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23/12/2021 | FRANCE | N°21PA04207

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 23 décembre 2021, 21PA04207


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 15 février 2021 par lequel le préfet de police lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, et d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retar

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Par un jugement n° 2105269/1-3 du 23 juin 2021, le Tribunal administratif d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 15 février 2021 par lequel le préfet de police lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, et d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 2105269/1-3 du 23 juin 2021, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 15 février 2021 du préfet de police, lui a enjoint de délivrer à M. B... un titre de séjour pour soins dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement, a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la Cour :

I - Par une requête enregistrée le 23 juillet 2021 sous le n° 21PA04207, le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 2105269/1-3 du 23 juin 2021 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant ce tribunal.

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a estimé qu'il avait méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que l'Egypte est doté de médicaments au moins équivalents à ceux qui ont été prescrits à M. B... ;

- pour le reste, il s'en remet à ses écritures de première instance.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 septembre 2021, M. B..., représenté par Me Corinne Giudicelli-Jahn demande à la Cour de rejeter la requête, d'annuler l'arrêté du 15 février 2021 du préfet de police et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens invoqués par le préfet de police ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 1er septembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er octobre 2021 à 12 heures.

II - Par une requête enregistrée le 3 septembre 2021 sous le n° 21PA04942, M. B..., représenté par Me Corinne Giudicelli-Jahn demande à la Cour de rejeter la requête, d'annuler l'arrêté du 15 février 2021 du préfet de police et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens invoqués par le préfet de police ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bonneau-Mathelot ;

- et les conclusions de Mme Jimenez, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant égyptien, a fait l'objet d'un arrêté du 15 février 2021 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé. Par un jugement n° 2105269/1-3 du 23 juin 2021, dont le préfet de police relève appel, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté, lui a enjoint de délivrer à M. B... un titre de séjour pour soins dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2. La requête enregistrée sous le n° 21PA04942 constitue le mémoire en défense produit par M. B... en réponse à la requête du préfet de police enregistrée sous le n° 21PA04207, sur laquelle il est statué par le présent jugement. En conséquence il y a lieu de rayer la requête

n° 21PA04942 des registres du greffe de la Cour et de verser le mémoire correspondant dans le dossier n° 21PA04207.

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal :

3. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) ;

/ 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée. (...) ".

4. Pour annuler la décision portant refus de renouvellement contestée devant lui et, par voie de conséquence, les autres décisions contenues dans l'arrêté du 15 février 2021, au motif que le préfet de police a méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le tribunal relève que M. B... souffre d'une maladie de Parkinson idiopathique symptomatique depuis 2016 et que, dans le cadre de son traitement médical, cinq médicaments lui sont administrés dont le Neupro, qui n'est pas disponible en Egypte, ainsi que cela ressort du courriel du laboratoire qui le commercialise. Il souligne que le préfet de police, qui a joint des justificatifs établissant que les quatre autres médicaments prescrits à M. B... sont disponibles dans son pays d'origine, n'a produit aucun élément sur le Neupro ou sur un autre médicament comportant le même principe actif. Dans ces conditions, et en l'état du dossier, le tribunal a estimé que le préfet de police ne remettait pas sérieusement en cause les affirmations du requérant au sujet de ce médicament et, en conséquence, sur la disponibilité de son traitement.

5. Toutefois, le préfet de police soutient, en appel, qu'aucun des certificats médicaux produits par M. B... n'indique que le Neupro ne pourrait être remplacé par un médicament au moins équivalent ou similaire. Or, des médicaments tels que le carbidopa et le levodopa, qui appartiennent à la même famille que le Neupro, sont disponibles en Egypte, ainsi que cela ressort de la liste des médicaments disponibles dans ce pays que le préfet de police a produite, ce que ne conteste pas M. B.... S'il allègue qu'en raison de son mode d'administration par patch, le Neupro ne pourrait faire l'objet d'aucune substitution par un médicament administré oralement, M. B... ne produit, cependant, aucun élément au soutien de son argumentation. Il suit de là que les éléments produits par M. B... ne sont pas suffisants pour remettre en cause l'avis émis le 14 janvier 2021 par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, soit un mois avant l'intervention de l'arrêté attaqué, en ce qui concerne la possibilité pour l'intéressé, eu égard à l'offre de soins disponible dans son pays d'origine, de bénéficier d'un traitement adéquat. Au vu de l'ensemble de ces éléments, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris s'est fondé sur le motif sus-rappelé pour annuler son arrêté.

6. Il y a lieu pour la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... tant en première instance qu'en appel.

Sur les autres moyens soulevés par M. B... :

7. En premier lieu, par un arrêté n° 2020-1102 du 28 décembre 2020 régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial n° 75-2020-433 de la préfecture de Paris du même jour et au bulletin municipal de la Ville de Paris du 5 janvier 2021, le préfet de police a donné délégation à Mme Catherine Kergonou, conseiller d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, cheffe du 9ème bureau, pour signer tous actes dans la limite de ses attributions. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté critiqué ne peut qu'être écarté.

8. En deuxième lieu, au vu de la situation de M. B... qui a été décrite au point 5. du présent arrêt, le préfet de police n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation en ne renouvelant pas son titre de séjour en qualité de malade et en l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours.

9. En troisième lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que M. B... a développé à l'appui de sa contestation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, doit être écarté pour le même motif que celui exposé au point 5. du présent arrêt.

10. En quatrième et dernier lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire qui n'ont ni pour objet ni pour effet de fixer le pays à destination duquel M. B... pourra être reconduit d'office. En revanche, si ce moyen est opérant à l'encontre de la décision fixant le pays à destination duquel M. B... sera reconduit d'office, l'intéressé ne peut être regardé comme établissant, au vu de ce qui a été dit au point 5. du présent arrêt, que son renvoi en Egypte l'exposerait à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

11. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté, lui a enjoint de délivrer à M. B... un titre de séjour pour soins dans un délai de trois mois et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, en conséquence, d'annuler ce jugement et de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal ainsi que ses conclusions d'appel.

DECIDE :

Article 1er : La requête enregistrée sous le n° 21PA04942 est rayée des registres du greffe de la Cour.

Article 2 : Le jugement n° 2105269/1-3 du 23 juin 2021 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 3 : La demande présentée par M. B... devant le Tribunal administratif de Paris ainsi que ses conclusions d'appel sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêté sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A... C... B....

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 15 décembre 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. Platillero, président assesseur,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 décembre 2021.

Le rapporteur,

S. BONNEAU-MATHELOTLe président,

I. BROTONS

Le greffier,

I. BEDR

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Nos 21PA04207... 6


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA04207
Date de la décision : 23/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sonia BONNEAU-MATHELOT
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : GIUDICELLI-JAHN

Origine de la décision
Date de l'import : 28/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-12-23;21pa04207 ?
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