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23/03/2022 | FRANCE | N°21PA03799

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 23 mars 2022, 21PA03799


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... A... B... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2012609/2 du 9 juin 2021,

le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la C...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... A... B... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2012609/2 du 9 juin 2021, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 juillet 2021, M. A... B..., représenté par Me Lucille Besse, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2012609/2 du 9 juin 2021 du Tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, après délivrance d'une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'erreur de droit ;

- l'erreur de droit commise rend irrégulière la procédure d'édiction de la décision, à défaut de saisine de la commission du titre de séjour ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant son admission exceptionnelle au séjour ;

- le préfet a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et de méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'interdiction de retour sur le territoire français est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Platillero a entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant marocain, a sollicité le 1er octobre 2019 son admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié. Par un arrêté du 13 octobre 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. M. A... B... relève appel du jugement du 9 juin 2021 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ".

3. Ainsi que l'a rappelé le tribunal, qui a prononcé une substitution de base légale, l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national. Toutefois, les stipulations de l'accord franco-marocain n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation de la situation d'un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié.

4. Il ressort des pièces du dossier que, si M. A... B... a bénéficié de titres de séjour en qualité de travailleur saisonnier entre 2010 et 2016, il ne résidait pas de manière habituelle en France au cours de ces années mais s'est irrégulièrement maintenu sur le territoire français à compter de cette dernière année, à partir de laquelle il justifie de sa résidence habituelle, en dépit d'une obligation de quitter le territoire français prononcée par le préfet de l'Ardèche le 20 avril 2016. Il est constant que M. A... B..., dont l'épouse, les quatre enfants, les parents et la fratrie résident au Maroc, n'a pas d'attaches familiales en France et ne justifie d'aucune insertion sociale particulière. Par ailleurs, si M. A... B... justifie avoir travaillé pour le compte de diverses sociétés en tant que ferrailleur depuis janvier 2018 et a produit une demande d'autorisation de travail présentée par une société d'intérim, ces circonstances ne révèlent pas une insertion professionnelle particulière ni même une perspective d'insertion pérenne. Dans ces conditions, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation, d'une part, en estimant que la situation personnelle et familiale de M. A... B... n'était pas constitutive de circonstances humanitaires ou exceptionnelles de nature à justifier son admission exceptionnelle au séjour, et, d'autre part, en ne procédant pas à sa régularisation sur le fondement de son pouvoir discrétionnaire.

5. A cet égard, si le préfet de la Seine-Saint-Denis a commis une erreur de droit en mentionnant dans l'arrêté contesté que M. A... B... ne pouvait pas se prévaloir d'années de présence en France antérieures à la mesure d'obligation de quitter le territoire français qu'il n'a pas exécutée, ainsi qu'il a été dit précédemment, le requérant ne justifie pas de sa résidence habituelle sur le territoire français avant l'année 2016, les pièces produites ne justifiant d'une présence en France qu'au cours d'une période limitée de chacune des années antérieures, M. A... B... bénéficiant alors de titres de séjour en qualité de travailleur temporaire. Par suite, l'erreur de droit commise par le préfet, qui aurait pris la même décision sans la commettre compte tenu de ce qui précède et qui n'était en tout état de cause pas tenu de saisir la commission du titre de séjour à raison de la durée de résidence habituelle en France de M. A... B..., est sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué.

6. Par ailleurs, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 4., M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté contesté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

7. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 4., M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle.

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :

8. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " (...) Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".

9. Compte tenu des éléments de fait rappelés au point 4., M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Seine-Saint-Denis a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation en lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Pour les mêmes motifs, M. A... B..., qui ne justifie d'aucune circonstance humanitaire, n'est pas fondé à soutenir que l'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'annulation de ce jugement et de l'arrêté contesté doivent dès lors être rejetées.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

11. Le présent arrêt n'appelle aucune mesure d'exécution. Les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par M. A... B... doivent dès lors être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A... B... demande au titre des frais qu'il a exposés.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 9 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. Platillero, président assesseur,

- M. Magnard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 mars 2022.

Le rapporteur,

F. PLATILLEROLe président,

I. BROTONSLe greffier,

S. DALL'AVALa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA03799


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA03799
Date de la décision : 23/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Fabien PLATILLERO
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : BESSE

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-03-23;21pa03799 ?
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