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05/10/2021 | FRANCE | N°19PA04083

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 05 octobre 2021, 19PA04083


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler les décisions portant modification de son régime indemnitaire ainsi que la décision implicite par laquelle le recteur de l'académie de Paris a rejeté son recours gracieux formé le 17 mai 2017 contre ces décisions.

Par un jugement n° 1714696/5-3 du 16 octobre 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 décembre 2019 et le

19 avril 2020, M. A..., représenté par Me Lerat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler les décisions portant modification de son régime indemnitaire ainsi que la décision implicite par laquelle le recteur de l'académie de Paris a rejeté son recours gracieux formé le 17 mai 2017 contre ces décisions.

Par un jugement n° 1714696/5-3 du 16 octobre 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 décembre 2019 et le 19 avril 2020, M. A..., représenté par Me Lerat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1714696/5-3 du 16 octobre 2019 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler les décisions attaquées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- les premiers juges n'ont pas statué sur le moyen tiré de l'incompétence négative entachant les décisions attaquées ;

- les décisions attaquées sont entachées d'incompétence, le recteur ne justifiant pas d'une délégation de pouvoir ;

- elles sont entachées d'incompétence négative, le recteur n'ayant pas mis en œuvre son pouvoir d'appréciation en fonction des critères fixés par le décret du 20 mai 2014 ;

- elles ne sont pas motivées ;

- elles ont été prises sans procédure contradictoire préalable ;

- elles méconnaissent les dispositions du décret du 20 mai 2014 dès lors que le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise a été déterminé en dehors des critères imposés par ce décret et qu'il n'a pas bénéficié du cumule de l'IFSE et de l'indemnité de caisse et de responsabilités ;

- cette indemnité a été fixée en méconnaissance des directives contenues dans la circulaire du 5 novembre 2015 ;

- les décisions attaquées méconnaissent le principe d'égalité de traitement, le cumul de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise et de l'indemnité de caisse et de responsabilité étant accordé à d'autres fonctionnaires dans des situations similaires ;

- elles constituent une seconde sanction, financière, pour des faits déjà sanctionnés et méconnaît le principe " non bis in idem " ;

- elles sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 février 2020, le recteur de l'académie de Paris conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'éducation,

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi du 22 avril 1905 ;

- le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'Etat ;

- l'arrêté du 3 juin 2015 pris pour l'application au corps interministériel des attachés d'administration de l'Etat des dispositions du décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'Etat ;

- l'arrêté du 27 août 2015 pris en application de l'article 5 du décret n° 2014-513 du

20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'Etat ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hamon,

- les conclusions de M. Segretain, rapporteur public,

- et les observations de Me Lerat, avocate de M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., attaché principal d'administration exerçant les fonctions de chef de service du département financier du service inter-académique des examens et concours (S.I.E.C.), a fait l'objet, par arrêté du recteur de l'académie de Paris du 15 juillet 2016, d'une sanction disciplinaire de déplacement d'office et a été affecté au lycée Paul Valéry de Paris (75012) à compter du 1er septembre 2016 pour y exercer les fonctions d'adjoint gestionnaire au chef d'établissement et d'agent comptable. Par recours gracieux reçu le 19 mai 2017, M. A... a contesté les décisions, révélées par son bulletin de paie du mois de février 2017, portant diminution à compter de septembre 2016 du montant de la prime " indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise " (IFSE) lui étant attribuée, et fixation du montant de l'indemnité de caisse et de responsabilité lui étant attribuée à compter du 1er septembre 2016. Il fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions, ainsi que du rejet implicite opposé à son recours gracieux.

Sur la régularité du jugement :

2. En se bornant à relever, en réponse au moyen tiré par M. A... de ce que les décisions attaquées avaient été prises par une autorité incompétente, que lesdites décisions " émanent du ministère dont il relève ", les premiers juges n'ont pas suffisamment motivé leur jugement. Il y a lieu, en conséquence, d'annuler le jugement attaqué et, dans les circonstances de l'espèce, de se prononcer par la voie de l'évocation.

Sur la légalité externe des décisions en litige :

3. Aux termes de l'article 2 du décret du 20 mai 2014, applicable au corps interministériel des attachés d'administration de l'Etat auquel appartient M. A... par l'effet de l'article 1er de l'arrêté du 3 juin 2015 : " Le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise est fixé selon le niveau de responsabilité et d'expertise requis dans l'exercice des fonctions. Les fonctions occupées par les fonctionnaires d'un même corps ou statut d'emploi sont réparties au sein de différents groupes au regard des critères professionnels suivants : 1° Fonctions d'encadrement, de coordination, de pilotage ou de conception ; 2° Technicité, expertise, expérience ou qualification nécessaire à l'exercice des fonctions ; 3° Sujétions particulières ou degré d'exposition du poste au regard de son environnement professionnel. Le nombre de groupes de fonctions est fixé pour chaque corps ou statut d'emploi par arrêté du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget et, le cas échéant, du ministre intéressé. Ce même arrêté fixe les montants minimaux par grade et statut d'emplois, les montants maximaux afférents à chaque groupe de fonctions et les montants maximaux applicables aux agents logés par nécessité de service. Le versement de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise est mensuel. ". L'article 3 du même décret dispose que : " Le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise fait l'objet d'un réexamen : 1° En cas de changement de fonctions ; 2° Au moins tous les quatre ans, en l'absence de changement de fonctions et au vu de l'expérience acquise par l'agent ; 3° En cas de changement de grade à la suite d'une promotion. ".

4. En premier lieu l'article R. 222-25 du code de l'éducation dispose que " Sous réserve des attributions dévolues au préfet de région et au préfet de département, le recteur, pour l'exercice des missions relatives au contenu et à l'organisation de l'action éducatrice ainsi qu'à la gestion des personnels et des établissements qui y concourent, prend les décisions dans les matières entrant dans le champ de compétences du ministre chargé de l'éducation et du ministre chargé de l'enseignement supérieur exercées à l'échelon de la région académique, de l'académie et des services départementaux de l'éducation nationale ". Concernant les membres du corps des attachés d'administration de l'Etat, auquel appartient M. A..., l'article R. 222-34 du même code ne mentionne pas les décisions portant fixation du montant de l'IFSE au nombre des décisions, limitativement énumérées, ne pouvant faire l'objet d'une délégation au profit du recteur. Par suite M. A... n'est pas fondé à soutenir que les décisions attaquées, prises par le recteur de l'académie de Paris comme celui-ci le mentionne dans ses écritures, seraient entachées d'incompétence.

5. En deuxième lieu les décisions attaquées, fixant les montants de l'IFSE et de la prime de caisse allouées à M. A..., n'entrent dans aucune des catégories de décisions mentionnées à l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration et, par suite, n'ont pas à être motivées en application de ces dispositions. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ces décisions doit être écarté.

6. En troisième lieu, il ne résulte d'aucun texte législatif ou réglementaire, ni d'aucun principe, que les agents susceptibles de bénéficier d'une prime qui tient compte de leur manière de servir doivent être mis à même de présenter leurs observations préalablement à la décision de l'administration d'en fixer le taux. Par suite le moyen tiré de ce que les décisions attaquées ont été irrégulièrement prises, faute de procédure contradictoire préalable, doit être écarté.

Sur la légalité interne des décisions en litige :

7. Aux termes de l'article 5 du décret du 20 mai 2014 : " L'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise et le complément indemnitaire annuel sont exclusifs de toutes autres primes et indemnités liées aux fonctions et à la manière de servir, à l'exception de celles énumérées par arrêté du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget. ". L'article 1er de l'arrêté du 27 août 2015 dispose à cet égard que : " La liste des primes et indemnités relevant des exceptions prévues à l'article 5 du décret du 20 mai 2014 susvisé est fixée comme suit : - indemnité de caisse et de responsabilité régie par les décrets du 28 septembre 1972 et du 18 septembre 1973 susvisés (...). ".

8. En premier lieu, dès lors que le recteur a, par les décisions attaquées, modifié à compter du 1er septembre 2016 le montant de l'IFSE alloué à M. A... et déterminé le montant de l'indemnité de caisse et de responsabilité lui étant alloué à compter de cette même date, le moyen tiré de ce qu'il n'aurait pas mis en œuvre le pouvoir d'appréciation que lui confère le décret précité du 20 mai 2014 doit être écarté, la circonstance que le montant cumulé de ces deux primes soit équivalent au montant de l'IFSE perçue sur son précédent poste étant, à cet égard, sans incidence.

9. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient M. A... il ressort des pièces du dossier, notamment de ses bulletins de salaire, qu'à compter du mois de septembre 2016 il a bénéficié, d'une part, de l'IFSE et d'autre part de la prime de caisse et de responsabilité, d'un montant mensuel de 766 euros qui n'est pas critiqué. Par suite M. A... n'est pas fondé à soutenir que le recteur aurait méconnu les dispositions précitées en refusant de le faire bénéficier du cumul de ces deux primes, la circonstance que le montant cumulé de ces deux primes soit équivalent au montant de l'IFSE perçue sur son précédent poste étant à cet égard sans incidence. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que le principe d'égalité aurait été méconnu dès lors que certains agents auraient bénéficié du cumul de ces deux indemnités.

10. En troisième lieu, il est constant que le poste occupé par M. A... au sein du S.I.E.C. était classé, pour l'application des dispositions précitées, dans le groupe de fonctions 2 tandis que le poste d'adjoint gestionnaire au chef d'établissement et d'agent comptable sur lequel il a été affecté en conséquence de son déplacement d'office à compter du 1er septembre 2016 est classé dans le groupe de fonctions 1, bénéficiant d'un montant d'indemnité maximal supérieur, aux termes de l'arrêté du 3 juin 2015. Si M. A... soutient que, compte tenu de cette nouvelle affectation, le recteur ne pouvait légalement lui allouer un montant d'IFSE inférieur à compter du 1er septembre 2016, toutefois ni les dispositions précitées du décret du 20 mai 2014, ni aucune autre disposition ou principe n'impose que le montant de l'IFSE alloué à un agent affecté dans un poste classé en catégorie 1 soit supérieur à celui d'un agent affecté dans un poste classé en catégorie 2, dès lors que ces catégories ne déterminent que des montants minimaux et maximaux pour cette prime. Il ressort des pièces du dossier que le montant de 14 400 euros annuels de l'IFSE alloué à M. A... par la décision attaquée est très sensiblement supérieur au montant minimal pour un attaché principal d'administration non logé, fixé par l'arrêté du 3 juin 2015 à la somme de 2 500 euros. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le montant de son IFSE aurait méconnu les dispositions du décret du 20 mai 2014, ni celles de la circulaire du 5 novembre 2015 qui, si elle rappelle la prise en compte de l'ancienneté de l'agent, n'apporte rien aux règles de détermination du montant de l'IFSE fixées par le décret du 20 mai 2014. Pour les mêmes motifs il n'est pas plus fondé à soutenir que cette décision serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

11. En quatrième lieu, en se bornant à faire valoir qu'il a précédemment fait l'objet d'une sanction disciplinaire M. A... n'établit pas que la décision qui fixé le nouveau montant de son IFSE, à un niveau très supérieur à son minimum, constituerait une seconde sanction des mêmes faits en méconnaissance du principe " non bis in idem ".

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation des décisions attaquées. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1714696/5-3 du 16 octobre 2019 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le Tribunal administratif de Paris et ses conclusions présentées en appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au recteur de l'académie de Paris.

Délibéré après l'audience du 14 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente assesseure,

- Mme Jurin, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 octobre 2021.

La rapporteure,

P. HAMONLe président,

C. JARDINLa greffière,

C. BUOTLa République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19PA04083


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA04083
Date de la décision : 05/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-08-03 Fonctionnaires et agents publics. - Rémunération. - Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: M. SEGRETAIN
Avocat(s) : LERAT

Origine de la décision
Date de l'import : 12/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-10-05;19pa04083 ?
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