Vu les procédures suivantes :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 6 août 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.
Par un jugement n° 2009339 du 30 avril 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 1er juin 2021, M. B..., représenté par Me Chemin, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2009339 du 30 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la
Seine-Saint-Denis du 6 août 2020 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours avec interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans et fixant son pays de renvoi ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour d'un an portant la mention " salarié " ou " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer, dans l'attente une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail, dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis d'effacer son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;
- les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences sur sa situation personnelle ;
- elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elles méconnaissent les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées ;
- la décision portant refus d'un délai de départ volontaire est illégale par voie d'exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale par voie d'exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ; elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est illégale par voie d'exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été transmise au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a produit aucune observation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Boizot ;
- et les observations de Me Berthelot, substituant Me Chemin, pour M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant sri-lankais né le 31 décembre 1981, entré en France en février 2012 selon ses déclarations, a sollicité le 5 avril 2019 auprès du préfet de la
Seine-Saint-Denis son admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 6 août 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours avec interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans et a fixé son pays de renvoi. M. B... relève appel du jugement du 30 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande d'annulation des décisions contenues dans l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 6 août 2020.
Sur les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire :
2. En premier lieu, les moyens tirés d'un défaut de motivation des décisions attaquées doivent être écartés par adoption des motifs retenus par le tribunal qui y a exactement répondu au point 2 de son jugement.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2.(...) ".
4. Saisie d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de ces dispositions par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail, ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi. Il appartient, en effet, à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.
5. A l'appui de sa demande tendant à l'annulation de la décision lui refusant un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 alors en vigueur du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, M. B... soutient qu'il vit en France depuis 2012, qu'il est père d'un enfant né en France en 2019 de sa relation avec une compatriote avec laquelle il vit en concubinage et qu'il travaille comme le montrent les bulletins de salaire qu'il produit. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que sa compagne soit en situation régulière sur le territoire français. Par suite, compte tenu notamment du jeune âge de sa fille née en France, qui n'est pas encore scolarisée, rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale se reconstitue au Sri Lanka. Dans ces conditions, l'admission exceptionnelle au séjour de M. B... par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ne se justifiait ni par des considérations humanitaires, ni au regard de motifs exceptionnels. Par ailleurs, M. B... produit une demande d'autorisation de travail de la société Nenusha Market pour un emploi de vendeur dans le secteur du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire, ainsi que des bulletins de salaire de cette société pour la période de février 2018 à septembre 2020. Toutefois, ces circonstances ne peuvent être regardées comme constitutives d'un motif exceptionnel au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile eu égard au niveau de qualification et à l'absence de spécificités de l'emploi occupé. En outre, M. B... a fait l'objet en 2016 d'une mesure d'éloignement, devenue définitive, à l'exécution de laquelle il s'est soustrait. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées doivent être écartés.
6. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, M. B... n'est pas fondé à soutenir que les décisions attaquées porteraient une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni qu'elles seraient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences sur sa situation personnelle. Au demeurant, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait saisi le préfet de la Seine-Saint-Denis d'une demande d'admission au séjour sur le fondement de ces dispositions.
Sur la décision fixant le délai de départ :
8. En premier lieu, aucun des moyens soulevés à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant fondé, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de cette décision à l'appui des conclusions à fin d'annulation de la décision fixant le pays de destination ne peut qu'être écarté.
9. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier : " 1. Les États membres prennent une décision de retour à l'encontre de tout ressortissant d'un pays tiers en séjour irrégulier sur leur territoire (...) ". Aux termes de l'article 7 de la même directive : " 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire (...) 2. Si nécessaire, les États membres prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée de séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux et sociaux (...) ". Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. (...) ".
10. Lorsque l'autorité administrative accorde un délai de trente jours, elle n'est pas tenue de motiver sa décision sur ce point si l'étranger, comme en l'espèce, n'a présenté aucune demande tendant à l'octroi d'un délai de départ plus long. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté.
11. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... ait demandé au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui accorder un délai de départ supérieur au délai légal de trente jours. De plus, il ne justifie d'aucune circonstance particulière de nature à rendre nécessaire la prolongation de ce délai au-delà de trente jours. Dès lors, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait, dans les circonstances de l'espèce, commis une erreur manifeste d'appréciation en n'accordant pas à M. B... un délai de départ volontaire supérieur à trente jours.
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
12. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi.
13. En second lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
14. Si M. B... soutient être exposé à des discriminations et des violences en cas de retour dans son pays d'origine en raison de son appartenance à l'ethnie tamoule, il ne fait valoir aucune circonstance particulière de nature à établir la réalité et la gravité de ces risques. Au demeurant, sa demande a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 29 février 2016, confirmée par arrêt de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 10 juin suivant. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.
Sur la décision d'interdiction de retour sur le territoire français de deux ans :
15. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / Sauf s'il n'a pas satisfait à une précédente obligation de quitter le territoire français ou si son comportement constitue une menace pour l'ordre public, le présent III n'est pas applicable à l'étranger obligé de quitter le territoire français au motif que le titre de séjour qui lui avait été délivré en application de l'article L. 316-1 n'a pas été renouvelé ou a été retiré ou que, titulaire d'un titre de séjour délivré sur le même fondement dans un autre Etat membre de l'Union européenne, il n'a pas rejoint le territoire de cet Etat à l'expiration de son droit de circulation sur le territoire français dans le délai qui lui a, le cas échéant, été imparti pour le faire. ".
16. En premier lieu, la décision en litige qui vise les dispositions précitées du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, indique notamment que M. B... se maintient sur le territoire français depuis 2012 malgré une précédente mesure d'éloignement prise par le préfet de la Seine-Saint-Denis le 4 avril 2016, qu'il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales au Sri Lanka, qu'il n'a pas développé de liens forts sur le territoire, ni ne fait preuve d'une intégration particulière dans la société française. Dans ces conditions, la décision contestée comporte l'ensemble des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et est ainsi suffisamment motivée.
17. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment, que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français en litige.
18. En troisième lieu, si le préfet a estimé que la présence de M. B... en France ne constituait pas une atteinte à l'ordre public, il a pu sans commettre d'erreur d'appréciation décider de prononcer une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans eu égard au fait qu'il a déjà fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement qu'il n'a pas exécutée, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que sa compagne, qui a la même nationalité que lui, ne dispose pas d'un droit au séjour en France, et ce alors même qu'il séjourne en France depuis 2012 et qu'il travaille depuis 2018 en qualité de vendeur au sein de la société Nenusha Market.
19. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté les conclusions de sa demande. Sa requête doit dès lors être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre des frais d'instance.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 10 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Carrère, président de chambre,
- M. Simon, premier conseiller,
- Mme Boizot, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 28 janvier 2022.
La rapporteure,
S. BOIZOTLe président,
S. CARRERE
La greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA02947