Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au Tribunal administratif de Melun de condamner l'Etat à lui verser la somme de 203 659,47 euros, en réparation de divers préjudices qu'elle aurait subis du fait des fautes commises par les services fiscaux dans l'établissement de son impôt sur le revenu au titre de l'année 2007.
Par un jugement n° 1801319 du 25 juin 2020, le Tribunal administratif de Melun a rejeté la demande de Mme A....
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 31 août et le 1er septembre 2020, Mme A..., représentée par Me Goetz, avocat, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement entrepris ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser l'indemnité déjà mentionnée au titre du préjudice financier, pour un montant de 123 659,47 euros, et du trouble dans ses conditions d'existence, pour un montant de 80 000 euros, en raison de la faute commise par les services fiscaux en l'assujettissant à une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu pour l'année 2007 portant sur le montant total de ses cessions de valeurs mobilières.
Elle soutient que :
- aucune cause exonératoire de la responsabilité de l'administration, reconnue par le tribunal administratif, ne saurait lui être opposée, l'administration ne lui ayant pas précisément indiqué l'objet de ses demandes de renseignement relatives à la plus-value de cession de valeurs mobilières de son contrat Axa et ayant manqué à son devoir de conseil ;
- elle-même n'a pas obtenu d'Axa les éléments de réponse à l'administration ;
- l'administration a commis une faute, ainsi que le tribunal administratif l'a reconnu, en se livrant à une taxation exagérée et exorbitante du montant erroné de la plus-value de cession des valeurs mobilières, et entachée de discrimination, alors qu'elle avait procédé à un calcul plus favorable de la rectification pour un contribuable placé dans le même cas que la requérante ;
- ces fautes et agissements de l'administration sont à l'origine d'un préjudice financier résultant de la cession à un prix minoré d'un appartement qu'elle avait acquis, de frais de procédure, ainsi que de la perte du bénéfice d'un avantage fiscal ;
- elles sont également la cause d'un grave trouble dans ses conditions d'existence, et notamment d'une dépression nerveuse importante.
Par un mémoire en défense enregistré le 2 avril 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Soyez,
- les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public,
- et les observations de Me Goetz, représentant Mme A....
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... a fait l'objet, au titre de 2007, à l'issue d'un contrôle sur pièces effectué dans le cadre de la procédure de redressement contradictoire, de cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux pour respectivement 19 307 euros et 12 162 euros en droits et pénalités, à raison de la cession de valeurs mobilières d'un montant de 99 230 euros dans son contrat d'assurance-vie Axa n° 32873051506000. A la suite de la réclamation présentée le 21 juin 2013, le directeur départemental des finances publiques du
Val-de-Marne a prononcé le dégrèvement de cette cotisation supplémentaire. Mme A... a demandé le 16 mai 2017 la réparation des préjudices qui lui auraient été causés par les fautes commises par l'administration dans l'établissement et le recouvrement des cotisations supplémentaires mentionnées, en se fondant sur une plus-value de cession mobilière d'un montant exagéré. Cette demande a fait l'objet d'une décision de rejet en date du 15 décembre 2017. Par la présente requête, Mme A... demande l'annulation du jugement du 25 juin 2020, par lequel le Tribunal administratif de Melun a confirmé le refus par l'administration de faire droit à sa demande indemnitaire.
Sur la faute :
2. Il résulte de l'instruction que, par deux demandes de renseignement en date du 18 janvier 2010 et du 15 juillet 2010, l'administration a, sur le fondement de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, invité Mme A... à communiquer le prix d'acquisition des valeurs mobilières cédées, sur le compte Axa Banque qui lui était précisément désigné. Il est constant que Mme A... n'a pas donné suite à ces demandes. Par une proposition de rectification en date du 9 novembre 2010, qui a été retournée au service comme n'ayant pas été réclamée, l'administration a fait savoir à Mme A... qu'en raison de cette absence de réponse, elle entendait imposer, selon la procédure de rectification contradictoire, la totalité du montant de ces cessions au taux de 16 %, prévu par les dispositions de l'article 200 A du code général des impôts en cas de plus-value de cession de valeurs mobilières. Faute d'observations exprimant le désaccord de la contribuable, l'administration a mis en recouvrement le supplément d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux résultant de cette plus-value. Elle en a poursuivi le recouvrement, notamment, au mois d'avril 2011, par un avis à tiers détenteur auprès de l'employeur de la contribuable. Par un courriel en date du 8 novembre 2011, la contribuable a transmis au service un justificatif fiscal n° 2561 ter qui ne concernait pas le résultat net de la cession de valeurs mobilières en litige et auquel, de ce fait, le service n'a pas donné suite. Elle a transmis, par une réclamation en date du 21 juin 2013, le justificatif de la plus-value litigieuse qui ne s'élevait qu'à un montant de 57 euros. Par suite, l'administration a, par une décision du 25 juin 2013, procédé au dégrèvement de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux. Il s'ensuit que ce supplément d'imposition est dépourvu de bien-fondé et, comme tel, constitutif d'une faute. Ainsi, la responsabilité de l'administration est susceptible d'être engagée à raison de cette rectification de l'imposition de Mme A... sur une base supérieure à une plus-value d'un montant de 57 euros.
Sur la responsabilité :
3. Toutefois, en vertu des dispositions de l'article 150-0 A du code général des impôts, les gains nets retirés des cessions à titre onéreux, effectuées directement ou par personne interposée, de valeurs mobilières sont soumis à l'impôt sur le revenu lorsqu'ils excèdent un certain seuil. Et en vertu des dispositions du 1 de l'article 150-0 D du code général des impôts, dans sa version applicable à l'année d'imposition, ces gains nets sont constitués par la différence entre le prix effectif de cession des titres ou droits, net des frais et taxes acquittés par le cédant, et leur prix effectif d'acquisition par celui-ci ou, en cas d'acquisition à titre gratuit, leur valeur retenue pour la détermination des droits de mutation. Dès lors, dans l'hypothèse où le contribuable n'est pas en mesure de justifier d'une valeur d'acquisition, il convient, en principe, de retenir une valeur nulle.
4. En premier lieu, Mme A... soutient que les deux demandes qu'elle a reçues de l'administration au sujet du prix d'acquisition des valeurs cédées en 2007 étaient imprécises. Toutefois, à supposer que l'objet de ces demandes n'ait pas été clair pour la contribuable, elle allègue mais n'établit pas avoir sollicité en vain des éclaircissements par divers courriels. Celui du 8 novembre 2011 fournissant un justificatif de plus-value de cession de valeurs mobilières, est relatif à une autre année que celle en litige et à un autre compte. Elle n'a pas davantage produit d'observations tendant à obtenir des éclaircissements sur le montant de la plus-value litigieuse retenue par l'administration. Elle ne saurait se plaindre de l'absence d'éclaircissements apportés par cette dernière. Par suite, le moyen tiré du manquement de l'administration à une prétendue obligation de conseil envers les contribuables ne peut qu'être écarté.
5. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que précédemment, et comme l'ont estimé les premiers juges, l'administration, à qui il n'incombait pas d'effectuer des recherches en vue d'établir le prix d'acquisition des valeurs mobilières en cause, n'a pas méconnu les règles d'assiette prescrites par les dispositions précitées, en retenant un prix nul d'acquisition des valeurs cédées, et en évaluant la plus-value de cession réalisée au montant total de cession de ces valeurs.
6. En troisième lieu, Mme A... fait valoir qu'Axa Banque ne lui a pas fourni les documents nécessaires à la déclaration de la plus-value réellement retirée des cessions opérées en 2007. Toutefois, il n'est pas établi que Mme A..., au reçu des deux demandes de l'administration, ait sollicité des informations de l'établissement qui gérait ses valeurs mobilières. Il ressort en revanche de la lettre en date du 15 mai 2013 adressé par le conseil de Mme A... à cet établissement que, dès 14 juin 2013, le service qualité et réclamations clients Axa Banque a produit la déclaration récapitulative des opérations sur valeurs mobilières et revenus de capitaux mobiliers 2007, qui a entraîné le dégrèvement du complément d'imposition litigieux. Ainsi, le moyen, à supposer qu'il soit soulevé, tiré de la faute d'un tiers en lien avec les insuffisances de déclaration de la requérante, doit être écarté.
7. En quatrième lieu, Mme A... relève que le centre des impôts de Nogent-sur-Marne a retenu une assiette de taxation de plus-value de valeurs mobilières de 30 % du prix des cessions, dans le cas d'une autre contribuable qui s'était également abstenu de communiquer le montant de ses plus-values de cession de valeurs mobilières. Ce faisant, l'administration n'a pas pris une position sur une situation de fait que la requérante puisse lui opposer. Mme A... ne saurait davantage se prévaloir de bases de rectification moins sévères au profit de cette contribuable, pour établir une rupture d'égalité devant l'impôt. En tout état de cause, l'administration relève sans être contredite que le montant des cessions, les années d'imposition et la situation matrimoniale étaient différents dans le cas mentionné par la requérante.
8. Enfin, Mme A... reproche à l'administration de l'avoir, par son erreur, assujettie à une imposition rectifiée de 31 489 euros, sans commune mesure avec son imposition primitive d'un montant de 2 782 euros, alors que son omission de déclaration ne portait que sur une plus-value d'un montant de 57 euros. Toutefois, en appliquant à la plus-value supposée réalisée un taux proportionnel de 16 %, des prélèvements sociaux d'un taux de 11 %, en assortissant l'imposition consécutive d'intérêts de retard de 0,40 %, et en infligeant à la requérante une majoration de 10 % prévue à l'article 1758 A du code général des impôts, l'administration ne s'est pas livrée à une taxation exorbitante et exagérée de la plus-value de cession de valeurs mobilières qu'elle estimait réalisée sur la base des seuls éléments dont elle disposait. Par suite, le moyen tiré du caractère agravatoire de ce niveau de taxation par rapport à la faute commise par l'administration, doit également être écarté.
9. Il découle de ce qui a été dit aux points 3 à 8 du présent arrêt qu'aucune faute des services fiscaux n'est établie.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 10 septembre 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Carrère, président de chambre,
- M. Soyez, président-assesseur
- Mme Boizot, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 septembre 2021.
Le rapporteur,
J.-E. SOYEZLe président,
S. CARRERE
La greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA02520