Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... D... a demandé au Tribunal des pensions de Papeete d'annuler la décision de la ministre des armées du 19 décembre 2018 rejetant sa demande de pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " séquelles de traumatisme du genou droit (...) ".
Par jugement n° 1900409 du 16 juin 2020, le Tribunal administratif de la Polynésie française, auquel la demande a été transmise en application du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018, a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 12 septembre 2020 et 4 décembre 2021, M. D..., représenté par Me Neuffer, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1900409 du 16 juin 2020 du Tribunal administratif de la Polynésie française ;
2°) d'annuler la décision de la ministre des armées du 19 décembre 2018 ;
3°) d'ordonner une expertise pour préciser les aggravations intervenues depuis son accident et établir le taux de son invalidité ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat les frais d'expertise ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- son état de santé s'est dégradé, que son taux d'invalidité est supérieur à 10 % et qu'ainsi le jugement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- le rappel de sa lombalgie a uniquement pour but d'étayer le faisceau d'indices en vue de permettre de faire droit à sa demande.
Par un mémoire en défense enregistré le 10 novembre 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête de M. D... et à la confirmation du jugement n° 1900409 du 16 juin 2020 du Tribunal administratif de la Polynésie française.
Elle soutient que :
- la requête d'appel de M. D... est irrecevable en ce qui concerne les séquelles de traumatisme du dos en raison de l'abandon de ses prétentions pour cette infirmité avant même l'expertise diligentée par l'administration pour cette affection et du fait qu'il ne s'est pas prévalu de cette infirmité en première instance ;
- le requérant n'a produit aucun document de nature à remettre en cause le taux de 10 % retenu à la date de sa demande de pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " séquelles de traumatisme du genou droit (...) ".
Par ordonnance du 23 septembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 novembre 2021 à 12h.
Par ordonnance du 15 novembre 2021, la clôture de l'instruction a été reportée au 16 décembre 2021 à 12h.
Un mémoire a été enregistré le 5 janvier 2022 pour la ministre des armées, après la clôture de l'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Collet,
- et les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. E... D..., né le 10 novembre 1957, s'est engagé dans la Légion étrangère en 1977 et a servi jusqu'à sa radiation des contrôles le 8 juillet 1989. Par une demande enregistrée le 16 septembre 2016, il a sollicité le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité au titre d'une blessure survenue en service le 18 août 1983 et a précisé, dans son courrier du 2 octobre 2017 reçu le 13 décembre suivant, que cette demande concernait une infirmité à son genou droit. Un rejet de sa demande lui a été opposé par la ministre des armées par une décision du 19 décembre 2018. Par jugement n° 1900409 du 16 juin 2020, dont M. D... relève appel, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur les droits à pension militaire d'invalidité de M. D... :
2. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, en vigueur à la date de la demande de bénéfice de la pension, le 27 septembre 2016 : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; / 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; / 4° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'accidents éprouvés entre le début et la fin d'une mission opérationnelle, y compris les opérations d'expertise ou d'essai, ou d'entraînement ou en escale, sauf faute de la victime détachable du service ". Aux termes de l'article L. 4 du même code alors en vigueur : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; / 2° Au titre d'infirmités résultant de maladies associées à des infirmités résultant de blessures, si le degré total d'invalidité atteint ou dépasse 30 % ; / 3° Au titre d'infirmité résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : 30 % en cas d'infirmité unique ; 40 % en cas d'infirmités multiples. / En cas d'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'une infirmité étrangère à celui-ci, cette aggravation seule est prise en considération, dans les conditions définies aux alinéas précédents. Toutefois, si le pourcentage total de l'infirmité aggravée est égal ou supérieur à 60 %, la pension est établie sur ce pourcentage ".
3. M. D..., qui avait rappelé dans sa requête d'appel avoir commencé à souffrir du dos à la suite d'une chute lors d'un exercice, a précisé dans ses dernières écritures qu'il s'agissait d'un rappel de faits destiné à étayer le faisceau d'indices en vue de permettre de faire droit à sa demande de pension, laquelle concerne l'infirmité " séquelles de traumatisme du genou droit (...) ". La Cour n'a donc pas à se prononcer sur cette infirmité.
S'agissant de l'infirmité " séquelles de traumatisme du genou droit (...) " :
4. Il résulte de l'instruction que M. D... a produit, à l'appui de sa demande de pension militaire d'invalidité enregistrée le 16 septembre 2016, un certificat médical établi par le docteur A... le 27 août 2016 mentionnant une douleur du genou droit côté interne et une gêne à la marche et à la flexion. Il a ensuite été examiné le 1er juin 2018, à la demande de la ministre des armées, par le docteur C..., chirurgien orthopédiste. Celui-ci a relevé que M. D... " est gêné par l'instabilité du genou droit avec une gonarthrose très limitée et uniquement interne pour laquelle se discute un traitement chirurgical dont on peut espérer une amélioration très sensible. L'avenir lointain de ce genou est pourtant sombre et il aura sans doute une prothèse de genou dans les dix ans à venir. L'examen de ce genou trouve une articulation normalement mobile sans flexum ", ce qui l'a conduit à conclure, à la date de son examen, à un taux d'invalidité inférieur à 10 % pour ces séquelles qui sont liées à un accident survenu en service le 18 août 1983 à Collioure, appréciation confirmée par le médecin chargé des pensions militaires d'invalidité de la sous-direction des pensions, dans son avis émis le 12 juillet 2018.
5. Si M. D... conteste ce taux d'invalidité et soutient qu'il a produit des documents médicaux récents qui font état d'aggravations et de douleurs complémentaires, toutefois l'appréciation de son état de santé à la date la plus proche de sa demande, soit le 16 septembre 2016, ne révèle pas de telles constatations médicales. En effet, si les certificats médicaux des docteurs B... et Petitzon mentionnent que la lésion du ligament croisé antérieur consécutive à la grave entorse de 1983 n'a pas été traitée, cette indication ne permet pas de contredire utilement les conclusions précitées du docteur C... et d'établir qu'à la date de sa demande de bénéfice de la pension militaire d'invalidité, son taux d'invalidité ne serait pas inférieur à 10 %. La production du certificat médical non daté établi par le remplaçant du docteur B..., mentionnant une radiographie réalisée en 2019 et montrant une méniscocalcose discrète latérale et une gonarthrose modérée fémoro-tibiale interne droite déjà existante selon les comptes rendus d'échographie et de radiologie du 15 juillet 2016, ne permettent pas davantage de contredire le taux d'invalidité retenu par la ministre des armées dans sa décision du 19 décembre 2018. Enfin, si M. D... se prévaut du certificat médical établi le 12 août 2020 par le docteur C..., lequel indique que depuis l'expertise réalisée le 1er juin 2018, " il existe une dégradation de son genou gauche qui justifie de reconsidérer l'expertise car le taux dépasse à présent les 10 % ", cette évolution est postérieure au 27 septembre 2016, qui est la date de sa demande de pension militaire d'invalidité à laquelle doit être appréciée l'existence et l'ampleur de l'infirmité alléguée. Il suit de là que cette évolution ne saurait être prise en compte dès lors que l'expertise précitée, réalisée le 1er juin 2018 par le docteur C..., à la date la plus proche de cette demande, ne révèle pas de telles constatations médicales.
6. Il résulte de ces différents éléments que, sans qu'il soit nécessaire d'ordonner une expertise, dès lors qu'il n'est pas établi qu'à la date de la demande de bénéfice d'une pension militaire d'invalidité pour " séquelles de traumatisme du genou droit (...) ", le 16 septembre 2016, cette infirmité résultant d'une blessure en service entraînait un taux d'invalidité d'au moins 10 %, c'est sans entacher le jugement attaqué d'une erreur manifeste d'appréciation que les premiers juges ont rejeté la demande de M. D... tendant à l'annulation de la décision du 19 décembre 2018 de la ministre des armées.
7. M. D... peut, s'il s'y croit fondé, se prévaloir de cette évolution de son état de santé postérieure à sa demande en formant une nouvelle demande de pension militaire d'invalidité auprès de la ministre des armées.
8. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris par voie de conséquence ses conclusions relatives aux dépens et aux frais liés à l'instance.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D... et à la ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 10 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Le Goff, président,
- M. Ho Si Fat, président assesseur,
- Mme Collet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 janvier 2022.
La rapporteure,
A. COLLET
Le président,
R. LE GOFF
La greffière,
E. VERGNOL
La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA02686