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13/10/2021 | FRANCE | N°19PA02648

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 13 octobre 2021, 19PA02648


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française :

1°) d'annuler la décision implicite de rejet opposée par le garde des Sceaux, ministre de la justice à sa demande du 28 mars 2018 tendant à la modification de son reclassement dans le corps des surveillants de l'administration pénitentiaire ainsi que l'arrêté le titularisant du 28 décembre 2017 ;

2°) d'enjoindre à l'administration de procéder à son reclassement à l'échelon 13 du corps des surveillants pénit

entiaires et de reconstituer sa carrière à compter du 19 février 2016 avec versement des rému...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française :

1°) d'annuler la décision implicite de rejet opposée par le garde des Sceaux, ministre de la justice à sa demande du 28 mars 2018 tendant à la modification de son reclassement dans le corps des surveillants de l'administration pénitentiaire ainsi que l'arrêté le titularisant du 28 décembre 2017 ;

2°) d'enjoindre à l'administration de procéder à son reclassement à l'échelon 13 du corps des surveillants pénitentiaires et de reconstituer sa carrière à compter du 19 février 2016 avec versement des rémunérations qui lui sont dues.

Par un jugement n° 1800229 du 21 mai 2019, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires enregistrés les 8 août 2019, 27 février 2020 et 11 juin 2021, M. B..., représenté par Me Robin Quinquis, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1800229 du 21 mai 2019 du Tribunal administratif de la Polynésie française ;

2°) d'annuler la décision implicite de rejet et l'arrêté du 28 décembre 2017, en tant qu'il le classe au 1er échelon, contestés devant ce tribunal ;

3°) d'enjoindre à l'administration de procéder à son reclassement à l'échelon 13 du corps des surveillants pénitentiaires et de reconstituer sa carrière à compter du 19 février 2016 avec versement des rémunérations qui lui sont dues ;

4°) à titre subsidiaire, de surseoir à statuer dans l'attente de l'arrêt rendu par la Cour administrative d'appel de Bordeaux dans l'affaire n° 18BX03257 ;

5°) de mettre à la charge de l'administration la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa requête est recevable ;

- il doit être procédé à son reclassement en application des dispositions de l'article 10 du décret du 14 avril 2006, dans sa rédaction antérieure au décret du 10 mai 2017, qui prévoient que les surveillants de l'administration pénitentiaire qui avaient, à la date de leur nomination en tant qu'élève, la qualité de fonctionnaire d'une collectivité territoriale sont classés à un échelon comportant un traitement égal ou, à défaut, immédiatement supérieur à celui qu'ils percevaient dans leur cadre d'emplois d'origine ; les dispositions du décret du 10 mai 2017 ne lui sont pas applicables dès lors qu'il a été recruté antérieurement à son entrée en vigueur ; il aurait dû être reclassé à un échelon comportant un traitement égal ou supérieur à la somme de 2 393 euros soit au minimum à l'indice brut 547 - indice majoré 465, lequel correspond à l'échelon 13 du grade des surveillants pénitentiaires ;

- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité à défaut pour le tribunal d'avoir répondu à tous les moyens qu'il avait soulevés devant lui ;

- les premiers juges ont entaché leur jugement d'erreur de droit en faisant application des dispositions du décret du 10 mai 2017 et en estimant que son ancienneté devait être appréciée à la date de sa titularisation ; l'ancienneté d'un agent est appréciée à la date de la nomination du fonctionnaire en qualité d'élève et non à la date de sa titularisation ;

- le refus opposé par l'administration à sa demande repose sur un motif qui n'est pas celui qui est explicité par le jugement attaqué ; le motif sur lequel s'est fondé l'administration pour rejeter sa demande, tiré de ce que les fonctionnaires de la Polynésie française sont exclus du dispositif prévu par l'article 10 du décret du 14 avril 2006, est entaché d'erreur de droit ; la Polynésie française est une collectivité territoriale de la République au sens des articles 72 et 74 de la Constitution ; le principe général du droit d'égalité de traitement entre les fonctionnaires d'un même corps s'oppose à ce que soit traité de manière différente des agents placés dans une situation identique ou à ce que soient appliquées des discriminations qui ne sont pas justifiées par l'objectif poursuivi par le texte ; au demeurant, l'ancienneté des fonctionnaires de la Polynésie française doit être reprise dans les mêmes conditions que les fonctionnaires de la fonction publique territoriale de métropole dès lors que les corps de la fonction publique d'Etat et le cadre d'emplois de la fonction publique du territoire présentent des correspondances suffisantes ; le cadre d'emplois des rédacteurs de la Polynésie française ne présente pas de différences notables avec des corps de la fonction publique existant en métropole.

Par un mémoire en défense enregistré le 24 janvier 2020, le garde des Sceaux, ministre de la justice conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 29 juin 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 15 juillet 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;

- la délibération n° 95-215 AT du 14 décembre 1995 portant statut général de la fonction publique de la Polynésie française ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 2006-441 du 14 avril 2006 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bonneau-Mathelot,

- les conclusions de Mme Jimenez, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., qui relevait du cadre d'emploi des rédacteurs de la fonction publique de la Polynésie française, a été admis au concours d'entrée dans le corps des personnels d'encadrement et d'application du personnel de surveillance de l'administration pénitentiaire et a été nommé élève surveillant de cette administration par un arrêté du garde des Sceaux, ministre de la justice du 29 février 2016. Par un arrêté du 28 octobre 2016, il a été nommé en qualité de stagiaire dans ce corps. Il a été titularisé dans le grade de surveillant et surveillant principal de ce corps, à compter du 29 octobre 2017, au premier échelon de son grade, par un arrêté du 28 décembre 2017 du garde des Sceaux, ministre de la justice. Par un jugement du 21 mai 2019, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le garde des Sceaux, ministre de la justice a rejeté sa demande du 28 mars 2018 tendant à la modification de son reclassement dans le corps des surveillants de l'administration pénitentiaire. M. B... relève appel de ce jugement et demande, outre l'annulation de cette décision implicite de rejet, l'annulation de l'arrêté du 28 décembre 2017 en tant que le garde des Sceaux, ministre de la justice l'a classé au 1er échelon de son grade.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. En réponse au moyen invoqué par M. B..., tiré de ce que pour déterminer l'échelon dans lequel il devait être classé à la suite de sa titularisation, l'administration devait appliquer l'article 10 du décret n° 2006-441 du 14 avril 2006 dans sa rédaction antérieure au décret

n° 2017-1009 du 10 mai 2017, et non pas cet article dans sa rédaction issue de ce décret, les premiers juges se sont bornés à citer cet article en précisant qu'il l'appliquait dans sa rédaction " applicable à la date de la titularisation du requérant ", sans expliciter les motifs qui conduisaient à faire application de ces dispositions. Compte tenu de l'argumentation qui était présentée, ce jugement est ainsi insuffisamment motivé. M. B... est, dès lors, fondé à en demander l'annulation.

4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... devant le Tribunal administratif de la Polynésie française.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

5. Aux termes de l'article 10 du décret du 14 avril 2006, dans sa rédaction issue de l'article 61 du décret du 10 mai 2017 : " I. - Sous réserve des dispositions du II, du III et du IV, les surveillants titularisés sont classés au 1er échelon de leur grade. / II. - Les surveillants qui avaient, à la date de leur nomination en tant qu'élève, la qualité de fonctionnaire de l'Etat, des collectivités territoriales ou d'établissements publics en relevant sont classés à un échelon comportant un indice brut égal ou, à défaut, immédiatement supérieur à celui qu'ils détenaient dans leur corps ou cadre d'emplois d'origine. / (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier que le garde des Sceaux, ministre de la justice a, par arrêté du 28 décembre 2017, titularisé M. B... au premier échelon dans le grade de surveillant et surveillant principal du corps des personnels d'encadrement et d'application du personnel de surveillance de l'administration pénitentiaire avec effet au 29 octobre 2017 conformément aux dispositions précitées de l'article 10 du décret du 14 avril 2006. M. B..., qui a estimé que les modalités de ce reclassement lui étaient défavorables, a sollicité, le 28 mars 2018, la régularisation de sa situation en application des dispositions du II de l'article 10 de ce décret dans leur rédaction issue du décret n° 2013-1256 du 27 décembre 2013, soit à la date à laquelle il avait été nommé en qualité d'élève surveillant de l'administration pénitentiaire.

7. D'une part, il résulte de ces dispositions, qui relèvent du chapitre IV, intitulé " Classement ", du Titre Ier relatif aux " Corps d'encadrement et d'application du personnel de surveillance de l'administration pénitentiaire ", que le reclassement des surveillants pénitentiaires n'a lieu qu'au moment de leur titularisation et non au moment de leur nomination en qualité d'élève ou stagiaire. Si, en application des dispositions de l'article 8 de ce même décret, " les élèves et stagiaires qui avaient auparavant la qualité de fonctionnaire ou d'agent non titulaire ne peuvent percevoir une rémunération inférieure à celle qui résulterait des dispositions du chapitre IV du présent titre qui correspondent à leur situation ", la compensation financière ainsi prévue n'a d'autre objet que de neutraliser le décalage de rémunération jusqu'à la titularisation et le reclassement des intéressés. Il suit de là que le garde des Sceaux, ministre de la justice était tenu, contrairement à ce que soutient M. B..., de le reclasser à la date à laquelle il avait été titularisé dans le grade de surveillant et surveillant principal du corps des personnels d'encadrement et d'application du personnel de surveillance de l'administration pénitentiaire et non à la date à laquelle il avait été nommé en qualité d'élève surveillant de cette administration.

8. D'autre part, ainsi qu'il a été dit au point 6. du présent arrêt, M. B... a été titularisé dans le grade de surveillant et surveillant principal du corps des personnels d'encadrement et d'application du personnel de surveillance de l'administration pénitentiaire, à compter du 29 octobre 2017, par un arrêté du 28 décembre 2017 du garde des Sceaux, ministre de la justice. A cette date s'appliquaient les dispositions précitées de l'article 10 du décret du 14 avril 2006 dans leur rédaction issue de l'article 61 du décret du 10 mai 2017, conformément au chapitre Ier intitulé " Dispositions entrant en vigueur le 1er janvier 2017 (articles 60 à 66) " du Titre V relatif aux " Dispositions modifiant le décret n° 2006-441 du 14 avril 2006 portant statut particulier des corps du personnel de surveillance de l'administration pénitentiaire (article 60 à 74) ", sur le fondement desquelles il appartenait au garde des Sceaux, ministre de la justice de déterminer les modalités de reclassement de M. B... à la date de sa titularisation. Il est, à cet égard, constant, que M. B... a été titularisé au premier échelon de son grade (indice brut 347, indice majoré 325, ancienneté conservée d'un an) et qu'à la date à laquelle il avait été nommé en qualité d'élève surveillant de l'administration pénitentiaire, par un arrêté du 29 février 2016 du garde des Sceaux, ministre de la justice, il était rémunéré par référence à l'indice brut 287. Ce faisant, et contrairement à ce que fait valoir M. B... dont l'argumentation est dépourvue de toute portée, il a bien été reclassé à un échelon comportant un indice brut immédiatement supérieur à celui qu'il détenait dans son cadre d'emplois d'origine ainsi que le prévoient les dispositions du II de l'article 10 du décret du 14 avril 2006, qu'elles aient été applicables par le seul effet de leur entrée en vigueur ou en application du principe d'égalité entre agents d'un même corps dont il se prévaut.

9. Il suit de là, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen invoqué par M. B..., qu'il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le garde des Sceaux, ministre de la justice l'a reclassé, à compter de sa titularisation, au premier échelon de son grade.

10. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler le jugement n° 1800229 du 21 mai 2019 du Tribunal administratif de la Polynésie française et de rejeter la demande présentée par M. B... devant ce tribunal, ainsi que le surplus des conclusions qu'il a présentées devant la Cour.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1800229 du 21 mai 2019 du Tribunal administratif de la Polynésie française est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le Tribunal administratif de la Polynésie française ainsi que le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au garde des Sceaux, ministre de la justice.

Copie en sera adressée au Haut-commissaire de la République en Polynésie française.

Délibéré après l'audience du 29 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Platillero, président,

- M. Magnard, premier conseiller,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 octobre 2021.

Le rapporteur,

S. BONNEAU-MATHELOTLe président-assesseur,

En application de l'article R. 222-26 du code

de justice administrative

F. PLATILLERO

Le greffier,

I. BEDR

La République mande et ordonne au Haut-commissaire de la République en Polynésie française en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 19PA02648


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA02648
Date de la décision : 13/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. SOYEZ
Rapporteur ?: Mme Sonia BONNEAU-MATHELOT
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : SELARL PIRIOU QUINQUIS BAMBRIDGE-BABIN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-10-13;19pa02648 ?
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