Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 2 novembre 2020 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination.
Par un jugement n° 2019195/4-1 du 18 décembre 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 16 avril et 6 juillet 2021, M. B..., représenté par Me Angliviel, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2019195/4-1 du 18 décembre 2020 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a rejeté sa demande et en tant qu'il a omis de se prononcer sur son admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ;
2°) d'annuler l'arrêté du 2 novembre 2020 du préfet de police ;
3°) de faire injonction au préfet de police de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous une astreinte de 500 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son avocate au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
5°) de prononcer son admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier dès lors qu'il n'a pas statué sur ses conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ;
- il a été irrégulièrement privé du droit d'être entendu avant l'édiction de l'obligation de quitter le territoire français ;
- cette mesure d'éloignement est contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, compte tenu de la durée de son séjour en France et de ses perspectives d'emploi, et entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été communiquée au préfet de police qui n'a pas produit de mémoire en défense.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris du 22 février 2021, s'agissant de la requête d'appel.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Jardin a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
1. M. B... a demandé au premier juge de prononcer son admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire, conclusions sur lesquelles le jugement attaqué a omis de statuer. Cependant, M. B... a obtenu l'aide juridictionnelle totale au titre de sa demande de première instance, par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 25 mai 2021. Sa requête d'appel est par suite devenue sans objet sur ce point.
2. Le droit d'être entendu, qui fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union européenne, implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Il ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause.
3. M. B... soutient qu'il a été privé du droit d'être entendu. Invité par la Cour à justifier le respect par l'administration de cette garantie, le préfet de police a produit uniquement un procès-verbal d'audition daté du 16 janvier 2021, alors que l'arrêté à l'origine du litige a été pris le 2 novembre 2020, et n'a pas transmis à la Cour de mémoire en défense. Le moyen tiré du vice de procédure doit par suite être accueilli.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
4. Aux termes de l'article L. 614-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Si la décision portant obligation de quitter le territoire français est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues aux articles L. 721-6, L. 721-7, L. 731-1, L. 731-3, L. 741-1 et L. 743-13, et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas ".
5. A la suite de l'annulation d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, il incombe au préfet, en application des dispositions précitées de l'article L. 614-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, non seulement de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour mais aussi, qu'il ait été ou non saisi d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour. Dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 911-2 du code de justice administrative pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être réexaminée, au vu de l'ensemble de la situation de droit et de fait existant à la date de ce réexamen. Il s'ensuit qu'il y a lieu de prescrire au préfet de police de se prononcer sur la situation de M. B... dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu d'assortir immédiatement cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés à l'instance :
6. M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Angliviel, son avocate, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me Angliviel.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. B... tendant à l'annulation du jugement n° 2019195/4-1 du 18 décembre 2020 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a omis de statuer sur ses conclusions relatives à son admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire et sur celles tendant à ce que la Cour prononce cette admission.
Article 2 : Le jugement n° 2019195/4-1 du 18 décembre 2020 du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 2 novembre 2020 du préfet de police sont annulés.
Article 3 : Le préfet de police statuera sur la régularisation de la situation de M. B..., dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à Me Angliviel, avocate de M. B... une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Angliviel, au préfet de police et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 8 février 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- Mme Hamon, présidente assesseure,
- Mme Jurin, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 2 mars 2022.
L'assesseure la plus ancienne,
P. HAMON
Le président-rapporteur,
C. JARDIN
Le greffier,
C. MONGIS La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 21PA01992 2