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24/02/2022 | FRANCE | N°21PA04351

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 24 février 2022, 21PA04351


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler le refus implicite de la commune du Vaudoué (Seine-et-Marne) de modifier le plan local d'urbanisme afin qu'il classe en zone U les terrains correspondant au lotissement de la Montagne Blanche et de supprimer l'espace boisé classé sur cette partie du territoire communal, d'enjoindre à la commune du Vaudoué de procéder au classement en zone U des terrains correspondant au lotissement de la Montagne Blanche et de supprimer l'espac

e boisé classé sur cette partie du territoire communal dans un délai d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler le refus implicite de la commune du Vaudoué (Seine-et-Marne) de modifier le plan local d'urbanisme afin qu'il classe en zone U les terrains correspondant au lotissement de la Montagne Blanche et de supprimer l'espace boisé classé sur cette partie du territoire communal, d'enjoindre à la commune du Vaudoué de procéder au classement en zone U des terrains correspondant au lotissement de la Montagne Blanche et de supprimer l'espace boisé classé sur cette partie du territoire communal dans un délai de six mois à compter de la notification du jugement à intervenir et à titre subsidiaire, de condamner la commune à lui verser la somme de 526 020 euros, en réparation du préjudice né du caractère inconstructible de sa parcelle.

Par un jugement n° 1908178 du 9 avril 2021, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés le 30 juillet et le 17 novembre 2021, Mme C... A... épouse B..., représentée par Me Labetoule, demande à la Cour :

1°) d'annuler la décision implicite de la commune du Vaudoué de modifier le plan local d'urbanisme afin qu'il classe en zone U les terrains correspondant au lotissement de la Montagne Blanche et de supprimer l'espace boisé classé sur cette partie du territoire communal ;

2°) d'enjoindre à la commune du Vaudoué de procéder, dans un délai de six mois, à la révision du plan local d'urbanisme et de prévoir un classement en zone U sur la partie du territoire communal des terrains correspondant au lotissement de la Montagne Blanche ;

3°) à titre subsidiaire, d'enjoindre à la commune de Vaudoué de procéder, dans le délai de huit mois, à la révision du plan local d'urbanisme aux fins suivantes :

- prévoir, après avis de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, sur la partie du territoire communal correspondant au lotissement de la Montagne Blanche, un nouveau classement en zone Nd " zone naturelle agricole ou forestière à secteur de taille et de capacité d'accueil limités " au sens de l'article L. 151-13 du code de l'urbanisme ;

- supprimer l'espace boisé classé sur cette même partie du territoire communal ;

- autoriser exceptionnellement sur cette même partie du territoire communal les constructions résidentielles et leurs dépendances ;

4°) de mettre à la charge de la commune du Vaudoué la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le classement de sa parcelle en zone N est entaché d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que le lotissement dans lequel elle est située est un lotissement entièrement urbanisé situé en continuité urbaine du centre-bourg ;

- le classement en terrain boisé classé est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- un classement en zone U ou en zone N avec des conditions de préservation de l'environnement serait plus cohérent au regard de la situation actuelle.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 octobre 2021, la commune du Vaudoué, représentée par Me de Bourbon Busset conclut au rejet de la requête, et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme A... épouse B... la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun moyen n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gobeill,

- les conclusions de Mme Guilloteau, rapporteure publique,

- et les observations de Me Labetoule, avocat de Mme A... épouse B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... épouse B..., propriétaire d'un terrain situé 10 rue de la Montagne Blanche sur le territoire de la commune du Vaudoué, a demandé au maire de la commune, par courrier daté du 1er juillet 2019, la révision du plan local d'urbanisme approuvé le 11 octobre 2013 afin qu'il classe en zone U les terrains correspondant au lotissement de la Montagne Blanche et que soit supprimé l'espace boisé classé sur cette partie du territoire communal. Le silence gardé par le maire sur cette demande a fait naître une décision implicite de rejet. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Melun l'annulation de cette décision ainsi que la condamnation de la commune à la réparation du préjudice de jouissance dû au caractère inconstructible de son terrain. Par un jugement du 9 avril 2021 dont elle relève appel, le tribunal a rejeté sa demande.

2. Mme A... épouse B... soutient en premier lieu que le classement en zone N de la parcelle cadastrée B n°950 dont elle est propriétaire est entaché d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'issue d'une division parcellaire, elle est la seule parcelle non construite dans le lotissement de la Montagne Blanche qui est entièrement urbanisé, qu'elle est desservie par une voie de circulation en partie bitumée, qu'elle est viabilisée et qu'il existe une continuité urbaine avec le centre de la commune dont elle n'est séparée que de 200 mètres.

3. Aux termes de l'article R. 123-8 du code de l'urbanisme alors applicable : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : / a) Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; / b) Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; / c) Soit de leur caractère d'espaces naturels. (...) ".

4. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Ils peuvent être amenés, à cet effet, à modifier le zonage ou les activités autorisées dans une zone déterminée, dans l'intérêt de l'urbanisme, leur appréciation sur ces différents points ne pouvant être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

5. Le thème transversal " protection des espaces naturels, agricoles et forestiers " du projet d'aménagement et de développement durables de la commune rappelle que le territoire communal comporte, parmi les unités paysagères homogènes, le massif des Trois Pignons dont il est primordial de veiller à la préservation en maitrisant l'étalement urbain et en densifiant le centre ancien et qu'il est nécessaire d'organiser un aménagement de l'espace qui définisse clairement les limites de l'urbanisation future et consacre la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers.

6. Les dispositions du règlement du plan local d'urbanisme approuvé le 11 octobre 2013 prévoient que la zone N est " une zone naturelle recouvrant les espaces naturels et boisés de la commune, qui nécessitent d'être préservés et mis en valeur. / Elle comprend trois secteurs : (...) / Le secteur Nd, d'habitat diffus existant, en marges des franges nord et nord-est du périmètre urbain. Des conditions strictes d'aménagement sont données, afin de préserver le milieu forestier environnant ".

7. S'il ressort des pièces du dossier que la parcelle en litige, au demeurant déjà classée dans le plan d'occupation des sols adopté en 1984 en zone N, soit en " zone non équipée constituée en majorité d'espaces boisés importants situés dans le prolongement du massif des Trois Pignons et qu'il convient de protéger en raison de la qualité du paysage et du caractère des éléments naturels qui la composent ", est située dans un secteur où des maisons d'habitation sont déjà construites, qu'elle est accessible par une voie d'accès en partie bitumée et reliée aux réseaux publics, elle est toutefois, ainsi qu'il ressort des documents produits et notamment des photographies, située dans le secteur de la Montagne Blanche, largement ouvert sur la forêt de Fontainebleau et qui, bien que situé à courte distance du centre-bourg de la commune, s'en distingue cependant par son caractère majoritairement boisé et par la dispersion des maisons sur des parcelles dont toutes ne sont pas construites. Dans ces conditions, c'est sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation que le règlement du plan local d'urbanisme a classé la parcelle en litige en zone N.

8. Mme A... épouse B... soutient en deuxième lieu que le classement de sa parcelle en espace boisé est entaché d'erreur manifeste d'appréciation en ce que, proche du centre-bourg, elle est située dans un secteur entièrement construit dont les maisons forment un linéaire bâti jusqu'à la lisière du bois.

9. Aux termes de l'article L. 130-1 du code de l'urbanisme alors applicable : " Les plans locaux d'urbanisme peuvent classer comme espaces boisés, les bois, forêts, parcs à conserver, à protéger ou à créer, qu'ils relèvent ou non du régime forestier, enclos ou non, attenant ou non à des habitations. Ce classement peut s'appliquer également à des arbres isolés, des haies ou réseaux de haies, des plantations d'alignements. ".

10. Ainsi qu'il a été dit au point 7, la parcelle en litige est située dans le secteur de la Montagne Blanche, dans une zone largement boisée, englobée dans le Massif des Trois Pignons qui appartient à la forêt de Fontainebleau, et que la commune a entendu protéger ainsi qu'il ressort des mentions du projet d'aménagement et de développement durables. Du fait du caractère épars des maisons, ce secteur ne saurait, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, être qualifié de " site urbain constitué " au sens du Schéma directeur de la région Île-de-France dont l'article 3.3 des orientations réglementaires énonce que " Les lisières des espaces boisés doivent être protégées. En dehors des sites urbains constitués, à l'exclusion des bâtiments à destination agricole, toute nouvelle urbanisation ne peut être implantée qu'à une distance d'au moins 50 mètres des lisières des massifs boisés de plus de 100 hectares. Un ensemble de constructions éparses ne saurait être regardé comme un site urbain constitué ". Il résulte de ce qui précède que le classement contesté en espace boisé n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

11. Si Mme A... épouse B... soutient en dernier lieu qu'un autre classement serait plus cohérent, il n'appartient pas au juge de l'excès de pouvoir d'exercer un contrôle sur l'opportunité des choix d'urbanisation des communes.

12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... épouse B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'annulation ainsi que celles à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. La commune du Vaudoué n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions de Mme A... épouse B... tendant à ce qu'une somme soit mise à sa charge au titre des dispositions précitées doivent être rejetées. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de Mme A... épouse B... le versement à la commune du Vaudoué d'une somme de 1 500 euros au titre des frais liés à l'instance.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... épouse B... est rejetée.

Article 2 : Mme A... épouse B... versera à la commune du Vaudoué une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... épouse B... et à la commune du Vaudoué.

Délibéré après l'audience du 3 février 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Diémert, président assesseur,

- M. Gobeill, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 février 2022.

Le rapporteur,

JF. GOBEILLLe président,

J. LAPOUZADE

La greffière,

C. POVSE

La République mande et ordonne au préfet de la Seine-et-Marne en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent jugement.

2

N° 21PA04351


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21PA04351
Date de la décision : 24/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01-01-03-03-01 Urbanisme et aménagement du territoire. - Plans d'aménagement et d'urbanisme. - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d’urbanisme (PLU). - Légalité des plans. - Légalité interne. - Appréciations soumises à un contrôle d'erreur manifeste. - Classement et délimitation des ones.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Jean-François GOBEILL
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : LABETOULE

Origine de la décision
Date de l'import : 08/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-02-24;21pa04351 ?
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