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28/02/2022 | FRANCE | N°21PA06124

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 28 février 2022, 21PA06124


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat national des pilotes de ligne France Alpa, M. E... M..., M. I... K..., M. D... G..., M. N... H..., M. L... C... et M. J... F... ont demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler d'une part la décision du 30 avril 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a rejeté la demande d'injonction en date du 21 avril 2021, d'autre part la décision du 5 mai 2021 par laquelle le directeur régional et interd

partemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat national des pilotes de ligne France Alpa, M. E... M..., M. I... K..., M. D... G..., M. N... H..., M. L... C... et M. J... F... ont demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler d'une part la décision du 30 avril 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a rejeté la demande d'injonction en date du 21 avril 2021, d'autre part la décision du 5 mai 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a validé l'accord collectif majoritaire relatif au plan de sauvegarde de l'emploi de la société Corsair, et enfin la décision du 5 mai 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a homologué le document unilatéral en date du 8 avril 2021.

Par un jugement n° 2106373 du 30 septembre 2021, le tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 1er décembre 2021, un mémoire en réplique, enregistré le 11 janvier 2022, et un nouveau mémoire, enregistré le 8 février 2022, le syndicat national des pilotes de ligne France Alpa, M. E... M..., M. I... K..., M. D... G..., M. N... H..., M. L... C... et M. J... F..., représentés par Me Hocquet, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 21006373 du 30 septembre 2021 du tribunal administratif de Melun ;

2°) avant dire-droit, d'ordonner à la société Corsair de verser aux débats le registre d'entrée et de sortie du personnel navigant technique, les transactions et les quatre lettres de licenciement visées dans la pièce n° 15 produites par la direction régionale et interdépartementale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France ;

3°) d'annuler la décision du 5 mai 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a validé l'accord collectif majoritaire relatif au plan de sauvegarde de l'emploi de la société Corsair ;

4°) d'annuler la décision du 5 mai 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a homologué le document unilatéral en date du 8 avril 2021 ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement au syndicat national des pilotes de ligne France Alpa de la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'accord collectif majoritaire du 8 avril 2021 est entaché d'une fraude aux dispositions d'ordre public relatives à l'obligation d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi ; en effet, le rattachement fictif des personnels navigants techniques (PNT) à un plan de sauvegarde de l'emploi concernant les personnels au sol est constitutif d'une fraude ;

- l'article 5.12.1 de l'accord d'entreprise portant sur le plan de sauvegarde de l'emploi n'est pas conforme à l'accord du 15 novembre 2006 ;

- il existe une rupture d'égalité entre les salariés, tous concernés par une rupture de leur contrat de travail pour un même motif économique (la vente des Boeing 747 appartenant à la société Corsair), qui auraient tous dû être inclus dans un seul et même plan de sauvegarde de l'emploi ;

- les dix personnels navigants techniques inclus dans le plan de sauvegarde de l'emploi se sont retrouvés sans travail depuis la vente le 15 juin 2020 par la compagnie Corsair des Boeing 747, sur lesquels ils travaillaient ; en les plaçant dans une situation d'attente sans échéance prévue, l'employeur a agi sans prendre en considération les risques psycho-sociaux qu'il faisait courir à ces salariés et n'a pas organisé le maintien de la validité de leur licence avion, en méconnaissance de l'article L. 6321-1 du code du travail ;

- la rémunération des personnels navigants techniques qui ont été maintenus plus d'un an dans l'entreprise sans exercer aucune activité professionnelle du fait du refus de la société Corsair de mettre en œuvre un plan de sauvegarde de l'emploi, au demeurant diminuée de plus de la moitié, a été en grande partie financée par le recours au dispositif d'activité partielle, le détournant ainsi de sa finalité ;

- la décision litigieuse portant validation de l'accord collectif majoritaire relatif au plan de sauvegarde de l'emploi de la société Corsair est insuffisamment motivée en ce qu'elle n'a pas répondu à l'allégation de fraude qui avait été portée préalablement à la connaissance de l'administration ;

- la procédure d'information et de consultation du conseil social et économique a été insuffisante et donc irrégulière ;

- la décision contestée de validation de l'accord collectif majoritaire est entachée d'une erreur de droit et méconnaît les dispositions du 1° et du 2° de l'article L. 1233-57-2 du code du travail en ce que l'autorité administrative n'a pas contrôlé le respect des dispositions concernant l'information à disposition des organisations syndicales pour négocier loyalement cet accord ;

- la décision querellée de validation de l'accord collectif majoritaire est entachée d'une erreur de droit et méconnaît les dispositions du 3° de l'article L. 1233-57-2 du code du travail en ce que l'autorité administrative devait s'assurer de la conformité de l'accord aux dispositions des articles L. 4121-1 et L. 1233-31 du code du travail ;

- la décision litigieuse portant validation de l'accord collectif majoritaire est entachée d'une erreur de droit et méconnaît les dispositions du 3° de l'article L. 1233-57-2 du code du travail en ce que l'autorité administrative ne pouvait valider un accord qui ne comprenait pas de mesures visant à faciliter le reclassement et ne respectait pas l'obligation d'effort de formation, d'adaptation et de reclassement incombant à l'employeur, mentionnée à l'article L. 1233-4 du code du travail ;

- la décision d'homologation du document unilatéral du 8 avril 2021 est entachée d'une insuffisance de motivation, d'une erreur de droit et méconnaît les dispositions de l'article L. 1233-57-3 du code du travail, l'administration ayant en effet homologué un document unilatéral qui ne respectait pas les dispositions de l'article L. 1233-24-4 du code du travail.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 décembre 2021, la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par les consorts requérants ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 30 décembre 2021, et des nouveaux mémoires enregistrés les 21 janvier 2022 et 10 février 2022, la société Corsair, représentée par Me Pataux, conclut au rejet de la requête et à ce que le versement de la somme de 5 000 euros soit mis à la charge du syndicat national des pilotes de ligne France Alpa sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par les consorts requérants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de Mme Pena, rapporteure publique,

- et les observations de Me Hocquet, avocate du syndicat national des pilotes de ligne France Alpa et des autres requérants, de M. A..., représentant la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion et de Me Pataux, avocat de la société Corsair.

Considérant ce qui suit :

1. Par deux décisions du 5 mai 2021, le directeur régional et interdépartemental de 1'économie, de 1'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France, d'une part, a validé l'accord collectif majoritaire portant sur le projet de licenciement économique collectif, hors le nombre d'emplois supprimés, donnant lieu à la mise en œuvre du plan de sauvegarde de l'emploi de l'entreprise Corsair et, d'autre part, a homologué le document unilatéral portant sur le nombre d'emplois supprimés au sein de l'entreprise Corsair (77 suppressions d'emploi et 10 modifications de contrats de travail). Par le jugement du 30 septembre 2021 dont il est relevé appel, le tribunal administratif de Melun a rejeté la demande d'annulation de ces décisions présentée par le syndicat national des pilotes de ligne France Alpa, M. M..., M. K..., M. G..., M. H..., M. C... et M. F....

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision portant validation de l'accord collectif majoritaire :

2. Aux termes de l'article L. 1233-24-1 du code du travail : " Dans les entreprises de cinquante salariés et plus, un accord collectif peut déterminer le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63 ainsi que les modalités de consultation du comité social et économique et de mise en œuvre des licenciements. Cet accord est signé par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins 50 % des suffrages exprimés en faveur d'organisations reconnues représentatives au premier tour des dernières élections des titulaires au comité social et économique, quel que soit le nombre de votants, ou par le conseil d'entreprise dans les conditions prévues à l'article

L. 2321-9. L'administration est informée sans délai de l'ouverture d'une négociation en vue de l'accord précité. ". Aux termes de l'article L. 1233-57-2 du code du travail : " L'autorité administrative valide l'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 dès lors qu'elle s'est assurée de : / 1° Sa conformité aux articles L. 1233-24-1 à L. 1233-24-3 ; / 2° La régularité de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique ; / 3° La présence dans le plan de sauvegarde de l'emploi des mesures prévues aux articles L. 1233-61 et

L. 1233-63 ; / 4° La mise en œuvre effective, le cas échéant, des obligations prévues aux articles L. 1233-57-9 à L. 1233-57-16, L. 1233-57-19 et L. 1233-57-20 ".

3. En premier lieu, les requérants font valoir que la société Corsair a procédé à la vente des trois Boeing 747 présents dans sa flotte (composée pour le reste d'Airbus A 330) le 2 juillet 2020, qu'elle a adressé le 28 juillet 2020 aux personnels navigants techniques (PNT) qualifiés pour voler sur des Boeing 747 une proposition de modification de leur contrat de travail visant à leur affectation au secteur Airbus A 330, avec un délai d'un mois à compter de la date de présentation de cette lettre pour accepter cette proposition de modification ou pour la refuser, auquel cas la société Corsair indiquait qu'elle serait alors contrainte d'engager une procédure de licenciement pour motif économique, que si certains pilotes ont fait valoir leurs droits à la retraite et d'autres ont négocié une rupture conventionnelle de leur contrat de travail, de nombreux pilotes ont refusé la modification de leur contrat de travail et l'affectation au secteur A 330, que la société Corsair aurait alors dû mettre en œuvre sans délai une procédure de licenciement collectif pour motif économique en application de l'article L. 1233-25 du code du travail, qui dispose que " lorsqu'au moins dix salariés ont refusé la modification d'un élément essentiel de leur contrat de travail, proposée par leur employeur pour l'un des motifs économiques énoncés à l'article L. 1233-3 et que leur licenciement est envisagé, celui-ci est soumis aux dispositions applicables en cas de licenciement collectif pour motif économique ", mais aurait temporisé en escomptant que le nombre de pilotes concernés passerait sous le seuil de dix salariés, et que n'étant pas parvenue à cet objectif, elle se serait résolue à rattacher les dix personnels navigants techniques qui demeuraient dans ses effectifs à un plan de sauvegarde de l'emploi qui ne concernait que des personnels au sol en signant le 8 avril 2021 avec les organisations syndicales représentatives un accord collectif majoritaire et en sollicitant le 30 avril 2021 de la direction régionale et interdépartementale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France la validation de l'accord collectif et l'homologation du document unilatéral. Toutefois, comme l'ont à bon droit estimé les premiers juges, d'une part la circonstance que la société Corsair n'a pas mis en œuvre un plan de sauvegarde de l'emploi immédiatement après avoir recueilli les réponses de refus de modification de leur contrat de travail des personnels navigants techniques est sans incidence sur la légalité de la décision du 5 mai 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de 1'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a validé l'accord collectif majoritaire signé le 8 avril 2021 ; le contrôle exercé par l'administration sur l'accord collectif, en application des dispositions précitées de l'article L. 1233-57-2 du code du travail, ne pouvait être effectué qu'à compter de la date de sa saisine et au regard des circonstances alors existantes. A supposer que des ruptures conventionnelles aient été conclues dont la finalité aurait été de contourner la législation relative aux licenciements économiques collectifs, cette circonstance entacherait de nullité ces ruptures conventionnelles et serait sans incidence sur la légalité d'un plan de sauvegarde de l'emploi ultérieur. Il appartenait alors aux salariés de la société qui estimaient que c'est à tort qu'ils n'avaient pas bénéficié en temps voulu d'un plan de sauvegarde de l'emploi de saisir le conseil de prud'hommes, seul compétent pour résoudre de tels litiges. D'autre part, la circonstance que la société Corsair a inclus dix personnels navigants techniques dans le plan de sauvegarde de l'emploi considéré qui concerne 52 suppressions de poste et 25 modifications de contrats, majoritairement de personnels au sol, n'est pas entachée d'irrégularité. Par suite, le moyen, pris en ses deux branches, tiré de la fraude à l'obligation d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi et de l'irrégularité de la définition du périmètre du plan de sauvegarde de l'emploi, doit être écarté.

4. En deuxième lieu, les requérants soutiennent que c'est à tort que l'accord collectif portant sur le plan de sauvegarde de l'emploi de la compagnie Corsair fait référence, pour les personnels navigants techniques, à l'accord " de fin de secteur 747 Personnel Navigant Technique " en date du 21 avril 2018, alors que l'accord du 15 novembre 2006 aurait dû être appliqué. Toutefois, il résulte des dispositions précitées de l'article L. 1233-57-2 du code du travail que le contrôle de l'administration validant un accord collectif est limité à la présence, dans ce plan, des mesures prévues aux articles L. 1233-61 et L. 1233-63 du code du travail. Par suite, les requérants ne peuvent utilement soutenir, pour contester la décision litigieuse du 5 mai 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de 1'économie, de 1'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a validé l'accord collectif signé le 8 avril 2021, que cet accord méconnaitrait des stipulations conventionnelles.

5. En tout état de cause, l'accord de fin de secteur 747 Personnel Navigant Technique du 21 avril 2018 stipule : " Préambule : le présent accord a vocation à prévoir les modalités d'une fin de secteur 747 et de l'introduction de nouvelles machines au sein de la société Corsair. / Dans tous les cas de figure entraînant une modification substantielle du contrat de travail du pilote autre que celle induite par le changement de secteur lié à la fin du secteur 747 objet du présent accord, que ce changement de secteur s'effectue au sein de la compagnie Corsair ou d'une autre entité, l'accord du 15 novembre 2006 relatif aux indemnités de licenciement pour motif économique continuera à s'appliquer dans toutes ses dispositions. (...) / 2. Montant de l'indemnité de départ. / 2.1 Montant de l'indemnité versée dans le cadre d'un projet collectif de réorganisation en l'absence d'impact sur le niveau de l'emploi. / Dans le cadre d'un projet de changement de flotte (fin de secteur et/ou renouvellement de la flotte de la compagnie) n'entraînant aucune diminution du nombre de pilote (à savoir sans suppression de poste de PNT tous secteurs confondus), après une phase d'appel au volontariat au changement de secteur ou au départ de la compagnie dans les conditions précisées au présent accord et à ses annexes : / Seules des modifications de contrat seraient proposées dans le cadre du changement de secteur qui pourraient entraîner, le cas échéant, en cas de refus de la part des salariés concernés, des licenciements pour motif économique (individuel ou collectif) / Des ruptures de contrat liées à la cessation d'activité dans le cadre de l'article L. 6521-4 du code des transports pourraient également intervenir pour les pilotes remplissant les conditions légales. / Or, conscients des enjeux économiques liés à l'application du protocole d'accord relatif aux indemnités de licenciement pour motif économique applicable au personnel navigant technique (PNT) en date du 16 novembre 2006, les parties au présent avenant ont donc convenu de modifier notamment l'indemnité de licenciement économique qui serait versée par Corsair dans cette seule hypothèse. (...) / 2.2 Montant de l'indemnité de licenciement intervenant dans le cadre d'un changement de flotte entraînant une réduction de l'effectif. / Dans le cadre d'un projet de changement de flotte (fin de secteur et/ou renouvellement de la flotte de la compagnie) entraînant une diminution du nombre de pilotes (à savoir avec suppression de postes de PNT tous secteurs confondus), les pilotes concernés bénéficieraient de l'application du protocole d'accord relatif aux indemnités de licenciement pour motif économique applicable au personnel navigant technique (PNT) en date du 15 novembre 2006. (...) ". Dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que, d'une part, si le nombre des personnels navigants techniques habilités à voler sur des Boeing 747 a diminué du fait de la vente des trois Boeing 747 appartenant à la société Corsair, le nombre total des personnels navigants techniques employés par cette compagnie a augmenté à la date de signature de l'accord collectif et que, d'autre part, cet accord indique qu'il y a 140 personnels navigants techniques dans l'organisation actuelle, aucun poste supprimé, et que " l'organisation cible " comprendra 140 personnels navigants techniques, l'article 5.12.1 de cet accord a appliqué les stipulations précitées en indiquant que, " pour les 10 salariés du Personnel Navigant Technique ayant refusé la modification de leur contrat en raison du changement de secteur 747, ils percevront une indemnité de rupture conformément à l'article 2.1 de l'accord de fin de secteur 747 Personnel Navigant Technique en date du 21 avril 2018 ".

6. En troisième lieu, les requérants soutiennent qu'il existe une rupture d'égalité entre des salariés personnels navigants techniques, tous concernés par une rupture de leur contrat de travail pour un même motif économique, la vente des Boeing 747, qui auraient dû être inclus dans un seul et même plan de sauvegarde de l'emploi, alors que certains ont accepté de conclure des ruptures conventionnelles avec la société Corsair en recevant des indemnités de rupture supérieures à celles que doivent percevoir les personnels navigants techniques, qui de surcroît sont demeurés dans l'entreprise sans activité professionnelle, avec des rémunérations diminuées et dont la licence n'a pas été maintenue à jour par leur employeur.

7. Si un plan de sauvegarde de l'emploi peut contenir des mesures réservées à certains salariés, c'est à la condition que tous les salariés de l'entreprise placés dans une situation en tous points identique au regard de l'avantage en cause puissent bénéficier de cet avantage, ce qui implique qu'une différence de traitement puisse être justifiée par des raisons objectives et pertinentes et que les règles déterminant les conditions d'attribution de cet avantage soient préalablement définies et contrôlables.

8. En l'espèce, les requérants ne sont pas fondés à soutenir qu'existerait une différence de traitement entre des personnels navigants techniques salariés ayant quitté l'entreprise avant la conclusion de l'accord collectif et les dix salariés personnels navigants techniques concernés par cet accord dès lors qu'ils ne sont pas dans une situation en tous points identique au regard de l'application des mesures du plan de sauvegarde de l'emploi en cause.

9. En quatrième lieu, les requérants soutiennent que les dix personnels navigants techniques inclus dans le plan de sauvegarde de l'emploi se sont retrouvés sans travail depuis la vente, le 2 juillet 2020, par la société Corsair, des trois Boeing 747, sur lesquels ils travaillaient, et qu'en les plaçant dans une situation d'attente sans échéance prévue, pour faire pression sur eux afin qu'ils acceptent de signer une rupture conventionnelle de leur contrat de travail, l'employeur a agi sans prendre en considération les risques psycho-sociaux qu'il faisait courir à ces salariés et n'a pas agi de telle sorte que leur licence avion demeure valide, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 6321-1 du code du travail, aux termes desquelles " l'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail. / Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations. / Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences (...) ". Toutefois, comme l'ont à bon droit estimé les premiers juges, à les supposer avérés, les éléments relatifs au fait que l'employeur n'aurait pas exécuté les obligations auxquelles il était tenu dans le cadre des contrats de travail des personnels navigants techniques ne peuvent être utilement invoqués à l'encontre de la décision litigieuse du 5 mai 2021 portant validation de l'accord collectif majoritaire.

10. En cinquième lieu, la circonstance, à la supposer établie, que la rémunération des personnels navigants techniques qui ont été maintenus plus d'un an dans l'entreprise sans exercer aucune activité professionnelle du fait du refus de la société Corsair de mettre en œuvre en temps utile un plan de sauvegarde de l'emploi aurait été en grande partie financée par le recours au dispositif d'activité partielle, le détournant ainsi de sa finalité, est sans incidence sur la légalité de la décision contestée du 5 mai 2021 portant validation de l'accord collectif majoritaire.

11. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 1233-57-4 du code du travail : " L'autorité administrative notifie à l'employeur la décision de validation dans un délai de quinze jours à compter de la réception de l'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 (...). / (...) La décision prise par l'autorité administrative est motivée. / (...) ". En vertu de ces dispositions, la décision expresse par laquelle l'administration valide un accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 doit énoncer les éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que les personnes auxquelles cette décision est notifiée puissent à sa seule lecture en connaître les motifs. Si le respect de cette règle de motivation n'implique ni que l'administration prenne explicitement parti sur tous les éléments qu'il lui incombe de contrôler, ni qu'elle retrace dans la motivation de sa décision les étapes de la procédure préalable à son édiction, il lui appartient, toutefois, d'y faire apparaître les éléments essentiels de son examen. Doivent ainsi y figurer ceux relatifs à la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique ainsi que ceux relatifs à l'obligation d'effort de formation, d'adaptation et de reclassement incombant à l'employeur. En outre, il appartient, le cas échéant, à l'administration d'indiquer dans la motivation de sa décision tout élément sur lequel elle aurait été, en raison des circonstances propres à l'espèce, spécifiquement amenée à porter une appréciation.

12. Si les requérants indiquent avoir fait valoir auprès de la direction régionale et interdépartementale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France que le plan de sauvegarde de l'emploi était entaché de fraude, le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France n'était pas tenu de répondre à cette allégation dans la décision litigieuse du 5 mai 2021 validant l'accord collectif majoritaire relatif au plan de sauvegarde de l'emploi de la société Corsair. Au surplus, cette décision, qui énonce les éléments de droit et de fait qui la fondent, et qui n'avait pas à faire état de la circonstance particulière que les dix salariés personnels navigants techniques concernés par cet accord avaient refusé la modification de leur contrat de travail qui leur avait été proposée le 28 juillet 2020 par la société Corsair en raison de la vente le 2 juillet 2020 des trois Boeing 747 de la flotte de la compagnie sur lesquels ils étaient affectés et que d'autres personnels navigants techniques, qui se trouvaient dans la même situation, avaient quitté la société avant la conclusion de l'accord collectif dans des conditions meilleures que celles allouées par cet accord, est suffisamment motivée.

13. En septième lieu, aux termes de l'article L. 1233-30 du code du travail : " I.- Dans les entreprises ou établissements employant habituellement au moins cinquante salariés, l'employeur réunit et consulte le comité social et économique sur : / 1° L'opération projetée et ses modalités d'application, conformément à l'article L. 2323-31 ; / 2° Le projet de licenciement collectif : le nombre de suppressions d'emploi, les catégories professionnelles concernées, les critères d'ordre et le calendrier prévisionnel des licenciements, les mesures sociales d'accompagnement prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi et, le cas échéant, les conséquences des licenciements projetés en matière de santé, de sécurité ou de conditions de travail. / Les éléments mentionnés au 2° du présent I qui font l'objet de l'accord mentionné à l'article L. 1233-24-1 ne sont pas soumis à la consultation du comité social et économique prévue au présent article. / (...) ". Aux termes de l'article L. 1233-31 du même code : " L'employeur adresse aux représentants du personnel, avec la convocation à la première réunion, tous renseignements utiles sur le projet de licenciement collectif. / Il indique : / 1° La ou les raisons économiques, financières ou techniques du projet de licenciement ; / 2° Le nombre de licenciements envisagé ; / 3° Les catégories professionnelles concernées et les critères proposés pour l'ordre des licenciements ; / 4° Le nombre de salariés, permanents ou non, employés dans l'établissement ; / 5° Le calendrier prévisionnel des licenciements ; / 6° Les mesures de nature économique envisagées ; / 7° Le cas échéant, les conséquences de la réorganisation en matière de santé, de sécurité ou de conditions de travail. ".

14. Il ressort des pièces du dossier que le conseil social et économique a été informé et consulté à neuf reprises, depuis la première séance du 28 janvier 2021, avant qu'il ne rende son avis le 9 avril 2021. Les requérants soutiennent que n'ont pas été portées à la connaissance du conseil social et économique les conditions économiques dans lesquelles les salariés personnels navigants techniques avaient refusé la modification de leur contrat de travail qui leur avait été proposée le 28 juillet 2020 par la société Corsair en raison de la vente le 2 juillet 2020 des trois Boeing 747 de la flotte de la compagnie sur lesquels ils étaient affectés et qui avaient quitté la société et que le nombre des personnels navigants techniques dans cette situation a été dissimulé, ce qui a fait obstacle à ce que le conseil social et économique puisse prendre la mesure de l'importance des licenciements économiques envisagés en conséquence de la vente des trois Boeing 747/400. Toutefois, lors de la séance du conseil social et économique du 26 février 2021, comme il ressort de son procès-verbal, la question des personnels navigants techniques a été évoquée de manière détaillée, y compris sur les points de savoir pourquoi un plan de sauvegarde de l'emploi n'avait pas été mis en œuvre dès la fin du secteur Boeing de la compagnie et pourquoi, alors que les dix personnels navigants techniques étaient connus dès septembre 2020, ils avaient été inclus dans le plan de sauvegarde de l'emploi faisant l'objet de la consultation, la directrice des ressources humaines de la compagnie Corsair ayant répondu à ce sujet que la direction avait préféré attendre les résultats des élections professionnelles organisées à la fin de l'année 2020 et que de plus l'entreprise ne possédait pas les moyens de financer un plan de sauvegarde de l'emploi en septembre 2020, et que, par ailleurs, les causes d'un départ d'un commun accord des pilotes (départs négociés et cessation d'activité) n'avaient pas à être présentées dans cette instance. De plus, l'avis émis par le conseil social et économique du 9 avril 2021 indique, " concernant la partie PNT : le CSE déplore que les 10 PNT n'aient pas pu bénéficier d'un PSE propre à leur corporation [sic !] suite à la vente accélérée de leur outil de travail. Comme le souligne le rapport APEX, le PSE PNT apparaît comme un PSE spécifique et indépendant. Cela aurait permis de négocier des conditions de départ spécifiques, d'éviter de nombreuses discussions improductives, mais surtout de soulager bien en amont les salariés concernés qui attendent d'être fixés sur leur sort depuis juillet 2020. ". Enfin, si les requérants soutiennent qu'aucune précision n'a été donnée sur les circonstances des départs des personnels navigants techniques salariés qui avaient refusé la modification de leur contrat de travail qui leur avait été proposée le 28 juillet 2020 par la société et qui avaient quitté la société, ce qui n'a pas permis de vérifier l'égalité de traitement de tous les personnels navigants techniques dont le contrat de travail a été rompu pour une même cause économique, à savoir la fin du secteur 747/400 et leur refus d'une modification de leur contrat de travail, entre ceux ayant accepté de négocier individuellement et ceux inclus dans le plan de sauvegarde de l'emploi, ces informations sont confidentielles et intéressent uniquement le salarié concerné, comme l'a rappelé la directrice des ressources humaines de la compagnie Corsair lors de la séance du 26 février 2021. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la procédure d'information et de consultation du conseil social et économique aurait été irrégulière.

15. En huitième lieu, les requérants soutiennent qu'en n'informant pas les organisations syndicales sur le nombre de salariés membres du personnel navigant technique qui ont refusé la modification de leur contrat de travail et qui, de ce fait, étaient concernés par une rupture de leur contrat de travail à l'initiative de l'employeur pour raison économique, et qu'en ne donnant aucune information aux organisations syndicales sur le contenu des transactions conclues avec ces personnels navigants techniques ayant accepté de ne pas faire l'objet d'un licenciement économique, la société Corsair a violé les dispositions des articles L. 1233-24-1, L. 1233-24-2, L. 1233-61 et L. 1233-63 du code du travail. Toutefois, d'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que la société Corsair ait délivré aux organisations syndicales lors de la négociation de l'accord collectif, ou au conseil social et économique lors de la procédure d'information et de consultation, comme il a été dit au point 14, des informations erronées en ce qui concerne le nombre de salariés membres du personnel navigant technique ayant refusé la modification de leur contrat de travail proposée par la lettre du 28 juillet 2020 de nature à vicier la procédure de négociation de l'accord collectif. D'autre part, comme il a été dit au point 14, les informations relatives aux conditions de départ des personnels navigants techniques ayant quitté la société sans faire l'objet d'un licenciement économique étant confidentielles et intéressant uniquement le salarié concerné, elles ne pouvaient, en tout état de cause, être portées à la connaissance des organisations syndicales lors de la négociation de l'accord collectif.

16. En neuvième lieu, aux termes de l'article L. 4121-1 du code du travail : " L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. / Ces mesures comprennent : / 1° Des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l'article L. 4161-1 ; / 2° Des actions d'information et de formation ; / 3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. / L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes. ".

17. Dans le cadre d'une réorganisation qui donne lieu à élaboration d'un plan de sauvegarde de l'emploi, il appartient à l'autorité administrative de vérifier le respect, par l'employeur, de ses obligations en matière de prévention des risques pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. A cette fin, elle doit contrôler, tant la régularité de l'information et de la consultation des institutions représentatives du personnel que les mesures auxquelles l'employeur est tenu en application de l'article L. 4121-1 du code du travail au titre des modalités d'application de l'opération projetée, ce contrôle n'étant pas séparable de ceux qui sont mentionnés au point précédent. Il n'appartient qu'à la juridiction administrative de connaître de la contestation de la décision prise par l'autorité administrative, le juge judiciaire étant pour sa part compétent pour assurer le respect par l'employeur de son obligation de sécurité lorsque la situation à l'origine du litige, soit est sans rapport avec le projet de licenciement collectif et l'opération de réorganisation et de réduction des effectifs en cours, soit est liée à la mise en œuvre de l'accord ou du document ou de l'opération de réorganisation.

18. D'une part, les requérants ne peuvent utilement soutenir, pour contester la légalité de la décision contestée du 5 mai 2021, que vingt-neuf salariés personnels navigants techniques, dont les dix inclus dans le plan de sauvegarde de l'emploi en cause, ont été maintenus, depuis la vente le 2 juillet 2020 des trois Boeing 747 de la flotte de la compagnie sur lesquels ils étaient affectés, dans une situation de maintien fictif dans un emploi, ce qui était de nature à provoquer une souffrance et à favoriser l'apparition de risques psycho-sociaux, dès lors que cette situation est antérieure à la conclusion de l'accord collectif du 8 avril 2021 validé par la décision du 5 mai 2021 et à la mise en œuvre du plan de sauvegarde de l'emploi, comme l'ont à bon droit estimé les premiers juges qui ont répondu à cette branche du moyen au point 18 du jugement attaqué, contrairement à ce que soutiennent les requérants. D'autre part, comme l'ont à bon droit relevé les premiers juges, il ressort des pièces du dossier que l'accord collectif signé le 8 avril 2021 contient un point sur les " conséquences du projet en matière de santé, sécurité et conditions de travail ", qui est développé dans le livre II qui présente les dispositifs d'accompagnement et les conséquences du projet sur la santé, la sécurité et les conditions de travail des collaborateurs comportant une analyse des risques sur la base d'un référentiel issu de travaux de recherches comportant 14 facteurs de risques articulés autour de 3 axes (organisation du travail / climat social / conditions de vie au travail) en application duquel la direction de l'entreprise a mis en place un plan d'actions par direction et pris des engagement, et que ces éléments ont été débattus lors de la réunion du CSE du 9 avril 2021.

19. En dixième lieu, aux termes de l'article L. 1233-61 du code du travail : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en œuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. / Ce plan intègre un plan de reclassement visant à faciliter le reclassement sur le territoire national des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité, notamment celui des salariés âgés ou présentant des caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile. / (...) ".

20. Il ressort des pièces du dossier que le plan de reclassement prévoit des mesures générales auxquelles les personnels navigants techniques sont éligibles, ainsi qu'une mesure de reclassement spécifique aux personnels navigants techniques, le point 5.8 de l'accord collectif majoritaire stipulant que " La Compagnie pourra prendre en charge, dans la limite de 10 000 € HT, le financement de la licence Avion PNT sur présentation d'une offre d'embauche, ou d'une lettre de motivation pour cet emploi et d'un devis. Cette aide n'est pas cumulable avec les aides à la formation prévues aux points 5.7.1 et 5.7.2.1 et ne se cumule pas à l'accompagnement à la création/reprise d'entreprise. ", dont les requérants n'établissent pas qu'il serait privé d'effectivité. D'une part, la circonstance invoquée par les requérants, à la supposer établie, que cette mesure ne constituerait en réalité qu'une exécution tardive des obligations de l'employeur, à qui il appartenait en tout état de cause de maintenir l'employabilité des personnels navigants techniques affectés sur le secteur Boeing 747/400 après la vente de ces avions le 2 juillet 2020, est inopérante à l'encontre de l'accord collectif du 8 avril 2021 validé par la décision du 5 mai 2021. D'autre part, si les requérants font valoir que les personnels navigants techniques, n'étant pas affiliés au régime de retraite complémentaire AGIRC/ARCO mais à la Caisse de retraite du personnel navigant, caisse obligatoire de retraite, ne peuvent bénéficier, contrairement aux autres salariés concernés par le plan de sauvegarde de l'emploi, du maintien des cotisations de retraite complémentaire pendant le congé de reclassement, ils n'établissent toutefois pas cette impossibilité, alors qu'il ressort des pièces du dossier qu'un accord d'entreprise portant sur le maintien des cotisations de retraite complémentaire pendant le congé de reclassement a été signé le 8 avril 2021 dont la société Corsair a confirmé à la direction régionale et interdépartementale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France, par un courrier du 28 avril 2021, qu'il était applicable aux personnels navigants techniques. Enfin, si les requérants font valoir qu'il existe une inégalité de traitement pour ce qui concerne les indemnités de rupture entre les personnels navigants techniques et les personnels au sol, ces deux catégories de salariés relèvent de statuts différents qui peuvent justifier une telle différence de traitement, telle qu'elle a été formalisée par l'accord du 21 avril 2018 de fin de secteur 747 pour les personnels navigants techniques, auquel l'accord collectif majoritaire pouvait se référer, comme il a été dit ci-dessus.

En ce qui concerne la décision portant homologation du document unilatéral portant sur le nombre d'emplois supprimés au sein de l'entreprise Corsair :

21. Aux termes de l'article L. 1233-57-3 du code du travail : " En l'absence d'accord collectif ou en cas d'accord ne portant pas sur l'ensemble des points mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié la conformité de son contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles relatives aux éléments mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2 (...) ". Aux termes de l'article L. 1233-24-2 du même code : " L'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 porte sur le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63. / Il peut également porter sur : / (...) 4° Le nombre de suppressions d'emploi et les catégories professionnelles concernées ; / (...) ".

22. En premier lieu, la décision litigieuse du 5 mai 2021 portant homologation du document unilatéral comporte les éléments de droit et de fait qui en constitue le fondement et est ainsi suffisamment motivée.

23. En deuxième lieu, le document unilatéral du 8 avril 2021 homologué le 5 mai 2021 indique : " Nombre maximal de licenciements envisagés. (...) Par ailleurs, compte tenu du refus déjà formalisé de la modification du contrat de travail de 10 salariés PNT (changement de secteur 747), le présent Plan de Sauvegarde de l'Emploi pourrait concerner au total un maximum de 77 salariés. Au total, le nombre maximal de licenciements envisagés dans le cadre du présent Plan sera donc limité à 10 PNT et 67 Personnel Sol. ". Par suite, " le nombre de suppressions d'emploi et les catégories professionnelles concernées ", au sens des dispositions précitées de l'article L. 1233-24-2 du code du travail, a bien été mentionné dans ce document unilatéral, contrairement à ce que soutiennent les requérants.

24. En dernier lieu, les requérants ne peuvent utilement soutenir, à l'encontre de la décision litigieuse portant homologation du document unilatéral portant sur le nombre d'emplois supprimés au sein de l'entreprise Corsair, que le nombre des personnels navigants techniques est très supérieur aux dix salariés mentionnés dans le document unilatéral dès lors qu'il convient d'y inclure les autres personnels navigants techniques ayant refusé la modification de leur contrat de travail du fait de la même cause mais qui ont quitté la société avant la mise en œuvre du plan de sauvegarde de l'emploi, ces départs étant antérieurs à cette mise en œuvre.

En ce qui concerne la demande d'injonction :

25. Il ressort des pièces du dossier qu'une demande a été adressée par le SNPL France Alpa le 21 avril 2021 à la direction régionale et interdépartementale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France, soit après la signature de l'accord majoritaire du 8 avril 2021, concernant une injonction à adresser à la société Corsair de lui communiquer les accords individuels intervenus avec les 21 personnels navigants techniques dont la liste figurait en annexe d'un courrier électronique de la société Corsair en date du 21 avril 2021, ainsi que leur solde de tout compte. Les premiers juges ont estimé à bon droit qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les documents demandés par les requérants dans le cadre de leur demande d'injonction entreraient dans le cadre prévu par les dispositions de l'article L. 1233-57-5 du code du travail, qui dispose que " toute demande tendant, avant transmission de la demande de validation ou d'homologation, à ce qu'il soit enjoint à l'employeur de fournir les éléments d'information relatifs à la procédure en cours ou de se conformer à une règle de procédure prévue par les textes législatifs, les conventions collectives ou un accord collectif est adressée à l'autorité administrative. Celle-ci se prononce dans un délai de cinq jours ", et que, par suite, le refus de l'administration de faire droit à la demande d'injonction présentée par le SNPL France Alpa aurait été de nature à vicier la procédure d'information et consultation du comité social et économique.

26. Pour les mêmes motifs qu'indiqués précédemment, la demande avant dire-droit des requérants, qui demandent que soit ordonnée la production du registre d'entrée et de sortie du personnel navigant technique, des transactions et des quatre lettres de licenciement visées dans la pièce n° 15 versée au dossier par la direction régionale et interdépartementale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France, doit être rejetée.

27. Il résulte de tout ce qui précède que les consorts requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 30 septembre 2021, le tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande tendant à l'annulation d'une part de la décision du 30 avril 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a rejeté la demande d'injonction en date du 21 avril 2021, d'autre part de la décision du 5 mai 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a validé l'accord collectif majoritaire relatif au plan de sauvegarde de l'emploi de la société Corsair, et enfin de la décision du 5 mai 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a homologué le document unilatéral en date du 8 avril 2021.

Sur les frais liés à l'instance :

28. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais liés à l'instance. Dès lors, les conclusions présentées à ce titre par les consorts requérants doivent être rejetées.

29. Dans les circonstances de l'espèce, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la société Corsair les frais liés à l'instance.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du syndicat national des pilotes de ligne France Alpa, de M. M..., de M. K..., de M. G..., de M. H..., de M. C... et de M. F... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société Corsair, tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat national des pilotes de ligne France Alpa, à M. E... M..., à M. I... K..., à M. D... G..., à M. N... H..., aux ayants-droit de M. L... C..., à M. J... F..., à la société Corsair et à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion.

Copie en sera délivrée au directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 15 février 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- Mme Marie-Dominique Jayer, première conseillère.

- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 février 2022.

Le président-rapporteur,

I. B...L'assesseure la plus ancienne,

M.D. JAYER

La greffière,

N. DAHMANI

La République mande et ordonne à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA06124


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA06124
Date de la décision : 28/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07 Travail et emploi. - Licenciements.


Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: M. Ivan LUBEN
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : BARTHELEMY AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-02-28;21pa06124 ?
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