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09/12/2021 | FRANCE | N°21PA01935

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 09 décembre 2021, 21PA01935


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 23 octobre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour.

Par un jugement n° 2012856 du 12 mars 2021, le tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté du 23 octobre 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis, a enjoint à ce dernier de délivrer à M. C..., dans le délai de trois mois à compter de la notification du jugement, un titre de séjour portan

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 23 octobre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour.

Par un jugement n° 2012856 du 12 mars 2021, le tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté du 23 octobre 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis, a enjoint à ce dernier de délivrer à M. C..., dans le délai de trois mois à compter de la notification du jugement, un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " et a rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête et un mémoire ampliatif, enregistrés le 14 avril 2021 et le 8 juin 2021 sous le n° 21PA01935, le préfet de la Seine-Saint-Denis, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2012856 du 12 mars 2021 du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) de rejeter les demandes présentées par M. C... devant le tribunal administratif.

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré qu'il avait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que la décision attaquée ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale, le requérant n'étant pas intégré professionnellement, ayant pour seules ressources des aides sociales et ayant adopté un comportement pénalement répréhensible et contraire aux lois de la République lors de sa venue en préfecture ;

- les autres moyens soulevés par M. C... devant le tribunal administratif ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juillet 2021, M. C..., représenté par

Me Place, conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que la décision portant refus de titre de séjour méconnaissait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- cette décision de refus de séjour n'est pas suffisamment motivée ;

- elle n'a pas été précédée d'un examen suffisant de sa situation ;

- elle n'a pas été précédée de la saisine de la commission du titre de séjour ;

- elle est entachée d'erreur de droit pour être intervenue en méconnaissance du 6° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-17 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît également les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

II. Par une requête, enregistrée sous le n° 21PA03327 le 16 juin 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis demande à la cour de prononcer le sursis à exécution du jugement

n° 2012856 du 12 mars 2021 du tribunal administratif de Montreuil.

Il soutient que les moyens qu'il invoque sont sérieux et de nature à justifier, sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, l'annulation du jugement attaqué et le rejet de la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Montreuil.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 juillet 2021, M. C..., représenté par Me Place, conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par le préfet de la Seine-Saint-Denis n'est de nature à justifier l'annulation ou la réformation du jugement attaqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les observations de Me Girod substituant Me Place, avocate de M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant serbe né le 15 avril 1993, est entré régulièrement en France, le 1er janvier 2002. Par un arrêté du 23 octobre 2020 le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler la carte de séjour pluriannuelle portant la mention vie privée et familiale délivrée sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet de la Seine-Saint-Denis relève appel du jugement

du 12 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a annulé cet arrêté et lui a enjoint de délivrer à M. C... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement.

2. Les requêtes nos 21PA01935 et n° 21PA03327, présentées par le préfet de la Seine-Saint-Denis, tendent respectivement à l'annulation et au sursis à exécution du même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt.

Sur la requête n° 21PA01935 :

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

S'agissant du moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif de Montreuil :

3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...). ".

4. Pour refuser le renouvellement de la carte de séjour délivrée à M. C..., le préfet de la Seine-Saint-Denis a estimé que celui-ci représentait une menace pour l'ordre public, au motif qu'il avait proféré des insultes racistes à l'encontre d'un fonctionnaire lors de sa venue en préfecture, faits pour lesquels il a fait l'objet, sur le plan pénal, d'un rappel à la loi. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. C... est entré régulièrement en France à l'âge de huit ans, a été mis en possession d'un document de circulation pour étranger mineur ; depuis sa majorité, il a résidé en France sous couvert de titres de séjour. Agé de 27 ans à la date de l'arrêté attaqué, il vit en concubinage avec une ressortissante française avec laquelle il a eu enfant, né le 22 août 2015, à l'éducation et l'entretien il est constant qu'il contribue, en conséquence de quoi il a demandé le renouvellement de son titre en tant que parent d'enfant français. Aussi regrettable et inconvenant qu'ait été le comportement de M. C... lors de sa venue en préfecture et quand bien même l'intéressé serait-il sans emploi, il résulte de l'ensemble de ces éléments que l'arrêté du 23 octobre 2020 porte nécessairement une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale.

5. Il résulte de ce qui précède le préfet de la Seine-Saint-Denis n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a annulé son arrêté du 23 octobre 2020. Sa requête n° 21PA01935 doit dès lors être rejetée.

Sur les conclusions à fin d'injonction présentées par M. C... :

6. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ".

7. M. C... demande à la cour d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir. Les premiers juges ayant enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement, M. C... doit donc être regardé comme demandant, par la voie de l'appel incident, la réformation du jugement attaqué sur ce point.

8. L'annulation de la décision litigieuse par les premiers juges pour le motif que ces derniers ont retenu implique nécessairement que le préfet de la Seine-Saint-Denis délivre à

M. C... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Faute pour le préfet de la Seine-Saint-Denis d'avoir souscrit à l'injonction dans le délai imparti alors même que la décision du tribunal était exécutoire par provision quand bien même le préfet en aurait-il fait appel et en aurait-il demandé qu'il soit sursis à son exécution, il y a lieu de réformer l'article 2 du jugement attaqué et d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder à cette délivrance dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur la requête n° 21PA03327 :

9. La cour se prononçant, par le présent arrêt, sur la requête n° 21PA01935 du préfet de la Seine-Saint-Denis tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Montreuil du 12 mars 2021, il n'y a plus lieu de statuer sur la requête n° 21PA03327 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis sollicite le prononcé par la cour du sursis à exécution de ce jugement.

Sur les frais liés à l'instance :

10. Dans les circonstances de l'espèce il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 21PA03327 du préfet de la Seine-Saint-Denis.

Article 2 : La requête n° 21PA01935 du préfet de la Seine-Saint-Denis est rejetée.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer un titre de séjour à

M. C... dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'article 2 du jugement n° 2012856 du 12 mars 2021 du tribunal administratif de Montreuil est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 3 du présent arrêt.

Article 5 : L'Etat versera à M. C... une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de M. C... est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., à Me Place, au ministre de l'intérieur et au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience publique du 16 novembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Ivan Luben, président,

Mme Marie-Dominique Jayer, première conseillère,

Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 décembre 2021.

La rapporteure,

M-D. A...Le président,

I. LUBEN

Le greffier,

E. MOULINLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 08PA04258

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Nos 21PA01935 et 21PA03327


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA01935
Date de la décision : 09/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

.

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Marie-Dominique JAYER
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : PLACE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-12-09;21pa01935 ?
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