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21/10/2021 | FRANCE | N°20PA00855

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 1ère chambre, 21 octobre 2021, 20PA00855


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :





Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 25 juin 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 1915968/6-1 du 7 février 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.





Procédure d

evant la Cour :





Par une requête enregistrée le 6 mars 2020, Mme A..., représentée par Me Abreu, demande à la Cour :

...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 25 juin 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1915968/6-1 du 7 février 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 mars 2020, Mme A..., représentée par Me Abreu, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1915968/6-1 du 7 février 2020 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 25 juin 2019 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation administrative ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé et entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- il méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 24 septembre 2021, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Un mémoire a été produit pour Mme A... le 27 septembre 2021, soit postérieurement à la clôture de l'instruction intervenue le 26 septembre 2021 en application du premier alinéa de l'article R. 613-2 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, publié par le décret n° 94-203 du 4 mars 1994 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et d'administration ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Doré,

- et les observations de Me Scemama substituant Me Abreu, pour Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante marocaine née en novembre 1984 est entrée en France, selon ses déclarations, en juin 2013. Le 14 juin 2019, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salariée. Par un arrêté du 25 juin 2019, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme A... fait appel du jugement du

7 février 2020 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, l'arrêté contesté qui, en particulier, décrit le parcours individuel et administratif de Mme A... et mentionne les éléments d'ordre personnel relatifs à sa situation, comporte l'ensemble des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement. Cette motivation révèle en outre que le préfet a procédé à un examen de sa situation personnelle. Par suite, doivent être écartés les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " / (...) ". Aux termes de l'article 9 de cet accord : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord (...) ".

4. Il ressort de ces dispositions que l'accord franco-marocain renvoie, sur tous les points qu'il ne traite pas, à la législation nationale, en particulier aux dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du code du travail pour autant qu'elles ne sont pas incompatibles avec les stipulations de l'accord et nécessaires à sa mise en œuvre. Ainsi, en imposant la présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, l'article 3 cité ci-dessus doit être regardé comme renvoyant aux dispositions du 2° de l'article L. 5221-2 du code du travail.

5. Aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : (...) 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail ".

6. Il est constant que Mme A... n'a pas présenté, à l'appui de sa demande de titre de séjour en qualité de salariée, de contrat de travail visé par l'autorité administrative. Elle ne remplissait donc pas les conditions de délivrance d'une carte de séjour portant la mention " salarié " sur le fondement des stipulations précitées de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987. Les circonstances que la requérante et son employeur ignoraient cette obligation, qu'elle n'ait pas été invitée à régulariser sa demande lors de son dépôt et qu'elle contribue à la prospérité de son entreprise sont sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. Mme A... fait valoir qu'elle est entrée en France en 2013 avec son fils né en août 2011, et qu'ils sont hébergés chez son frère titulaire d'une carte de résident. Il ressort toutefois des pièces du dossier que si la requérante établit son entrée sur le territoire français en 2013, elle ne justifie d'un séjour continu que depuis 2017, date à laquelle elle a commencé à travailler, alors qu'elle ne produit pour les années précédentes que des documents médicaux faisant état d'une présence ponctuelle. Mme A... justifie par ailleurs être employée en qualité d'esthéticienne depuis avril 2017 dans l'entreprise créée par son frère, dont elle est également associée, ainsi que d'une promesse d'embauche au sein d'un autre salon de coiffure, qui lui permettrait de percevoir des revenus complémentaires. Enfin, si Mme A... justifie qu'elle a subi des violences de la part de son ex-conjoint qui a accepté que leur enfant vive en France, elle n'établit pas être dépourvue d'attaches au Maroc où elle a vécu la majeure partie de sa vie. Par ailleurs, elle ne fait état d'aucune circonstance qui s'opposerait à ce que son fils poursuive sa scolarité dans son pays d'origine, notamment en raison de son jeune âge. Compte tenu de l'ensemble de ces circonstances et bien que Mme A... exerce une activité professionnelle, elle ne peut être regardée comme établissant l'existence de considérations humanitaires ou d'un motif exceptionnel justifiant son admission au séjour. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. Pour les mêmes motifs, les circonstances invoquées par Mme A... ne suffisent pas à établir que l'arrêté contesté aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Il n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme A... aurait demandé un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté comme inopérant.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 30 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Diémert, président de la formation de jugement en application des articles L. 234-3 (1er alinéa) et R. 222-6 (1er alinéa) du code de justice administrative,

- M. Gobeill, premier conseiller,

- M. Doré, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 octobre 2021.

Le rapporteur,

F. DORÉLe président,

S. DIÉMERT

La greffière,

Y. HERBER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 20PA00855 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20PA00855
Date de la décision : 21/10/2021
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. DIEMERT
Rapporteur ?: M. François DORE
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : ABREU

Origine de la décision
Date de l'import : 18/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2021-10-21;20pa00855 ?
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