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06/12/2021 | FRANCE | N°21PA01186

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 06 décembre 2021, 21PA01186


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 22 juillet 2019 par lequel le préfet du Val-de-Marne l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné.

Par un jugement n° 1907373 du 22 octobre 2020, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des pièces enregistrées les 8 mars et 28 mai 2021,

M. A..., représenté par Me Sidobre, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1907373 du 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 22 juillet 2019 par lequel le préfet du Val-de-Marne l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné.

Par un jugement n° 1907373 du 22 octobre 2020, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des pièces enregistrées les 8 mars et 28 mai 2021, M. A..., représenté par Me Sidobre, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1907373 du 22 octobre 2020 du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du 22 juillet 2019 par lequel le préfet du Val-de-Marne l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de réexaminer sa situation en vue de la délivrance d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros à son conseil Me Sidobre sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation au bénéfice de la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

S'agissant de la décision d'obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée et est entachée d'un défaut d'examen de sa situation ;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle dès lors qu'elle implique le retour dans son pays d'origine ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- elle est insuffisamment motivée et est entachée d'un défaut d'examen de sa situation ;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les articles L. 513-2 et L. 711-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La requête a été communiquée à la préfète du Val-de-Marne qui n'a pas produit de mémoire en défense.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 8 janvier 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- le code des relations entre le public et l'administration,

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été rendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Collet,

- et les observations de Me Sidobre, avocat de M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant arménien né le 20 mars 1995, qui est entré en France le 29 décembre 2017 selon ses déclarations, a déposé une demande d'asile qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 20 août 2018, décision confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 28 mars 2019. Par arrêté du 22 juillet 2019, le préfet du Val-de-Marne l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... relève appel du jugement n° 1907373 du 22 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

En ce qui concerne la décision d'obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-1 I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée (...) ".

3. L'arrêté attaqué comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Ainsi, et alors même que ces motifs ne reprennent pas l'ensemble des éléments caractérisant la situation de l'intéressé et que certaines de leurs mentions sont rédigées à l'aide d'une formule stéréotypée, une telle motivation satisfait, en tout état de cause, aux exigences de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté attaqué portant refus de titre de séjour et fixant le pays de destination d'une mesure d'éloignement manque en fait et doit être écarté.

4. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Val-de-Marne n'aurait pas, avant de prendre la décision d'obligation de quitter le territoire français, procédé à un examen particulier et suffisamment approfondi de la situation de M. A....

5. En troisième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par la décision obligeant M. A... à quitter le territoire français, en raison des risques qu'il encourrait en cas de retour dans son pays d'origine est inopérant, une telle décision n'entraînant pas, par elle-même, renvoi dans son pays.

6. En quatrième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que cet arrêté, qui rappelle que la demande tendant à la reconnaissance de la qualité de réfugié ou à la protection subsidiaire a été refusée, serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

7. En premier lieu, après avoir rappelé la nationalité de M. A..., le préfet du Val-de-Marne a précisé dans sa décision que sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et par la Cour nationale du droit d'asile, qu'il ne peut prétendre ni au renouvellement du récépissé prévu à l'article R. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni à la délivrance d'une carte de résident au titre du 8° de l'article L. 314-11 ou d'une carte de séjour temporaire au titre de l'article L. 313-13 du même code et que sa décision ne contrevenait pas aux articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ainsi, cette décision comporte les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement. Elle est, dès lors, suffisamment motivée au regard des exigences des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.

8. En second lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa numérotation alors en vigueur : " L'étranger qui est obligé de quitter le territoire français ou qui doit être reconduit à la frontière est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines et traitements inhumains et dégradants ". Aux termes de l'article L. 711-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa numérotation alors en vigueur : " Les actes de persécution et les motifs de persécution, au sens de la section A de l'article 1er de la convention de Genève, du 28 juillet 1951, relative au statut des réfugiés, sont appréciés dans les conditions prévues aux paragraphes 1 et 2 de l'article 9 et au paragraphe 1 de l'article 10 de la directive 2011/95/UE du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 2011, concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d'une protection internationale, à un statut uniforme pour les réfugiés ou les personnes pouvant bénéficier de la protection subsidiaire, et au contenu de cette protection. / S'agissant des motifs de persécution, les aspects liés au sexe, à l'identité de genre et à l'orientation sexuelle sont dûment pris en considération aux fins de la reconnaissance de l'appartenance à un certain groupe social ou de l'identification d'une caractéristique d'un tel groupe (...) ".

9. M. A..., dont la demande de reconnaissance du statut de réfugié présentée auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a été rejetée par une décision du

20 août 2018, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 28 mars 2019, soutient qu'il encourt des risques en cas de retour en Arménie, dès lors, notamment, qu'il exerçait la profession de journaliste, qu'il est activement recherché dans son pays d'origine suite à la couverture de nombreuses manifestations populaires, ses activités et publications ayant attiré les foudres des autorités policières et oligarques de son pays, qu'il a été menacé, tabassé et agressé à plusieurs reprises, que son domicile a été perquisitionné et ses outils de travail confisqués et qu'il a dû fuir son pays qui ne peut le protéger. Toutefois, les pièces produites par l'intéressé, à savoir deux convocations à une audition comme témoin datées des 22 août 2019 et 2 février 2021, sont insuffisantes pour permettre d'établir la réalité des risques personnels encourus en cas de retour dans son pays. Par suite, en prenant la décision contestée, le préfet du Val-de-Marne n'a méconnu ni les dispositions des articles L. 513-2 et L. 711-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement du 22 octobre 2020 du tribunal administratif de Melun et de l'arrêté du 22 juillet 2019 par lequel par lequel le préfet du Val-de-Marne l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 15 novembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Le Goff, président,

- M. Ho Si Fat, président assesseur,

- Mme Collet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 décembre 2021.

La rapporteure,

A. COLLET Le président,

R. LE GOFF

La greffière,

E. VERGNOL

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

6

N° 21PA01186


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA01186
Date de la décision : 06/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. LE GOFF
Rapporteur ?: Mme Aude COLLET
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : SIDOBRE

Origine de la décision
Date de l'import : 14/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-12-06;21pa01186 ?
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