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27/10/2021 | FRANCE | N°20PA01667

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 27 octobre 2021, 20PA01667


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Ingénierie Santé Social a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2015.

Par un jugement n° 1812544/1-2 du 9 juin 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 8 juillet

et 16 octobre 2020, la SARL Ingénierie Santé Social, représentée par Me Hugues Hourdin, demande à l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Ingénierie Santé Social a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2015.

Par un jugement n° 1812544/1-2 du 9 juin 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 8 juillet et 16 octobre 2020, la SARL Ingénierie Santé Social, représentée par Me Hugues Hourdin, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1812544/1-2 du 9 juin 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée devant ce tribunal ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a estimé que l'administration avait apporté la preuve de la régularité de la notification de la proposition de rectification dès lors que le dossier ne comporte aucun élément permettant d'établir que le pli contenant cette proposition de rectification a fait l'objet d'un avis de mise en instance ;

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- le tribunal a méconnu les pièces du dossier en écartant son argumentation tirée de ce que le solde créditeur de 3 943 euros au titre de l'année 2014 avait été reporté en 2015 et que la somme en cause avait été taxée deux fois ;

- le tribunal s'est mépris sur la portée des pièces au titre du contrat de travail de Mme A... ;

- c'est à tort que le tribunal a estimé que l'administration devait être regardée comme apportant la preuve du manquement délibéré de la société à ses obligations fiscales ; la formation professionnelle du gérant ne permet pas de présumer qu'il a entendu sciemment éluder l'impôt ; ni l'importance ni le caractère répété des montants rappelés en matière de taxe sur la valeur ajoutée ne sauraient suffire à considérer qu'elle a sciemment éludé l'impôt .

Par un mémoire en défense enregistré le 18 septembre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par la SARL Ingénierie Santé Social ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 29 juin 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 10 septembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bonneau-Mathelot,

- les conclusions de Mme Jimenez, rapporteure publique,

- et les observations de Me Hourdin, avocat de la SARL Ingénierie Santé social.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Ingénierie Santé Social (ISAS), qui réalise des prestations de conseils et de services dans la conception, la mise en œuvre et l'exploitation de plateformes sécurisées supportant des services de soins, de prévention de la santé et d'activités sociales, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, à l'issue de laquelle lui ont été notifiés des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des rehaussements d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2014 et 2015. La SARL ISAS, après avoir en vain demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquels elle a, en conséquence, été assujettie, relève appel du jugement n° 1812544/1-2 du 9 juin 2020 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. Il ressort du jugement attaqué que les premiers juges ont, en son point 6., répondu de manière suffisamment motivée au moyen invoqué par la SARL ISAS et tiré de ce que le solde créditeur du compte de " TVA déductible " de 3 943 euros avait été reporté en 2015 et que cette somme avait été taxée deux fois, une première fois en 2014 puis une seconde fois en 2015, cela, alors même qu'ils n'auraient pas précisé dans le détail l'ensemble des pièces produites devant eux, qu'ils ont écartées comme n'étant pas suffisantes pour venir à l'appui de l'argumentation de la société requérante. Ainsi, la SARL ISAS n'est pas fondée à contester la régularité du jugement attaqué au regard des dispositions précitées du code de justice administrative.

Sur les conclusions à fin de décharge :

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

4. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / (...) ". Les rectifications doivent être notifiées au contribuable. En cas de contestation sur ce point, il incombe à l'administration fiscale d'établir qu'une telle notification a été régulièrement adressée au contribuable et, lorsque le pli contenant cette notification a été renvoyé par le service postal au service expéditeur, de justifier de la régularité des opérations de présentation à l'adresse du destinataire. La preuve qui lui incombe ainsi peut résulter soit des mentions précises, claires et concordantes figurant sur les documents, le cas échéant électroniques, remis à l'expéditeur conformément à la règlementation postale soit, à défaut, d'une attestation de l'administration postale ou d'autres éléments de preuve établissant la délivrance par le préposé du service postal d'un avis de passage prévenant le destinataire de ce que le pli est à sa disposition au bureau de poste.

5. Il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 2 août 2017 a été adressée à la SARL ISAS, par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception, à l'adresse de son siège social. Le pli correspondant, présenté le 8 août 2017 ainsi que l'attestent les mentions de l'avis de réception indiquant " présenté / avisé : 8 août 2017 ", a été retourné à l'administration fiscale le 25 août suivant avec la mention " pli non réclamé ". Ces éléments, corroborés par l'attestation du 13 avril 2018 du service courrier-colis de la plate-forme de préparation et de distribution du courrier Paris XVIme, étaient suffisamment clairs, précis et concordants pour établir que la SARL ISAS avait été régulièrement avisée, dès le 8 août 2017, que ce pli était à sa disposition au bureau de poste dont elle relevait, lequel est d'ailleurs mentionné sur le pli contenant la proposition de rectification. La circonstance que ce pli lui ait été notifié en période de congés est sans incidence. La SARL ISAS n'est dès lors pas fondée à soutenir que la proposition de rectification ne lui a pas été régulièrement notifiée.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne le solde créditeur de taxe sur la valeur ajoutée :

6. Il résulte de l'instruction qu'au cours de la vérification de comptabilité de la SARL ISAS, l'administration a constaté que le compte 445660 " TVA déductible " présentait, à la date de clôture de l'exercice 2014, un solde créditeur d'un montant 3 943,37 euros. La seule constatation par l'administration d'un solde créditeur sur ce compte, qui doit en principe être débiteur ou nul, était de nature à justifier un rappel de taxe à concurrence du montant du solde créditeur. En l'absence de tout élément justificatif, tant devant le service que devant le juge de l'impôt, de nature à établir, ainsi que le soutient la SARL ISAS, que la somme de 3 943 euros avait été reportée en 2015 et avait fait l'objet d'une double taxation, la SARL ISAS n'est pas fondée à demander la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée correspondant au solde anormalement créditeur un compte de " TVA déductible ".

En ce qui concerne la déductibilité des charges salariales et sociales :

7. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts : " 1. Sous réserve des dispositions des articles 33 ter, 40 à 43 bis et 151 sexies, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. / (...) ". Aux termes de l'article 39 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'œuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire. / (...) ".

8. Si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts, que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Pour être admises en déduction du résultat imposable, les charges doivent être exposées dans l'intérêt direct de l'exploitation ou se rattacher à la gestion normale de l'entreprise et être appuyées de justifications suffisantes. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée.

9. Il résulte de l'instruction que l'administration a, au cours de la vérification de comptabilité, demandé à la SARL ISAS de produire le contrat de travail de Mme A.... Si la société requérante a produit ce contrat, non signé, et stipulant que Mme A... avait été recrutée en qualité d'" assistante à la gestion des projets Vigilance 2 - Asalée ", l'intéressée a indiqué à l'administration, au cours du débat oral et contradictoire, qu'elle assurait l'enregistrement et le visa des demandes de remboursements de frais de déplacements des salariés de l'association Asalée. L'administration, qui a considéré que les prestations ainsi réalisées par Mme A... l'étaient exclusivement pour le compte de l'association Asalée, a remis en cause la déduction des charges afférentes à sa rémunération au titre de l'année 2015 comme étant sans lien avec l'activité de la société requérante. Si la SARL ISAS soutient que le tribunal se serait mépris sur la portée des pièces qu'elle avait produites en première instance, il ne ressort pas de leur examen qu'elles permettraient d'établir, ainsi qu'elle le faisait valoir devant le tribunal, que les prestations ainsi réalisées avaient fait l'objet d'une refacturation à l'association Asalée. Ainsi, l'examen des comptes 512000 " Compte de banque " et 708000 " Compte de prestations " de l'extrait du grand livre des comptes généraux produit par la SARL ISAS, qui présente, au demeurant, un caractère provisoire, ne permet pas d'établir un lien entre les prestations réalisées par Mme A... et les opérations portées en comptabilité au nom de l'association Asalée. Il suit de là que la SARL ISAS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration n'a pas admis en déduction les charges afférentes à la rémunération de Mme A....

Sur les pénalités :

10. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ". Aux termes de l'article L. 195 A du livres des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration ".

11. Il résulte de la proposition de rectification du 2 août 2017 que la majoration de 40 % prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts a été appliquée aux rectifications relatives à la taxe sur la valeur ajoutée déductible. L'administration s'est fondée sur la circonstance que la SARL ISAS ne pouvait ignorer avoir majoré à tort la taxe sur la valeur ajoutée déductible qu'elle avait déclarée, alors qu'elle avait régulièrement appliqué les règles de déduction pour d'autres opérations, et qu'un tel manquement avait été constaté en 2014 et 2015. Il suit de là que l'administration justifie du bien-fondé de l'application de la majoration prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts. En se bornant à invoquer la faible importance des montants en cause, la circonstance que les manquements sanctionnés n'ont été constatés que sur deux années, et à soutenir que " la formation professionnelle de son gérant ne permet pas de présumer qu'il a voulu sciemment éluder l'impôt ", la société requérante ne conteste pas utilement le caractère délibéré des manquements relevés, lesquels visaient à majorer indûment la taxe devant être reversée au Trésor.

12. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL ISAS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter sa requête d'appel en toutes ses conclusions, y compris les conclusions qu'elle a présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL ISAS est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Ingénierie Santé Social et au ministre de l'économie, de finances et de la relance.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 13 octobre 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. Platillero, président-assesseur,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2021.

Le rapporteur,

S. BONNEAU-MATHELOTLe président,

I. BROTONS

Le greffier,

I. BEDR

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

4

N° 20PA01667


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01667
Date de la décision : 27/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sonia BONNEAU-MATHELOT
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : HOURDIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-10-27;20pa01667 ?
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