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27/10/2021 | FRANCE | N°20PA01183

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 27 octobre 2021, 20PA01183


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... B... et Mme C... F... ont demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 25 mai 2018 par laquelle le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris a pris une décision, conforme à la délibération du collège territorial de second examen de Paris réuni le 15 mai 2018, confirmant la décision du pôle de contrôle des revenus et du patrimoine des 5ème et 14ème arrondissements de Paris refusant de reconnaître que les documents produits à l'appui de leur

demande de rescrit apportaient la preuve contraire à la présomption édictée pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... B... et Mme C... F... ont demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 25 mai 2018 par laquelle le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris a pris une décision, conforme à la délibération du collège territorial de second examen de Paris réuni le 15 mai 2018, confirmant la décision du pôle de contrôle des revenus et du patrimoine des 5ème et 14ème arrondissements de Paris refusant de reconnaître que les documents produits à l'appui de leur demande de rescrit apportaient la preuve contraire à la présomption édictée par l'article 751 du code général des impôts.

Par un jugement n° 1813910/2-2 du 10 février 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 10 avril 2020 et le 27 juin 2021, Mme B... et Mme F..., représentées par Me Xavier Abon, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1813910/2-2 du 10 février 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler la décision du 25 mai 2018 ;

3°) de leur accorder le rescrit sollicité ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme B... et Mme F... soutiennent que :

- la décision présente des effets notables autres que fiscaux ;

- elles se sont conformées aux voies de recours mentionnées dans la décision attaquée ;

- la motivation de la décision est erronée ;

- le principe du contradictoire n'a pas été respecté dans l'instruction de leur demande ;

- l'administration a été déloyale et a commis un détournement de procédure ;

- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et d'erreur de droit.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 juin 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Le ministre soutient que :

- la requête est irrecevable, compte tenu de l'existence d'un recours parallèle et en l'absence d'effets notables autres que fiscaux ;

- les moyens invoqués par Mme B... et Mme F... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 10 juin 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 29 juin 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Platillero ;

- les conclusions de Mme Jimenez, rapporteure publique ;

- et les observations de Me Abon, pour Mme B... et Mme F....

Considérant ce qui suit :

1. Par un acte notarié du 21 février 2017, M. D... F... et son épouse ont fait donation à titre de partage anticipé à leurs deux filles, Mme E... B... et G... F..., A... la nue-propriété d'un bien immobilier constitué de six appartements et cinq caves situé au 76 rue des Gravilliers à Paris. A la suite du décès de M. F... le 29 avril 2017, le notaire chargé de la succession, agissant au nom et pour le compte de Mme B... et de Mme F..., a saisi le 13 octobre 2017 le pôle de contrôle des revenus et du patrimoine des 5ème et 14ème arrondissements d'une demande de rescrit, sur le fondement du 1° de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, en vue d'obtenir une prise de position de l'administration quant à la réintégration dans la déclaration de succession des biens qui avaient fait l'objet de la donation du 21 février 2017, consentie moins de trois mois avant le décès de M. F..., les héritières estimant disposer de documents susceptibles de renverser la présomption posée l'article 751 du code général des impôts. A la suite de la décision défavorable prise le 28 décembre 2017, Mme B... et Mme F... ont présenté le 21 février 2018 une demande de réexamen sur le fondement de l'article L. 80 CB du livre des procédures fiscales. Le 25 mai 2018, le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris a pris une décision défavorable, conforme à la délibération du collège territorial de second examen de Paris réuni le 15 mai 2018. Mme B... et Mme F... font appel du jugement du 10 février 2020 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté pour irrecevabilité leur demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration ". Aux termes de l'article L. 80 B du même livre : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : 1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal. Elle se prononce dans un délai de trois mois lorsqu'elle est saisie d'une demande écrite, précise et complète par un redevable de bonne foi (...) ".

3. Une prise de position formelle de l'administration sur une situation de fait au regard d'un texte fiscal en réponse à une demande présentée par un contribuable dans les conditions prévues par les dispositions précédemment mentionnées a, eu égard aux effets qu'elle est susceptible d'avoir pour le contribuable et, le cas échéant, pour les tiers intéressés, le caractère d'une décision. En principe, une telle décision ne peut, compte tenu de la possibilité d'un recours de plein contentieux devant le juge de l'impôt, pas être contestée par le contribuable par la voie du recours pour excès de pouvoir. Toutefois, cette voie de droit est ouverte lorsque la prise de position de l'administration, à supposer que le contribuable s'y conforme, entraînerait des effets notables autres que fiscaux et qu'ainsi, la voie du recours de plein contentieux devant le juge de l'impôt ne lui permettrait pas d'obtenir un résultat équivalent. Il en va ainsi, notamment, lorsque le fait de se conformer à la prise de position de l'administration aurait pour effet, en pratique, de faire peser sur le contribuable de lourdes sujétions, de le pénaliser significativement sur le plan économique ou encore de le faire renoncer à un projet important pour lui ou de l'amener à modifier substantiellement un tel projet.

4. Mme B... et Mme F... soutiennent que la décision attaquée remet en cause la validité de la donation-partage opérée par acte notarié du 21 février 2017 ainsi que les éléments de la déclaration de succession à la suite du décès de leur père. Toutefois, il résulte des dispositions mêmes de l'article 751 du code général des impôts, aux termes duquel " Est réputé, au point de vue fiscal, faire partie, jusqu'à preuve contraire, de la succession de l'usufruitier, toute valeur mobilière, tout bien meuble ou immeuble appartenant, pour l'usufruit, au défunt et, pour la nue-propriété, à l'un de ses présomptifs héritiers ou descendants d'eux, même exclu par testament ou à ses donataires ou légataires institués, même par testament postérieur, ou à des personnes interposées, à moins qu'il y ait eu donation régulière et que cette donation, si elle n'est pas constatée dans un contrat de mariage, ait été consentie plus de trois mois avant le décès ou qu'il y ait eu démembrement de propriété effectué à titre gratuit, réalisé plus de trois mois avant le décès, constaté par acte authentique et pour lequel la valeur de la nue-propriété a été déterminée selon le barème prévu à l'article 669 (...) ", que ces dispositions n'ont de conséquences que fiscales, sans remettre en cause les effets civils et patrimoniaux de la donation-partage, les avantages familiaux et patrimoniaux dont se prévalent les requérantes n'étant pas affectés par la décision en litige portant sur l'application d'une disposition à visée exclusivement fiscale.

5. Par ailleurs, Mme B... et Mme F... font valoir que la décision attaquée les " empêche de se positionner sur le patrimoine " de la succession. A supposer qu'elles aient entendu ainsi soutenir que cette décision aurait des effets quant à l'acceptation ou à la renonciation à la succession, insusceptibles d'être réparés par un contentieux fiscal portant sur le montant des droits de succession, elles n'apportent aucune précision ni justification à l'appui de leurs allégations, permettant d'établir que le fait de se conformer à la prise de position de l'administration aurait notamment pour effet, en pratique, de faire peser sur elles de lourdes sujétions, de les pénaliser significativement sur le plan économique ou encore de les faire renoncer à un projet important.

6. Enfin, si Mme B... et Mme F... font valoir qu'elles se sont conformées aux voies de recours mentionnées dans la décision attaquée, cette circonstance est sans incidence sur la recevabilité de leur recours juridictionnel.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... et Mme F... ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande. Leurs conclusions aux fins d'annulation et, en tout état de cause, de délivrance du rescrit sollicité doivent dès lors être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme B... et Mme F... demandent au titre des frais qu'elles ont exposés.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... et Mme F... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... B..., à Mme C... F... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 13 octobre 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. Platillero, président-assesseur,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 octobre 2021.

Le rapporteur,

F. PLATILLEROLe président,

I. BROTONS

Le greffier,

I. BEDRLa République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 20PA01183


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01183
Date de la décision : 27/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Fabien PLATILLERO
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : ABON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-10-27;20pa01183 ?
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