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09/12/2021 | FRANCE | N°21PA01818

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 09 décembre 2021, 21PA01818


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 7 janvier 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2005889 du 9 mars 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 8 avril 2021

, Mme C..., représentée par

Me Rochiccioli, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 7 janvier 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2005889 du 9 mars 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 8 avril 2021, Mme C..., représentée par

Me Rochiccioli, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2005889 du 9 mars 2021 du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler les décisions portant refus de renouvellement de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français contenues dans l'arrêté du 7 janvier 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ; à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif n'a pas répondu à une branche du moyen tiré d'un vice de procédure, à savoir l'absence de production de l'intégralité des pièces qu'elle avait demandées ;

- la décision portant refus de renouvellement de son titre de séjour a été prise au terme d'une procédure irrégulière, faute pour l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) d'avoir été pris à l'issue d'une délibération collégiale ; par ailleurs, en dépit de sa demande, les éléments spécifiques sur lesquels ce collège s'est fondé pour considérer qu'elle pouvait être prise en charge dans son pays d'origine en application des articles L. 1111-7 du code de la santé publique et de l'avis n° 20191886 de la commission d'accès aux documents administratifs (CADA), ne lui ont pas été communiqués ; le rapport médical du 5 septembre 2019 et l'avis rendu par le collège de médecins le 12 septembre 2019 se contredisent s'agissant de sa présence aux rendez-vous de l'OFII ;

- elle est entachée d'une erreur de droit pour avoir été prise au regard des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vigueur avant le 1er janvier 2017 ;

- les services préfectoraux se sont estimés, à tort, en situation de compétence liée ;

- elle méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A... ;

- et les observations de Me Rochiccioli, avocate de Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante congolaise (République Démocratique du Congo) née le 13 décembre 1984, qui serait entrée en France en 2015, a bénéficié d'un titre de séjour délivré sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile valable jusqu'au 20 février 2019 dont elle a sollicité le renouvellement. Par arrêté du 7 janvier 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme C... relève appel du jugement du 9 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du

7 janvier 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable du 1er janvier 2017 au 1er mai 2021 : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande au titre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11, de vérifier, au vu de l'avis émis par le collège de médecins mentionné au point 2, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine.

4. Pour refuser à Mme C... le renouvellement d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de la Seine-Saint-Denis s'est fondé sur l'avis du collège de médecins de l'OFII du 12 septembre 2019, et la circonstance que l'intéressée n'établissait pas ne pas avoir accès effectivement dans son pays d'origine au traitement approprié pour la pathologie dont elle est atteinte. Il ressort toutefois des pièces du dossier, et notamment des certificats médicaux établis par un médecin du service d'immunologie de l'hôpital Georges Pompidou en date des

28 juin 2016 et 27 mai 2019, que Mme C..., séropositive au VIH, diagnostiquée en RDC en 2013 mais non traitée dans ce pays, fait l'objet en France d'une prise en charge et d'un suivi clinique (prescription d'un traitement antiviral) mais que sa charge virale est encore très élevée. Le traitement qui lui est administré comprend trois molécules antirétrovirales, dont l'une au moins est difficile à obtenir dans son pays d'origine. En refusant de lui accorder le renouvellement de son précédent titre de séjour obtenu en raison de la même pathologie et sans qu'il ressorte des pièces du dossier que la situation de l'intéressée aurait évolué, le préfet de la Seine-Saint-Denis, à qui incombait la charge d'établir que Mme C... pourrait bénéficier effectivement en RDC soit d'un traitement identique à celui qu'elle suit en France, soit comprenant des molécules présentant le même bénéfice thérapeutique, et qui n'a conclu ni en en première instance ni en appel, a ainsi méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. Il résulte dès lors ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande et à demander l'annulation de la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour ainsi que, par voie de conséquence, des décisions portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination pour son éloignement.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Eu égard au motif d'annulation de l'arrêté attaqué ci-dessus retenu, et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que des éléments de fait ou de droit nouveaux justifieraient que l'autorité administrative oppose une nouvelle décision de refus, le présent arrêt implique nécessairement que cette autorité délivre à Mme C... le titre de séjour sollicité. Par suite il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer ce titre dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a toutefois pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés à l'instance :

7. Dans les circonstances de l'espèce il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par Mme C... et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2005889 du 9 mars 2021 du tribunal administratif de Montreuil et l'arrêté du 7 janvier 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " à Mme C... dans le délai de deux mois courant à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme C... une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des demandes de Mme C... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C..., à Me Rochiccioli, au ministre de l'intérieur et au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience publique du 16 novembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Ivan Luben, président,

Mme Marie-Dominique Jayer, première conseillère,

Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 décembre 2021.

La rapporteure,

M-D. A...Le président,

I. LUBEN

Le greffier,

E. MOULINLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 08PA04258

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N° 21PA01818


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA01818
Date de la décision : 09/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Marie-Dominique JAYER
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : ROCHICCIOLI

Origine de la décision
Date de l'import : 21/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-12-09;21pa01818 ?
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