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14/10/2021 | FRANCE | N°21PA01846

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 14 octobre 2021, 21PA01846


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 15 décembre 2020 par lequel le préfet du Val-de-Marne l'a transféré aux autorités italiennes.

Par un jugement n° 2010558 du 15 janvier 2021, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 avril 2021, M. B..., représenté par Me Le Gall, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2010558 du 15 janvier 2021 du tribunal ad

ministratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du 15 décembre 2020 du préfet du Val-de-Marne le transfér...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 15 décembre 2020 par lequel le préfet du Val-de-Marne l'a transféré aux autorités italiennes.

Par un jugement n° 2010558 du 15 janvier 2021, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 avril 2021, M. B..., représenté par Me Le Gall, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2010558 du 15 janvier 2021 du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du 15 décembre 2020 du préfet du Val-de-Marne le transférant aux autorités italiennes ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de l'admettre provisoirement au séjour au titre de l'asile dans un délai de 24 heures suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 200 euros par jour de retard et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant la durée de l'examen de sa demande d'asile ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sous réserve de renonciation à l'aide juridictionnelle, en application de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision de transfert méconnaît les stipulations des articles 3.2 et 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 16 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.

Le préfet du Val-de-Marne auquel la requête a été transmise n'a pas produit de mémoire en défense.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 10 février 2021.

Les parties ont été informées, par lettre du 17 juillet 2021, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt est susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré d'un non-lieu à statuer sur la requête de M. A... B... dans la mesure où l'arrêté de transfert du 15 décembre 2020 n'est plus susceptible d'exécution (Conseil d'Etat, n° 420708 du 24 septembre 2018).

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 du Parlement européen et du Conseil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 portant application de la loi sur l'aide juridictionnelle ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Vinot a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant de la République démocratique du Congo né le 28 février 1986, a déposé une demande d'asile et été mis en possession d'une attestation de demandeur d'asile le 12 novembre 2020. À l'issue de la procédure de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen de cette demande d'asile, le préfet du Val-de-Marne a, par un arrêté du 15 décembre 2020, décidé le transfert de M. B... aux autorités italiennes. M. B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler cet arrêté. Il relève appel du jugement du 15 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision de transfert :

2. Le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 fixe, à ses articles 7 et suivants, les critères à mettre en œuvre pour déterminer, de manière claire, opérationnelle et rapide ainsi que l'ont prévu les conclusions du Conseil européen de Tempere des 15 et 16 octobre 1999, l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile. La mise en œuvre de ces critères peut conduire, le cas échéant, à une demande de prise ou reprise en charge du demandeur, formée par l'Etat membre dans lequel se trouve l'étranger, dénommé " Etat membre requérant ", auprès de l'Etat membre que ce dernier estime être responsable de l'examen de la demande d'asile, ou " Etat membre requis ". En cas d'acceptation de ce dernier, l'Etat membre requérant prend, en vertu de l'article 26 du règlement, une décision de transfert, notifiée au demandeur, à l'encontre de laquelle ce dernier dispose d'un droit de recours effectif, en vertu de l'article 27, paragraphe 1, du règlement. Aux termes du paragraphe 3 du même article : " Aux fins des recours contre des décisions de transfert ou des demandes de révision de ces décisions, les Etats membres prévoient les dispositions suivantes dans leur droit national : / a) le recours ou la révision confère à la personne concernée le droit de rester dans l'Etat membre concerné en attendant l'issue de son recours ou de sa demande de révision (...) ". Aux termes de l'article 29, paragraphe 1, du règlement, le transfert du demandeur vers l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande d'asile doit s'effectuer " dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de la prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3 ". Aux termes du paragraphe 2 du même article : " Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'Etat membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'Etat membre requérant ".

3. Aux termes des dispositions alors codifiées au premier alinéa de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen ". Aux termes du I de l'article L. 742-4 du même code : " L'étranger qui a fait l'objet d'une décision de transfert mentionnée à l'article L 742-3 peut, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de cette décision, en demander l'annulation au président du tribunal administratif. / Le président ou le magistrat qu'il désigne à cette fin (...) statue dans un délai de quinze jours à compter de sa saisine (...) ". En vertu du II du même article, lorsque la décision de transfert est accompagnée d'un placement en rétention administrative ou d'une mesure d'assignation à résidence notifiée simultanément, l'étranger dispose d'un délai de 48 heures pour saisir le président du tribunal administratif d'un recours et ce dernier dispose d'un délai de 72 heures pour statuer. Aux termes des dispositions alors codifiées au second alinéa de l'article L. 742-5 du même code : " La décision de transfert ne peut faire l'objet d'une exécution d'office ni avant l'expiration d'un délai de quinze jours ou, si une décision de placement en rétention prise en application de l'article L. 551-1 ou d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 a été notifiée avec la décision de transfert, avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures, ni avant que le tribunal administratif ait statué, s'il a été saisi ". L'article L. 742-6 du même code prévoit que : " Si la décision de transfert est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au livre V. L'autorité administrative statue à nouveau sur le cas de l'intéressé ".

4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date à laquelle le jugement du tribunal administratif statuant au principal sur cette demande a été notifié à l'administration, quel que soit le sens de sa décision. Ni un appel ni le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. Son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement précité, l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale.

5. Le délai de six mois imparti à peine de caducité à l'administration pour procéder au transfert de M. B... fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 a commencé à courir à compter de la décision d'acceptation de la reprise en charge de l'intéressé par l'Italie le 2 décembre 2020. Il a, toutefois, été interrompu le 21 décembre 2020 par la présentation d'une requête devant le tribunal administratif de Melun tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-de-Marne ordonnant son transfert aux autorités italiennes. Ce délai a recommencé à courir intégralement à compter du 15 janvier 2021, date à laquelle le préfet du Val-de-Marne s'est vu notifier le jugement du tribunal administratif de Melun rejetant la requête présentée par M. B... contre son transfert aux autorités italiennes. Dès lors que le préfet n'a pas présenté d'observations au moyen d'ordre public tiré de l'absence d'objet de la requête présentée par M. B..., il y a lieu de considérer que la décision de transfert de M. B... est devenue caduque. La requête de M. B... est, dès lors, devenue sans objet. Il n'y a plus lieu d'y statuer.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

6. Les conclusions à fin d'injonction sous astreinte présentées par M. B... ne peuvent qu'être rejetées, dès lors que le présent arrêt, qui se borne à constater qu'il n'y a plus lieu de statuer, n'appelle aucune mesure d'exécution.

Sur les frais de justice :

7. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. B... présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins d'annulation du jugement n° 2010558 du 15 janvier 2021 du tribunal administratif de Melun présentées par M. B....

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 23 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Vinot, présidente de chambre,

- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,

- M. Aggiouri, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 octobre 2021.

La présidente-rapporteure,

H. VINOT

La présidente-assesseure,

C. VRIGNON-VILLALBA

La greffière,

F. DUBUY-THIAM

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 21PA01846


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA01846
Date de la décision : 14/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-05 Étrangers. - Réfugiés (voir : Asile) et apatrides.


Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: Mme Hélène VINOT
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : LE GALL

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-10-14;21pa01846 ?
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