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14/10/2021 | FRANCE | N°19PA04153

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 14 octobre 2021, 19PA04153


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2019 par lequel le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris a établi la liste des conseillers du salarié, habilités à venir assister, sur sa demande, un salarié lors de l'entretien préalable à son licenciement ou à la rupture conventionnelle de son contrat de travail. Par un mémoire en intervention, M. C... A... a demandé au même tribunal de faire droit aux conclusions de la requête de M. D... et

à ce qu'il soit enjoint au préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2019 par lequel le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris a établi la liste des conseillers du salarié, habilités à venir assister, sur sa demande, un salarié lors de l'entretien préalable à son licenciement ou à la rupture conventionnelle de son contrat de travail. Par un mémoire en intervention, M. C... A... a demandé au même tribunal de faire droit aux conclusions de la requête de M. D... et à ce qu'il soit enjoint au préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, de procéder au réexamen de sa propre candidature.

Par jugement n° 1903741 du 22 octobre 2019, le tribunal administratif de Paris n'a admis l'intervention de M. A... au soutien de la requête de M. D... qu'en tant que ce dernier conteste sa non-inscription sur la liste des conseillers du salarié établie par l'arrêté du

18 janvier 2019 du préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris et a rejeté la demande de M. D... tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 janvier 2019.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée le 22 décembre 2019 sous le numéro 19PA04153,

M. D..., représenté par Me Kaboré, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1903741 du 22 octobre 2019 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2019 par lequel le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris a établi la liste des conseillers du salarié, habilités à venir assister, sur sa demande, un salarié lors de l'entretien préalable à son licenciement ou à la rupture conventionnelle de son contrat de travail ;

3°) d'enjoindre au préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier dès lors qu'il ne mentionne pas les moyens contenus dans le mémoire produit le 28 septembre 2019 ;

- les premiers juges ont retenu à tort qu'il ne justifiait d'aucun intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de l'ensemble de la liste des conseillers du salarié établie par l'arrêté préfectoral du 18 janvier 2019 ;

- le préfet était incompétent rationae temporis pour signer et prendre l'arrêté du 18 janvier 2019 moins de trois années après le précédent arrêté ayant établi la même liste ;

- la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) n'a pas motivé sa décision rejetant implicitement sa candidature, de sorte que l'arrêté du préfet du 18 janvier 2019 est illégal ;

- il n'a pas été mis en mesure de faire valoir ses observations écrites préalablement à l'intervention de la décision de la DIRECCTE rejetant implicitement sa candidature et à l'édiction de l'arrêté attaqué ;

- l'arrêté du 18 janvier 2019 est entaché d'un vice de procédure dès lors que la DIRECCTE n'a pas accusé réception de sa candidature en vue du renouvellement de son inscription sur la liste des conseillers du salarié ;

- la commission nationale de la négociation collective n'a pas été consultée avant l'édiction de l'arrêté attaqué en méconnaissance des dispositions de l'article D. 1232-4 du code du travail ;

- le préfet s'est cru, à tort, lié par la proposition de la même direction régionale qui a préparé un projet de liste de conseillers du salarié ;

- le préfet n'établit pas que la DIRECCTE aurait porté à sa candidature toute l'attention qu'elle requérait ;

- contrairement à ce qu'ont considéré les premiers juges il n'a pas présenté sa candidature postérieurement à la date de clôture dès lors que l'appel à candidatures publié sur le site internet de la DIRECCTE n'est pas opposable et que celle-ci n'a pas procédé à une notification individuelle de cet appel à candidatures.

La procédure a été communiquée au préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, qui n'a pas produit d'observations.

Par ordonnance du 16 mars 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 6 mai 2021 à 12h.

Par un courrier du 24 juin 2021, les parties ont été informées, en application de

l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la décision de la Cour était susceptible d'être fondée sur un moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité des conclusions présentées par M. D... tendant à l'annulation de l'ensemble de la liste des conseillers du salarié fixée par l'arrêté du 18 janvier 2019 du préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, le requérant n'ayant intérêt à agir que contre cet arrêté en tant que son nom ne figure pas sur cette liste.

II. Par une intervention, enregistrée le 22 décembre 2019 sous le numéro 19PA04154 et présentée à l'appui de la requête numéro 19PA04153 de M. D..., M. A..., représenté par Me Kaboré, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1903741 du 22 octobre 2019 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2019 par lequel le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris a établi la liste des conseillers du salarié, habilités à venir assister, sur sa demande, un salarié lors de l'entretien préalable à son licenciement ou à la rupture conventionnelle de son contrat de travail ;

3°) d'enjoindre au préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris de réexaminer la demande de M. D... dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier dès lors qu'il n'a pas été destinataire du courrier du 25 septembre 2019 du tribunal administratif informant les parties que le jugement à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions de la requête de M. D... dirigées contre l'arrêté du 18 janvier 2019, le requérant n'ayant intérêt à agir contre cet arrêté qu'en tant que son nom ne figure pas sur cette liste ;

- son intervention est parfaitement recevable dès lors qu'il a fait régulièrement acte de candidature à la fonction de conseiller du salarié auprès de la DIRECCTE qui lui a opposé un refus pour un motif déraisonnable ;

- l'arrêté du 18 janvier 2019 a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que M. A... n'a pas été mis en mesure de faire valoir ses observations écrites préalablement à l'intervention de la décision du 2 octobre 2018 de la DIRECCTE rejetant sa candidature ;

- la commission nationale de la négociation collective n'a pas été consultée avant l'édiction de l'arrêté attaqué en méconnaissance des dispositions de l'article D. 1232-4 du code du travail ;

- le préfet s'est cru, à tort, lié par la proposition de la même direction régionale qui a préparé un projet de liste de conseillers du salarié ;

- l'arrêté du 18 janvier 2019 est irrégulier faute pour la DIRECCTE d'avoir étudié sa candidature d'une manière utile loyale et régulière et de l'avoir rejetée pour des raisons discriminatoires, de sorte que l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur de faits, de motifs et ou en tout cas de droit.

La procédure a été communiquée au préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, qui n'a pas produit d'observations.

Par ordonnance du 16 mars 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 6 mai 2021 à 12h.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail,

- le code des relations entre le public et l'administration,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Collet,

- et les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté n° 201628-0006 du 28 janvier 2016 fixant la liste des conseillers du salarié habilités à venir assister, à sa demande, un salarié lors de son entretien préalable à son licenciement ou à la rupture conventionnelle de son contrat de travail, M. D... a été désigné conseiller du salarié dans le département de Paris en qualité de représentant de la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC). Lors de la révision de la liste des conseillers du salarié prévue par l'article D. 1232-6 du code du travail prévoyant la révision de la liste des conseillers du salarié tous les trois ans, la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Ile-de-France a rencontré les organisations syndicales représentatives pour préparer ce renouvellement, puis a publié le 5 juin 2018 sur son site internet un appel à candidatures relatif à la désignation de cinq conseillers du salarié n'étant pas affiliés à une organisation syndicale prévoyant une date limite pour pouvoir candidater en tant que conseiller du salarié non syndiqué au 15 septembre 2018. Par ailleurs, par courriel du 11 juillet 2018, la DIRECCTE d'Ile-de-France a informé la CFTC du nombre de places de conseillers du salarié qu'elle comptait lui réserver lors du renouvellement de la liste prévu en 2019 et lui a communiqué le nom des conseillers du salarié désignés en 2016 et affiliés à la CFTC remplissant les conditions leur permettant de postuler à un nouveau mandat parmi lesquels figurait M. D.... Par note du 8 août 2018 adressée aux organisations syndicales parisiennes, la DIRECCTE d'Ile-de-France a précisé les deux critères pris en compte pour déterminer le nombre de conseillers accordé à chaque syndicat, à savoir le taux de représentativité du syndicat et le taux d'activité moyen des conseillers de chaque syndicat lors du mandat, et que ce calcul a conduit à attribuer à la CFTC neuf conseillers supplémentaires, ce qui lui permettait de présenter trente-six candidatures de conseillers du salarié pour le mandat 2019-2021. Par courriel du 29 août 2018, M. D... a demandé à la DIRECCTE d'Ile-de-France de lui " indiquer le dernier délai pour présenter une candidature dans le cadre du renouvellement des conseillers du salarié à Paris ", laquelle lui a répondu le même jour en lui précisant qu'il devait d'abord s'adresser à son organisation syndicale qui devait valider sa candidature et que les dossiers devraient être transmis au plus tard le 15 octobre 2018. Par courrier du 11 octobre 2018, M. D... a fait acte de candidature " sans étiquette " pour le renouvellement de son mandat de conseiller du salarié dans le département de Paris suite à l'absence de réponse du syndicat CFTC à sa demande tendant à être proposé comme conseiller du salarié pour le mandat 2019-2021, information qu'il a communiquée à la DIRECCTE d'Ile-de-France par courriel du 16 octobre 2018. Finalement, dans les propositions de candidatures de la CFTC adressées à la DIRECCTE d'Ile-de-France ne figurait pas le nom de M. D....

2. Par arrêté du 18 janvier 2019, le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, a établi la nouvelle liste des conseillers du salarié, habilités à venir assister, sur sa demande, un salarié lors de l'entretien préalable à son licenciement ou à la rupture conventionnelle de son contrat de travail, sur laquelle ne figure pas le nom de M. D.... Le recours formé par ce dernier contre cet arrêté a été rejeté par le jugement n° 1903741 du 22 octobre 2019 du tribunal administratif de Paris dont il relève appel. Par ailleurs, M. A... avait, par courrier du 11 décembre 2017, présenté une candidature pour être inscrit pour la première fois sur la liste des conseillers du salarié et un refus lui avait été opposé le 28 décembre 2017 au motif qu'une simple mise à jour de la liste avait lieu à cette période et non son renouvellement. Il a renouvelé sa candidature sans étiquette syndicale le 10 juillet 2018 et un refus lui a été opposé par décision du 2 octobre 2018 de la DIRECCTE

d'Ile-de-France. Il a déposé un mémoire en intervention au soutien de la requête de M. D..., intervention qui n'a été admise par le jugement n° 1903741 du 22 octobre 2019 du tribunal administratif de Paris qu'en tant que M. D... conteste sa non-inscription sur la liste des conseillers du salarié établie par l'arrêté du 18 janvier 2019 du préfet de la région

d'Ile-de-France, préfet de Paris. M. A... relève appel de ce jugement en présentant une requête qui tend à ce qu'il soit donné acte de son intervention, à l'annulation du jugement du 22 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. D... tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 janvier 2019 du préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, à lui enjoindre de réexaminer la demande de M. D... et à ce que soit mis à la charge de l'Etat une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

3. Il ressort du document enregistré le 22 décembre 2019 sous le n° 19PA04154 d'une part qu'il se réfère aux dispositions procédurales relatives à l'intervention et demande qu'il soit donné acte à son auteur de son intervention au soutien des prétentions de la requête en appel de

M. D... et d'autre part qu'il tend aux mêmes fins que la requête de n° 19PA04153 de M. D.... Il constitue en réalité un mémoire en intervention présenté par M. A... et faisant suite à la requête enregistrée le 22 décembre 2019 sous le n° 19PA04153 présentée par M. D.... Par suite, ce document doit être rayé des registres du greffe de la cour et être joint à la requête enregistrée sous le n° 19PA04153.

Sur la requête n° 19PA04153 :

Sur la recevabilité de l'appel :

4. Aux termes de l'article D. 1232-4 du code du travail : " La liste des conseillers du salarié est préparée par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, après consultation des organisations d'employeurs et de salariés représentatives au niveau national siégeant à la Commission nationale de la négociation collective, de l'emploi et de la formation professionnelle, dont les observations sont présentées dans le délai d'un mois. / Les conseillers du salarié sont choisis en fonction de leur expérience des relations professionnelles et de leurs connaissances du droit social. (...) ".

5. M. D... demande l'annulation de l'arrêté du 18 janvier 2019 par lequel le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris a établi la liste des conseillers du salarié, habilités à venir assister, sur sa demande, un salarié lors de l'entretien préalable à son licenciement ou à la rupture conventionnelle de son contrat de travail dans son ensemble. Or, M. D... ne justifie d'aucun intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de cette liste dans son ensemble dès lors que le nombre de conseillers du salarié à désigner n'est pas préalablement déterminé par une disposition législative ou réglementaire, de sorte que l'arrêté du

18 janvier 2019 qui n'a pas conduit à l'appréciation des mérites respectifs comparés des candidats a un caractère divisible. Les conclusions de M. D... ne sont, par suite, recevables qu'en tant que l'arrêté attaqué établit une liste des conseillers du salarié ne comportant pas son nom.

Sur la recevabilité de l'intervention :

6. Dès lors qu'une intervention n'est recevable que si son auteur justifie d'un intérêt suffisant eu égard à la nature et à l'objet du litige, en sa seule qualité de candidat non retenu pour figurer sur la liste des conseillers du salarié, établie par le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, M. A... ne justifie pas d'un intérêt suffisant pour intervenir au soutien de la requête d'appel de M. D... tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 janvier 2019 en tant que ledit préfet refuse l'inscription de M. D..., ce qui n'a aucune incidence sur sa propre situation. Il suit de là que l'intervention de M. A... à l'appui de la requête n° 19PA04153 de M. D... n'est pas admise.

Sur la régularité du jugement :

7. Même si l'analyse des cinq arguments avancés par M. D... pour justifier de son intérêt à agir contre l'arrêté du 18 janvier 2019 du préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris dans son ensemble n'a pas été faite par les premiers juges dans les visas du jugement attaqué, les premiers juges ont explicité au point 3 dudit jugement les raisons pour lesquelles

M. D... n'avait un intérêt à agir contre cet arrêté qu'en tant qu'il établit une liste des conseillers du salarié ne comportant pas son nom et ceci par des motifs répondant de manière complète à cette question. Ainsi M. D... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué est irrégulier pour défaut d'analyse des moyens contenus dans le mémoire enregistré le

28 septembre 2019 dans lequel il a présenté des observations sur les moyens susceptibles d'être relevés d'office par le tribunal.

Sur le bien-fondé du jugement :

8. Aux termes de l'article L. 1232-7 du code du travail : " Le conseiller du salarié est chargé d'assister le salarié lors de l'entretien préalable au licenciement dans les entreprises dépourvues d'institutions représentatives du personnel. / Il est inscrit sur une liste arrêtée par l'autorité administrative après consultation des organisations représentatives d'employeurs et de salariés au niveau national, dans des conditions déterminées par décret. / La liste des conseillers comporte notamment le nom, l'adresse, la profession ainsi que l'appartenance syndicale éventuelle des conseillers. Elle ne peut comporter de conseillers prud'hommes en activité ". Aux termes de l'article D. 1232-5 du même code : " La liste des conseillers du salarié est arrêtée dans chaque département par le préfet et publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture. / Elle est tenue à la disposition des salariés dans chaque section d'inspection du travail et dans chaque mairie ". Aux termes de l'article D. 1232-6 du même code : " La liste des conseillers du salarié est révisée tous les trois ans. / Elle peut être complétée à tout moment si nécessaire ".

9. En premier lieu, si M. D... soutient que le préfet de la région

d'Ile-de-France, préfet de Paris était incompétent rationae temporis pour signer et prendre l'arrêté attaqué du 18 janvier 2019 moins de trois années après le précédent arrêté ayant établi la même liste, il ressort des dispositions précitées des articles D. 1232-4, D. 1232-5 et D. 1232-6 du code du travail que la liste des conseillers du salarié préparée par la DIRECCTE est arrêtée dans chaque département par le préfet et qu'elle est révisée tous les trois ans, ce qui correspond au délai pendant lequel doit intervenir cette révision sans qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose que cette révision ne puisse avoir lieu exactement de date à date trois ans jour pour jour après la publication au recueil des actes administratifs de la préfecture de ladite liste. Il s'ensuit que le moyen ne peut qu'être écarté.

10. En deuxième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; / 2° Infligent une sanction ; / 3° Subordonnent l'octroi d'une autorisation à des conditions restrictives ou imposent des sujétions ; / 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ;/ 5° Opposent une prescription, une forclusion ou une déchéance ; / 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; / 7° Refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions du a au f du 2° de l'article L. 311-5 ; / 8° Rejettent un recours administratif dont la présentation est obligatoire préalablement à tout recours contentieux en application d'une disposition législative ou réglementaire ". Aux termes des dispositions de l'article L. 232-4 du même code : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. / Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours contentieux contre ladite décision est prorogé jusqu'à l'expiration de deux mois suivant le jour où les motifs lui auront été communiqués ".

11. Dès lors que la décision par laquelle la DIRECCTE a implicitement rejeté la candidature déposée par M. D... le 11 octobre 2018 tendant à son inscription sur la liste des conseillers du salarié pour le département de Paris n'est pas au nombre des décisions individuelles défavorables devant être motivées en application des dispositions de

l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ni d'aucune autre disposition législative ou réglementaire ou principe général du droit, le moyen selon lequel l'absence de motivation de cette décision rendrait illégal l'arrêté du 18 janvier 2019 du préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris est, en tout état de cause, inopérant. Au surplus, il ne ressort pas des pièces du dossier, en tout état de cause, que M. D... ait expressément sollicité la communication des motifs de la décision implicite précitée.

12. En troisième lieu, M. D... invoque le moyen tiré de ce qu'il n'a pas été mis en mesure de faire valoir ses observations écrites préalablement à l'intervention de la décision de la DIRECCTE rejetant implicitement sa candidature et à l'édiction de l'arrêté attaqué sans apporter à l'appui de ce moyen, déjà soulevé devant le tribunal administratif de Paris, aucun élément nouveau susceptible de remettre en cause l'appréciation portée à juste titre par les premiers juges. Il y a dès lors lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par ces derniers au point 11 du jugement attaqué.

13. En quatrième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 112-6 du code des relations entre le public et l'administration : " Les délais de recours ne sont pas opposables à l'auteur d'une demande lorsque l'accusé de réception ne lui a pas été transmis ou ne comporte pas les indications exigées par la réglementation. / Le défaut de délivrance d'un accusé de réception n'emporte pas l'inopposabilité des délais de recours à l'encontre de l'auteur de la demande lorsqu'une décision expresse lui a été régulièrement notifiée avant l'expiration du délai au terme duquel est susceptible de naître une décision implicite ".

14. Si M. D... soutient que l'arrêté du 18 janvier 2019 attaqué est entaché d'un vice de procédure dès lors que la DIRECCTE n'a pas accusé réception de sa candidature en vue du renouvellement de son inscription sur la liste des conseillers du salarié, cette absence d'accusé réception est, en tout état de cause, insusceptible d'avoir une incidence sur la légalité dudit arrêté. Ainsi ce moyen est inopérant.

15. En cinquième lieu, contrairement à ce que soutient M. D... en application des dispositions précitées de l'article D. 1232-4 du code du travail, seule la consultation des organisations d'employeurs et de salariés représentatives au niveau national siégeant à la Commission nationale de la négociation collective, de l'emploi et de la formation professionnelle est prévue et non la consultation de la commission nationale elle-même. Par suite, le moyen relatif à l'absence de consultation de cette commission avant l'édiction de l'arrêté attaqué est inopérant.

16. En sixième lieu, si M. D... soutient que le préfet n'établit pas que la DIRECCTE aurait porté à sa candidature toute l'attention qu'elle requérait, il ne ressort pas des pièces du dossier que pour prendre l'arrêté contesté le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa candidature en vue d'être inscrit sur la nouvelle liste des conseillers du salarié et que il se serait par ailleurs, à tort, cru lié par la proposition de liste des conseillers du salarié, préparée par la DIRECCTE d'Ile-de-France. Ces deux moyens ne peuvent qu'être écartés.

17. En septième lieu, si M. D... soutient que, contrairement à ce qu'ont considéré les premiers juges, il n'a pas présenté sa candidature postérieurement à la date de clôture dès lors que l'appel à candidatures publié sur le site internet de la DIRECCTE n'est pas opposable et qu'elle n'a pas procédé à une notification individuelle de cet appel à candidatures, d'une part, il ressort des pièces du dossier et de la chronologie des faits telle que rappelée au point 1 du présent arrêt que la DIRECCTE d'Ile-de-France a rencontré les organisations syndicales représentatives pour préparer ce renouvellement, puis a publié le 5 juin 2018 sur son site internet un appel à candidatures relatif à la désignation de cinq conseillers du salarié n'étant pas affiliés à une organisation syndicale prévoyant une date limite pour pouvoir candidater en tant que conseiller du salarié non syndiqué au 15 septembre 2018, appel consultable par toute personne intéressée. Par ailleurs, si M. D..., dont le nom figurait sur la liste des conseillers du salarié désignés en 2016 et affiliés à la CFTC, qui remplissaient les conditions leur permettant de postuler à un nouveau mandat, transmise par la DIRECCTE d'Ile-de-France à la CFTC par courriel du

11 juillet 2018, il a, par courriel du 29 août 2018, demandé à la DIRECCTE d'Ile-de-France de lui " indiquer le dernier délai pour présenter une candidature dans le cadre du renouvellement des conseillers du salarié à Paris " sans préciser que la candidature qu'il souhaitait déposer le serait en tant que salarié non affilié, ce qui le soumettait ainsi à une date limite de dépôt de candidature non pas au 15 octobre 2018, date réservée aux candidats syndiqués, mais au 15 septembre 2018, telle qu'indiquée sur le site internet de la DIRECCTE d'Ile-de-France. D'autre part, aucune disposition législative ni réglementaire n'imposait une notification individuelle de cet appel à candidatures. Il s'ensuit que le 11 octobre 2018, lorsque M. D... a fait acte de candidature

" non affilié " pour le renouvellement de son mandat de conseiller du salarié dans le département de Paris, le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris a pu légalement écarter sa candidature qui a été présentée postérieurement au 15 septembre 2018, date de clôture des candidatures pour les conseillers du salarié n'étant pas affiliés à une organisation syndicale.

18. Il résulte de tout ce qui précède que l'intervention de M. A... n'est pas admise au soutien de la requête n° 19PA04153 de M. D... et que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 janvier 2019. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1 : Les productions enregistrées sous le n° 19PA04154 sont rayées du registre du greffe de la cour pour être jointes à la requête n° 19PA04153.

Article 2 : L'intervention de M. A... au soutien de la requête n° 19PA04153 de M. D... n'est pas admise.

Article 3 : La requête de M. D... est rejetée.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D..., à M. A..., au préfet de la région

d'Ile-de-France, préfet de Paris et au directeur régional interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile[CM1]-de-France.

Délibéré après l'audience du 23 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Le Goff, président,

- Mme Collet, première conseillère,

- Mme Larsonnier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 octobre 2021.

La rapporteure,

A. COLLETLe président,

R. LE GOFF

La greffière,

E. VERGNOLLa République mande et ordonne au ministre du travail en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

[CM1]Notif à la DRIEETS et non DIRECCTE '

3

Nos 19PA04153, 19PA04154


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA04153
Date de la décision : 14/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07 Travail et emploi. - Licenciements.


Composition du Tribunal
Président : M. LE GOFF
Rapporteur ?: Mme Aude COLLET
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : KABORE

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-10-14;19pa04153 ?
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