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28/01/2022 | FRANCE | N°21PA03792

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 28 janvier 2022, 21PA03792


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 4 juin 2021 par lequel le ministre de l'intérieur lui a refusé l'admission sur le territoire au titre de l'asile.

Par un jugement n° 2111941 du 11 juin 2021 la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 4 juin 2021 du ministre de l'intérieur.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 juillet 2021, le ministre de l'intérieur, représent

é par Me Moreau, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2111941 du 11 juin 2021 par leq...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 4 juin 2021 par lequel le ministre de l'intérieur lui a refusé l'admission sur le territoire au titre de l'asile.

Par un jugement n° 2111941 du 11 juin 2021 la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 4 juin 2021 du ministre de l'intérieur.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 juillet 2021, le ministre de l'intérieur, représenté par Me Moreau, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2111941 du 11 juin 2021 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du ministre de l'intérieur du 4 juin 2021 par lequel il a refusé d'admettre sur le territoire au titre de l'asile M. B... ;

2°) de rejeter la demande de première instance de M. B....

Le ministre de l'intérieur soutient que :

- le jugement est entaché d'une d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'arrêté attaqué n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation.

La requête n'a pu être transmise à M. B... faute d'adresse connue.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Boizot ;

- et les observations de Me Lecourt pour le ministre de l'intérieur.

Considérant ce qui suit :

1. Par décision du 4 juin 2021 prise après l'avis rendu le même jour par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), le ministre de l'intérieur a rejeté la demande d'entrée en France au titre de l'asile formée par M. B..., interpellé à son arrivée à l'aéroport de

Paris-Orly. Par cette même décision, le ministre de l'intérieur a ordonné son réacheminement vers tout pays où il sera légalement admissible. Saisi par M. B..., le tribunal administratif a annulé cette décision par jugement du 11 juin 2021 dont le ministre de l'intérieur relève appel.

S'agissant du moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :

2. Aux termes de l'article L. 352-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision de refuser l'entrée en France à un étranger qui se présente à la frontière et demande à bénéficier du droit d'asile ne peut être prise que dans les cas suivants : / 1° L'examen de la demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ou en application d'engagements identiques à ceux prévus par ce règlement avec d'autres Etats ; 2° La demande d'asile est irrecevable en application de l'article L. 531-32 ; / 3° La demande d'asile est manifestement infondée. / Constitue une demande d'asile manifestement infondée une demande qui, au regard des déclarations faites par l'étranger et des documents le cas échéant produits, est manifestement dénuée de pertinence au regard des conditions d'octroi de l'asile ou manifestement dépourvue de toute crédibilité en ce qui concerne le risque de persécutions ou d'atteintes graves ". L'article L. 352-2 de ce même code prévoit que : " Sauf dans le cas où l'examen de la demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat, la décision de refus d'entrée ne peut être prise qu'après consultation de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, qui rend son avis dans un délai fixé par voie réglementaire et dans le respect des garanties procédurales prévues au titre III du livre V. L'office tient compte de la vulnérabilité du demandeur d'asile. L'avocat ou le représentant d'une des associations mentionnées au huitième alinéa de l'article L. 531-15, désigné par l'étranger, est autorisé à pénétrer dans la zone d'attente pour l'accompagner à son entretien dans les conditions prévues au même article (...) ". Aux termes de l'article R. 351-1 du même code : " Lorsque l'étranger qui se présente à la frontière demande à bénéficier du droit d'asile, il est informé sans délai, dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de penser qu'il la comprend, de la procédure de demande d'asile et de son déroulement, de ses droits et obligations au cours de cette procédure, des conséquences que pourrait avoir le non-respect de ses obligations ou le refus de coopérer avec les autorités et des moyens dont il dispose pour l'aider à présenter sa demande. (...) ".

3. Il résulte des dispositions précitées que le ministre de l'intérieur peut rejeter la demande d'asile présentée par un étranger se présentant aux frontières du territoire national lorsque ses déclarations et les documents qu'il produit à leur appui, du fait notamment de leur caractère incohérent, inconsistant ou trop général, sont manifestement dépourvus de crédibilité et font apparaître comme manifestement dénuées de fondement les menaces de persécutions alléguées par l'intéressé au titre de l'article 1er A (2) de la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés.

4. Pour annuler la décision du ministre de l'intérieur refusant l'entrée sur le territoire de M. B..., la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondée sur les déclarations de l'intéressé telles qu'elles ont été consignées dans le compte-rendu d'entretien avec l'officier de protection de l'OFPRA, complétées à la barre, dont il ressort que le requérant fait partie de l'ethnie muluba, que son père a soutenu le précédent chef de l'Etat, le président Kabila, et a exercé auprès de lui des fonctions d'agent de renseignement pendant une dizaine d'années, qu'après le départ au pouvoir du président Kabila en 2019, le nouveau gouvernement s'est engagé dans un mouvement violent de remplacement des équipes précédentes, que le requérant a été enlevé en janvier 2021 et séquestré durant trois jours, et que, après avoir été menacé, son père a été assassiné en avril 2021. La magistrate désignée par le président du tribunal administratif a estimé qu'au regard de ces éléments, le ministre de l'intérieur, en refusant l'admission de M B... sur le territoire national et en estimant que sa demande d'asile devait être regardée comme manifestement infondée, avait méconnu les dispositions du code précité.

5. Toutefois, M. B... n'a apporté devant l'officier de protection de l'OFPRA, non plus que devant le ministre ou le Tribunal, aucun élément ou document de nature à établir la réalité, l'intensité et le caractère personnel des menaces et violences dont il alléguait avoir été la victime dans son pays d'origine, notamment en liaison avec les fonctions qu'assurait son père auprès du précédent chef de l'Etat et le décès qui se serait ensuivi, ni aucun élément ou document de nature à justifier des risques qu'il prétendait encourir en cas de retour dans ce pays. Il n'établit pas davantage dans ses écritures la réalité de ces menaces, violences et risques, ne produisant aucune pièce à l'appui de son récit. Par suite, le ministre de l'intérieur a pu à bon droit estimer que la demande d'admission sur le territoire français au titre de l'asile de M. B... était manifestement infondée.

6. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal a annulé sa décision du 4 juin 2021.

7. Il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant le tribunal administratif de Paris.

S'agissant de l'autre moyen soulevé par M. B... :

8. M. B... fait valoir qu'il est isolé dans son pays d'origine et qu'il craint de subir des tortures et violences de la part des forces de l'ordre en cas de retour dans son pays d'origine, la République démocratique du Congo, au regard des fonctions précédemment occupées par son père sous le régime du président Kabila. Il ressort toutefois du procès-verbal de l'entretien avec l'officier de protection de l'OFPRA que l'intéressé a livré un récit impersonnel et imprécis, ses déclarations quant à la réalité des menaces dont il ferait l'objet étant inconsistantes et dépourvues de crédibilité. Au surplus, il ne produit au dossier aucune pièce au soutien de ses allégations. Ainsi, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que le ministre de l'intérieur n'aurait pas pris en compte l'ensemble des déclarations du requérant et aurait ainsi entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

9. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désigné par le président du tribunal administratif de Paris a annulé sa décision portant refus d'entrée sur le territoire français de M. B.... La demande qu'il a présentée devant le Tribunal doit dès lors être rejetée.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2111941 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris du 11 juin 2021 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A... B....

Délibéré après l'audience du 10 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président,

- M. Simon, premier conseiller,

- Mme Boizot, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 28 janvier 2022.

La rapporteure,

S. BOIZOTLe président,

S. CARRERE La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA03792


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA03792
Date de la décision : 28/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: Mme Sabine BOIZOT
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : SCP SAIDJI et MOREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 08/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-01-28;21pa03792 ?
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