La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/07/2021 | FRANCE | N°20PA00576

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 08 juillet 2021, 20PA00576


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... F... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 25 octobre 2019 par lequel le préfet de police a décidé son transfert aux autorités belges, responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1924705/8 du 24 décembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 février 2020, Mme F..., représentée par Me D..., dema

nde à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1924705/8 du 24 décembre 2019 du tribunal administrat...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... F... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 25 octobre 2019 par lequel le préfet de police a décidé son transfert aux autorités belges, responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1924705/8 du 24 décembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 février 2020, Mme F..., représentée par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1924705/8 du 24 décembre 2019 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 25 octobre 2019 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de l'autoriser à se maintenir sur le territoire français en vue de l'introduction de sa demande d'asile, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens.

Elle soutient que :

- le premier juge a procédé à une substitution de base légale d'office sans inviter les parties à présenter leurs observations, en méconnaissance du principe du contradictoire et de l'égalité des armes dans le procès, garantis par l'article 16 du code de procédure civile et l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale ;

- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, en méconnaissance de l'article 455 du code de procédure civile ;

- l'arrêté contesté a été signé par une autorité incompétence ;

- il méconnaît les articles 7 et 9 du règlement (UE) n° 604/2013, dès lors que des membres de sa famille ont été admis à résider en France au titre de l'asile.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 août 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le 4 mars 2020, il a prolongé de six à dix-huit mois le délai durant lequel il pourrait être procédé au transfert de Mme F... ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Mme F... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire Paris du 5 mars 2020.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme F..., ressortissante congolaise, est entrée en France le 5 juillet 2019. Elle a sollicité le bénéfice de l'asile le 5 septembre 2019 au guichet unique de la préfecture de police. La consultation du fichier Visabio ayant permis d'établir qu'elle avait voyagé sous couvert d'un visa délivré par les autorités consulaires belges de Kinshasa (République Démocratique du Congo), valable du 1er juillet 2019 au 20 août 2019, le préfet de police a saisi, le 9 septembre 2019, les autorités belges d'une demande de reprise en charge à laquelle elles ont répondu favorablement le 11 septembre 2019. Par un arrêté du 25 octobre 2019, le préfet de police a ordonné le transfert de Mme F... aux autorités belges pour l'examen de sa demande d'asile. Mme F... fait appel du jugement du 24 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, contrairement à ce que soutient Mme F..., le premier juge n'a pas procédé à une substitution de base légale en se fondant, pour répondre au moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte, sur une délégation de signature d'une date distincte de celle visée par l'arrêté litigieux. Il n'a ainsi méconnu ni son office, ni les principes du contradictoire et de l'égalité des armes dans le procès garanti par les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni, enfin, les dispositions de l'article 16 du code de procédure civile, au demeurant inapplicables dans un litige de nature administrative.

3. En second lieu, la requérante ne peut utilement se prévaloir de l'article 455 du code de procédure civile qui n'est pas applicable aux juridictions administratives. A supposer qu'elle doit être regardée comme ayant entendu se prévaloir de l'article L. 9 du code de justice administrative, aux termes duquel : " Les jugements sont motivés ", il ressort des termes mêmes du jugement attaqué que le premier juge, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a répondu à l'ensemble des moyens soulevés par la requérante, y compris, aux points 9 et 10, au moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise le préfet au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) 604/2013 du 26 juin 2013. Par suite, Mme F... n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait, pour ce motif, entaché d'irrégularité.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. En premier lieu, par un arrêté n° 2019-00794 du 27 septembre 2019, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial n° 75-2019-337 du 30 septembre 2019 de la préfecture de Paris, le préfet de police a donné à Mme G... C..., attachée d'administration de l'Etat, délégation à l'effet de signer, notamment, les décisions relatives à la police des étrangers. En outre, la circonstance que l'arrêté comporte le visa erroné d'une délégation de signature est sans incidence sur sa légalité. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté manque en fait.

5. En second lieu, aux termes de l'article 7 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 susvisé : " (...) 1. Les critères de détermination de l'État membre responsable s'appliquent dans l'ordre dans lequel ils sont présentés dans le présent chapitre. / 2. La détermination de l'État membre responsable en application des critères énoncés dans le présent chapitre se fait sur la base de la situation qui existait au moment où le demandeur a introduit sa demande de protection internationale pour la première fois auprès d'un État membre (...) ". Aux termes de l'article 9 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Si un membre de la famille du demandeur, que la famille ait été ou non préalablement formée dans le pays d'origine, a été admis à résider en tant que bénéficiaire d'une protection internationale dans un Etat membre, cet Etat membre est responsable de l'examen de la demande de protection internationale, à condition que les intéressés en aient exprimé le souhait par écrit. ". Il résulte toutefois du g) de l'article 2 du même règlement que, pour l'application des dispositions précitées à une personne majeure, seuls le conjoint ou les enfants mineurs du demandeur présents sur le territoire des Etats membres ont la qualité de membres de sa famille. Enfin, aux termes de l'article 12 du règlement n° 604/2013 : " (...) / 2. Si le demandeur est titulaire d'un visa en cours de validité, l'État membre qui l'a délivré est responsable de l'examen de la demande de protection internationale, (...) / 4. Si le demandeur est seulement titulaire d'un ou de plusieurs titres de séjour périmés depuis moins de deux ans ou d'un ou de plusieurs visas périmés depuis moins de six mois lui ayant effectivement permis d'entrer sur le territoire d'un État membre, les paragraphes 1, 2 et 3 sont applicables aussi longtemps que le demandeur n'a pas quitté le territoire des États membres ".

6. Si Mme F... soutient que la France aurait dû examiner sa demande d'asile dès lors que ses frères et sa soeur y ont obtenu le statut de réfugié, elle ne peut pas se prévaloir des dispositions de l'article 9 du règlement n° 604/2013 qui ne s'appliquent qu'aux membres de la famille tels qu'ils sont définis par le g) de l'article 2 du même règlement. Par ailleurs, il est constant que les autorités belges ont délivré à l'intéressée un visa de type C, valable du 1er juillet 2019 au 20 août 2019, et que ce visa était ainsi expiré depuis moins de six mois à la date de la décision litigieuse. Dans ces conditions, le préfet de police a pu, sans commettre d'erreur de droit, décider du transfert de Mme F... aux autorités belges, responsables de sa demande d'asile.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sa requête, y compris ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre des frais liés au litige, doit ainsi être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme F... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... F... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 23 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- M. E..., premier vice-président,

- M. Diémert, président-assesseur,

- M. A..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 juillet 2021.

Le rapporteur,

F. A...

Le président,

J. E... La greffière,

A. LOUNISLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 20PA00576 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20PA00576
Date de la décision : 08/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. François DORE
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : CABINET OHAYON

Origine de la décision
Date de l'import : 20/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-07-08;20pa00576 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award