Déclaration de 1789 implique que la majoration des droits, lorsqu'elle constitue une sanction ayant le caractère d'une punition, ne puisse être appliquée que si l'administration, sous le contrôle du juge, l'a expressément prononcée en tenant compte des circonstances propres à chaque espèce ". Elle relève que les événements qui l'ont conduite à déposer avec retard sa déclaration sont exceptionnels et indépendants de sa volonté et ont donné lieu à une régularisation spontanée avant toute demande ou relance de l'administration. Toutefois, dans l'affaire mentionnée, le juge constitutionnel a également décidé que la majoration en litige devant lui, égale comme en l'espèce au montant de la contribution due, ne revêtait pas par elle-même un caractère manifestement disproportionné. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction, en l'espèce, que l'administration n'aurait pas tenu compte des circonstances propres à l'affaire avant d'appliquer les majorations contestées. Enfin, la circonstance que la société n'aurait commis aucune négligence ou qu'elle n'aurait pas tenté d'éluder l'impôt est à cet égard sans incidence sur le bien-fondé des majorations dès lors que celles-ci peuvent être infligées en cas d'insuffisance de versement constatée et que, même si sa bonne foi n'a pas été remise en cause par le service, elle est l'auteur d'un défaut volontaire de liquidation ou d'acquittement de l'impôt.

16. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 123-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Une personne ayant méconnu pour la première fois une règle applicable à sa situation ou ayant commis une erreur matérielle lors du renseignement de sa situation ne peut faire l'objet, de la part de l'administration, d'une sanction pécuniaire ou consistant en la privation de tout ou partie d'une prestation due, si elle a régularisé sa situation de sa propre initiative ou après avoir été invitée à le faire par l'administration dans le délai que celle-ci lui a indiqué. (...) ".

17. La SA Atéac soutient que l'article L. 123-1 précité du code des relations entre le public et l'administration a institué un véritable droit à régularisation sans aucune sanction dès lors qu'il s'agit d'une première infraction commise de bonne foi. Toutefois, ces dispositions, lesquelles concernent les cas de première erreur portant " sur une règle applicable à la situation du contribuable ", ou " une erreur matérielle lors du renseignement de la situation ", ne sont pas susceptibles de recevoir application en l'espèce, la règle en cause, relative aux modalités de règlement des taxes en litige, étant parfaitement connue de la société requérante et n'étant pas susceptible de donner lieu, dans son esprit, à une erreur quant à la possibilité d'une autre règle. En tout état de cause, cette disposition, entrée en vigueur le 12 août 2018, soit postérieurement à la mise en recouvrement en litige, intervenue le 31 mai 2018, régit les procédures de redressement ou de contrôle mises en œuvre par l'administration en prévoyant, notamment, des possibilités de régularisation avant mise en œuvre d'une sanction, et ne peuvent s'analyser comme adoucissant les sanctions en cause. Elle ne peut dès lors avoir une portée rétroactive.

18. En dernier lieu, si la société soutient pour contester la régularité de la sanction fiscale dont elle a fait l'objet, qu'elle est susceptible de bénéficier du droit à l'erreur retenu par la jurisprudence administrative en matière de sanctions, et en particulier qu'elle était de bonne foi, il résulte de l'instruction qu'elle avait connaissance des obligations de paiement qui étaient les siennes, lesquelles ne souffraient aucune ambiguïté, et ne peut en conséquence, prétendre avoir commis une erreur de compréhension, justifiant qu'elle se soit acquittée avec retard de ses obligations de paiement. Ainsi, c'est à bon droit que le service a application des dispositions des articles 1599 ter 1, 235 ter H bis et 235 ter KK du code général des impôts.

19. Il résulte de tout ce qui précède que la SA Atéac n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

20. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".

21. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demandent la SAS Atéac au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

Sur les dépens :

22. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. / L'Etat peut être condamné aux dépens ".

23. Il n'est pas établi que des dépens aient été exposés au sens de l'article R. 761-1 du code de justice administrative. Par suite, les conclusions relatives à la charge des dépens ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SA Atéac est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme (SA) Atéac et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris (Pôle contrôle fiscal et affaires juridiques - SCAD).

Délibéré après l'audience du 14 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président de chambre,

- M. Soyez, président assesseur,

- Mme Boizot, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2022.

La rapporteure,

S. BOIZOTLe président,

S. CARRERE

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA00822


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA00822
Date de la décision : 28/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Amendes - pénalités - majorations.

Contributions et taxes - Impôts assis sur les salaires ou les honoraires versés - Taxe d'apprentissage.

Contributions et taxes - Impôts assis sur les salaires ou les honoraires versés - Participation des employeurs au financement de la formation professionnelle continue.


Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: Mme Sabine BOIZOT
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : BONIN

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-03-28;21pa00822 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award