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17/12/2021 | FRANCE | N°20PA01180

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 17 décembre 2021, 20PA01180


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du ministre de l'intérieur en date du 28 juin 2017 refusant de faire droit à sa demande de mutation au titre du mouvement 2017 des agents du corps d'encadrement et d'application de la police nationale, ensemble le rejet implicite de son recours gracieux formé le 30 juin 2017.

Par un jugement n°1716380 du 7 février 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par u

ne requête, enregistrée le 9 avril 2020, M. D..., représenté par Me Hubert, demande à la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du ministre de l'intérieur en date du 28 juin 2017 refusant de faire droit à sa demande de mutation au titre du mouvement 2017 des agents du corps d'encadrement et d'application de la police nationale, ensemble le rejet implicite de son recours gracieux formé le 30 juin 2017.

Par un jugement n°1716380 du 7 février 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 avril 2020, M. D..., représenté par Me Hubert, demande à la Cour :

1) d'annuler le jugement n° 1716380 du 7 février 2020 ;

2) d'annuler les décisions susmentionnées ;

3) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui accorder sa mutation au sein d'une des circonscriptions de sécurité publique pour lesquelles il avait postulé ;

4) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé dans sa réponse au moyen tiré de l'erreur de droit qui entache les décisions litigieuses, dès lors que le ministre ne démontre pas avoir respecté les dispositions de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 ;

- il méconnaît les dispositions des articles R. 741-7 et R. 741-8 du code de justice administrative ;

- il est entaché de dénaturation des faits de l'espèce ;

- les décisions litigieuses ne sont pas motivées ;

- lles sont entachées d'incompétence de leur auteur ;

- elles méconnaissent l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 ;

- elles sont entachées d'une erreur d'appréciation des faits et notamment de l'ancienneté respective de trois agents postulant des postes dans la circonscription de sécurité publique de Mazamet.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 mars 2021, ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête de M. D....

Il fait valoir, en se référant notamment à son mémoire en défense de première instance, que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 2016-1969 du 28 décembre 2016 relatif à la procédure d'édiction des lignes directrices permettant le classement par l'administration des demandes de mutation des fonctionnaires de l'Etat ;

- l'arrêté du 12 août 2013 relatif aux missions et à l'organisation de la direction des ressources et des compétences de la police nationale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Soyez,

- les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., brigadier de police affecté depuis le 3 octobre 2016 à la préfecture de police de Paris, a formé devant le tribunal administratif de Paris un recours en excès de pouvoir contre la décision du ministre de l'intérieur en date du 28 juin 2017, en tant qu'elle ne lui accorde pas sa demande de mutation dans les circonscriptions de sécurité publique de Mazamet, Carmaux, Pau, Tarbes et Lourdes, ensemble le rejet implicite de son recours gracieux formé le 30 juin 2017. Le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande, par un jugement n°1716380 du 7 février 2020, dont appel.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée : " L'autorité compétente procède aux mouvements des fonctionnaires après avis des commissions administratives paritaires./Dans les administrations ou services où sont dressés des tableaux périodiques de mutations, l'avis des commissions est donné au moment de l'établissement de ces tableaux./(...)Dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service, les affectations prononcées doivent tenir compte des demandes formulées par les intéressés et de leur situation de famille. Priorité est donnée aux fonctionnaires séparés de leur conjoint pour des raisons professionnelles, aux fonctionnaires séparés pour des raisons professionnelles du partenaire avec lequel ils sont liés par un pacte civil de solidarité (...), aux fonctionnaires handicapés (...) et aux fonctionnaires qui exercent leurs fonctions, pendant une durée et selon des modalités fixées par décret en Conseil d'État, dans un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles, ainsi qu'aux fonctionnaires qui justifient du centre de leurs intérêts matériels et moraux dans une des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution ainsi qu'en Nouvelle-Calédonie. (...) / Dans les administrations ou services mentionnés au deuxième alinéa du présent article, l'autorité compétente peut procéder à un classement préalable des demandes de mutation à l'aide d'un barème rendu public. Le recours à un tel barème constitue une mesure préparatoire et ne se substitue pas à l'examen de la situation individuelle des agents. Ce classement est établi dans le respect des priorités figurant au quatrième alinéa du présent article. Toutefois, l'autorité compétente peut édicter des lignes directrices par lesquelles elle définit, sans renoncer à son pouvoir d'appréciation, des critères supplémentaires établis à titre subsidiaire dans des conditions prévues par décret en Conseil d'État. ". Lorsque dans le cadre d'un mouvement de mutation un poste a été déclaré vacant, alors que des agents se sont portés candidats dans le cadre du mouvement, l'administration doit procéder à la comparaison des candidatures dont elle est saisie en fonction, d'une part, de l'intérêt du service, et d'autre part, si celle-ci est invoquée, de la situation de famille des intéressés, appréciée compte tenu des priorités fixées par les dispositions citées ci-dessus de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984.

3. Il résulte de la lecture des points 4 et 5 du jugement attaqué que le tribunal a rappelé les critères énoncés à l'article 60 précité de la loi du 11 janvier 1984, que doit prendre en compte l'administration pour départager les agents sollicitant leur mutation sur un même poste, à savoir l'intérêt du service, et d'autre part, si celle-ci est invoquée, la situation de famille des intéressés. D'une part, les premiers juges ont relevé que, quoique d'une ancienneté moindre dans le grade que M. D..., M. C... se prévalait du critère prioritaire de rapprochement de conjoint et que, pour cette raison, sa candidature a été préférée à celle du requérant pour la mutation dans la circonscription de Mazamet. D'autre part, si les premiers juges ont admis que l'ancienneté de M. A... possédait était moindre dans la police nationale, ils ont relevé que son ancienneté dans le grade de brigadier était plus importante que celle du requérant, et qu'il disposait d'une notation moyenne, au cours des trois années précédant le mouvement de mutation, de six, supérieure à celle de M. D... sur la même période. Par suite, les premiers juges n'ont pas apporté une réponse insuffisamment motivée au moyen tiré du refus injustifié, au regard notamment des critères de cet article 60, d'affectation du requérant à Mazamet.

4. En deuxième lieu, en vertu des dispositions des articles R. 741-7, R. 741-8 et

R. 751-2 du code de justice administrative, seule la minute du jugement doit être signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience et, si le président est rapporteur, par l'assesseur le plus ancien. Il ressort de l'examen de la copie de la minute du jugement attaqué qu'elle comporte les signatures du président, du rapporteur et du greffier. La circonstance que l'expédition du jugement qui est produite en appel n'est pas signée par les membres de la formation de jugement et le greffier est sans incidence sur la régularité du jugement entrepris. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de ces articles manque en fait.

5. En dernier lieu, hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative attaquée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. M. D... ne peut donc utilement soutenir que le tribunal a entaché sa décision de dénaturation des faits de l'espèce pour demander l'annulation du jugement attaqué.

Au fond :

6. En premier lieu, il convient, pour écarter moyen tiré du défaut de motivation des décisions litigieuses et repris sans changement en appel, d'adopter les motifs retenus par le tribunal au paragraphe 2 du jugement et non critiqués en appel.

7. En deuxième lieu, pareillement, il convient, pour écarter le moyen tiré de l'incompétence de l'arrêté collectif du 8 septembre 2017 portant mutation des fonctionnaires du corps d'encadrement et d'application au titre du mouvement 2017, moyen repris sans changement en appel, d'adopter les motifs retenus par le tribunal au paragraphe 3 du jugement et non critiqués en appel.

8. En troisième lieu, en vertu des dispositions de l'article 1er de l'arrêté du 12 août 2013 relatif aux missions et à l'organisation de la direction des ressources et des compétences de la police nationale, cette dernière est chargée de l'administration générale de la police nationale ainsi que de la formation de ses agents sans préjudice des compétences de la direction des ressources humaines.

9. Il ressort des pièces du dossier que M. D... a adressé son recours gracieux en date du 30 juin 2017 au directeur des ressources et compétences de la police nationale. Par suite, la décision implicite de rejet de ce recours doit être regardée comme ayant été prise par cette autorité. Dans ces conditions et faute de toute précision à l'appui du moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision confirmative, ce moyen ne peut qu'être écarté.

10. En quatrième lieu, aux termes de l'article 1er du décret du 28 décembre 2016 susvisé, pris pour l'application du dernier alinéa de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 : " Lorsque l'autorité compétente d'une administration ou d'un service mentionné au deuxième alinéa de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée procède à un classement préalable des demandes de mutation à l'aide d'un barème, les lignes directrices mentionnées au sixième alinéa de ce même article peuvent fixer des critères supplémentaires qui ont un caractère subsidiaire par rapport aux priorités prévues au quatrième alinéa de ce même article ainsi que les modalités d'élaboration de ce barème. ". En application de ces dispositions, le ministre a énoncé des critères subsidiaires dans l'instruction du 21 avril 2017 relative aux mouvements de mutation des agents du corps d'encadrement et d'application de la police nationale.

11. Ainsi qu'il a été dit au point 3 du présent arrêt, l'administration s'est fondée, pour refuser l'affectation du requérant dans la circonscription de sécurité publique de Mazamet, sur le motif du rapprochement de conjoint dont se prévalait M. C..., motif expressément prévu à l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984. En revanche, pour donner la préférence à M. A... sur le requérant, dans la mutation dans la même circonscription, elle s'est fondée sur la plus grande ancienneté dans le grade et une manière de servir plus appréciée que celle de M. D..., d'après leur notation respective des trois dernières années précédant le mouvement de mutation. Si ces deux critères ne sont pas prévus par l'article 60 mentionné ci-dessus, ils le sont dans l'instruction du 21 avril 2017 et il n'apparaît pas qu'ils soient en contradiction avec les critères prioritaires énoncés à l'article 60 mentionné ci-dessus. Au demeurant, ces critères subsidiaires ne possèdent qu'un caractère indicatif, le ministre conservant un pouvoir d'appréciation au vu de l'examen de chaque situation individuelle. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la mutation dans sa circonscription de M. D... a été refusée en méconnaissance de cet article, doit être écarté.

12. En cinquième lieu, M. D... se prévaut de la lettre du 23 mars 2018 dans laquelle le médiateur interne de la police nationale estime que l'agent disposait de plus de points de barème que M. A.... Toutefois, ce barème n'est qu'indicatif, et le ministre de l'Intérieur ne peut lier sa décision à ce barème, sans renoncer à l'examen, dans le cadre de son pouvoir propre d'appréciation, de chaque situation individuelle. De plus, si M. D... possède une ancienneté plus grande dans le service que MM. A... et C... qui lui ont été préférés pour les deux postes dans la circonscription de sécurité publique de Mazamet, il ressort des pièces du dossier que l'ancienneté de ces deux derniers dans le grade de brigadier était supérieure à la sienne. En retenant ce critère, le ministre n'a pas commis une erreur manifeste d'appréciation des faits de l'espèce.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles tendant à l'application en sa faveur de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 19 novembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président de chambre,

- M. Soyez, président assesseur,

- M. Simon, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 17 décembre 2021.

Le rapporteur,

J.-E. SOYEZ Le président,

S. CARRERE

La greffière,

E. LUCE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 20PA01180


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01180
Date de la décision : 17/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-01-02 Fonctionnaires et agents publics. - Positions. - Affectation et mutation. - Mutation.


Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: M. Jean-Eric SOYEZ
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : KADRAN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-12-17;20pa01180 ?
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