Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 28 août 2019 par lequel le préfet de l'Essonne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination de la mesure d'éloignement.
Par une ordonnance du 21 octobre 2019, la présidente du tribunal administratif de Versailles a transmis au tribunal administratif de Paris la requête de Mme A....
Par un jugement n° 2000922 du 10 juillet 2020, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés à la Cour le 30 décembre 2020 et le 19 mai 2021, Mme A..., représentée par Me Ka, demande à la Cour :
1°) d'ordonner la production de l'entier dossier détenu par les services du préfet de l'Essonne ;
2°) d'annuler le jugement n° 2000922 du 10 juillet 2020 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris ;
3°) d'annuler l'arrêté du 28 août 2019 du préfet de l'Essonne ;
4°) d'enjoindre au préfet de l'Essonne, à titre principal, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler le temps de l'instruction, et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Ka de la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- l'arrêté est insuffisamment motivé ;
- il a été pris sans examen personnalisé de sa situation ;
- il est illégal dès lors qu'elle est de nationalité française ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
- la décision portant refus de départ volontaire est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 26 juin 2021, le préfet de police déclare s'en remettre à ses écritures de première instance.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 6 novembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., née le 6 février 1974 à Mascara (Algérie), est entrée régulièrement sur le territoire français le 14 août 2017. Elle a été interpellée et placée en garde à vue le 27 août 2019 pour des faits de harcèlement moral. Ayant constaté que l'intéressée ne disposait pas d'un titre l'autorisant à séjourner sur le territoire français, le préfet de l'Essonne, par un arrêté du 28 août 2019, l'a obligée à quitter le territoire sans délai et a fixé le pays de destination. Mme A... relève appel du jugement du 10 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions tendant à la production de l'entier dossier :
2. L'affaire étant en état d'être jugée, il n'y a pas lieu, ainsi que le demande Mme A..., d'ordonner au préfet de l'Essonne de produire l'entier dossier détenu par ses services. En conséquence, les conclusions sus analysées de la requête doivent, en tout état de cause, être rejetées.
Sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai et fixant le pays de destination :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Et aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée (...) / II.- (...) l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français (...) ".
4. L'arrêté du 28 août 2019 vise notamment le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en particulier l'article L. 511-1 sur le fondement duquel il a été pris, ainsi que la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en particulier ses articles 3 et 8. Il est mentionné que Mme A... est entrée régulièrement en France le 14 août 2017 et s'est maintenue sur le territoire français à l'expiration de la validité de son visa, et que eu égard à la nature à la gravité des faits qui ont conduit à son interpellation par les services de police et son placement en garde à vue, le 27 août 2019, l'intéressée est obligée de quitter le territoire français sans délai. L'arrêté mentionne également que Mme A... est sans emploi et dépourvue de ressources, qu'elle est célibataire et sans charge des familles et que dans les circonstances de l'espèce, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie familiale ni aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ainsi, l'arrêté attaqué comporte l'énoncé des circonstances de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté.
5. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier, et notamment des termes de l'arrêté du 28 août 2019, que le préfet de l'Essonne a procédé à l'examen particulier de la situation de Mme A... avant de prendre sa décision, s'agissant en particulier des éléments relatifs à la durée de sa présence en France, à son activité professionnelle et à sa situation personnelle que Mme A... a mentionnés lors de sa garde à vue le 27 août 2019 et qui sont consignés dans le procès-verbal d'audition établi le même jour. Le moyen tiré d'un défaut d'examen de la situation de l'intéressée doit donc être écarté.
6. En troisième lieu, Mme A... reprend en appel l'exception de nationalité française soulevée devant le tribunal. Elle n'apporte cependant sur ce point aucun élément de fait ou de droit de nature à remettre en cause l'appréciation portée par les premiers juges sur son argumentation de première instance. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption du motif retenus par le tribunal administratif de Paris au point 8 du jugement.
7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance - 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
8. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... est célibataire et sans charge de famille. Elle n'établit pas l'intensité de ses attaches privées et familiales sur le territoire français ni être dépourvue d'attaches en Algérie, pays dans lequel elle a vécu jusqu'en 2017. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations précitées.
9. En cinquième lieu, aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / 1° Si le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; (...) ".
10. Il ressort des pièces du dossier que, le 27 août 2019, Mme A... a été placée en garde de vue suite à des faits de harcèlement. Eu égard à la nature des faits en cause, qui ont conduit la victime des agissements de Mme A... à porter plainte, en indiquant qu'elle avait peur pour son épouse enceinte, le préfet de l'Essonne n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en obligeant Mme A... à quitter le territoire français sans délai.
11. En dernier lieu, aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
12. Mme A... n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations selon lesquelles elle sera exposée à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays d'origine. Le moyen tiré de la méconnaissance, par la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement, des stipulations précitées ne peut, dès lors, qu'être écarté.
13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fins d'annulation doivent être rejetées de même que, par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction et celles présentées sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Essonne.
Délibéré après l'audience du 6 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
- Mme Vinot, présidente de chambre,
- Mme Cécile Vrignon-Villalba, présidente assesseure,
- M. Aggiouri, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 janvier 2022.
La rapporteure,
C. B...La présidente,
H. VINOT
La greffière,
F. DUBUY-THIAM
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 20PA04281 2