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25/01/2022 | FRANCE | N°21PA05455

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 25 janvier 2022, 21PA05455


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... D... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour en qualité de parent d'enfant français.

Par un jugement n° 2014089 du 17 septembre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Par une requête, enregistrée le 19 octobre 2021, Mme D..., représentée par Me Habibi Alaoui, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°

2014089 du 17 septembre 2021 du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler l'arrêté du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... D... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour en qualité de parent d'enfant français.

Par un jugement n° 2014089 du 17 septembre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Par une requête, enregistrée le 19 octobre 2021, Mme D..., représentée par Me Habibi Alaoui, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2014089 du 17 septembre 2021 du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision portant refus de renouvellement de son titre de séjour méconnaît les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 et du 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D..., ressortissant haïtienne née le 16 novembre 1982, entrée en France le

26 février 2016, a obtenu la délivrance de titres de séjour en qualité de parent d'enfant français. Le

2 janvier 2020, elle a sollicité le renouvellement de son dernier titre de séjour venant à échéance le 25 mars 2020. Par un arrêté du 23 novembre 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé le renouvellement sollicité. Mme D... relève appel du jugement du 17 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ; / Lorsque la filiation est établie à l'égard d'un parent, en application de l'article 316 du code civil, le demandeur, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, justifie que ce dernier contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du même code, ou produit une décision de justice relative à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant. Lorsque le lien de filiation est établi mais que la preuve de la contribution n'est pas rapportée ou qu'aucune décision de justice n'est intervenue, le droit au séjour du demandeur s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ". Aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'en l'absence de contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant au cas d'espèce par son père, que le droit au séjour de la requérante s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant.

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme D... est mère d'une enfant de nationalité française née le 29 mars 2017, reconnue par anticipation le 15 décembre 2016 par un ressortissant français, M. B..., dont elle porte le nom et avec lequel elle a vécu jusqu'en septembre 2019, soit jusqu'à l'âge de 2,5 ans. Si l'intéressée ne conteste pas qu'entre cette date et un jugement du juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Paris du 7 juillet 2021 postérieur à la décision attaquée constatant l'exercice conjoint de l'autorité parentale et fixant à cent cinquante euros par mois la contribution M. B... à l'entretien et l'éducation de l'enfant, ce dernier ne lui a versé aucune somme, pour autant, il ressort des mêmes pièces que, jusqu'au 25 mars 2020, la requérante a été en situation régulière en ayant bénéficié d'un titre de séjour plusieurs fois renouvelé en qualité de mère d'un enfant français. Pour l'élever, elle a ainsi été en mesure d'occuper deux emplois à temps partiel par contrats à durée déterminée et indéterminée, en qualité d'agent de propreté. Ainsi, dans les circonstances particulières de l'espèce et quand bien même la décision de refus de titre de séjour n'aurait-elle pas pour objet de séparer la mère de son enfant, dès lors que la fille A... la requérante vit sur le territoire national depuis sa naissance, y est scolarisée, a vocation à y grandir et à y être élevée en recevant depuis la décision attaquée des subsides de la part de son père, Mme D... est fondée à soutenir que la décision portant refus de renouvellement de son titre de séjour, même non assortie d'une mesure d'éloignement, méconnait l'intérêt de supérieur de son enfant au sens des dispositions et stipulations précitées.

4. Il résulte de ce qui précède que Mme D... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 novembre 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis.

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. ". Le juge administratif doit statuer sur les conclusions à fin d'injonction présentées sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative en tenant compte de la situation de droit et de fait existant à la date de sa décision.

6. Eu égard au motif d'annulation de la décision du 23 novembre 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis figurant au point 3, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement que celui-ci délivre à Mme D... une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, dans un délai de deux mois à compter de sa notification. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés à l'instance :

7. Il y a lieu il y lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n°2014089 du 17 septembre 2021 du tribunal administratif de Montreuil et l'arrêté du 23 novembre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler le titre de séjour de Mme D..., sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " à Mme D..., dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme D... une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme D... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... D..., au préfet de la Seine-Saint-Denis et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 4 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- Mme Marianne Julliard, présidente assesseure,

- Mme Marie-Dominique Jayer, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 janvier 2022.

La rapporteure,

M-D C...Le président,

I. LUBEN

Le greffier,

E. MOULINLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA05455


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA05455
Date de la décision : 25/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Marie-Dominique JAYER
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : HABIBI ALAOUI

Origine de la décision
Date de l'import : 01/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-01-25;21pa05455 ?
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